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L'institution esclavagiste: fondements et critiques
L'histoire de l'esclavage
· L'esclavage dans l'Antiquité
· L'esclavage dans le monde médiéval
· Le servage en Russie
· La traite des Noirs d'Afrique
· Vers l'abolition de l'esclavage
· Le travail forcé au XXe siècle
· Réglementation internationale

 
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L'esclavage est une institution sociale qui fait de certains êtres humains des marchandises, ou, comme le dit Aristote, «une sorte de propriété animée». Le propriétaire possède son esclave comme un bien ou une chose, et peut exiger de lui travail et autres services sans aucune restriction. Il peut lui refuser la liberté d'agir et de se déplacer. Il a le droit de séparer les membres d'une même famille et de refuser un mariage. L'esclavage est donc un rapport de domination fondé sur la menace et la violence.    

L'institution esclavagiste: fondements et critiques

Dès l'Antiquité, des fondements théoriques et économiques de l'esclavage sont exposés, mais aussi critiqués. Platon recommande, dans les Lois, de ne pas réduire d'autres Grecs en esclavage; Aristote, dans sa Politique, justifie ainsi l'esclavage: «Il y a dans l'espèce humaine des individus aussi inférieurs aux autres que le corps l'est à l'âme ou que la bête l'est à l'homme; ce sont les hommes chez qui l'emploi des forces corporelles est le meilleur parti qu'on puisse en tirer. Ces individus sont destinés par la nature elle-même à l'esclavage, parce qu'il n'y a rien de meilleur pour eux que d'obéir.» Pour Aristote, «la guerre est en quelque sorte un moyen légitime d'acquérir des esclaves» ; elle est en effet alors couramment pratiquée dans le but d'obtenir des esclaves, même à l'encontre d'autres Grecs; ainsi les jeunes Spartiates se livraient-ils à la cryptie, sorte de chasse aux ilotes.

 

 

Les esclaves, en Grèce comme à Rome, n'ont aucun statut juridique; cependant, devant les tribunaux grecs, les esclaves pouvaient être soumis à la torture afin de confirmer les dires de leur maître. Les propriétaires d'esclaves avaient pour objectif la production, et d'ores et déjà Aristote considérait l'institution esclavagiste comme une façon commode de produire des biens, à défaut de machines perfectionnées: «Si chaque instrument pouvait, sur un ordre donné, travailler de lui-même, si les navettes tissaient toutes seules, si l'archet jouait tout seul de la cithare, les entrepreneurs se passeraient d'ouvriers et les maîtres d'esclaves.»

 
 

Les Spartiates poussent à son extrémité cette justification de l'esclavage par la nécessité économique, puisque toute activité productive est interdite aux homoioi ou «égaux» qui constituent la classe des hommes libres de Sparte.

 
 

Dans l'Économique, Xénophon affirme que ce n'est que pour s'attacher les bons esclaves qu'on peut leur permettre d'avoir des enfants; cela coûte trop cher de nourrir des enfants pendant de longues années, aussi préconise-t-il d'acquérir des esclaves adultes.

 
 

De même, à Rome, Caton, dans le De re rustica, donne des préceptes d'économie aux propriétaires d'esclaves afin qu'ils organisent au mieux le travail de la terre par leurs esclaves.

 
 

Mais face à ces justifications économiques, d'autres philosophes de l'Antiquité critiquent l'esclavagisme. Ainsi, Sénèque, dans ses Lettres à Lucilius, lance-t-il cette sentence: «Veux-tu bien te dire que cet être que tu appelles ton esclave est né de la même semence que toi; qu'il jouit du même ciel, qu'il respire le même air, qu'il vit et meurt comme toi. Tu peux le voir libre comme il peut te voir esclave Avise-toi donc de mépriser un homme dont la condition peut devenir la tienne, au moment où tu lui marques ton mépris.» Cicéron, lui, invite à bien traiter les esclaves «il faut exiger du travail mais leur donner un juste salaire» Traité des devoirs sans remettre en cause l'institution elle-même.

 
 

La morale chrétienne n'apporte pas la fin de l'esclavage. Saint Paul y verra une sorte de domination patriarcale, et saint Augustin un instrument de pénitence. Cependant, le christianisme invite à reconnaître aux esclaves la possibilité de se marier et de fonder une famille. En outre, affranchir des esclaves est, dès les Mérovingiens, considéré comme un acte de piété. Ces changements sociaux contribuent à modifier le rôle économique de l'esclavage en Occident.

 
 

Pour les théologiens, les Noirs sont les descendants de Cham, le fils impie de Noé, et ils sont ainsi marqués par la malédiction divine. Les bulles papales des 3 et 4 mai 1492 (donc avant que Colomb n'aborde dans le Nouveau Monde) précisent: «Les païens et les infidèles ne possèdent légitimement ni leurs terres ni leurs biens, et les fils de Dieu ont le droit de les leur enlever.» Avec les grandes découvertes, ces bulles sont des encouragements à déporter des populations et à les réduire en esclavage; nombre de théologiens s'attachent à prouver l'infériorité des indigènes du Nouveau Monde ou des Noirs par des considérations sur leur absence d'âme ou la date de leur création selon la Genèse: le cinquième jour avec les animaux, ou le sixième jour avec les hommes. L'alibi de l'esclavage est alors la christianisation, qui l'emporte sur les considérations économiques chez les Espagnols ce qui ne sera jamais le cas chez les Français, les Britanniques ou les Hollandais , mais qui reste sous-tendu par des conceptions racistes. Ainsi, pour Ginès de Sepulveda, les «barbares du Nouveau Monde [] sont aussi inférieurs aux Espagnols en sagesse, en intelligence, en vertu et en humanité que le sont les enfants par rapports aux adultes [] et il y a autant de différence entre eux qu'entre des sauvages et des gens civilisés [] je dirais même qu'il y en a presque autant qu'entre des singes et des hommes (Traité sur les justes causes de la guerre contre les Indiens, 1547).

 
 


L'économie coloniale, qui devient rapidement la pourvoyeuse de l'Occident en or, argent et sucre notamment, se structure grâce à l'importation massive d'esclaves. Cependant, la religion reste le motif invoqué pour la colonisation; dès l'article Ier de l'édit de fondation de la Compagnie des Indes occidentales (1664), il est dit que «le but de l'établissement des colonies est la gloire de Dieu, en faisant connaître la vraie foi aux indigènes» Quelque vingt ans plus tard, le Code noir avance à la fois des justifications religieuses et économiques. Les esclaves sont des «êtres meubles» (art. 44) qui sont déclarés biens immeubles (art. 48) au même titre que les fabriques et plantations où ils travaillent. Ils n'ont aucune existence civile et ne peuvent se constituer parties civiles (art. 31), bien qu'ils aient le droit de porter plainte contre leurs maîtres si ces derniers les nourrissent mal (art. 26). S'il est imprécis sur les droits et la place réelle de l'esclave, le Code noir définit en revanche très précisément les sanctions à appliquer aux fugitifs: une oreille coupée à la première tentative, les jarrets taillés à la deuxième, la décapitation à la troisième.

 
Le Code noir

En 1788 naît la Société des amis des Noirs, autour de Brissot, de Condorcet et de La Fayette. Au départ, la Société demande l'abolition radicale de l'esclavage, mais dès 1790, elle ne cherche plus qu'à mettre fin progressivement à l'esclavagisme, et prône des moratoires, jusqu'à soixante-dix ans, pour son abolition; il s'agit de faire travailler librement les Noirs, afin de ne pas mettre à bas l'édifice économique des colonies. La critique issue des Lumières ne la conduit donc pas à proposer une libération immédiate et inconditionnelle des esclaves; influencée par les idées des physiocrates, la Société des amis des Noirs reste en effet convaincue de la supériorité du gouvernement des Blancs, et propose même d'étendre la colonisation à l'Afrique elle-même.

 
 

Pour Hegel, la lutte entre le maître et l'esclave est l'un des moteurs de l'histoire et de l'évolution de l'humanité; cela ne peut que déboucher sur le contrat social qui, selon lui, mettra fin à la misère du monde. Cet aspect de l'opposition dialectique entre maîtres et esclaves est repris par Marx dans son analyse de la lutte des classes comme moteur de l'histoire, et de la succession des différents modes de production, l'esclavagisme étant l'un des plus archaïques. Mais Marx ajoute une analyse économique de l'esclavage: «L'esclave ne vend pas son travail au maître, non plus que le bœuf ses services aux paysans. L'esclave est vendu une fois pour toutes, et son travail est compris dans le marché []. Il est marchandise; mais le travail n'est point sa marchandise.» Ainsi, «l'esclavage direct est le pivot de notre industrialisme actuel aussi bien que les machines, le crédit, etc. Sans esclavage, vous n'avez pas de coton, sans coton vous n'avez pas d'industrie moderne». Marx voit dans la persistance de l'esclavage dans la société du XIXe siècle la façon la plus rapide pour les capitalistes d'assurer une accumulation de capital.

 
 

L'histoire de l'esclavage

L'esclavage a existé aussi bien en Asie dans les tribus nomades de pasteurs, en Amérique du Nord dans les sociétés d'Indiens chasseurs, en Scandinavie chez les marins, que dans des sociétés sédentaires fondées sur l'agriculture. Dans ce dernier cas, les esclaves sont considérés comme une force de production irremplaçable. De telles sociétés, notamment l'Empire romain et le vieux Sud des États-Unis, sont quelquefois désignées sous le nom de sociétés d' «esclavage commercial», par opposition aux «sociétés d'esclavage personnel», où les esclaves sont principalement utilisés à des fins domestiques, notamment comme serviteurs ou concubines; ce dernier type d'esclavage a été fortement implanté dans les pays du Moyen-Orient, en Afrique et en Chine. Cependant, les deux formes coexistent, et dans l'Empire romain comme aux États-Unis, les esclaves étaient contraints de se soumettre aux exigences sexuelles de leurs maîtres; c'est ce que montrent le Satyricon où Pétrone met en scène un esclave soumis aux exigences sexuelles de son maître comme de sa «patronne» pour Rome, et les innombrables cas de viols d'esclaves aux États-Unis.

 

 

L'économie de profit a beaucoup contribué à développer l'emploi de la force de travail servile. La canne à sucre porte la lourde réputation d'avoir été génératrice d'esclavage, en Iraq dès le VIIe siècle, dans les îles de l'Atlantique et en Amérique à partir du XVIe siècle; l'économie de plantation a provoqué les plus gros transferts de main-d'œuvre de toute l'histoire, au détriment des Noirs d'Afrique. Les mines, de l'argent du Laurion, exploité par Athènes au Ve siècle av. J.-C., à l'or des Achantis du Ghana au XVIIIe siècle, ont aussi utilisé de grandes quantités d'esclaves.

 
 

L'esclavage dans l'Antiquité

Les codes juridiques de Sumer prouvent que l'esclavage existait dès le IVe millénaire av. J.-C. Le symbole sumérien correspondant au terme «esclave», en écriture cunéiforme, signifie «étranger», ce qui indique une origine essentielle: les premiers esclaves étaient probablement des prisonniers de guerre. Mais dans l'Égypte antique apparaît un phénomène que l'on retrouvera jusque dans l'Europe chrétienne: des hommes se vendent comme esclaves ou vendent leur femme et leurs enfants afin de payer leurs dettes.

 

fresque de Pompéi : scène de banquet
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La société antique dépend étroitement du travail servile, et les maîtres détiennent des droits absolus sur leurs esclaves. Au Proche-Orient, ceux-ci, tant masculins que féminins, sont reconnaissables à leur crâne rasé.

 
 

Le Code d'Hammourabi, roi de Babylone au XVIIIe siècle av. J.-C., comprend de nombreuses lois s'appliquant aux esclaves. Ceux-ci ont le droit de posséder des biens, de faire des affaires et d'épouser des femmes libres. La manumission affranchissement prononcé officiellement par le maître est possible soit par l'achat de la liberté, soit par l'adoption. Néanmoins, l'esclave est toujours considéré comme un objet et une marchandise. Le code des Hittites, appliqué en Asie occidentale de 1800 à 1400 av. J.-C., reconnaît, lui, que l'esclave est un être humain, même s'il appartient à une classe inférieure.

 
 

Les Hébreux sont asservis par les Égyptiens durant la seconde moitié du IIe millénaire av. J.-C.: dans la Bible, le livre de l'Exode relate que les Égyptiens maintiennent les Hébreux «en esclavage, les obligeant à manier la brique et le mortier ainsi qu'à rendre divers services dans les champs. Quels que soient les travaux effectués, ils les traitent avec dureté». Cependant, nulle part dans l'Ancien Testament il n'apparaît de critiques ouvertement dirigées contre l'esclavagisme, les Hébreux adhérant eux-mêmes à ce système; tout au plus, chez ces derniers, l'esclavage, situation provisoire, ne peut-il dépasser une période de sept ans.

 
 

Dans la vallée de l'Indus, les premiers documents prouvant l'existence de l'esclavage coïncident avec l'invasion aryenne, vers 1500 av. J.-C.

 
 

En Perse, le nombre d'esclaves augmente par reproduction naturelle et grâce aux conquêtes militaires: les victoires perses sur les îles de la mer Égée, Chio, Lesbos et Ténédos, ont pour conséquence l'asservissement de populations entières.

 
 

Dans la société hellénique

L'esclavage fait partie intégrante de l'histoire de la Grèce probablement dès 1200 av. J.-C. Les guerres, la piraterie (jusqu'à son éradication au Ve siècle av. J.-C.) et les tributs dus par les pays vaincus constituent pour les Grecs les principales sources d'esclaves. Les marchands d'esclaves se fournissaient essentiellement en Thrace, Carie et Phrygie. Les débiteurs insolvables pouvaient être vendus comme esclaves, le prix de la vente revenant au créancier; c'est Solon qui interdit cette dernière pratique à Athènes. Sur les marchés d'Athènes, de Rhodes, de Corinthe et de Délos, un millier d'esclaves changent de mains en un après-midi. Au terme d'une bataille importante, ce sont plusieurs milliers de prisonniers de guerre qui deviennent esclaves.

 

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Si les esclaves ruraux et les esclaves d'État, travaillant notamment à construire les routes, sont quelquefois traités de façon inhumaine, la situation des esclaves employés dans les mines est encore moins enviable: enchaînés, fouettés, ils sont obligés de travailler sous terre dans d'épouvantables conditions. Les esclaves domestiques, ou artisans, ceux qui occupent des situations administratives inférieures ou encore les esclaves d'État servant dans les temples sont traités avec plus de clémence.

 
 

Un esclave s'affranchit en achetant sa liberté, en la recevant en récompense de ses services, ou en legs après le décès de son maître. Le quasi légendaire Ésope, l'auteur des Fables, passe pour un esclave grec affranchi au VIe siècle av. J.-C.

 
 

On estime qu'une cité comme Athènes comptait, au temps de sa splendeur, environ 200 000 personnes libres (deux tiers de citoyens et leurs familles, un tiers de métèques), contre environ 300 000 esclaves. Quelques révoltes d'esclaves émaillent l'histoire de la Grèce antique, comme celle des ilotes en 464 av. J.-C. à la suite d'un tremblement de terre: le désordre qui s'ensuivit leur permit de secouer le joug spartiate.

 
 

À Rome

À l'époque romaine, les guerres puniques, la guerre des Gaules et bien d'autres conflits jettent sur le marché une énorme quantité d'esclaves. Dès le Ier siècle av. J.-C. apparaît une sorte d'esclavage rural: des équipes entières travaillent dans d'immenses propriétés, dépourvues de tout contact avec leurs maîtres. En 167 av. J.-C., Plutarque note qu'en une seule journée 150 000 esclaves ont été vendus sur un seul marché. La Syrie, la Galatie, l'Afrique du Nord et la Gaule constituent les régions qui satisfont le mieux les besoins de ce système. Le pouvoir détenu par les maîtres est pratiquement illimité, et le traitement infligé aux esclaves réellement barbare. De telles conditions de vie, alliées à la supériorité numérique des esclaves sur les hommes libres, génèrent inévitablement des révoltes, telle l'insurrection fomentée par l'esclave thrace Spartacus en 73 av. J.-C. Au début de l'ère chrétienne, les esclaves sont cependant moins systématiquement maltraités; ils vivent souvent mieux que les Romains libres réduits à la misère, et certains d'entre eux occupent même des situations importantes dans les affaires ou dans les bureaux du gouvernement impérial.

 

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L'esclavage dans le monde médiéval

On estime que l'Europe carolingienne comptait environ 20 % d'esclaves; l'Église en possédait elle-même un grand nombre, à l'image du théologien Alcuin qui utilisait quelque vingt mille esclaves dans ses quatre abbayes. On parle de mancipia, servi et ancillae, mots latins qui désignent les esclaves de l'un ou l'autre sexe, dans les descriptions de biens appartenant aux grands domaines ruraux, et l'on distingue les tenures «ingénuiles», confiées à des hommes libres, des tenures serviles, confiées à des esclaves.

 

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Dans l'Espagne wisigothique, au VIe siècle, si l'affranchissement personnel des esclaves est recommandé, c'est à la condition qu'ils demeurent, par contrat, comme force de travail sur les biens qu'ils cultivent. Les esclaves ruraux se transforment ainsi progressivement en colons ou en métayers employés sur de grandes propriétés. Cependant, ce changement de statut est plus formel que réel: les métayers doivent perpétuellement de l'argent à leur propriétaire et restent attachés à la terre qu'ils travaillent afin de rembourser leurs dettes.

 
 

Ainsi, dans l'Occident chrétien, le servage se substitue peu à peu à l'esclavage. En théorie, à la différence de l'esclave, le serf appartient à la terre et non au maître, et il est tenu de fournir une redevance au seigneur, sous forme de journées de travail sur les terres de ce dernier ou d'impôts divers en nature. En échange, le seigneur lui promet protection sur l'étendue de son domaine et la possibilité de cultiver un lopin de terre lui permettant d'assurer sa subsistance.

 
 

Dans l'Empire byzantin, l'esclavage se poursuivra sans qu'on lui oppose de résistance: les esclaves sont souvent utilisés comme employés et travaillent également sur les domaines ecclésiastiques.

 
 


Au Moyen-Orient, l'esclavage est déjà une institution ancrée dans les mœurs avant Mahomet (VIIe siècle), et l'islam ne tente pas de mettre un terme à cette situation. Le Coran, pas plus que la Bible, ne condamne l'esclavage, même s'il milite en faveur d'un traitement humain. Aussi affranchir un esclave est-il jugé comme un acte digne d'éloges.

 
Soliman II le Magnifique reçoit Barberousse

Toutefois, l'immensité de l'empire islamique et l'interdiction de réduire un musulman ou un «protégé de l'islam» en esclavage conduisent à importer de grandes quantités d'esclaves, nécessaires à l'armée ou à la production, à l'administration parfois, sans oublier la «traite des Blanches» pour fournir les harems. L'Europe occidentale fournit des Slaves capturés au-delà de l'Elbe; d'Asie viennent des Turcs qui vont jouer un grand rôle dans l'histoire de l'islam. L'Afrique noire fournit chaque année des contingents de plusieurs milliers d'esclaves, qui transitent par les ports de la mer Rouge, ceux de l'océan Indien, et par le Sahara. L'une des plus importantes révoltes d'esclaves est celle qui, en Iraq, se déroula de 869 à 883, et qui mit fin à l'exploitation massive des Noirs dans le monde arabe.

 
 

Les conflits entre chrétiens et musulmans en Méditerranée de l'Espagne au Proche-Orient (Reconquista, croisades, guerres navales) conduisent à l'asservissement de nombreux prisonniers de guerre; le plus souvent, il s'agit d'un excellent moyen d'obtenir leur rachat par l'adversaire.

 
 

Le servage en Russie

Dans l'empire des tsars, à côté des esclaves proprement dits et des paysans libres émerge une catégorie d' «hommes loués» et d' «hommes endettés», qui s'engageaient à travailler pour les propriétaires de la terre. En droit, il était formellement interdit de vendre comme esclave un serf sous peine d'amende. Cependant, le recensement de 1571 consacre l'assujettissement formel des serfs russes à leur seigneur: désormais, les serfs sont inscrits dans les listes contributives au nom de leur seigneur et non plus à celui de leur commune, ce qui montre que la frontière entre servage et esclavage n'est pas hermétique, la distinction théorique et juridique pouvant être abolie dans les faits.

 

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La traite des Noirs d'Afrique

La production de sucre au Levant espagnol et dans les îles de l'Atlantique, comme les Canaries, commence à concurrencer, au XVe siècle, celle de Venise à Chypre, que complètent des importations en provenance du monde musulman. Le sucre devient ainsi un produit de plus large consommation: les Portugais développent sa production à l'aide de capitaux, dont une partie vient de l'Europe du Nord, marché de plus en plus important. La demande d'esclaves africains commence, dès le milieu du XVe siècle, le long des côtes atlantiques qu'explorent les Portugais. La première vente d'esclaves africains en Occident date de 1444 et se déroule au Portugal, à Lagos. Les Portugais organisent autour de l'île de São Tomé et du comptoir de Saint-Georges-de-la-Mine un fructueux trafic; les esclaves sont vendus aussi bien à des souverains africains, qui les emploient dans les mines ou les plantations, qu'à des Européens qui les transportent vers la péninsule Ibérique. En 1472, les Cortes de Lisbonne demandent à la Couronne de réserver ces importations aux besoins des plantations portugaises.

 

Embarquement d'esclaves vers les colonies américaines
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La demande de main-d'œuvre est considérablement accélérée à la suite de la conquête des Amériques par les Espagnols et les Portugais, mais elle est également une conséquence de l'achèvement de la Reconquista. En effet, les musulmans chassés de la péninsule Ibérique s'enfuient avec les esclaves qu'ils utilisaient dans leurs plantations, ce qui crée une pénurie subite de main-d'œuvre. Quant aux juifs, expulsés eux aussi d'Espagne en 1492, certains s'établissent bientôt aux postes relais des compagnies négrières, pour le compte desquelles ils participent à l'organisation du trafic.

 
 


Dans un premier temps, la conquête se traduit par le quasi-asservissement de populations entières d'indigènes, au Pérou et en Amérique centrale. Au début du XVIe siècle, Hernán Cortés fait allusion au grand nombre d'esclaves indigènes rassemblés et vendus dans la capitale du Mexique. Cependant, l'encomienda et le repartimiento, systèmes de travail forcé institués par les conquistadores, se révèlent peu satisfaisants. Les Espagnols découvrent bientôt que, à cause de leur vulnérabilité aux maladies européennes, les Indiens ne constituent pas une main-d'œuvre idéale. D'autre part, comme ils vivent dans leur propre pays, révoltes et fuites s'en trouvent facilitées. Les Indiens tentent ainsi, au début, de s'opposer par la force à ceux qui entreprennent de les priver de leur liberté. Mais lorsque, domptés, ils subissent d'énormes pertes dans les mines d'or et d'argent, une partie de l'opinion européenne s'émeut, notamment parmi le clergé régulier. Ainsi, les réformes humanitaires prônées par le dominicain Las Casas finiront par alléger les souffrances des Indiens. Mais les esclavagistes, après avoir réduit la population amérindienne dans une proportion sans aucun doute considérable, même si le chiffre est controversé, se tournent vers l'Afrique. Las Casas lui-même prône la traite des Noirs afin de sauver les indigènes d'Amérique, ce qui montre la complexité des enjeux.

 
Chronologie (1547): Las Casas : Histoire des Indes
Bartolomé de Las Casas

Un fructueux trafic

Sélectionnés en raison de leur jeunesse et de leur vigueur, les Africains qui parviennent à survivre aux traversées maritimes sont généralement capables de travailler quelques années. Les Portugais et les Espagnols se réservent, dans un premier temps, le monopole d'État du trafic entre côtes africaines et américaines, le premier asiento (contrat avec une compagnie) datant de 1528. Mais ils sont vite concurrencés par les Hollandais, les Français et les Anglais qui, à leur tour, recherchent à la fois la main-d'œuvre pour leurs plantations et les profits du trafic esclavagiste transatlantique.

 

 


C'est au XVIIIe siècle que le «commerce triangulaire» connaît son apogée: les navires quittent les ports négriers en France, ce sont Nantes, surtout, ainsi que Bordeaux, La Rochelle et Le Havre à destination de l'Afrique, chargés de présents sans grande valeur mais aussi de fusils qui seront échangés contre les esclaves; ils prennent livraison de leur marchandise humaine dans des comptoirs comme celui de l'île de Gorée, au large de Dakar, puis font voile vers la Guyane, les Antilles et l'Amérique du Nord où ils vendent ceux des esclaves qui ont survécu à la traversée; enfin, ils reviennent vers l'Europe chargés de marchandises diverses (coton, tabac, café). Le trafic triangulaire est d'un énorme rapport, et la concurrence est très forte. Les négriers sont les véritables maîtres de ce trafic: ils tiennent à leur merci aussi bien les Africains que les planteurs, qui réclament une main-d'œuvre toujours renouvelée. Interdit en Europe à la suite du congrès de Vienne, le trafic se poursuivit cependant jusqu'au milieu du XIXe siècle.

 
 

En Afrique même, la demande d'esclaves ne crée pas de toutes pièces, dans une société idéalement égalitaire, les conditions de la dépendance: il existe, dans la plupart des sociétés africaines, comme dans les sociétés antiques, des dépendants, réduits à travailler au service des autres, pour de multiples raisons. Le fait nouveau réside dans la «déportation sans retour» au-delà de l'Océan. La demande désorganise les sociétés africaines, même si certaines trouvent dans cette déportation une solution aux problèmes que posent les asociaux. La complicité de certains royaumes côtiers facilite, en outre, la collecte des esclaves. L'évaluation de l'impact de la traite sur l'histoire future de l'Afrique varie en fonction des approches; cependant, l'on peut estimer que le trafic a durablement désorganisé le continent, jusque dans les régions les plus centrales, notamment par la peur qu'il engendrait. De plus, face au trafic négrier, les seuls appuis pour un individu face à une razzia se trouvaient parmi les membres de sa propre ethnie; l'exaltation des liens ethniques que connaît encore aujourd'hui l'Afrique serait ainsi une conséquence directe de la traite.

 
 

Enfin, l'extension de l'emploi des esclaves dans le sud des actuels États-Unis pour la culture du coton va créer, dans ce pays, une situation de conflit qui deviendra l'un des plus grands problèmes sociaux et politiques du monde moderne.

 
 

Une plaie béante

L'énormité des profits réalisés dans les plantations conduit à l'augmentation constante de la demande d'esclaves noirs; pour le seul XVIIIe siècle, leur nombre est estimé à près de 6 millions. Les historiens hésitent sur le chiffre global; du XVIe au XIXe siècle, certains parlent de 8 à 10 millions, d'autres de 15 à 20 millions.

 

 

Pour tâcher d'estimer le nombre de Noirs ainsi déportés, l'on ne dispose en effet que de chiffres partiels ou de séries limitées dans le temps. L'on sait, par exemple, que 103 135 esclaves ont été convoyés par des navires nantais entre 1763 et 1775. L'une des sources qui permettent d'évaluer l'intensité du trafic est constituée par les archives de la compagnie d'assurances maritimes britannique, la Lloyd's. Celle-ci enregistra pas moins de 1 053 navires coulés en face de l'Afrique entre 1689 et 1803, dont 17 % pour faits de révolte, pillage ou insurrection.

 
 

En effet, en Afrique même, les révoltes liées à l'esclavage furent très importantes; elles furent le fait à la fois des populations de la côte et de celles de l'intérieur. Car si certains potentats africains se sont livrés à la traite de concert avec les Européens ou les Arabes, la population s'y opposa souvent violemment. Mais si l'on sait que des navires négriers ont été attaqués à proximité des côtes par les Africains, les documents sont quasi inexistants pour mesurer précisément l'ampleur des révoltes sur l'ensemble du continent.

 
 

La condition d'esclave

À bord des navires négriers, les conditions sont effroyables: on entasse un maximum d'esclaves dans la coque du navire et on les garde enchaînés afin de prévenir tout risque de révolte ou de suicide par noyade. La nourriture, l'aération, la lumière et le système sanitaire suffisent à peine à les maintenir en vie. Si la traversée dure plus longtemps que prévu, l'eau manque plus encore que les vivres, et les épidémies se déclarent. Les observations médicales réalisées aux XVIIe et XVIIIe siècles à propos de ces traversées montrent le nombre de maux qui s'abattent, d'abord sur les esclaves, parfois sur l'équipage; les pertes sont énormes: sur les 70 000 esclaves embarqués par la Real Compañía Africana espagnole entre 1680 et 1688, 46 000 seulement survécurent à la traversée.

 

 

Les terribles conditions de vie sur les plantations, les châtiments qui frappaient les fugitifs du marquage au fer rouge à la mutilation et à la pendaison provoquèrent la rapide disparition de nombreux esclaves importés. De plus, des esclaves choisirent la voie du suicide, car, selon des croyances largement répandues parmi eux, ils pensaient ressusciter libres; ce phénomène atteignit une telle ampleur que les maîtres se mirent à mutiler les cadavres afin que les esclaves ne puissent plus espérer revenir à la vie que châtrés ou décapités, et qu'ils renoncent ainsi à se suicider.

 
 

Cependant, les rébellions se multiplient, débouchant sur la fuite collective des esclaves marrons et la création dans les montagnes de refuges bien défendus. La plus célèbre de ces rébellions est celle qui, après le massacre des propriétaires européens, conduit en 1804 à l'indépendance d'Haïti.

 
 

Vers l'abolition de l'esclavage


La première source d'opposition à l'esclavage vient des esclaves eux-mêmes. Ce sont leurs révoltes qui ont conduit certains de leurs propriétaires à remettre en cause un système qui leur causait trop de problèmes par rapport aux avantages économiques qu'ils pouvaient en retirer. La révolte des esclaves de Haïti, qui commence en 1791 et que les Blancs ne parvinrent pas à mater, est décisive: c'est d'abord elle qui entraîne la suppression de l'esclavage dans l'île le 29 août 1793, suppression proclamée par Sonthonax, membre de la Société des amis des Noirs, et Polverel, commissaires de la République munis de pouvoirs extraordinaires. Cependant, cette abolition est aussi le fruit des circonstances: les troupes républicaines non seulement avaient été incapables de ramener l'ordre, mais, de plus, avaient besoin de troupes supplémentaires pour espérer repousser les Espagnols, installés à l'est de l'île, et les Britanniques, qui menaçaient de débarquer. Le 16 pluviôse an II (4 février 1794), la mesure des deux commissaires est ratifiée par la Convention, qui l'étend à toutes les colonies françaises; cependant, dès 1799, la traite reprend en secret au Sénégal sous des formes déguisées le commandant français du Sénégal est alors chargé de recruter des Noirs consentants , puis l'esclavage est rétabli en 1802 par le Premier consul, Bonaparte, sous la pression des commerçants français du sucre. La révolte des Noirs qui s'ensuivit, notamment aux Antilles, conduira à l'indépendance de Haïti le 1er janvier 1804.

 
Toussaint Louverture
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En Grande-Bretagne, à la suite d'un mouvement antiesclavagiste mené par William Wilberforce et Thomas Clarkson, le Parlement britannique déclare illégale la traite des Noirs (1807) et autorise la fouille et la saisie des navires suspects, ainsi que le versement d'une amende destinée à payer la libération des esclaves. En 1815, le congrès de Vienne déclare la traite illégale, et c'est la Grande-Bretagne qui se montre la plus active dans le contrôle des navires négriers, s'arrogeant un «droit de visite» que lui contestent les autres puissances maritimes. Cependant, entre 1817 et 1830, malgré l'interdiction, on enregistre 305 voyages négriers au départ de Nantes  la dernière expédition française partira du Havre en 1847.

 
Le brick «la Diligente»


En 1831-1832, la révolte des esclaves de la Jamaïque conduit la Grande-Bretagne à abolir l'esclavage à partir de 1833 dans toutes ses colonies, sauf en Inde où, si l'esclavage est aboli en 1843, les esclaves ne sont pas affranchis. La France suit en 1848, avec l'abolition obtenue le 27 avril 1848 par le député Victor Schoelcher, lequel était parvenu à convaincre le ministre de la Marine et des Colonies que, sans abolition, l'on allait vers une rébellion générale. Mais un nouveau système d' «engagement libre» proposé aux Noirs prolonge, sous le Second Empire, une situation très ambiguë.

 
Chronologie (1831): Révolte des esclaves dans le sud des États-Unis
Décret de 1848 sur l'abolition de l'esclavage
Victor Schœlcher

L'Empire ottoman, pour sa part, avait interdit la traite dans le golfe Persique et fermé les marchés publics d'esclaves d'Istanbul en 1847.

 
 

Les pays de l'Amérique du Sud abolissent l'esclavage à leur indépendance, mais, dans ces régions, le système du péonage succède bientôt à l'esclavage. En 1840, le Portugal et l'Espagne aboliront officiellement le trafic des esclaves, mais les vaisseaux négriers portugais continueront à traverser l'Atlantique durant tout le XIXe siècle.

 
 

Dans les colonies nord-américaines, les premiers signes d'opposition à l'esclavage émanent des quakers, qui se prononcent contre l'asservissement en 1724. Bien que le marché aux esclaves soit un spectacle courant, bon nombre de colons considèrent cette forme d'exploitation de l'homme comme un phénomène injustifiable. Les États vont ainsi abolir progressivement l'esclavage. Le Rhode Island est ainsi le premier État abolitionniste (1774). Mais la Constitution fédérale, ratifiée en 1788, prévoit la continuation du système esclavagiste pendant vingt années supplémentaires.

 
 

Alors que le décret de 1787 interdit l'esclavage dans les États du Nord-Ouest, le bénéfice éventuel de cette action va s'effacer devant la généralisation de l'égreneuse de coton, inventée en 1793 par Eli Whitney; en effet, l'utilisation de cette machine accéléra tellement la commercialisation du coton que les besoins en esclaves augmentèrent.

 
 

Le sentiment antiesclavagiste s'intensifie, en 1831, avec la publication du journal abolitionniste The Liberator ; cette même année voit aussi la révolte d'esclaves menée par Nat Turner, qui s'inscrit dans une vague de révoltes commencée en 1829 à Cincinnati et qui se prolonge jusque dans les années 1840. En 1833, une société antiesclavagiste est créée à Philadelphie. Dès 1840, les esclaves s'échappent vers les États du Nord pour y gagner la liberté. Des livres comme la Case de l'oncle Tom (1852), de Harriet Beecher-Stowe, stimulent la cause de la libération des esclaves. Pourtant, même si une nouvelle extension de l'esclavage est généralement condamnée, la cause de l'abolitionnisme est assez faiblement soutenue, avant qu'Abraham Lincoln n'en fasse un thème majeur de sa campagne présidentielle en 1860. Dans son discours d'investiture, Lincoln résume le problème politique, sinon humanitaire, de l'esclavage en affirmant qu'une nation mi-esclave, mi-libre ne peut survivre. La guerre de Sécession (1861-1865), provoquée par le refus des États du Sud d'abolir l'esclavage, fera près de 900 000 victimes et causera d'indescriptibles souffrances, mais la proclamation d'émancipation, prononcée par Lincoln en 1863, permettra d'affranchir tous les esclaves. Le 13e amendement à la Constitution, enfin, adopté en 1865, abolira l'esclavage sur tout le territoire des États-Unis.

 
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Les derniers pays à abolir officiellement l'esclavage sont l'Arabie Saoudite, en 1962, et la Mauritanie, en 1981 mais dans un rapport de 1992, l'Organisation internationale du travail (OIT) révèle que l'esclavage n'a pas disparu de ce pays, pas plus que du Soudan où des rapts d'enfants vendus ensuite comme esclaves ont été signalés en 1993.

 
 

Le travail forcé au XXe siècle

Si la distinction entre esclavage et servage est peu visible dans les faits, celle entre travail forcé et esclavage ne l'est guère plus, ainsi que le constatent des députés français en 1946: «De quelque nom que l'on masque le travail forcé, on ne peut pas faire que ce ne soit pas en fait et en droit l'esclavage rétabli et encouragé.» Et en effet, le travail forcé subsiste dans nombre de régions; il s'agit essentiellement d'esclavage pour dettes Asie du Sud-Est, Amérique latine et d'exploitation de femmes et d'enfants pour la prostitution. Ainsi, en 1999, l'Organisation internationale du travail (OIT) a condamné la Birmanie pour son recours systématique au travail forcé  plus de 500 000 personnes seraient concernées.

 

 

En Inde, l'esclavage pour dettes est toujours présent dans l'agriculture, les métiers du bâtiment, ou encore la production de tapis ou de poteries; le travail des enfants est utilisé dans la fabrication de perles de verre, le tissage des tapis ou encore la confection de feuilles d'or ou d'argent. Au Pakistan, l'esclavage pour dettes se rencontre dans les secteurs de la briqueterie, de la cordonnerie, du tissage, dans l'agriculture ou dans la fabrication de bidis (cigarettes d'eucalyptus). Les dettes revêtant parfois un caractère héréditaire, l'institution du servage pour dettes s'assimile à une forme réelle d'esclavage.

 
 

Ce n'est pas forcément le cas de la prostitution, bien que la question soit de plus en plus actuelle. En Thaïlande, aux Philippines, certains adolescents des deux sexes se prostituent contre leur gré. Le phénomène a pris une telle ampleur que certaines organisations parlent, à propos de la vente par leurs parents ou du rapt puis de la prostitution d'enfants birmans en Thaïlande, de politique délibérée de destruction de certaines ethnies de Birmanie. La prostitution des enfants n'épargne pas les pays occidentaux, comme l'ont montré de nombreuses affaires, notamment en Belgique, à la fin des années 1990.

 
 

Enfin, dans certaines régions d'Afrique et du Moyen-Orient, des formes d'esclavage subsistent; la Société internationale antiesclavagiste de Londres estime que la servitude financière, le servage sous couvert de contrats de travail, les fausses adoptions et l'asservissement imposé aux femmes mariées sont encore responsables de l'assujettissement de plusieurs millions d'êtres humains. Il existe aussi des personnes vivant dans la misère qui se vendent ou qui vendent leurs enfants comme esclaves. En Arabie Saoudite, le gouvernement estimait, en 1962, que le pays comptait encore quelque 250 000 esclaves.

 
 

Dans l'Empire français, le travail forcé n'a été aboli qu'en 1946, sur les instances, entre autres, de Félix Houphouët-Boigny et de Léopold Sédar Senghor, alors députés à l'Assemblée nationale; les travailleurs africains réquisitionnés de force étaient notamment employés à des constructions d'infrastructures comme des voies de chemin de fer.

 
 

Réglementation internationale

La Société des Nations adopta en 1926 un texte visant à mettre fin à l'esclavage dans le monde entier, sans prévoir cependant de procédures ou d'institutions officielles permettant de l'appliquer. En 1930, l'OIT adopta la convention n° 29 sur le travail forcé, que l'OIT définit comme étant «tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de son plein gré».

 

 

En 1948, les Nations unies, par la Déclaration universelle des Droits de l'Homme interdirent tout particulièrement l'esclavage et la traite, et le Conseil de sécurité condamna le travail forcé comme forme clandestine d'asservissement. En 1974, les Nations unies ont mis en place un groupe de travail sur les formes contemporaines de l'esclavage.

 
 

Le travail effectué par le Conseil économique et social des Nations unies, l'Unesco et l'OMS se révèle peut-être plus important que tous les accords ou les déclarations condamnant l'esclavage: en effet, ces organisations internationales s'attaquent à la famine et à l'ignorance, qui contribuent, plus que tout, à perpétuer l'esclavage.

 
 

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