Search Direct User 100 Zoom Quiz ? Libération Diamond clock xml netvibes live anciens-numeros data desintox diapo edito election-2017 election essentiel generique idee jo next portrait radio son alerte top-100 star une video scroll Facebook Whatsapp Twitter insta vine later glass Mail print Facebook Instagram Twitter Calendar download cross zoom-in zoom-out previous next truck visa mastercard user-libe user-doc user-doc-list user-mail user-security user-settings user-shop user-star Ruban abo Losange orange List check Most read Ptit Libé sport blog voyage
Dossier
SOS Méditerranée
Tous les articles
Elections américaines 2016
Tous les articles
MH370, deux ans de mystère
Tous les articles
Migrants, réfugiés... face à l'exode
Tous les articles
Un mois dans la vie des femmes
Tous les articles
Top
1

Avec la trêve en Syrie, les taxis espèrent relancer leurs affaires

2
Liberté de la presse

«Jour de honte» pour la presse turque, muselée par le pouvoir

3
Procès du siècle

La découverte d'un couteau pourrait relancer l'affaire O.J. Simpson

4

Slovaquie: Fico surfe vers la victoire sur la vague antimigrants

5
Carnet

Le peintre grec Tetsis est mort à l'âge de 91 ans

    Enquête

    Enquête sur les réseaux de la compagnie : Elf, banquier du pétrole et de la guerre en Afrique.

    Par et

    Créée dans les années 70, la Fiba, banque contrôlée par Elf et le président du Gabon, brasse en coulisses les millions de l'or noir.

    L'«affaire Dumas», si tant est qu'elle débouche sur une quelconque mise en cause du président du Conseil constitutionnel, ne constitue qu'une partie de «l'affaire Elf». On oublie en effet trop souvent que c'est en cherchant à comprendre comment et pourquoi l'entreprise pétrolière était venue au secours du groupe textile Biderman que la juge Eva Joly est tombée sur une foultitude d'agissements délictueux commis par des salariés de l'entreprise. Sur ce seul volet, une dizaine de dossiers (abus de biens sociaux, détournements de commissions,...) font à ce jour l'objet d'une information judiciaire. Au point de départ, en 1995, le personnage central s'appelle Loïk Le Floch-Prigent, l'ancien patron d'Elf. Trois ans et une lettre anonyme plus tard (lire p 4), d'autres noms sont venus alimenter la chronique. Certains ont connu ou connaissent la prison, d'autres sont en fuite et chaque semaine apporte son lot d'informations nouvelles. L'affaire part maintenant dans tous les sens, en France certes, mais surtout en Suisse et à Taiwan. Le montant des commissions occultes gonflent ­ sur ce seul volet on doit atteindre au bas mot les 600 millions de francs ­ et l'ampleur des malversations ont d'ores et déjà des allures de scandale. Mais cette «affaire Elf-Biderman» n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan des agissements du groupe pétrolier dont le chiffre d'affaires dépassait en 1996 les 232 milliards de francs. Non content de faire la pluie et le beau temps en Afrique depuis des décennies, Elf s'occupe aussi de jouer les intermédiaires entre un chef d'Etat et des vendeurs d'armes. L'attitude de la Fiba ­ une banque contrôlée par Elf ­ durant la guerre civile congolaise (lire ci-contre) ne manque pas de surprendre. Elf en prestataire de services pour le compte de Thomson dans l'affaire des frégates à Taiwan, Elf en soutien de Biderman, Elf au coeur d'un trafic d'armes" En 1996, Elf a tout de même eu le temps d'extraire 779000 barils de pétrole par jour .

    C'est la banque la plus secrète de Paris, celle des VIP fortunés de l'Afrique pétrolière. Depuis sa création en 1975, son siège social est installé au 30 de l'avenue George V, à un jet de pierre des Champs-Elysées. Mais la Banque française intercontinentale ­ la Fiba, selon l'acronyme curieusement dérivé de l'anglais ­ n'est pas seulement bien placée. Elle est sans doute la plus petite banque du monde à brasser, avec si peu de personnel, autant de centaines de millions de dollars. Seulement deux succursales à l'étranger, toutes deux en Afrique: l'une à Libreville au Gabon, l'autre à Brazzaville au Congo. Discrétion. Autre particularité, et ceci explique cela: la Fiba est la banque de la compagnie Elf et du président gabonais Omar Bongo, au pouvoir depuis trente ans. Aucun communiqué de presse, jamais une publicité. Après maintes sollicitations à la fois du directeur général de la Fiba, Pierre Houdray, et de la présidente de la banque, Bernadette de Bonrepos, le département «communication» d'Elf nous a opposé une fin de non-recevoir: «On ne parle pas de la Fiba.» Celle-ci travaille à guichets fermés. Pourtant, dans l'éponge d'or noir qu'est le golfe de Guinée, la Fiba s'occupe des opérations d'Elf.

    La «banque africaine» d'Elf n'a jamais retenu l'attention, ni des instances de contrôle bancaire en France, ni de la justice qui enquête depuis trois ans sur les circuits financiers de la compagnie pétrolière. «Raison d'Etat oblige, les abus de biens sociaux et les commissions versées sont présentés comme des dérives individuelles», commente un cadre d'Elf devant le feuilleton judiciaire qui, après avoir valu de la prison préventive à l'ancien PDG Loïk Le Floch-Prigent de juillet à décembre 1996, vient d'éclabousser Roland Dumas, l'ancien ministre socialiste des Affaires étrangères. «Personne n'ose toucher à l'infrastructure. C'est comme si on voulait restaurer le Centre Beaubourg sans toucher à la tuyauterie»" Dotée d'un capital de 60 millions de francs, la Fiba appartient à 50,9% à des privés gabonais, à 42,5% au groupe Elf et, pour le restant, à des partenaires très minoritaires comme Indosuez ou la petite banque française OBC (Odier-Bungener-Courvoisier). Les «privés gabonais» sont en fait Omar Bongo, qui détient lui-même 15,19% et trois de ses enfants, dont Pascaline Bongo, directrice du cabinet présidentiel à Libreville, et principale «opératrice» des comptes de la Fiba. Par une disposition statutaire attribuant des droits de vote double aux administrateurs représentant Elf, la Fiba est cependant placée sous le contrôle effectif du groupe pétrolier. Jusqu'à l'arrivée à la tête d'Elf de Philippe Jaffré en août 1993, la présidence de la Fiba avait été assurée par un proche d'André Tarallo, celui qui fut pendant un quart de siècle le «Monsieur Afrique» d'Elf, longtemps président d'Elf Gabon et qui conseille aujourd'hui, à titre privé les chefs d'Etat de plusieurs pays pétroliers en Afrique: Gabon, Congo, Angola, Cameroun. Philippe Jaffré, après son installation au 44e étage de la Tour Elf, a placé à la tête de la Fiba sa propre confidente, Bernardette de Bonrepos, qui occupe le bureau à côté du sien. Rien de ce qui se passe à la Fiba ne lui est donc étranger.

    «Une idée de Bongo». Pourquoi Elf et ses partenaires africains ont-ils éprouvé le besoin, au milieu des années 70, d'ouvrir leur propre guichet financier? «C'était l'idée de Bongo, qui voulait une banque», affirme un témoin de l'époque. Le père fondateur aurait été «feu le gouverneur Plas de la Banque européenne d'investissements, un dignitaire de la Grande Loge de France». La Fiba est très vite devenue la «cagnotte» des dirigeants d'Elf et de la nomenklatura pétrolière au Gabon, puis au Congo voisin. A la belle époque de la flambée des cours pétroliers et du recyclage des pétrodollars surabondants, la Fiba s'est également imposée comme la banque des sociétés de portefeuille d'Elf Gabon, la CPIH et la Sofipa. Ces deux sociétés ont porté d'énormes participations, comme dans le groupe textile de Maurice Bidermann, aujourd'hui dans le collimateur de la justice. Dans le cadre de «l'assainissement» du groupe Elf, elles ont été toutes deux liquidées et leurs dernières participations vendues à la BNP. Mais l'indispensable Fiba a survécu" Pas un transfert de fonds délicat, pas une opération concernant la dette «gagée» sur la future production pétrolière ne lui échappe. La Fiba a également créé la Fibaco, spécialisée dans la location immobilière, et la Fibaviat, qui a longtemps géré la flotte des avions Falcon du groupe Elf.

    Audit à surprises. Si la Banque de France semble avoir ignoré cet établissement si particulier, ce ne fut pas le cas de la Commission bancaire de l'Afrique centrale (Cobac). Cet organisme régional a tenté d'auditer, en 1994, la succursale de la Fiba à Brazzaville. Le rapport de ses experts est digne d'un roman policier: «Sans doute en raison de l'impératif de confidentialité absolue qui caractérise les opérations menées par cet établissement, l'organisation apparaît très centralisée: le pilotage du système informatique est assuré par le directeur lui-même, à sa propre résidence.» Autre surprise pour les experts: le siège parisien verse à sa succursale au Congo une «commission sur affaires» annuelle de l'ordre de 100 millions de francs, «sans que l'on connaisse précisément ce que celle-ci rémunère comme prestations». A l'époque, la succursale ne représentait en effet que 1,6% de la collecte épargne et 0,06% de l'activité crédit au Congo" Conclusion du rapport de la Cobac: la Fiba-Congo «apparaît, à l'analyse, fragile au regard des critères qui fondent l'octroi d'un agrément de banque. Son activité s'apparente en effet plus à celle d'un bureau de représentation qu'à celle d'un établissement bancaire».

    Valises. Et que dire de la succursale au Gabon, dont le sous-sol sert, selon de nombreux témoignages concordants, au transbordement de valises, voire de cantines d'argent? Sinon que, là encore, comme à la maison mère à Paris, nul n'a voulu répondre à nos questions .

    Antoine GLASER , Stephen SMITH
    Dans le direct
    Un mot à ajouter ?