Alphabet latin

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Latin
Image illustrative de l'article Alphabet latin
Exemple d'écriture typographique en alphabet latin
Caractéristiques
Type Alphabet
Langue(s) Latin et langues romanes ; la plupart des langues européennes ; romanisation possible pour presque toutes les langues.,
Historique
Époque ~ 700 av. J.-C. à nos jours
Système(s) parent(s) Protocananéen

 Phénicien
  Grec
   Étrusque
    Latin

Système(s) apparenté(s) Cyrillique, copte, arménien, runique
Système(s) dérivé(s) Nombreux
Codage
Unicode Plusieurs plans, dont 0000–007F
ISO 15924 Latn
Distribution de l'alphabet latin
  •      Pays où il est utilisé en tant qu'écriture principale
  •      Pays où il est utilisé avec une autre écriture officielle

L'alphabet latin (ou alphabet romain) est un alphabet bicaméral comportant vingt-six lettres de base, principalement utilisé pour écrire les langues d’Europe de l'Ouest, d'Europe du Nord et d'Europe centrale, ainsi que les langues de nombreux pays qui ont été exposés à une forte influence européenne, notamment à travers la colonisation européenne des Amériques, de l'Afrique et de l'Océanie. C’est, en concurrence avec l’alphabet cyrillique et dans une bien moindre part l’alphabet grec, le système d'écriture par défaut dans le monde occidental. Les utilisateurs de l’alphabet latin représentent 39 % de la population mondiale, consomment 72 % de la production imprimée et écrite sur papier dans le monde, et profitent de 84 % de l’ensemble des connexions à l’internet[1]. En raison de cette importance démographique, économique et culturelle des pays l’utilisant (notamment ceux de l’Europe et de l’Amérique du Nord), il est devenu une écriture internationale : on peut trouver des mots écrits en lettres latines dans les rues du Japon comme dans celles d’Égypte.

On nomme cet alphabet ainsi car les lettres capitales qu’il utilise pour sa graphie sont d’origine romaine (via sa langue latine), dont l’alphabet était encore monocaméral. Les lettres minuscules sont en revanche issues des formes monocamérales développées lors de la mise à l'écrit des langues germaniques.

C’est sous le règne de Charlemagne, désireux d’unifier les différentes formes d’écriture de l'Empire carolingien, qu’Alcuin mélangea ces écritures en créant la minuscule caroline qui est à la base des différentes formes de l’alphabet latin moderne, devenu ensuite bicaméral car il distingue maintenant les majuscules des minuscules pour des raisons lexicales (les lettres minuscules prennent parfois aussi la forme de lettres capitales pour des raisons orthographiques ou grammaticales, et dans les autres cas existent aussi sous la forme de petites capitales, en revanche les majuscules sont normalement toujours transcrites en grandes capitales).

Du fait de la grande variété des langues l'utilisant dans leur écriture, l'alphabet latin comporte de nombreuses extensions sous forme de signes diacritiques et de lettres supplémentaires. En effet, les vingt-six lettres fondamentales sont souvent insuffisantes pour exprimer toutes les distinctions entre phonèmes des langues considérées. Un autre moyen couramment employé pour créer des distinctions supplémentaires est le recours à des digrammes.

L’alphabet latin de base (dans sa forme simplifiée à vingt-six lettres sans les diacritiques et lettres complémentaires) est également le seul utilisé pour noter de façon sécurisée les adresses de sites internet (URL) et de courriel, en attendant une généralisation effective de l’Unicode au moins pour les URL internationalisées (IRL).

Lettres[modifier | modifier le code]

L'alphabet latin, comme la majorité de ceux issus de l'alphabet grec, est bicaméral : on utilise deux graphies pour chaque graphème (ou lettre), l'une dite bas de casse ou minuscule, l'autre capitale ou majuscule. Dans la majorité des cas, chaque lettre possède les deux variantes. Il existe cependant quelques exceptions, comme la ligature ß (appelée scharfes s ou eszett ; utilisée en allemand et autrefois dans d'autres langues (dont le Français), qui, en capitales, est remplacée par SS.

L'expansion – tant géographique que temporelle – de cet alphabet en fait l'un des plus riches en variantes nationales. Ainsi :

  • chaque langue donnée utilise un jeu plus ou moins complet de lettres fondamentales ;
  • chacune peut en posséder des lettres modifiées qui s'y ajoutent ;
  • parmi les lettres modifiées, certaines sont considérées, selon les langues, comme des lettres à part entière ou comme des variantes d'une autre lettre.

Par exemple, les alphabets utilisés pour le français et pour l'espagnol ne sont pas identiques (ainsi, la lettre ç ne s'emploie pas en espagnol et le français, à l'inverse ne se sert pas de ñ), bien que tous deux puissent être ramenés à l'alphabet latin. En sorte, il ne serait pas faux de parler d'un alphabet français et d'un alphabet castillan.

On le voit, il n'existe rien de tel qu'un alphabet latin figé et constant ; il est cependant possible d'isoler les graphèmes fondamentaux utilisés dans une majorité de langues : ce sont ceux de l'alphabet des origines (voir plus bas, section « Histoire ») plus j et u ainsi que g et w, soit :

Graphèmes fondamentaux[modifier | modifier le code]

Majuscules
A B C D E F G H I J K L M
N O P Q R S T U V W X Y Z
Minuscules
a b c d e f g h i j k l m
n o p q r s t u v w x y z

Nom des lettres[modifier | modifier le code]

Parmi les innovations de l'alphabet latin par rapport à son modèle (indirect) grec, on peut compter le nom des lettres. En effet, alors que les lettres grecques portent des noms sans sens dans leur langue car hérités directement des langues sémitiques et, surtout polysyllabiques (alpha, bêta, gamma, delta), ce sont des monosyllabes en latin.

Les Romains, en effet, n'ont pas cherché à donner un nom réel à leurs lettres, ils les désignaient comme elles se prononçaient, ce qui ne pouvait bien fonctionner qu'avec les continues et les voyelles (qu'on prononçait vraisemblablement longues). On trouve donc deux groupes de lettres (on se bornera ici aux lettres purement latines n'offrant pas de difficultés d'interprétation) :

  • celles prononçables sans support : les voyelles /aː/, /eː/, /iː/, /oː/, /uː/ et les continues /fː/, /lː/, /mː/, /nː/, /rː/ et /sː/ (on disait donc « la consonne /ffff/ » en prolongeant le son autant que nécessaire) ;
  • celles qu'on devait articuler avec une voyelle d'appui, /e/ chez les Romains : /beː/, /keː/ (lettre c), /deː/, /geː/, /kaː/ (lettre k, qu'on employait initialement devant a ou une consonne puis qui n'a été conservée que dans de rares mots), /peː/, /kuː/ (lettre q, qui ne s'emploie que devant un u), etc.

De là vient la manière qu'on a, en français mais aussi dans les autres langues à écriture latine ancienne, d'épeler les mots.

Extension des graphèmes fondamentaux[modifier | modifier le code]

Les limites intrinsèques à cet alphabet, relativement limité en nombre de signes différents ont dû rapidement être dépassées dès qu'il s'est agi de transcrire des langues autres que le latin, langues dont le système phonologique diffère nécessairement, comme le turc. Par exemple, l'alphabet latin des origines ne permet pas de noter le son [ʃ] de chat.

Pour ce faire, les copistes médiévaux puis les imprimeurs de la Renaissance ont trouvé plusieurs solutions :

  • utilisation de diacritiques, signes complémentaire à une lettre fondamentale et qui en modifient la valeur (accent aigu, tilde, ogonek, etc) ;
  • invention de lettres supplémentaires (issues de ligatures, de variantes contextuelles ou de variantes propres à une graphie médiévale particulière, principalement), parmi lesquelles certaines sont maintenant considérées comme fondamentales (comme le w ou le ß), certaines ont disparu (c'est le cas du ȝyogh) ;
  • emprunt de lettres à d'autres écritures (le ƿwynn – anglais, par exemple, emprunté aux runes) ;
  • utilisation de digrammes (ch, sh, cz, etc.).

Voici quelques exemples parmi de nombreux autres :

On se reportera à Digramme, Diacritiques de l'alphabet latin, Abréviations, Ligature, Lettres supplémentaires de l'alphabet latin et Variante contextuelle pour plus de détails.

Enfin, il est de plus en plus fréquent que la transcription ou la translittération d'une écriture non latine se fasse au moyen des lettres latines (qui donnent une grande partie des caractères de l'alphabet phonétique international et d'autres méthodes de transcription). On parle dans ce cas d'une romanisation. Enfin, nombreuses langues restées sans écriture ont adopté l'alphabet latin : c'est le cas de langues africaines, qui peuvent suivre l'alphabet pan-nigérian ou l'alphabet international de Niamey.

Variante française[modifier | modifier le code]

On utilise, en français, les vingt-six lettres fondamentales, dans deux casses, ainsi que des ligatures (comme æ et œ) et des lettres munies de diacritiques (comme dans é) qui ne sont cependant pas considérés comme des lettres indépendantes même si elles sont considérées comme distinctives et normatives dans l’orthographe. Enfin, les lettres diacritiques (comme u ou e après g pour en préciser la valeur), les digrammes (ch, ai, an/am, au, ei, en/em, eu, gn, in/im, ng, on/om, ou, un/um, ph, sh, ss…) et trigrammes (ain, eau, ein, oin, sch…), et diverses lettres muettes, sont particulièrement nombreux (dont certains importés de langues étrangères) et ne sont pas traités non plus comme des lettres indépendantes.

Article détaillé : Alphabet français.

Variante germanique[modifier | modifier le code]

Bien qu’on les oppose à l’écriture latine, les formes allemandes dites « gothiques » (Fraktur ou Schwabacher pour la typographie, Kurrent ou Sütterlin pour les cursives) font partie des écritures latines. Elles se distinguent par leurs formes anguleuses, des ductus et des ligatures particuliers. Bien qu’encore utilisées, ces types d’écritures ont disparu de l’usage courant.

Histoire[modifier | modifier le code]

Alphabet antique[modifier | modifier le code]

L'alphabet latin archaïque (avec différentes variantes pour chaque lettre)

L'alphabet latin était initialement utilisé pour écrire le latin, la langue parlée par les habitants de Rome et du Latium. Il est dérivé de l'alphabet étrusque, lui-même variante d'un alphabet grec différent de l'alphabet dit classique (celui qu'on utilise dans les éditions actuelles). L'alphabet étrusque comportait quelques lettres inutiles (B, C, D et O), qui n'étaient jamais utilisées dans les inscriptions car inutiles en raison du système phonologique de l'étrusque, dans lequel on ne trouve pas d'occlusives sonore ou de voyelle /o/. Elles seront en revanche utilisées par les Latins, chez qui elles trouvent une pleine utilité[2].

Les capitales (majuscules) sont la forme normale de cet alphabet, les minuscules étant d'invention tardive (minuscule caroline médiévale, IXe siècle de l'ère chrétienne) et, au départ, utilisée non pas en contraste avec des majuscules mais en tant que système graphique indépendant.

Les faits notables de cet alphabet sont les suivants :

  • on ne distingue pas U de V, qui s'écrivent tous deux V ;
  • dans les premiers temps, la lettre C notait à la fois /g/ et /k/ : en effet, l'alphabet étrusque s'est servi du gamma grec Γ /g/ avec la valeur /k/, /g/ étant absent du système phonologique étrusque. G (modification graphique de C) a cependant complété l'alphabet rapidement. La lettre K, redondante avec C, n'a été conservée en latin que devant /a/ et dans très peu de mots (KALENDAE, « calendes »). Mais la confusion C ~ G a cependant persisté dans le prénom romain Caius prononcé Gaius, notamment pour les abréviations : le prénom s'écrit normalement C. La lettre Z étant inutile en raison du rhotacisme, G l'a remplacé dans l'alphabet (rappelons qu'en grec on a, dans l'ordre, Α a, Β b, Γ g, Δ d, Ε e, Ϝ w (digamma) , Ζ z).
  • la lettre Q, utilisée comme variante de /k/ devant /u/ (c'est le koppa grec, inutile dans cet alphabet donc absent de la variante classique), n'a été conservée que pour former le digramme QV notant le phonème unique /kʷ/, distinct de la suite de consonnes /kw/ : on oppose ainsi QVI /kʷi/ « qui » et CVI /ku̯i/ (avec diphtongue) « à qui ».

En conclusion, le latin utilisait 20 lettres dans sa variante archaïque[3] :

A, B, C, D, E, F, G, H, I, L, M, N, O, P, Q, R, S, T, V, X

Puis, 23 lettres dans sa graphie classique :

A, B, C, D, E, F, G, H, I, K, L, M, N, O, P, Q, R, S, T, V, X, Y, Z
Note : K, Y et Z sont des ajouts tardifs à partir de l'alphabet grec pour en noter des mots d'emprunt.

Alphabet médiéval et graphies[modifier | modifier le code]

Au cours des siècles, les lettres de l'alphabet latin ont été tracées de diverses manières. Ces types d'écritures ne constituent pas des alphabets en soi mais des versions différentes d'un même alphabet, ce qui deviendra après l'invention de l'imprimerie la police de caractères :

L'imprimerie[modifier | modifier le code]

Jusqu'à la Renaissance, le manuscrit est le grand véhicule de l'écriture. L'imprimerie prend progressivement le relais, et le manuscrit devient peu à peu un objet d'art. C'est alors qu'apparaissent de grands maîtres qui signent des livres théoriques et pratiques sur "l'art de la belle écriture". Les circonvolutions de l'écriture vont suivre leur cours, ponctué de noms comme Arrighi, Giambattista Palatino, Tagliente Yciar, Lucas, Mercator[4]

Au XVe siècle, l'écriture est tracée majoritairement à la plume à bout carré. À cette époque, en France, on emploie une cursive de style gothique appelée "lettre de civilité", ainsi que la financière. Au XVIIe siècle, l'utilisation de plumes de plus en plus pointues apporte des modifications dans la silhouette : les traits sont plus fins, les angles plus arrondis, les arabesques naissantes dans la cancelaresca dansent comme des rubans sur le papier (Van de Velde, Periccioli, Barbedor…). Durant cette période, de nouvelles écritures apparaissent : la ronde, la bâtarde, la coulée.

Enfin, au XVIIIe siècle, un nouveau style émerge à partir de la bâtarde italienne, plus "facile à tracer", plus "rapide à écrire" : l'anglaise. Elle doit son nom d'une part aux maîtres anglais (George Bickham (en), Champion…) qui ont largement contribué à sa maturation, mais aussi à la puissance économique britannique qui diffuse cette écriture commerciale et utilitaire. Jusqu'au XXe siècle, l'anglaise a servi de base à l'écriture scolaire. Mais aujourd'hui, la structure des lettres est en pleine transformation. Les tags nous proposent une capitale métamorphosée, l'école réclame de nouveaux modèles, la calligraphie se développe.

En informatique[modifier | modifier le code]

L'alphabet latin a été le premier alphabet reconnu par les appareils informatiques. Dans ces appareils, à chaque glyphe correspond un nombre (code), et ce nombre est manipulé par l'appareil. La transformation d'un nombre en glyphe et inversement se fait conformément à des tables de correspondance normalisées.

La norme ASCII, créée en 1961 définit les correspondances entre 96 caractères d'imprimerie et leur nombre respectif. Parmi les caractères définis dans la norme, il y a les 26 lettres de l'écriture latine, en majuscule et minuscule, les nombres de 0 à 9, et les divers signes de ponctuation qui permettent d'écrire des textes en anglais. Cette norme ne définit pas de correspondance pour les lettres avec diacritiques (accents).

La table de correspondance ISO 8859-1, aussi appelée Latin-1 est une des tables de correspondance définies par la norme ISO 8859. Créée en 1991 sur la base de la norme ASCII, Cette norme définit la correspondance entre 191 caractères d'imprimerie et leur nombre respectif. Parmi les caractères il y a les 26 lettres de l'écriture latine, en majuscule et minuscule avec les diacritiques utilisées dans différentes langues (latines) de l'Europe de l'Ouest tels que le français (à l'exception notable des caractères 'œ', 'Œ' et 'Ÿ'), l'allemand, l'espagnol, le danois ou l'islandais.

Les 15 autres tables de la norme ISO 8859 définissent la correspondance entre les lettres avec des signes diacritiques inutilisées dans les langues de l'Europe de l'Ouest tels que le hatchek š, l'ogonek ę ou le S cédille ş, ainsi que des langues utilisant les alphabets cyrillique, grec, arabe, hébreu et thaï. Ces normes font partie de la famille de norme Unicode qui définit les correspondances pour toutes les lettres dans quasiment tous les alphabets utilisés dans le monde.

Les caractères suivants sont dédiés aux langues latines:

  • 0000 007F Latin de base voir norme ISO 646, code ASCII
  • 0080 009F Non utilisé voir plage non utilisée norme ISO 8859 et ISO 8859-1
  • 00A0 00FF Supplément Latin-1 voir norme ISO 8859, code ISO 8859-1
  • 0100 017F Latin étendu A
  • 0180 024F Latin étendu B

Classement alphabétique[modifier | modifier le code]

Voir l'article Classement alphabétique.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) A. E. Gordon, The Letter Names of the Latin Alphabet, University of California Press, 1973.
  • (fr) Jean Mallon, Paléographie romaine, Madrid, 1952.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Blocs de caractères Unicode pour l’écriture latine[modifier]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Netlang, réussir le cyberespace multilangue (page 129) », sur https://www.net-lang.net (consulté le 15 août 2014)
  2. On peut encore lire sur tous ces points la synthèse pourtant déjà ancienne mais toujours d'actualité A.Grenier, « L’alphabet de Marsiliana et les origines de l’écriture à Rome », Mélanges d’archéologie et d’histoire, 1924, vol 41, p. 3-41
  3. « Les lettres du latin : description sémiologique, fonctionnelle et graphématique, Paris Sorbonne », sur http://wwww.paris-sorbonne.fr (consulté le 15 août 2014)
  4. L'évolution des styles de l'écriture latine par Véronique Sabard Geneslay

Liens externes[modifier | modifier le code]

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