Georges Guingouin
Georges Guingouin est né
le 2 février 1913 à Magnac-Laval (Haute-Vienne).
Son père, sous-officier de carrière, est mort
pour la France le 28 août 1914 à Bapaume. Sa
mère était institutrice.
Après des études
à l'Ecole primaire supérieure de Bellac, il
intègre l'Ecole normale d'Instituteurs de Limoges.
Appelé sous les drapeaux en 1934 comme secrétaire
d'Etat-Major à la 6e Compagnie du Train à
l'Ecole militaire de Paris, il est ensuite nommé au
poste d'instituteur à Saint-Gilles-les-Forêts
(Haute-Vienne).
Il sera en outre secrétaire
du rayon communiste d'Eymoutiers comprenant les cantons de
l'est du département.
Mobilisé le 23 août
1939 au groupe de transport 120/124, blessé le 17 juin
1940, il sera évacué à l'Hôpital
Sainte Madeleine de Moulins. Le l8 juin, la ville est attaquée
par les Allemands.
Se refusant à être
fait prisonnier, Georges Guingouin rejoint sous la mitraille
le poste de secours de l'unité qui défendait
la ville et se fait évacuer sur Montluçon. C'était
le jour même où le général de
Gaulle, de Londres, lançait son célèbre
Appel.
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Georges Guingouin
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Revenu dans ses foyers et remis
de ses blessures, Georges Guingouin organise la résistance
dès juillet 1940, forme des groupes clandestins, édite
et diffuse des tracts contre le gouvernement de Vichy, confectionne
des fausses cartes d'identité, mais il se trouve en désaccord
avec la ligne politique préconisée par Jacques Duclos.
Il refuse de reproduire et diffuser
la Vie du Parti n°9 de septembre 1940 qui déclare : "Nous
devons être sans haine vis-à-vis des soldats allemands.
Nous sommes contre de Gaulle et le clan capitaliste dont les intérêts
sont liés à Vichy."
En février I94I, il échappe
de peu aux inspecteurs de police venus l'arrêter. En avril,
il "prend le maquis", se réfugiant dans une sapinière
de la commune de Soudaine-Lavinadière en Corrèze.
Gabriel Roucaute, l'un des dirigeants du Parti communiste clandestin
de la zone sud, le considère comme "le fou qui vit
dans les bois." A la tête d'une imprimerie clandestine,
Georges Guingouin vit dans les plus dures conditions, tantôt
dans des cahutes, des maisons inhabitées ou même dans
des souterrains. Il organise des distributions massives de tracts
lors des grands rassemblements que sont les foires. Cette activité
est signalée à Vichy par la police et le maréchal
Pétain y fera écho en direct à la radio, le
12 août I94I, disant qu'il "sent un vent mauvais se
lever dans toute la France."
Le 1er octobre I94I, à Saint-Gilles-les-Forêts,
il enlève un stock de cartes d'alimentation à la mairie.
Le 21 janvier 1942, il est condamné par contumace par le
Tribunal militaire de la 12e Région aux travaux
forcés à perpétuité.
Il crée les premiers groupes
armés qu'il baptise "Francs-Tireurs." En mai 1942,
Roucaute le somme d'arrêter son action considérant
qu'elle doit être menée essentiellement dans les centres
urbains. Devant son refus, on envisage de le supprimer. Incroyable
situation qui l'amène à envisager de partir à
Londres. Cependant, Georges Guingouin ne peut se résoudre
à abandonner les hommes qu'il a organisés en groupes
de combat. A la fois chef et soldat, il va diriger de nombreuses
actions de sabotage. L'économie de guerre allemande est frappée
par la destruction de deux chaudières à l'usine de
régénération de caoutchouc Wattelez à
Limoges le 8 mai 1943. Puis une atteinte sévère est
portée aux communications de l'armée allemande, le
12 juillet 1943, par le sabotage du câble téléphonique
souterrain reliant la base des sous-marins de Bordeaux à
l'Etat-Major de la Kriegsmarine à Berlin.
Plus retentissant encore, l'enlèvement
de la Commission d'armistice franco-allemande de Limoges, le 28 mars I944. Le Feldmarschall von Rundstedt informe Hitler qui prend
la décision, le 6 avril I944, de retirer du front de l'est
la division blindée SS Das Reich et de l'envoyer dans
le Tarn-et-Garonne afin d'attaquer les forces limousines au moment
du débarquement allié, erreur stratégique qui
sera fatale à Hitler omettant ainsi de renforcer son front
de Normandie où se trouvent seulement trois divisions blindées.
Voulant terroriser les populations, cette division se rendra coupable,
après les pendaisons de Tulle, de la tragédie d'Oradour-sur-Glane
où les hommes furent fusillés, les femmes et les enfants
brûlés vifs dans l'église, mais elle perdra
son "héros", le Sturmbannführer Kämpfe
capturé par un détachement de la 1ère Brigade
du colonel Guingouin. Après de vaines recherches, la division
se dirigera vers la Normandie avec 48 heures de retard. Le généralissime
Eisenhower reconnaîtra que ce retard
a sauvé la tête de pont alliée et l'historien
allemand Hans Luther écrira que "cette division d'élite
n'a pas pu être placée en temps utile sur le front
de Normandie."
La région Est de la Haute-Vienne
était devenue une haute terre de résistance, désignée
par les Allemands eux-mêmes comme une "petite Russie"
car, à leur lutte patriotique les maquisards avaient joint
la défense des intérêts immédiats des
paysans. Face aux réquisitions, la plupart de ceux-ci avaient
gardé leur fourrage car, dès décembre 1942,
les botteleuses du Ravitaillement général avaient
été détruites, ainsi que leur blé, en
1943, les batteuses ayant subi le même sort. Enfin Georges
Guingouin s'était opposé ouvertement à l'autorité
de Vichy en signant de son nom les affiches du Préfet du
Maquis imposant un barème plus rémunérateur
pour les produits agricoles et obligeant les meuniers à revenir
à un taux de blutage normal. Le pain blanc était revenu
sur les tables et les paysans reconnaissants disaient : "Que
lo Maquis qui nous baillen lou po blanc." Sera ainsi créée
une condition essentielle pour que la lutte armée prenne
force et vigueur.
Objet d'une attaque allemande du 17
au 24 juillet 1944, la 1ère Brigade du colonel Guingouin
perdit 97 tués et blessés infligeant à l'ennemi
des pertes triples, soit 342 soldats tués et blessés.
C'était une victoire pour nos armes au contraire des combats
du Mont Mouchet et du Vercors.
Le 3 août, le colonel Guingouin
devenait chef départemental de la 4e Brigade FFI.
Il prépara les opérations qui devaient amener la libération
de Limoges. Ayant appris que le chef de la Gestapo se promettait
de fusiller les patriotes emprisonnés avant de partir, alors
que 2 863 résistants avaient déjà donné
leur vie, il procéda à une manuvre d'encerclement.
In extremis, il réussit à obtenir la capitulation
du général Gleiniger, mais ce dernier dut faire face
à la rébellion du 19e régiment de
police SS. Profitant du fait que les maquisards avaient abandonné
leurs postes de combat pour entrer pacifiquement dans la ville,
cette unité s'échappa vers la Creuse ayant assassiné
le général Gleiniger.
Au soir du 21 août se rendait
l'autre partie de la garnison comprenant 12 officiers et 350 hommes.
Au lendemain de la libération de Limoges 20 000 combattants
en Haute-Vienne sont sous les ordres du colonel Guingouin, mais
le 20 novembre 1944, celui-ci est victime d'un accident d'automobile.
Gravement blessé, il est hospitalisé puis sera réformé
le 4 avril 1945.
Elu maire de Limoges de 1945 à
1947, il reprend ensuite son métier d'instituteur dans l'Aube.
L'homme que le général
de Gaulle a présenté dans la citation qu'il lui a
accordée comme "une des plus belles figures de la
Résistance" va être victime d'une machination
montée par deux policiers qui, sous l'occupation, l'avaient
poursuivi en vain. Sur le plan juridique, on trouvera un magistrat
ayant été sanctionné pour son attitude envers
la Résistance et un autre l'ayant condamné par deux
fois, le 27 juillet et le 5 octobre 1943,à 20 ans de travaux
forcés !
Incarcéré la veille
de Noël 1953, il sera victime, en prison, de graves sévices
mais au lieu d'être amené à l'hôpital
de Brive, il sera transféré dans une autre prison,
à Toulouse, où il ne pourra recevoir les soins nécessités
par son état. La plus grande partie de la presse, heureuse
de pouvoir se mettre un grand résistant sous la dent, s'en
donne à cur joie et le député socialiste
Jean Le Bail, ancien munichois, dans son journal Le Populaire
du Centre, pousse l'ignominie jusqu'à publier des articles
intitulés "Limousin, terre d'épouvante"
qui le couvrent de boue.
Sous la pression du Comité
départemental de la Résistance de Toulouse, le magistrat
instructeur demandera à trois experts de l'examiner. Ceux-ci,
dans leur rapport, ayant constaté les traces des sévices
subis, écriront que "l'état de G. Guingouin
inspire de réelles inquiétudes pour sa vie."
Ainsi, sous la IVème République,
il s'en est fallu de peu pour qu'un Compagnon de la Libération
connaisse le même sort que Jean Moulin
qui mourut à la suite des coups de la Gestapo. Il lui
faudra attendre plus de 5 ans pour que le magistrat chargé
de l'accusation déclare, le 13 novembre I959, à Lyon,
"ne pas comprendre, en son âme et conscience, qu'on
ait envisagé des poursuites contre Georges Guingouin."
Fin d'un long calvaire, ce dernier bénéficiera enfin
d'un non-lieu.
Lieutenant-colonel honoraire, Georges
Guingouin prend sa retraite en 1968.
Georges Guingouin
Commandeur de la Légion d'Honneur
Compagnon de la Libération - décret du 19 octobre
1945
Croix de guerre 39/45 avec palme
Médaille de la Résistance avec rosette
King's Medal for Courage (GB)
Acte de Reconnaissance de la Nation américaine
Médaille Garibaldienne
Publications :
Documents et récit
sur la libération de la ville de Limoges, Limoges 1945
Nouvelle de Prison, Limoges 1955
Quatre ans de lutte sur le sol limousin, Limoges
Georges Guingouin, Premier maquisard de France, Limoges
1983
Dernière mise à jour : le 5 avril 2005
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