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sur TVCom le vendredi 10 septembre de 17h00 à 18h00 (en boucle).
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Au
détour d'un sentier, au bord d'un canal ou dans le creux d'un
vallon, paysages et édifications nous murmurent l'histoire d'une
région et des gens qui l'habitent. C'est ce qu'on appelle le
patrimoine.
Partout
et toujours, l'homme consacre l'essentiel de son énergie à
trouver sa pitance. Au cours du Moyen-Age, les seigneurs féodaux
s'approprient une part importante des terres que les abbayes possèdent.
Les fermes seigneuriales se mettent alors à défricher
énormément en périphérie et les seigneurs
lotissent certaines de leurs terres moyennant redevance. Cette évolution
sur fond d'économie agricole s'accompagne d'un essort démographique
. A l'Ouest du Brabant wallon, de nombreuses fermes témoignent
encore de cette époque (point info 01).
Les
principales formes d'énergie sont le vent, l'eau et la force
musculaire de l'homme ou de l'animal. Leur dénominateur commun
est le moulin. Toute la population des campagnes s'y retrouve pour transformer
en farine et parfois même en huile d'éclairage les grains
de blé, d'épeautre, de froment, d'orge, de sarrasin et
de seigle. L'ouest du Brabant wallon regorge de ces témoins d'une
intense activité rurale. Si en ce temps les grandes décisions
se prennent au cimetière près de l'Eglise, le moulin est
un lieu important de rencontres et d'échanges. Souvent propriété
des Seigneurs, le moulin oblige parfois le meunier à occuper
une fonction particulière. A Rebecq, on y emprisonne parfois
des malfrats dans une pièce convertie en cachot. On y confectionne
aussi des cordes pour les prisons. De même, la position des ailes
des moulins à vent, véritable langage de communication
entre meuniers, annonce un décès ou tout autre événement
important. Les moulins à eaux, beaucoup plus nombreux que les
moulins à vent, sont également à l'origine d'inondations.
Afin de les actionner, les meuniers retiennent l'eau dans les barrages
qu'ils ouvrent sans se préoccuper des conséquences. A
l'époque rien ne réglemente l'usage de ces barrages (point
info 02).
Outre
les meuniers, on trouve de nombreux métiers aujourd'hui disparus
et liés aux activités de l'époque. Autour de la
traction animale, ce sont les maréchaux ferrants, les bourreliers
qui fabriquent les selles et autres charrons pour la réalisation
des roues et des chariots. Partout, il y a des brasseries, des distilleries,
des filatures, des papeteries et des briqueteries. Et puis des tanneurs,
des potiers, des sabotiers et des carriers (point
info 03).
Avec
la suppression des banalités et la fin des monopoles de l'usage
de l'eau et du vent détenus par les seigneurs, de petits capitalistes
investissent dans la création de petites usines faisant appel
à l'énergie hydraulique.
Dans
cette industrie rurale germent déjà les industries futures.
En 1752, l'impératrice Marie-Thérèse, reine de
Hongrie et de Bohème, autorise le maintien à Clabecq d'une
forge actionnée par un moulin à eau. Il s'agit véritablement
de la première forge de Clabecq. Elle se développe à
partir d'un moulin à battre le fer, construit sur la Sennette,
à côté d'un moulin à farine. La maçonnerie
du bief de cette forge est toujours visible aujourd'hui (point
info 04).
En
1812, Napoléon Premier demande que soit porté à
l'étude la réalisation d'un canal reliant Bruxelles à
Charleroi. En 1832, soit 20 ans plus tard, le canal Bruxelles-Charleroi
est effectivement créé, ce qui modifie considérablement
le paysage économique et social de la région. De grandes
péniches se mettent alors à transporter entre autres de
la houille vers Bruxelles, ce qui provoque à terme l'élargissement
du canal et la disparition des écluses pour diminuer le temps
de transport des marchandises. L'utilisation des péniches s'accompagne
aussi d'une arrivée importante de main d'oeuvres et de chevaux
aptes à les tracter. L' objectif premier du canal n'est donc
pas local, mais il se montre bien utile pour les forges de Clabecq et
les carrières de Quenast. Le canal s'est depuis considérablement
transformé, cependant à Virginal quelques dizaines de
mètres attestent encore de sa largeur initale (point
info 05).
En
1836, une papeterie rejoint le moulin de Fauquez. Elle devient ensuite
filature, fabrique d'allume-feu et puis de colle. C'est en 1901 que
l'usine devient la Société Anonyme des Verreries de Fauquez.
Après la première guerre mondiale, les verreries créent
la marbrite qui s'impose sur les marchés étrangers. L'évolution
économique et l'organisation sociale qui se construit autour
des verreries de Fauquez sont étroitement liées à
la forte personnilité d'Arthur Brancart (point
info 06).
A
Quenast, en 1846, un jeune homme d'affaires bruxellois, Joseph Zaman,
rachète une série de carrières dont il fait la
Société Anonyme des carrières de porphyre. Déjà
exploitées dès le 16è siècle, elle sert
entre autres à la création de la Chaussée allant
de Bruxelles à Mons, jusque Valenciennes. Mais ces carrières
ne deviennent véritablement industrielles qu'avec l'apparition
d'une ligne de chemin de fer privée vers 1880. La voie ferrée
transporte les pierres de la carrière jusqu'au canal. Fonctionnant
jusque-là sur le mode artisanal, les carrières ont désormais
les instruments nécessaires à une exploitation systématique
de l'immense veine de porphyre. Ce sont les plus grandes carrières
à ciel ouvert d'Europe. Du porphyre, on fait des pavés
qui sont mondialement connus et qui servent à paver des kilomètres
de routes bien au-delà de nos frontières. D'origine volcanique
et vieille de 450 millions d'années, cette pierre roche très
dure résiste au gel, à l'eau et aux poids lourds. C'est
pourtant à l'époque surtout à pieds que de nombreux
travailleurs empruntent ces longues routes pour rejoindre chaque jour
leur pénible travail (point info 07).
D'autres
pierres sont également exploitées. A Clabecq par exemple,
on exploite aussi l'arkose, très utilisée dans la région,
pour la construction des bâtiments. A Tubize, les carrières
de schiste prennent une importance considérable comme peut en
témoigner l'église construite en pierres locales (point
info 08).
Du
côté des communications, la construction de la gare de
Tubize, en 1840, annonce le déclin des diligences et des métiers
qui y sont liés. Boureliers et maréchaux ferrants voient
leurs activités diminuer et se transformer progressivement avant
de commencer à péricliter. A la fin du 19è siècle,
le halage des péniches sur le canal cesse d'être confié
aux chevaux. En effet, la Compagnie générale des tractions
électriques sur les voies navigables décide d'organiser
le halage à partir d'une centrale installée à Oisquerck.
Entre Clabecq et Virginal, c'est donc l'électricité qui
tracte les péniches. Mais l'exploitation de ces tracteurs électriques
se revèle catastrophique : le canal, difficile à entretenir,
provoque trop de contretemps et d'accidents. L'expérience n'est
pas rentable, et en 1903, le halage est rendu aux chevaux.
Parallèlement,
l'industrie crée l'industrie. En 1885, Joseph Zaman, le fondateur
de la Société des carrières de porphyre, crée
une entreprise pour la réparation, la construction et l'entretien
des locomotives et des machines. Il s'agit des Ateliers métallurgiques
de Tubize (point info 09).
Le
canal entre Bruxelles et Clabecq achevé, émergent alors
un chantier de découpage de ferrailles, un atelier de réparation
de matériel roulant et de grues ainsi que des quais d'embarquement
pour les carrières de Quenast. Depuis, une usine à soie
artificielle s'est installée aussi à Tubize. C'est la
première au monde. 5500 personnes arrivent pour y travailler.
Toutes ces activités industrielles entraînent en effet
une formidable poussée démographique dans la région.
Même si beaucoup d'ouvriers sont saisonniers, il faut bien les
loger. Autour des carrières, des soieries ou des forges par exemple,
on construit des centaines de logements à faible coût qui
lient l'ouvrier à son employeur (point
info 10).
Au
début du 20è siècle, la voierie s'adapte à
l'essor industriel et démographique. Elle est élargie,
pavée et éclairée à partir de 1902. Par
contre, il n'y a pas encore l'eau courante. Celle-ci n'apparaît
en effet qu'en 14-18. Lors de la grande guerre, on prend comme prétexte
de creuser des tranchées de canalisation d'eau pour que les hommes
ne soient pas déportés. Ces canalisations amènent
à des bornes. Mais en attendant, ce sont les puisatiers qui installent
des cabines de réserve d'eau le long des voies ferrées
(point info 11).
Avec
l'essor démographique et industriel, c'est tout le patrimoine
civil qui se développe. Il n'y a pas encore d'hôpitaux,
mais l'on soigne les bléssés dans les dispensaires des
entreprises, où l'on pratique même des opérations
chirurgicales. Part contre, hospices, écoles et maisons du peuple
sont autant de témoins d'un monde passé d'une économie
rurale à une économie industrielle (point
info 12).
A
Quenast, la Société anonyme des carrières de porphyre
est propriétaire de nombreux bâtiments qui attestent, aujourd'hui
encore, de l'existence d'une architecture quenastoise. Bureau de Direction
des carrières, batiments des "Grandes Forges", anciennes
menuiseries servant à l'entretien de l'outillage, Cité
de la Vallée et maison communale ont un aspect architectural
identique, révélateur des relations étroites qui
existent entre les carrières et les pouvoirs publics (point
info 13).
A
l'origine des salles de fêtes, on trouve parfois des grands industriels,
parfois des ouvriers.
A
Rebecq, ce sont les cabaretiers qui transforment les dépendances
de leur habitation en salon, parfois équipé d'une scène
avec rideau et coulisses. C'est l'occasion pour les sociétés
théâtrales de se développer et de multiplier leurs
activités.
A
Fauquez, en 1912, Arthur Brancart, le patron des verreries, fait construire
une salle exclusivement réservée au personnel de l'usine
et aux membres de leur famille. Elle sert généralement
à des séances cinématographiques (point info 14).
Par
contre, à Braine-le-Château, en 1930, la Maison du Peuple
est construite bénévolement par les ouvriers brainois
affiliés au Parti Ouvrier Belge.
A
Ittre, par exemple, le Wauxhall, appelé aujourd'hui "Palais
de Plumes" est construit vers 1890, par le propriétaire
du Château. D'abord réservé à des bourgeois
triés sur le volet, l'accès au salon se démocratise,
mais conserve toujours une note élitiste.
Témoin
de notre passé contrasté, le patrimoine est aujourd'hui
un élément de notre cadre de vie quotidien.
Nos
paysages d'une grande beauté et certains ensembles architecturaux,
que nous traversons trop vite sans doute, nous ont, par leur seule présence
construits, forgés, influencés.
Inventorier
et sauvergarder les lieux, les édifications qui témoignent
de notre histoire économique, sociale et culturelle, c'est élargir
et consolider le socle de nos développements futurs.
Parmi
les urgences, pointons en vrac le château de Clabecq, aussi appelé
chateau des italiens, l'église de Oisquerq, la potale de la rue
du moulin à Tubize, la chapelle de l'hospice de Rebecq, la tourette
d'Asquenpont à Virginal, l'arbre de la liberté à
Saintes, ou encore l'orgue de l'église St Remy à Ittre
(point info 15).
Urgences
qui réclament d'être inventoriées et sauvergardées
pour aller plus avant, c'est à dire : mettre en valeur et réaffecter.
Certaines réalisations devraient convaincre les sceptiques :
L'église
et le puits Ste Renelde à Saintes, le palais de plumes à
Ittre, la maison du Bailli à Braine-le-Château, la filature
Dehase à Tubize. Mais encore le théâtre de la Valette,
la façade reconstituée de l'ancien moulin de Oisquerq
au musée de la Porte à Tubize, l'ancien hospice de Rebecq,
le musée du folklore à Ittre, ou l'église St Géry
à Rebecq (point info 16).
Autant
d'exemples qui dépoussièrent les représentations
liées au patrimoine. Autant d'exemples qui mettent en valeur
l'harmonie de cet enjeu avec les objectifs de développement économique,
de création d'emploi, d'accessibilité à la culture,
de vie associative, de participation citoyenne et de qualité
de la vie.Témoin d'hier, le patrimoine est aussi le lieu de nos
racines et sera donc une source où puiser la force pour relever
les défis de demain.