Des films fluorescents qui changent de propriétés quand on les étire

Par Gaëlle Degrez / Publié le 19 mai 2015

Imaginez des écrans flexibles et antireflets par exemple, ou des dispositifs d’éclairage dont on peut moduler l’intensité en fonction de leur étirement. Ces objets futuristes pourraient devenir réalité grâce aux travaux d’une équipe du Laboratoire de Physique des Solides (LPS-UPSud/CNRS).

Des chercheurs du LPS viennent en effet de mettre au point un matériau composite qui est à la fois lumineux et souple et dont la luminosité change quand on tire dessus. Pour y parvenir, ils ont utilisé des particules fluorescentes synthétisées au laboratoire : il s’agit de plaquettes nanométriques d’un semi-conducteur, le séléniure de cadmium (CdSe).  Leur particularité est d’avoir une géométrie plate qui leur confère plusieurs avantages par rapport aux formes sphériques plus usuelles. D’une part, elle leur permet de fournir une fluorescence très intense et bien définie. D’autre part, la lumière émise par ces plaquettes est polarisée.

Les chercheurs ont ensuite déterminé qu’en combinant ces plaquettes avec une matrice polymère de type SBS (pour polystyrene (PS) – polybutadiene (PB) – polystyrene), ils obtiendraient une configuration optimale d’un matériau dont ils pourraient contrôler la polarisation. Le SBS est un élastomère thermoplastique : c’est un copolymère constitué d’une alternance de domaines nanométriques de PS et de PB qui peut être facilement mis en forme et étiré. Le polybutadiène étant particulièrement compatible avec le ligand des plaquettes de CdSe, ils ont montré que les plaquettes sont confinées dans les domaines PB sous la forme d’empilements. L’agrégation macroscopique, souvent constatée dans ce type de matériau, est donc ici évitée.

Induire de nouvelles propriétés optiques dans les matériaux

L'équipe a fabriqué des films hybrides et les a étiré jusqu’à des taux de déformation de 100%. Les chercheurs ont ainsi montré que sous étirement, ils orientaient non seulement les domaines du copolymère mais aussi les empilements de plaquettes (cf figure). C’est alors tout le film qui émet une lumière polarisée lorsque l’on tire dessus. On le voit bien sur l’image de droite, où le film est observé à travers un polariseur orienté parallèlement puis perpendiculairement au film. L’orientation des plaquettes est réversible et disparaît lorsque l’on arrête de tirer sur le film. Ainsi, il est possible d'induire des propriétés optiques spécifiques dans des matériaux composites et les contrôler précisément.

Référence :
Strain-controlled fluorescence polarization in a CdSe nanoplatelet / block copolymer composite
E. Beaudoin, B. Abecassis, D. Constantin, J. Degrouard and P. Davidson.
Chem Commun 51, 4051-4054 (2015).

 

Contact : Emmanuel Beaudoin (emmanuel.beaudoin @ u-psud.fr)

Dernière modification le 19 mai 2015