Anglo-frison

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Anglo-frison
Anglo-Frisian
Période IIIe siècle-Ve siècle
Langues filles vieil anglais, vieux scots, vieux frison
Pays Mercie, Frise, Lowlands
Typologie SVO flexionnelle accentuelle
Classification par famille
Codes de langue
ISO 639-5 [1] gmw[1]
IETF gmw[1]
Linguasphère 52-AAB
Régions d'origine des colons de la Grande-Bretagne au Ve siècle.
Aire de répartition actuelle des langues anglo-frisonnes en Europe. Les zones hachurées sont les zones de bilinguisme.

L’anglo-frison est le groupe linguistique regroupant les langues qui, vers le IIIe siècle, se sont différenciées à l'intérieur de territoires allant du nord des Pays-Bas (Saxons) jusqu'au sud du Danemark (Angles), aire linguistique de l'actuelle langue frisonne et des anciennes langues angles. Ces parlers anglo-frisons : le vieil anglais, le vieux frison, et leurs descendants actuels, forment un groupe des langues germaniques occidentales[2]. Les rameaux de l'anglo-frison sont :

Les langues anglo-frisonnes se distinguent en partie des autres langues germaniques occidentales par une loi phonétique, la « Loi des nasales spirantes ingvaeoniques », la diphtongaison anglo-frisonne, et par la palatalisation du *k Proto-germanique en une consonne affriquée coronale devant les voyelles à l'initiale.

Exemple

  • anglais cheese, ouest-frison tsiisnéerlandais kaas, bas saxon Kääs, allemand Käse; ou
  • anglais church, ouest-frison tsjerke — néerlandais kerk, bas saxon Kark, allemand Kirche.

Depuis la fin du XXe siècle, on assiste à une extinction progressive du frison dont l'usage n'est plus sauvegardé que par des populations rurales des Pays-Bas, d'Allemagne et du Danemark, essentiellement dans les îles de la Frise.

Évolution historique des parlers anglo-frisons[modifier | modifier le code]

Linguistique historique[modifier | modifier le code]

Voici, par ordre chronologique, un résumé des principales évolutions phonétiques ayant affecté les voyelles[3] :

  1. Recul de la racine de la langue et nasalisation de ā̆ devant une nasale, caractéristique des Langues germaniques occidentales ;
  2. élision du n devant une spirante, se traduisant par l'allongement compensatoire et la nasalisation de la voyelle précédente (goose <*gans);
  3. Le présent et le prétérit pluriels réduits à une seule forme ;
  4. Apophonie/avancement de la voyelle A : WGmc ā̆ǣ, poussé même jusqu'à la formation des diphtongues ai et au;
  5. Première palatalisation (c'est-à-dire sans phonémicisation des palatales) : church <*kirke;
  6. Rétablissement de A sous l’influence de consonnes adjacentes : ǣā ;
  7. coalescence de certaines diphtongues : ǣē en frison et pour les dialectes vieil-anglais (sauf pour l'ouest-saxon);
  8. Rétablissement de a devant une voyelle antérieure à la syllabe suivante (puis dans les dialectes angles de Mercie); frison æuau → vieux-frison ā/a;
  9. Diphtongaison en vieil-anglais, et diphtongaison palatale en anglo-saxon (West Saxon) ;
  10. Apophonie du i suivie d'une syncope; suivie d'une diphtongaison en vieux-frison;
  11. Seconde palatalisation et mouillure des palatales (yesterday<*gestraz, yellow <*gelwaz) et assibilation, suivie d'une seconde apopĥonie (avancement de voyelle), dans certaines régions de la Mercie;
  12. Coalescence.

Divergence entre l'anglo-saxon et les dialectes frisons[modifier | modifier le code]

Les peuples parlant les dialectes anglo-frisons et Vieux saxon habitaient des régions voisines ; les confins de leurs territoires finirent par former un carrefour linguistique, ce qui explique les traits communs à ces deux sous-groupes de parlers germaniques[4]. Mais malgré leur communauté d'origine, l'anglais et le frison ont beaucoup divergé, d'une part à cause du poids du vieux-norrois et du français sur l’anglais, et d'autre part à cause de l'influence considérable du bas-francique et du bas saxon sur le frison. C'est pourquoi le frison est beaucoup plus proche aujourd'hui du néerlandais et des dialectes bas allemands géographiquement voisins, que de l'anglais ; il s'inscrit ainsi dans le continuum linguistique des langues germaniques continentales, alors que le lexique de l’anglo-saxon est imprégné de racines scandinaves et latines.

Variété morphologique des dialectes anglo-frisons[modifier | modifier le code]

Voici les noms des chiffres dans différentes langues anglo-frisonnes:

Langue 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Anglais one two three four five six seven eight nine ten
Scots ane
ae[5]
twa three fower five sax seiven aicht nine ten
Yola oan twye dhree vour veeve zeese zeven ayght neen dhen
Ouest-frison ien twa trije fjouwer fiif seis sân acht njoggen tsien
Frison du Saterland aan twäi
twäin
twoo
träi fjauwer fieuw säks soogen oachte njugen tjoon
Nord-frison (dialecte éteint) iinj
ån
tou
tuu
trii
tra
fjouer fiiw seeks soowen oocht nüügen tiin

Comparaison des lexiques anglo-frison, néerlandais et allemand[modifier | modifier le code]

Frison Anglais Néerlandais Allemand
dei day dag Tag
rein rain regen Regen
wei way weg Weg
neil nail nagel Nagel
tsiis cheese kaas Käse
tsjerke church
kirk (Écosse)
kerk Kirche
tegearre together samen
tegader (archaïque)
zusammen
sibbe sibling sibbe Sippe
kaai key sleutel Schlüssel
ha west have been ben geweest bin gewesen
twa skiep two sheep twee schapen zwei Schafe
hawwe have hebben haben
ús us ons uns
hynder horse paard
ros (vieilli)
Ross / Pferd
brea bread brood Brot
hier hair haar Haar
ear ear oor Ohr
doar door deur Tür
grien green groen Grün
swiet sweet zoet süß
troch through door durch
wiet wet nat nass
each eye oog Auge
dream dream droom Traum
it giet oan it goes on het gaat door es geht weiter/los

« Anglo-frison » ou « Ingvaeonique » ?[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Ingvaeonique.

L’Ingvaeonique, ou germanique de la mer du Nord, est un groupe hypothétique de langues germaniques occidentales incluant le vieux frison, le vieil anglais et le vieux saxon[6].

Il ne s'agissait pas, dans l'esprit des chercheurs, d'une proto-langue monolithique, mais plutôt d'un groupe de dialectes étroitement apparentés ayant évolué de façon à peu près uniforme[7]. Le promoteur de ce regroupement est le linguiste et philologue allemand Friedrich Maurer (en) (1898–1984) qui, dans Nordgermanen und Alemannen (1942), propose cette alternative à la généalogie stricte qui prévalait depuis le XIXe siècle sous l'impulsion d'August Schleicher, et qui postulait l’existence d’un « groupe anglo-frison[8]. »

Notes[modifier | modifier le code]

  1. a et b code générique
  2. L'autre étant le groupe allemand
  3. D'après Robert D. Fulk, Approaches to Old Frisian Philology, Amsterdam, Rodopi, coll. « Amsterdamer Beitrage zur Alteren Germanistik »,‎ , 360 p., « The Chronology of Anglo-Frisian Sound Change », p. 185
  4. Le linguiste allemand Friedrich Maurer rejetait l'anglo-frison comme une catégorisation désuète des langues germaniques. Il proposait de lui substituer le concept d'Ingvaeonique, ancêtre hypothétique commun au vieux frison, au Vieil anglais et au vieux saxon.
  5. L'adjectif épithète (précédant un nom) prend la désinence ae /eː/, /jeː/ : cf. à ce propos William Grant et James Main Dixon, Manual of Modern Scots, Cambridge University Press,‎ , p. 105.
  6. On y inclut aussi parfois le flamand occidental. Cf. Bremmer (2009:22).
  7. Pour une revue exhaustive des isoglosses et de leur évolution dans le temps, cf. Voyles (1992).
  8. Friedrich Maurer (chaire de Philologie Germanique et de Linguistique)

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Anglo-Frisian_languages » (voir la liste des auteurs).
  • Friedrich Maurer, Nordgermanen und Alemannen: Studien zur Sprachgeschichte, Stammes- und Volkskunde (1942), Strasbourg: Hünenburg.

Articles connexes[modifier | modifier le code]