Asbl Julie et Mélissa, N'oubliez pas! - Rue Gustave Baivy, 30/6 - 4101 Jemeppe-sur-Meuse
Tél. : 04/231.24.11 - Fax: 04/231.20.93 - E-mail: julie.melissa@tiscali.be - Compte : 240-0285928-73
Présentation
Actualité
Forum
Agenda
Pour mémoire...
Humeurs
Galerie
Publications
Liens
Plan du site
Pour mémoire...
Julie et Mélissa. N’oubliez pas.
Arthur Haulot, poète, résistant et ancien prisonnier politique
La parole à Marie-Noëlle Bouzet
Chère Elizabeth
Pas de cérémonie pour Elizabeth, ce samedi 17 juillet
L’absence des Russo au procès ou la dénonciation du déséquilibre du rapport de forces
Pour rappel...
"Le procès d’Arlon doit marquer une rupture"
Chronique d’une enquête étouffée (10)
Chronique d’une enquête étouffée (9)
Chronique d’une enquête étouffée (8)
Chronique d’une enquête étouffée (7)
Faites entrer l’accusé, ou « on voudrait bien être impartial, mais on n’y arrive pas »
Débat : "Procès Dutroux - Procès bidon ?"
Chronique d’une enquête étouffée (6)
Chronique d’une enquête étouffée (5)
Chronique d’une enquête étouffée (4)
Chronique d’une enquête étouffée (3)
Vous n’avez pas oublié Julie et Mélissa
"Au nom de leur loi"
24 juin 1995 - 24 juin 2003 : N’oubliez pas Julie et Mélissa
Interview de Carine et Gino Russo, deux Friteurs d’Or
Affaire Dutroux, Nihoul et consorts : Les chemins de la procédure pénale
Arrêt de la chambre des mises en accusation de Liège : Dutroux n’est pas un ’pervers isolé’
La croisade des enfants
"La force tranquille du Vif-l’Express"
Chronique d’une enquête étouffée (2)
Chronique d’une enquête étouffée (1)
Quand la justice liégeoise demande des comptes à une victime
Ordonnance de la Chambre du conseil de Neufchâteau : il n’y a pas d’association de malfaiteurs... ou si peu !
Conséquences de l’ordonnance du président Moinet sur le dossier Julie et Mélissa
Le procès Dutroux : Carine et Gino Russo, sept ans après la disparition de Mélissa
Mensonges de Mme THILY sur le dossier "Julie et Mélissa" : SUITE
Motion déposée par Vincent Decroly pour l’ouverture d’un dossier disciplinaire à l’encontre d’Anne Thily
Démocratie et criminalité organisée : les limites du droit
Interpellation du ministre de la Justice, Marc Verwilghen, par Vincent Decroly à propos du Procureur général de Liège Anne Thily
"Repenser le crime" : conférence-débat par Jean de Maillard
La criminalité organisée et l’évolution du droit de la preuve
Les suites de la procédure avant le procès d’Assises Dutroux & co
Observations juridiques sur la défense de Marc Dutroux par Me Pierre
La plaidoirie de Julien PIERRE ou le détournement des règles de procédure au bénéfice du crime
Quand les avocats de la défense font le procès des victimes
Neufchâteau : Les parties et leurs avocats
Notes synthétiques sur le réquisitoire du procureur du Roi Bourlet - Chambre du Conseil de Neufchâteau du 20 septembre 2002
Code Pénal
La raison d’Etat
Gino et Carine Russo : « Le procès n’est pas une finalité »
Le réquisitoire de Michel Bourlet

Admin

Chronique d’une enquête étouffée (2)
DEUXIEME PARTIE : L’ERE LANGLOIS

le 31 mars 2003 - Version imprimable de cet article et de son forum

Suite de notre relecture de l’affaire Dutroux et Cie à travers la presse.
Nous attirons particulièrement votre attention sur le fait que cette chronologie ne se veut pas exhaustive. Nous vous signalons aussi que l’épisode précédent est toujours en ligne dans la rubrique "POUR MEMOIRE"

Octobre 1996

15 octobre


-  Le ministre de la Justice, Stefaan De Clerck, a décidé d’adjoindre un deuxième juge d’instruction à M. Langlois, successeur du juge Connerotte, pour l’aider dans l’instruction des dossiers. Il déclare à la presse que "le juge Connerotte pourra toujours être utile d’une manière ou d’une autre dans les enquêtes sur les réseaux pédophiles"

Nos observations : Par la suite, on dira au contraire que le juge Connerotte ne pourra plus s’occuper de tels dossiers. Les raisons invoquées ne sont pas très claires…

-  "La population exprime son indignation". Les manifestations se poursuivent au lendemain du dessaisissement du juge Connerotte par la Cour de Cassation. A Liège, plusieurs centaines de personnes provenant d’entreprises publiques et privées (Ferblatil, Cockerill, la FN,…) se sont rassemblées devant le palais de Justice dont la façade a été copieusement arrosées par les pompiers. image 161 x 48 - 1.2 ko A Bruxelles, de nombreux ouvriers de chez Volkswagen ont débrayé pour rejoindre le palais de Justice où une vingtaine de personnes ont entamé un sit-in qu’elles comptent poursuivre jusqu’à la marche blanche, prévue le 20. Des arrêts de travail sont également observés à la SNCB, chez Belgacom, dans plusieurs administrations communales et mutualités. En Brabant wallon, ce sont les chauffeurs des TEC qui ont manifesté leur mécontentement devant le palais de Justice de Nivelles, applaudis par de nombreux habitants. Même mobilisation dans la région de Namur, Mons, Charleroi, ainsi qu’en Flandre.

-  A l’issue d’un entretien avec le ministre de la Justice, les familles des victimes annoncent qu’elles ne feront pas opposition à l’arrêt dessaisissant le juge Connerotte.

Nos observations : Il faut savoir en effet que durant cet entretien, le ministre en personne les en a dissuadé, leur demandant de comprendre qu’il s’agit là d’une sage décision.
Une première tentative de conflit vient d’ailleurs d’être créée entre les différentes familles, puisqu’en dessaisissant uniquement le juge Connerotte et non le procureur du Roi Bourlet, la Cour réussit à convaincre certaines parties civiles (dont la famille Benaïssa) que le principal est sauf pour garantir la bonne continuité de l’enquête. Les familles Russo, Lejeune et Marchal ne sont pas de cet avis mais, comprenant, par l’attitude du ministre de la Justice, que ce jugement est une décision concertée entre pouvoirs judiciaire et politique, elles ne souhaiteront pas foncer tête baissée dans le piège de la désunion des parties civiles qui leur est d’ores et déjà tendu et se rallient à la position commune des autres familles. Dans le délai d’un mois imparti par la loi pour effectuer ce recours, la famille Benaïssa et son avocat changeront néanmoins d’avis pour se ranger à celui des Russo, Lejeune et Marchal. Fortes de cette majorité retrouvée, les quatre familles iront malgré tout en opposition au terme de ce délai (à la mi-novembre 96).

-  Des rumeurs circulent à propos de Benoît Dejemeppe : le procureur du Roi de Bruxelles serait intervenu à Neufchâteau concernant la détention d’Annie Bouty. Elles sont démenties par l’intéressé qui dit n’avoir rencontré Me Bouty qu’à de rares occasions lorsque celle-ci défendait Michel Nihoul dans le dossier SOS Sahel dont il assurait l’instruction.

-  Fort de son succès devant la Cour de Cassation, Me Julien Pierre s’en prend au juge Connerotte dans la presse, déclarant que celui-ci "n’a jamais été le véritable patron de son instruction. Je ne dis pas qu’il a commis personnellement des dérives, mais il a en tout cas laissé d’autres en commettre pour en arriver à la plus gigantesque manipulation de l’opinion publique que j’aie jamais connue en vingt ans de carrière."
Me Pierre estime en effet que le juge d’instruction "s’est laissé entraîner dans la sale guerre des polices" et, bien qu’il ne lui prête pas d’idées machiavéliques, qu’il "n’a pas montré assez d’indépendance par rapport à la ’pieuvre’ qui l’entourait que pour les éviter".

Nos observations : On aurait aimé que Me Pierre soit plus explicite quant à cette ’pieuvre’.

D’autre part, l’avocat de Dutroux exprime la confiance qu’il place dans le nouveau juge d’instruction : "Si c’est bien M. Langlois qui le remplace, je le connais assez pour dire que c’est un magistrat tout à fait remarquable et qu’il sera à même de mener correctement ce difficile dossier".

-  Pour le juge Connerotte lui-même, "l’esprit" de l’enquête est sauf.

16 octobre


-  Stefaan De Clerck dément avoir exercé une quelconque pression sur les parents des victimes pour les mener à renoncer à leur opposition à l’arrêt de la Cour de cassation. Devant la commission de la Justice de la Chambre, il explique sa rencontre de la veille avec les magistrats de Neufchâteau : outre le renfort d’un second juge d’instruction, le ministre annonce de renforcer les enquêteurs (qui sont déjà 350, policiers et gendarmes, à travailler en permanence), dans la mesure du possible. Il précise enfin que 5000 cassettes vidéo ont été saisies dans le cadre des différentes affaires et qu’aucune n’a disparu : "une équipe est en train de les visionner toutes les unes après les autres, mais c’est un travail de très longue haleine". Une aide étrangère a d’ailleurs été sollicitée.

Nos observations : A ce jour, le procureur du Roi lui-même ne peut plus dire combien de K7 exactement ont été saisies et visionnées. En outre, les opérations de visionnage se sont passées dans des conditions assez nébuleuses, pour mener à des résultats aussi étranges que lacunaires.

-  La gendarmerie estime à 60 millions (de francs belges) par mois le coût de l’enquête "Dutroux-Nihoul".

-  Partout dans le pays, les manifestations contre le dessaisissement du juge Connerotte se poursuivent.

-  La Commission européenne propose une série de mesures urgentes pour empêcher la diffusion de pornographie enfantine sur le Web. Elle compte saisir le G7 (regroupant les pays les plus industrialisés du monde) pour que des mesures immédiates soient examinées…

Nos observations : La diffusion de pornographie enfantine sur le Web continue de se porter pour le mieux en cette année 2003.

17 octobre


-  La Dernière Heure titre "Comment la juge Doutrèwe a tué l’enquête" et "Julie et Mélissa hors priorités", faisant ainsi écho au rapport du Comité P qui met sérieusement en cause la capacité de la juge liégeoise à mener l’enquête ainsi que son intérêt pour le sort des fillettes. image 161 x 48 - 1.2 ko Le Comité P constate notamment que les recherches ont été menées "dans une sorte de flou artistique désastreux". Au point qu’il est quasiment impossible de répondre à des questions telles que celle de savoir quand la ’piste Dutroux’ a été évoquée pour la première fois.
Selon l’enquête (qui s’appuie sur des déclarations de policiers et de gendarmes) et toujours dans La Dernière Heure, "la juge Doutrèwe connaissait le nom de Dutroux au moins depuis le 16 août 1995", soit six semaines après la disparition de Julie et Mélissa. Cette mise en cause est néanmoins tempérée par le journal qui pose la question de la compétence du Comité P dont le rôle consiste à contrôler les services de police…

Nos observations : Il faut entendre par-là que la magistrature n’est censée rendre de compte à personne et surtout pas à être soumise au contrôle du Comité P. Sur base de la constatation de cette carence, sera créé plus tard (après la Commission d’enquête parlementaire sur les disparitions d’enfants) le Conseil supérieur de la Justice dont le rôle de contrôle de la magistrature restera néanmoins très limité. En outre, il sera lui-même composé presque essentiellement de magistrats et d’avocats.

-  Entendu à la Chambre des députés, le lieutenant général Deridder, chef de la gendarmerie, a déclaré que "la maréchaussée exclut toute faute dans l’enquête sur les disparitions", ajoutant que "Dutroux était, dès le départ, considéré comme un gros suspect". Pour lui, tant le parquet de Charleroi que la juge d’instruction de Liège ont constamment été tenus au courant des enquêtes concernant Dutroux.
Il a également cité "une anecdote éloquente" : ’Un gendarme de Grâce-Hollogne qui rédigeait, trois jours après la découverte des corps de Julie et Mélissa, un rapport sur l’enquête, y mentionnait qu’on retrouverait à Charleroi des traces de recherches sur Dutroux "dans le cadre de la disparition de Julie et Mélissa". La juge lui avait demandé de supprimer ces derniers mots : "Sinon ça va m’assassiner" , a-t-elle dit.’"

Nos observations : Pour rappel, nous sommes le 17 octobre 96 et les travaux de la commission d’enquête parlementaire n’ont pas encore débuté… Mais à la fin de ces travaux, le mystère sur la mise au courant de la juge d’instruction Doutrèwe ne sera pas éclairé. Il ne l’est toujours pas à ce jour.

-  Au Parlement, on commence à parler de sanctions.

-  Les chefs de toutes les formations – sauf le FN – s’accordent sur la "création d’une commission d’enquête spécifique chargée de l’enquête sur l’enquête dans l’affaire Dutroux" qui devra rendre son rapport au plus tard dans trois mois (avant la mi-janvier 97). Marc Verwilghen (VLD), déjà à la tête de la commission de la Justice, est désigné président "par éliminations en cascade", peut-on lire dans la presse. L’enquête sur l’enquête Cools est remise à plus tard.

-  J. Beaufays, directeur de l’Institut des Sciences politiques à l’Université de Liège, analyse les manifestations spontanées qui se déroulent aux quatre coins du pays depuis le dessaisissement du juge Connerotte. Il salue "l’intelligence des personnes, qualifiées généralement d’ordinaires, qui y participent" ainsi que les parents de Julie et Mélissa qui "malgré la pression et la complexité de ces affaires, réagissent toujours avec le mot qu’il faut". "Cela me conforte, poursuit-il, dans l’idée que les gens du peuple ne sont pas des imbéciles parce qu’ils ne détiennent aucune parcelle du pouvoir." "Nul ne peut dire, dit-il enfin, si ce mouvement pourra durer", mais il pense que "la reprise en main est en route…"

Nos observations : Propos on ne peut plus clairvoyants…

-  On apprend que le bâtonnier de Liège a ouvert, le 14 octobre, une enquête disciplinaire à l’encontre de Me Victor Hissel pour "son manque de recul et de réserve". On lui reproche entre autres d’avoir porté le t-shirt du comité Julie et Mélissa, lors de la conférence de presse des parents.

-  Gino Russo porte plainte contre le mouvement d’extrême gauche PTB qu’il accuse de détourner à son profit les noms de Julie et Mélissa. Le PTB a en effet annoncé qu’il serait présent à la manifestation prévue le dimanche 20 octobre et revendique le droit d’y apporter ses idées, ce qui va à l’encontre de la volonté des parents de bannir les calicots et drapeaux. Plusieurs syndicats ont, pour leur part, appelé leurs membres à participer, mais de manière discrète (c’est-à-dire sans calicot).

-  L’enquête sur le viol avec tentative de meurtre d’une jeune fille, commis le 20 novembre 1995, à Obaix, est relancée. On soupçonne une implication de Dutroux.

-  Le bourgmestre faisant fonction de Bruxelles, F. Thielemans, et le commissaire en chef Roland Van Reusel déclarent s’attendre à ce que "plusieurs dizaines de milliers de personnes" viennent défiler à Bruxelles, le 20 octobre. En matière de sécurité, ils annoncent un encadrement de la manifestation par 400 policiers, avec le soutien logistique et de réserve de quelques 1000 gendarmes.

18 octobre


-  Me Georges Dehousse (avocat, entre autres, de Marcel Cools), mis en cause pour être l’employeur d’un ouvrier soupçonné de pédophilie (Michel Ferette), "accuse les Russo et les Lejeune d’avoir mené leur propre enquête sur l’ouvrier en question" et de l’avoir molesté "sous la menace d’un couteau". Il entend ainsi "dénoncer l’utilisation des fonds récoltés par les familles pour financer des enquêtes parallèles".

-  Les parents des victimes lancent à nouveau un appel au calme pour la Marche blanche de dimanche. "Ce serait un échec pour nous si les enfants n’osaient pas venir", déclare Jean-Denis Lejeune. image 161 x 48 - 1.2 ko Gino Russo rappelle que "Julie et Mélissa sont là, au-dessus de nous, et qu’elles nous regarderont de là-haut". Quant à Marie-Noëlle Bouzet, elle en appelle "au sens des responsabilités des gens" pour qu’aucun débordement ne vienne gâcher la marche. Rappel du thème de la marche : "que la Belgique applique la Convention qu’elle a signée en 1991 sur les droits de l’enfant."

-  "Première incursion en terre carolorégienne" pour le juge d’instruction Langlois. Après un briefing au siège de la gendarmerie de Charleroi, le magistrat a visité la maison de Dutroux à Marcinelle. Il s’est ensuite rendu à Jumet, rue Daubresse, puis aux étangs Caluwart. Commentaire de La Dernière Heure : "De quoi rassurer l’opinion sur sa volonté de faire progresser une enquête qui a pris l’importance que l’on sait".

Nos observations : La question qui se pose, suite à ces articles de presse, est : En quoi ces visites très médiatiques du juge d’instruction sont-elles réellement rassurantes pour l’enquête ? D’emblée, le nouveau juge, contrairement à son prédécesseur, se mettra en avant dans la presse. Nommé juge d’instruction après avoir effectué un parcours politique au sein du PSC, il semble n’avoir pas pu rompre avec certaines pratiques politiciennes qui ne conviennent guère au rôle que doit, en principe, tenir un juge d’instruction.

-  Le tribunal des référés de Bruxelles donne raison aux parents de Julie et Mélissa contre le PTB qui appelait à manifester en même temps que la Marche blanche. En cas d’infraction, l’astreinte est fixée à 50 000 francs par jour et par infraction.

-  Table ronde au Palais Royal. Le Roi Albert II et la reine Paola accueillent les familles des victimes, aux côtés du ministre de la Justice et de plusieurs experts. Dans son discours d’introduction, le Roi affirme : "une clarté totale doit être faite sur ce drame, ses origines et toutes ses ramifications, et cela dans un délai raisonnable". A la sortie, les parents se déclarent globalement satisfaits, mais expriment également leur volonté de rester vigilants.

Nos observations : Ces rencontres ont été initiées par Marie-France Botte fraîchement anoblie à l’époque.

-  Plusieurs personnalités annoncent leur participation à la Marche blanche. Parmi eux, Jacques Mercier qui sera accompagné de Philippe Geluck et de quelques autres membres de l’équipe de l’émission de radio La Semaine infernale : "C’est la première fois que je vais défiler et c’est une occasion unique de se faire entendre". François Pirette y sera aussi, pour "être acteur et pas spectateur", déclare-t-il, tout comme Adamo, Pierre Rapsat ou encore le dessinateur Tibet.

-  A propos de la mobilisation citoyenne, le Premier ministre Jean-Luc Dehaene appelle une nouvelle fois à la réaction : " Toutes les forces démocratiques doivent œuvrer ensemble, au-delà de positions politiques et idéologiques, pour une société dans laquelle chacun, et surtout nos enfants, vivent en sécurité, dans laquelle l’argent ne permet pas de tout acheter, dans laquelle la justice est ferme, équitable et à visage humain, dans laquelle chacun peut s’épanouir pleinement. A chacun aussi de tout mettre en œuvre pour que la Convention des droits de l’enfant soit appliquée intégralement ".

Nos observations : A la date du 21 février 2003, soit plus de six ans plus tard, Le Soir publie, dans un article intitulé "Punir l’exploitation des enfants", les résultats encore très aléatoires du groupe de travail "Droits de l’enfant" au Sénat. A lire absolument pour mesurer l’écart entre les promesses gouvernementales d’octobre 96 en la matière et ce qu’il s’en est suivi comme effets.

-  Au bas d’un article du Morgen consacré à l’aspect "Nihoul" de l’enquête de Neufchâteau, on lit déjà que "l’impression est née que l’enquête sur Dutroux et Nihoul n’avance pas vraiment".

-  Philippe Toussaint, chroniqueur judiciaire et rédacteur en chef du Journal des procès, se fend, dans le Vif-l’Express, d’un long article intitulé "Pourquoi le dessaisissement". Morceaux choisis :
"Il n’y a pas lieu d’être très fier de tous les avis – pourtant réputés informés – qui ont été exprimés à propos de l’affaire Connerotte avant l’arrêt de la Cour de Cassation. Il en est tout autre des réactions populaires. Ces dernières me font chaud au cœur, tandis que certains avis me semblent consternants." Il poursuit : "Le plus affligeant, c’est sans doute à quel point on a menti aux gens. A quel point on leur a laissé croire, non seulement que la Cour de cassation pouvait ne pas dire le droit, mais, infiniment plus grave, que le cœur était en contradiction avec les faits et leur qualification juridique." P. Toussaint explique pourquoi, selon lui, "il était souhaitable de dessaisir le juge Connerotte" : "… je ne comprends pas qu’un juge enfreigne délibérément la loi. Ce juge-là me fait peur. Pour parler net, j’ai le sentiment que M. Connerotte a voulu faire une sorte de coup de force, se flattant qu’ayant derrière lui l’adhésion de tout un peuple on n’oserait pas le contrer". "On a menti aux gens en leur laissant accroire que MM. Connerotte et Bourlet avaient fait la démonstration qu’ils étaient capables de trouver la vérité, de casser l’espèce de complot qui, de l’affaire Cools aux assassinats organisés dans le cadre d’une commercialisation de la pédophilie, pèserait sur les enquêtes." Ou encore : "On trompe les gens en leur laissant croire que le dessaisissement d’un juge d’instruction est uniquement une affaire de respect vétilleux de la "lettre" de la loi…". Viennent ensuite les bémols mis à son admiration pour les réactions de la population : "Ces choses, je n’ai pas osé les dire ou les écrire jusqu’à présent. (…) En partie aussi parce que rien n’est plus dangereux que de s’opposer à l’irrationnel, quand il sourd de tout un peuple. On n’ose plus dire certaines choses par crainte de passer pour indifférent à la souffrance des parents, d’être un cœur sec." Et pour terminer : "Il est impossible de parler de ces choses sans saluer la dignité de ceux qui souffrent le plus, les parents. On était prêt à tout leur pardonner et ce sont eux qui nous ont donné les plus grandes leçons même s’il est vrai qu’on les a entraînés irrésistiblement à se tromper sur ce qu’ils pouvaient attendre des chevaliers blancs".

Nos observations : Ce n’est qu’un début… Pour les amateurs, voir par ailleurs l’intégralité de l’article "Pourquoi le dessaisissement"

19 octobre


-  "Témoignage troublant", relaté par La Dernière Heure, d’un jeune habitant de Comblain-au-Pont qui, s’il était confirmé, "laisserait penser que Nihoul entretenait des relations avec d’autres réseaux pédophiles et qu’il a peut-être recruté des victimes ailleurs que dans le centre du pays".

-  La Marche blanche présentée dans la presse :
"Une marche qui s’annonce historique" ; "Demain, la Marche blanche fera vibrer tout le pays" ; "Pour l’amour de nos enfants" ; "Ce sera la marche du siècle".

Nos observations : La presse ne se contenta pas d’appeler la population à venir marcher à Bruxelles, elle lui fournit même toutes les informations pratiques utiles (horaire, itinéraire, transports, parkings,…)

20 octobre

Après la marche blanche, les parents rencontrent le Premier ministre Jean-Luc Dehaene qui leur fait quatre promesses solennelles :

-  L’enquête ira jusqu’au bout et la justice s’en chargera sans entrave du politique

-  Le Parlement a confié l’enquête sur l’enquête à une commission qui va aussi entendre les parents.
image 161 x 48 - 1.2 ko
-  La Constitution sera révisée en vue d’une dépolitisation des promotions dans la magistrature et d’un meilleur équilibre entre les droits de la défense et ceux des parties civiles

-  La mise en place d’un Centre européen "pour les enfants perdus et abusés", indépendant des milieux politiques, sur le modèle du Centre américain.

Nos observations : Voir à ce sujet, notre article dans le N’oubliez pas ! N°2 : "La Marche blanche et après…"

21 octobre


-  La presse étrangère fait écho à la Marche Blanche : "Les Belges donnent à l’Europe une leçon d’humanité" ; "Par la calme détermination qui en émanait, l’immense manifestation de Bruxelles ressemble assez à une révolution" ; "Le gouvernement face à la marée blanche" ; "Au nom de la défense de l’innocence dans un monde sali, un petit Etat a peut-être illustré, comme jamais, la détermination d’un peuple pour être désormais plus et mieux écouté par ceux qui le dirigent".

-  "Rarement on au vu presse belge aussi unanime", peut-on lire dans la Libre Belgique (22.10.96) qui publie quelques titres et commentaires de ses confrères : "La foi soulève des montagnes" ; "Merci la population" ; "La marche du siècle" ; "Cette foule en appelait aussi à un changement des valeurs" ; "C’est une révolution tranquille" ; "Les politiciens ont aujourd’hui beaucoup de pain sur la planche".

-  Dans un communiqué, le comité de soutien aux parents de Julie et Mélissa "se félicite du succès et de la réussite de la marche blanche, celle des fleurs blanches pour tous les enfants" et rappelle sa demande adressée au président de la Chambre, Raymond Langendries, et au président de la commission d’enquête parlementaire, Marc Verwilghen, pour qu’il soit possible aux différentes chaînes de télévision belges de retransmettre en direct toutes les séances de cette commission.

-  Une piste sérieuse se profile pour Loubna Benaïssa : "Un certain nombre de témoins qui pourraient très vite devenir suspects, devront être réentendus sous peu", commente la presse. Et l’on parle d’un certain J.G., vieil indic de la justice, qui connaissait les Attrébates, le Dolo, Michel Nihoul, et a le même avocat que le Dolo…

-  La Commission d’enquête parlementaire tient sa première réunion à la Chambre. Marc Verwilghen a décrète d’emblée l’état d’urgence, soulignant "le caractère exceptionnel de la mission, et, face à l’attente de l’opinion publique, l’obligation de mettre en œuvre une ’nouvelle culture politique’ s’élevant au-dessus des clivages habituels".

22 octobre


-  La Chambre des Mises en Accusation de Liège lève le mandat d’arrêt à charge de Gérard Pinon, accusé dans l’affaire du meurtre de Weinstein. La chambre du conseil de Neufchâteau, elle, décide de libérer Annie Bouty, l’ex-compagne de Michel Nihoul.

-  Des voisins de Bernard Weinstein à Jumet ont lancé une pétition pour que le chalet soit rasé et que l’endroit où ont été retrouvés les corps d’An et Eefje soit dédié à la mémoire des victimes de la pédophilie. A ce jour, plus de 10 000 signatures ont été recueillies.

-  Le procureur du Roi de Bruxelles, Benoît Dejemeppe, "reconnaît que des erreurs ont été commises, voici 4 ans, dans l’enquête sur la disparition de la petite Loubna", mais ne donne aucune explication sur ces lacunes.

23 octobre


-  Du renfort pour le juge Langlois : le juge d’instruction Dominique Gérard est délégué par le président de la Cour d’appel de Liège à la juridiction de Neufchâteau pour une durée de 6 mois, renouvelable en fonction des besoins de l’enquête.

-  Alors que s’ouvre à Bruxelles le procès SOS Sahel (dramatique affaire d’escroquerie à la charité), mettant en cause notamment Michel Nihoul et son amie Marleen De Cockere, le même Nihoul est inculpé par le juge Dominique Dehaan de banqueroute simple et frauduleuse, faux et usage de faux, escroquerie et détournement dans le cadre de ses sociétés DCN, DCN Benelux et Eurodiversified.

Nos observations : Tant l’une que l’autre enquête traînait lamentablement depuis des années…

-  Deux mois et demi après le début de l’enquête de Neufchâteau, Gilbert Dupont (L Dernière Heure) fait le point et explique les liens Dutroux-Nihoul : "… Les enquêteurs ont ramassé toute une série d’éléments qui leur permettent d’y voir beaucoup plus clair sur le fonctionnement de la bande et le rôle de chacun. Il ne s’agit plus aujourd’hui d’hypothèses de travail, mais de faits recoupés. Les enquêteurs font remonter l’affaire au début des années 80. A l’époque, coexistaient deux bandes indépendantes, sans liens, oeuvrant séparément dans des contextes différents. D’une part, le diabolique couple Dutroux-Martin met sur pied une sorte de nébuleuse dont le but est déjà d’enlever des enfants pour les violer. Emporté par sa libido de taré, Marc Dutroux en profite pour prendre ou faire prendre des photos, mais les documents sont exploités à petite échelle, de façon encore artisanale. Au milieu des années 80, la justice tombe sur une affaire qui vaut à Dutroux d’être condamné à treize ans. Et d’être vite libéré. A la même époque, Michel Nihoul, qui évolue dans un contexte d’escroqueries à la chaîne dont il parvient à chaque fois à se sortir sans trop de mal, en qui certains partis politiques bruxellois font confiance, qui n’hésite pas sur le chantage et fréquente (à cette fin ? ) les milieux à partouzes, cherche à tout prix à faire du fric. Pour le plus grand malheur d’un certain nombre de petites filles, les deux entités vont se rencontrer, en 1994, à l’intervention de l’ex-avocate Annie Bouty. Bien vite, chacun comprend le parti qu’il peut tirer de l’autre. L’idée germe de structurer et de commercialiser ce qui se faisait de façon artisanale. C’est dès cette époque que la bande prépare rationnellement des enlèvements. Ainsi, elle entreprend de créer des cellules pour enfants. Dutroux intéresse Nihoul, qui se garde de s’impliquer lui-même, un moyen de faire du fric. Et Dutroux a besoin de Nihoul qui lui sert à plusieurs reprises de protecteur."

Nos observations : Voilà une analyse étonnante. A la fois bien sommaire et précoce tout en étant, peut-être, l’un des meilleurs résumés que l’on puisse tirer aujourd’hui encore de cette affaire Dutroux & Co.

-  Francis Brichet, papa d’Elizabeth, attaque l’Etat belge "avant tout, comme l’explique son avocat, Me Arnould, pour le forcer à revoir la législation sur le secret de l’instruction, en tout cas vis-à-vis des victimes." M. Brichet est en effet tenu dans l’ignorance du dossier ouvert au parquet de Namur suite à la disparition de son enfant en 1989.

24 octobre


-  Jean-Pierre Gallet, directeur de l’information à la RTBF, annonce que les débats de la commission d’enquête parlementaire seront retransmis en différé. Il en sera en tout cas ainsi pour les auditions de cette fin de semaine. Mais JP. Gallet précise aussi que "les débats pourraient être retransmis en direct" dès la semaine suivante.

Nos observations : JP. Gallet se montrera d’ailleurs tellement empressé de réaliser ces directs (dont il a sans doute mesuré d’avance le succès audimétrique), qu’il empêchera les familles Lejeune et Russo d’obtenir un premier contact avec Marc Verwilghen, avant ces tout premiers directs d’auditions, qu’ils avaient pourtant longuement demandé dans le but d’en savoir un peu plus sur les objectifs finaux et le fonctionnement d’une telle commission, ainsi que sur l’objet exact des auditions qui leur étaient, d’ores et déjà, demandées et fixées. Dans cette folle précipitation, les parents craignent que la commission ne prenne pas le meilleur départ.

-  Suite du procès SOS Sahel. La Dernière Heure évoque des révélations concernant Michel Nihoul et interroge : "Quel ami politique lui a évité la taule ?" Il est en effet plus que jamais question des copinages politiques de Nihoul, ainsi que des influences et avantages dont il a pu bénéficier : "Condamné à un an de prison, il y a vingt ans, (l’intéressé) n’a jamais purgé une seule journée de la peine. Le 8 décembre 1976, le tribunal condamnait Nihoul pour banqueroute simple et frauduleuse, abus de confiance, escroquerie, émission de chèque sans provision et détournement d’objets saisis." Gilbert Dupont explique encore dans quel "climat bizarre" s’est déroulée l’audience : "Le terrain est glissant. Jamais aucun nom n’est cité. Nihoul s’en est bien gardé. Son jeu est subtil. Cherchait-il à faire passer un message ? Cet homme, c’est sûr, est dangereux. Il sait des choses."

Nos observations : Nihoul fait peur au point que la presse s’abstiendra de trop approfondir ce type d’information, pourtant pas anodine, évoquée par un président de tribunal. Et, quand elle refera surface, fin 2002, dans un journal néerlandophone (De Morgen), évoquant les liens de Nihoul avec un ancien ministre PSC, par ailleurs ’parrain’ politique de Jacques Langlois, cette même presse ’apeurée’ la tournera en dérision…

25 octobre


-  Pol Marchal, le papa d’An, déclare aux membres de la commission parlementaire : "Je n’ai pas grand-chose à vous dire malheureusement. J’ignore ce qu’il y a dans le dossier. Je n’ai jamais pu le consulter, même partiellement." Et le président Verwilghen lui promet d’intervenir auprès du ministre pour que l’accès au dossier lui soit accordé.

-  Les parents de Julie et Mélissa (en l’absence de Carine Russo) sont entendus, pendant près de trois heures, à huis clos, par la commission. image 161 x 48 - 1.2 ko Ils ont expliqué tout ce qu’ils reprochaient à la justice. Au préalable, leur avocat, Me Victor Hissel, avait expliqué en audience publique que le huis-clos était demandé en raison de "l’extrême fatigue des parents", mais aussi "à la suite d’un conflit avec la RTBF" à propos de la retransmission des débats.

31 octobre


-  Après avoir enfin obtenu de pouvoir consulter gratuitement le dossier liégeois, les parents de Julie et Mélissa souhaitent consulter également tout le dossier de Neufchâteau. Mais la Cour d’appel de Bruxelles décide que la demande de Me Hissel d’accès au dossier sera examinée plus tard.

Nos observations : L’accès au dossier de Liège était déjà arrivé bien tardivement, puisque plusieurs mois après la découverte de Julie et Mélissa et l’arrestation de Dutroux, et encore après que tous les parlementaires de la commission d’enquête en aient, eux, déjà reçu copie. Et c’est le même tout de carrousel juridique qu’en 1995 qui recommence pour espérer un jour obtenir l’accès au dossier de Neufchâteau. Pendant ce temps, les inculpés, dont Michel Nihoul, consultant depuis déjà cinq mois (à partir de l’époque de leur arrestation), de même dossier auquel, pour leur part, ils ont automatiquement accès. L’avantage est évident et considérable pour la défense des inculpés. Il est, en effet, impossible pour toute partie non informée de faire valablement valoir ses droits. Ce non-accès au dossier représente donc un empêchement considérable pour la défense des enfants victimes. Les familles Russo et Lejeune finiront néanmoins par obtenir l’accès intégral au dossier de Neufchâteau en mai 1999 !

Novembre 1996

1er novembre


-  Une foule nombreuse et recueillie s’est pressée au cimetière de Crotteux, à Grâce-Hollogne, pour honorer la mémoire de Julie et Mélissa. Par centaines, des personnes ont aussi afflué devant les propriétés de Marc Dutroux où ont été retrouvées ses victimes, ainsi qu’à Jumet, devant le chalet en bois de Bernard Weinstein.

4 novembre


-  Le bourgmestre de Lobbes (Sars-la-Buissière) veut faire démolir la propriété de Dutroux le plus vite possible pour élever une stèle à la mémoire des enfants martyrisés. Il dit néanmoins attendre que la justice ait fini son travail.

-  Après concertation avec deux des experts chargés d’aider les membres de la commission d’enquête parlementaire, le président Marc Verwilghen annonce que les avocats des familles des victimes pourront consulter les cinq rapports disciplinaires sur la manière dont avait été menée l’enquête sur la disparition des petites filles assassinées. Soit les rapports Velu et Liekendael au niveau de la Cour de cassation, celui du Procureur général de Liège Anne Thily, le rapport du Comité P et celui de la gendarmerie.


5 novembre

image 161 x 48 - 1.2 ko Accompagnée de Louisa et Jean-Denis Lejeune, une partie de la commission d’enquête se rend à Marcinelle, pour tenter de comprendre pourquoi les enquêteurs sont passés à côté de la cache de Dutroux. A leur sortie de la maison, tous les membres de la commission se sont dit "choqués par la vision de cet endroit" ; certains ont carrément déclaré que les gendarmes avaient mal travaillé.

Nos observations : Préalablement à la commission d’enquête, les familles Russo et Lejeune avaient déjà été invitées par une cellule de gendarmerie affectée à Neufchâteau, à visiter ensemble cet endroit. Ce qu’elles avaient fait en compagnie de leur conseil Me Hissel, afin de mieux se rendre compte de l’environnement dans lequel leurs petites filles avaient vécu et péri.

6 novembre


-  Première en Belgique : les avocats des familles de victimes impliquées dans le dossier Dutroux/Nihoul ont déposé une requête devant le tribunal de première instance de Neufchâteau, demandant de pouvoir assister aux chambres du conseil.
Selon plusieurs juristes, cette requête a peu de chance d’aboutir. En l’état actuel de la législation, les débats en chambre du conseil se déroulent en effet à huis clos et ne concernent que l’inculpé.

Nos observations : le président du tribunal déboutera en effet les parents de Julie, Mélissa et Loubna, le 12 novembre suivant. Notons également que sur ce point comme sur beaucoup d’autres, la législation n’a toujours pas évolué depuis lors.

-  Casper Flier, le Hollandais, relation de Nihoul et Bouty, est entendu pendant treize heures par la Brigade nationale, dans le cadre des recherches menées par Neufchâteau.

7 novembre


-  La mutuelle réclame 1,3 millions de francs à Marc Dutroux en récupération d’indemnités d’invalidité indûment touchées. Cette décision fait suite à une enquête ouverte début 1995, lorsqu’il était apparu que Dutroux exerçait une activité commerciale alors qu’il bénéficiait d’indemnités après avoir été reconnu "invalide".

Nos observations : Une enquête apparemment très lente aussi, puisqu’il a fallu plus d’un an et la médiatisation de l’affaire Dutroux pour qu’elle aboutisse enfin.

-  Une perquisition est effectuée à la rédaction de Ciné-Télé-Revue et au domicile de Claude Moniquet qui couvre l’affaire "Dutroux-Nihoul" pour l’hebdomadaire. En cause un article du 5 septembre ’96 dans lequel Cl. Moniquet accusait la PJ de Charleroi d’être "un souk". Selon les enquêteurs, cet écrit constitue des faits de calomnie et de diffamation, des imputations considérées comme des délits de presse c’est-à-dire relevant de la seule compétence de la Cour d’assises.

8 novembre


-  Appel à la sérénité du Syndicat national du Personnel de la Gendarmerie (SNPGd) après les déclarations de certains membres de la commission d’enquête sur l’enquête Dutroux, suite à la visite de la maison de Dutroux à Marcinelle.

-  Bilan, après deux mois d’activité, de la ligne verte (0800) d’appels à témoins, mise en place par le procureur du Roi de Neufchâteau, M. Bourlet, et le juge Connerotte. Pour Tom Smets, de la cellule "Traite des êtres humains" du BCR et coordinateur de l’équipe "0800", "il est trop tôt pour tirer des conclusions sur la masse d’informations ainsi parvenues…", mais "à la lueur des quelques 2700 appels reçus, nous ne pouvons pas dire qu’il existe des réseaux de pédophiles organisés en Belgique". Il précise encore que malgré les craintes émises à l’époque du lancement du 0800, "la dérive de la délation mensongère ne s’est pas produite".

Nos observations : Les informations parvenues au numéro 0800 ne seront effectivement analysées que des années plus tard, en fin d’instruction. Dès lors, il apparaît que les propos de Tom Smets sur la teneur des 2700 appels reçus étaient quelque peu audacieux.

9 novembre


-  Sur le plateau de CONTROVERSE (RTL-TVI), des pères et mères "oubliés" témoignent. Sont réunis sur le plateau : Tiny Mast, la maman de Kim et Ken, disparus à Anvers le 4 janvier 1994 ; Dirk Vanden Brande, papa du petit Liam, disparu à l’âge de 2 ans et demi, le 3 mai 1996 ; Zeki Cavas, sans nouvelles de son petit frère Gevrije depuis février 1985 ; Anita Crul, maman de Sylvie Carlin, disparue le 15 décembre 1994, et Claudia Vasquez dont la fille, Marie-Agnès Moens a disparu le 8 septembre 1989.

-  Selon un sondage express réalisé par RTL, 94% du public douteraient de l’enquête de Neufchâteau depuis le limogeage du juge Jean-Marc Connerotte.

11 novembre


-  A l’issue d’une réunion à huis-clos de la commission d’enquête, le député Claude Eerdekens annonce que les parents d’enfants disparus dont on ne parle jamais, pourront être entendus par la commission s’ils le souhaitent.

Nos observations : Nous ignorons si le fait d’être simplement entendus par la commission a pu satisfaire ces familles. Quoi qu’il en soit, il n’a pas été véritablement tenu compte de leurs doléances au niveau des juridictions et des juges ayant en charge leurs dossiers. En effet, à ce jour, aucune d’entre elles (à l’exception de Nabela Benaïssa qui s’était récemment constituée partie civile entre les mains du juge Connerotte) n’a vu de significatifs progrès dans les enquêtes menées sur la disparition de leurs enfants. Hélas !

-  Quant au président de la commission, M. Verwilghen, il considère qu’il est "grand temps que la commission qui entend faire toute la lumière sur le dossier Dutroux, s’en tienne à ses premiers prescrits, à savoir que la transparence ne peut être l’affaire du huis clos et que celui-ci doit rester l’exception". Les prochaines auditions devraient donc être publiques.

12 novembre


-  Nouvel indice contre Diakostavrianos : des cheveux d’An et Eefje auraient été découverts dans une de ses voitures, parquée dans une propriété de Dutroux.

-  La commission d’enquête a demandé que les brosses à dents saisies à Marcinelle, lors de la visite des députés, soient analysées en laboratoire. "Des traces pourraient permettre d’identifier des enfants dont on ignore s’ils sont oui ou non passés à Marcinelle, An et Eefje et peut-être d’autres", lit-on dans La Dernière Heure. image 161 x 48 - 1.2 ko Le quotidien rapporte aussi que "des parlementaires ne comprennent pas comment les enquêteurs n’ont pas pensé eux-mêmes à faire réaliser ces expertises". La commission a par ailleurs demandé une copie de toutes les cassettes vidéo saisies dans l’affaire Dutroux, non pour les visionner, mais pour les mettre en lieu sûr et ce, compte tenu de "rumeurs affirmant que des pièces du dossier disparaissent".

Nos observations : voir précédente remarque concernant ces cassettes. Concernant les analyses des brosses à dents en question, on n’en entendra plus jamais parler. Il est plus que probable qu’elles n’ont tout simplement jamais été réalisées.

-  Les parents font opposition à l’arrêt de la Cour de cassation dessaisissant le juge Connerotte.

-  Me Julien Pierre assigne au civil le journaliste du Soir Illustré, Philippe Brewaeys, pour avoir déclaré à la RTBF que le conseil de Dutroux était "un avocat d’extrême droite et qu’il faisait même partie, avec plusieurs collègues du barreau de Bruxelles, d’un réseau de conseils attachés à la défense du Front National et des autres groupuscules d’extrême droite". D’autre part, on apprend que Me Pierre a écrit au président de la commission parlementaire, pour lui dire qu’il n’existe aucune base légale en Belgique pouvant justifier la transmission du dossier aux victimes de son client et qu’"il s’agirait d’un viol du secret de l’instruction".

13 novembre

Dans La Dernière Heure, Gilbert Dupont évoque les cassettes de l’affaire Dutroux & Co. Au total, 4300 cassettes vidéo ont été saisies, parmi lesquelles quelques dizaines dans les propriétés de Dutroux, entre 200 et 300 chez Nihoul et plus encore cher Annie Bouty. Sur ce nombre, à peine la moitié a été visionnée à ce jour, par les six gendarmes chargés de cette tâche, "des spécialistes choisis parce qu’ils sont les seuls à pouvoir reconnaître d’éventuels pédophiles qui apparaîtraient".
On parle de "3 ou 4 cassettes avec des enfants" (deux trouvées chez Dutroux et une chez Diakostavrianos) : "Il s’agit de trois films amateurs tournés par Dutroux avec parfois l’aide de sa femme", explique G. Dupont. Dernières précisions : "Aucun des enfants disparus en Belgique, Mélissa, Julie, An, Eefje, Loubna, Elizabeth ou autres, n’apparaît sur ces vidéos. Mais un doute subsiste pour An Marchal que les parents croient reconnaître…"

Nos observations : Six gendarmes spécialistes des pédophiles ? Une fois encore, si de tels spécialistes existaient, pourquoi n’ont-ils pas été recrutés pour travailler dès 1995 sur le dossier de l’enlèvement de Julie et Mélissa ?

14 novembre


-  Les parents de Mélissa expriment des doutes par rapport à Neufchâteau. Ils ne visent pas une personne précise, mais "semblent se demander si ceux qui traitent dorénavant le dossier sont animés par la même volonté d’aboutir que Connerotte". Illustration par l’exemple : lorsqu’ils interrogent les enquêteurs, ils doivent constater qu’ils n’ont toujours aucune certitude sur les noms des personnes qui ont enlevé leurs enfants. Ils ne comprennent pas non plus les libérations successives de six des onze personnes arrêtées au départ (et néanmoins toujours inculpées).

-  Aux côtés des Lejeune, les Russo demandent la démission du ministre de l’Intérieur Johan Vande Lanotte, lequel répond qu’il n’en comprend pas les raisons.

Nos observations : Deux ans plus tard, la même demande sera effectuée par les parlementaires de l’opposition, lors de la mémorable "évasion de Dutroux". Sans se poser de plus de questions quant à sa responsabilité ministérielle, le ministre Vande Lanotte obtempèrera… illico !

15 novembre


-  Dans une interview publiée dans Het Volk, le procureur Bourlet parle du dossier et évoque les liens de Dutroux avec le grand banditisme carolorégien.

20 novembre


-  Dans un article consacré au numéro vert mis en place par Neufchâteau, La Dernière Heure se réfère à des déclarations du Procureur général de Liège, Anne Thily, selon laquelle "plusieurs témoignages au 0800 ont mis en cause le ministre Grafé". Le journal poursuit en citant Elio Di Rupo dont le nom serait "lui aussi revenu", et rappelle qu’"à la mi-octobre, la gendarmerie (nous) confirmait qu’une partie des dénonciations concernaient des personnalités politiques de premier plan."

Nos observations : Pour rappel : Tout commence le 16 novembre, par des articles de la presse flamande annonçant que la justice enquête sur des faits de pédophilie et suspecte deux ministres. Un journal cite même le nom du vice-premier ministre Elio Di Rupo. Jean-Pierre Grafé, ministre régional wallon et de la Communauté française, fait lui aussi l’objet d’accusations concernant des relations sexuelles avec des mineurs. Tous deux démentent avoir commis de tels faits, mais font l’objet d’une demande de mise en accusation adressée, par le Procureur général de Bruxelles, au Parlement (pour E. Di Rupo) et aux assemblées wallonne et francophone (pour JP Grafé). Très vite, la presse fera état d’une "manipulation" basée sur le seul témoignage d’un jeune homosexuel mythomane. Cette "affaire Di Rupo-Grafé", comme on l’a appelée, fera ainsi la Une de la presse pendant de longues semaines au cours desquelles d’autres accusations viendront s’ajouter aux premières. Le monde politique est en émoi et le Parlement vote en vitesse une loi visant à organiser les poursuites à l’égard des ministres. Au bout du compte, Elio Di Rupo est blanchi par la Chambre et l’on commence à se demander comment ce "dossier" a pu être monté. Quant à JP. Grafé, après avoir démissionné de son poste de ministre et être redevenu "simple député", il fera l’objet d’une levée d’immunité parlementaire et d’une instruction judiciaire qui aboutira, près de deux années plus tard, à un non-lieu. Six ans et demi plus tard, le doute plane toujours sur l’origine de cette "affaire"…

-  La commission d’enquête parlementaire met, à son tour, en place un numéro vert destiné, celui-là, à "recueillir les témoignages des personnes ayant collaboré à l’enquête sur les disparitions de mineurs d’âge dans l’affaire ’Dutroux’ et qui souhaitent communiquer certaines informations" relatives au déroulement de l’enquête. Les témoignages ne pourront pas être anonymes, mais la plus grande discrétion est assurée quant aux informations qui seront recueillies.

21 novembre


-  Dans le cinquième épisode d’une série d’articles "bilan" de l’enquête menée à Neufchâteau (articles publiés dans La Libre Belgique), on peut lire, sous la plume de Jean-Frédérick Deliège qui explique les liens unissant Dutroux, Lelièvre, Nihoul, Bouty et Flier, que l’enquête a "montré que Michel Nihoul est, en fait, le pion central de toute cette mouvance". Ou encore, à propos des questions qui se posent au sujet de Marc Dutroux : "Il fait partie du milieu criminel carolorégien. Il participe visiblement à des trafics de voitures volées. Et, surtout, il semble faire l’objet de protections policières. C’est dans le cadre de l’assassinat de Bernard Weinstein qu’elles apparaissent." Il termine en précisant que l’enquête a mené à l’inculpation d’un commissaire et d’un inspecteur de la PJ de Charleroi.

Nos observations : Il sera intéressant de mettre cette série d’articles en parallèle avec ce que ce même journaliste écrira plus tard, sur les mêmes personnages.

-  Nouvelle perquisition à Marcinelle à la demande du juge d’instruction Langlois, effectuée par plusieurs gendarmes en présence d’un architecte, d’un chien et des enquêteurs de Neufchâteau. Des saisies ont une fois encore été réalisées.

Nos observations : Plus d’une trentaine de perquisitions auront lieu à la maison de Marcinelle sur une période qui s’étendra du 13 août 96 au mois de février 98.

22 novembre


-  Fin des cinq jours de perquisitions au BCR, conduite par le juge d’instruction Marique et le président du Comité P, Freddy Troch, visant à instruire un dossier de possibles destructions de documents compromettants dans l’opération OTHELLO.

-  Les inspecteurs et commissaires de la PJ de Charleroi introduisent une action civile contre les ministres de l’Intérieur Vande Lanotte et de la Justice De Clerck. En cause, l’opération ZOULOU, à savoir des perquisitions au siège de la PJ et au domicile des quatre officiers, ordonnées par le juge d’instruction Connerotte "dans le cadre de l’affaire Dutroux et du trafic de véhicules impliquant l’inspecteur Zicot" et opérées par des dizaines de gendarmes. Pour les avocats des plaignants, "ces perquisitions n’étaient pas valables" et n’étaient "fondées sur aucun indice de culpabilité" de leurs clients.

Nos observations : Il est évident que cet automne 1996 sera une époque particulièrement lourde de plaintes judiciaires et règlements de compte en tous sens, tant pour certains journalistes, que pour des enquêteurs ou des politiques.

26 novembre


-  Suite dans La Libre Belgique, du feuilleton "Cent jours d’enquête et de questions" proposé par JF Deliège. Où il est question des réseaux de pédophilie sévissant en Belgique : "… la bande de Marc Dutroux constitue-t-elle ce que l’on appelle communément un ’réseau de pédophilie’ ? Ou Dutroux est-il un ’serial killer’… ?" (…) "Tout porte à croire que Marc Dutroux a réalisé, avec ses complices, ces enlèvements sur commande". Et le journaliste explique : "Selon nos informations, les enquêteurs seraient sur la piste d’au moins une personne qui aurait abusé de certaines des petites victimes de Dutroux." Il pose ensuite la question d’un éventuel commerce de cassettes vidéos par Dutroux et Martin, évoque les soupçons du même ordre à l’égard de Nihoul et poursuit : "Ces éléments montrent que si Dutroux n’était pas la tête pensante d’un réseau pédophile, il devait évoluer à la lisière d’un tel réseau qui utilisait, de temps à autre, ses services". JF Deliège conclut : "… le couple Dutroux-Martin ne semble être que la partie émergée d’un monde monstrueux où des adultes abusent, depuis des décennies, de très jeunes enfants".

-  Accompagnés d’un chien pisteur et d’un radar anglais destiné à sonder le sol, une escouade de gendarme a effectué une perquisition à Lodelinsart, au domicile d’un photographe chez qui Bernard Weinstein avait fait réaliser des développements. Le photographe, pour sa part, a souvent "fait appel à Weinstein pour effectuer des travaux à sa voiture" et "a loué ses services en tant qu’homme à tout faire lors de reportages".

-  On apprend, dans La Dernière Heure, que Nihoul a confirmé aux enquêteurs de Neufchâteau - alors qu’il le niait depuis son arrestation - avoir "demandé une fille à Dutroux", mais dans le but, prétend-il aujourd’hui, de "remonter tout le réseau Dutroux et de le balancer aux flics". image 161 x 48 - 1.2 ko A propos de ses entretiens téléphoniques avec Dutroux, "dans les semaines précédant les enlèvements", Nihoul prétend "qu’ils ne parlaient que de voiture en panne et qu’il voulait créer une société avec Michel Lelièvre". Quant au trafic d’XTC qui "aurait porté sur au moins 10 000 pillules, ce qui en ferait l’un des plus gros réseaux démantelés dans le pays", "Nihoul est en aveux." Selon G. Dupont (La Dernière Heure), "Nihoul désigne, à la tête du trafic, un tiers qui reste à identifier". Et toujours selon Dupont, "il est de plus en plus manifeste que Dutroux et Nihoul formaient une seule bande" et il est établi que ce dernier "fréquentait Dutroux, Michèle Martin, Michel Lelièvre et même le Grec Michaël Diakostavrianos…", en compagnie duquel il a d’ailleurs été reconnu par des policiers de Charleroi.

Nos observations : Visiblement, les versions de Nihoul évoluent… en fonction, sans aucun doute, des auditions de ses co-inculpés, auxquelles il a légalement accès en vertu de ses droits de la défense.

27 novembre

La RTBF propose une émission spéciale consacrée à l’affaire Dutroux et concoctée conjointement par les équipes d’Au Nom de la Loi et de Faits divers . A cette occasion a été mis en lumière un épisode datant de novembre 1992 et se déroulant à la patinoire de Charleroi : Dutroux avait été interpellé par la police pour avoir commis des attouchements sur de jeunes patineuses et un PV avait été dressé. Mais cela n’eût aucune incidence sur sa liberté conditionnelle, car les policiers n’avaient rien trouvé sur lui dans le casier judiciaire…

Nos observations : A cette occasion, les familles Russo et Lejeune se retrouveront invitées pour la première – et dernière - fois sur un plateau d’Au Nom de la Loi. Ils découvriront avec stupeur le reportage, concocté par une de leurs journalistes, ayant trait au rapport médico-légal de leurs petites filles. Jusque-là, les parents n’avaient pas reçu l’autorisation judiciaire d’y avoir accès. Ils apprendront donc en même temps que les téléspectateurs et en direct télévisé, la nature des sévices infligés à leurs enfants. Carine Russo réagira dès le lendemain à cette surprise de très mauvais goût, dans un billet d’humeur adressé à l’hebdomadaire Télémoustique.

28 novembre

Quinze jours après le déclenchement de l’affaire Di Rupo / Grafé, plusieurs groupes politiques à la Chambre déposent des propositions visant la responsabilité pénale des ministres.

29 novembre


-  Résultat négatif pour une commission rogatoire menée aux Canaries par le juge d’instruction Coméliau de Namur, en présence de Marie-Noëlle Bouzet, maman d’Elizabeth Brichet. On croyait en effet avoir retrouvé la trace de la fillette disparue en 1989, mais il s’agissait d’une autre jeune fille blonde, aux yeux bleus, ressemblant effectivement fort à la jeune Namuroise et qui, après avoir été repérée aux Canaries, a finalement été localisée à Montpellier, en France.

-  Melchior Wathelet, entendu par la commission, tente de justifier la libération conditionnelle de Dutroux (en 1992) par l’existence de quatre rapports positifs. Pour lui, le problème réside dans la mauvaise qualité du suivi dont cette libération a fait l’objet. Il estime en effet qu’un véritable suivi aurait pu mettre en évidence que Dutroux n’avait en rien modifié son comportement et qu’il présentait toujours un danger.

Décembre 1996

1er décembre

La Libre Belgique titre : "Les terribles ratés de l’enquête", expliquant que "les lacunes de l’enquête mettent en lumière des réflexes corporatistes chez les gendarmes et dans les parquets".

Nos observations : Ce titre est à l’évidence également lacunaire puisqu’à aucun moment il n’est précisé de quelle enquête il est exactement question. C’est le corps du texte qui nous apprend qu’il s’agit bien de l’enquête sur la disparition de Julie et Mélissa. La trame de la thèse particulièrement simpliste des réflexes corporatistes ayant mené l’enquête à l’échec et par conséquent conduit Julie et Mélissa à la mort, est ainsi dessinée. Elle restera la seule explication donnée au public. Thèse bien confortable puisque si les responsabilités sont à partager entre tous, il ne peut plus être possible de les attribuer à personne nommément.

2 décembre

L’asbl de Paul Marchal est à peine créée qu’elle se voit l’objet d’une enquête financière urgente diligentée par le parquet d’Hasselt.

Nos observations : Le harcèlement moral des autorités vis-à-vis des parents a bel et bien commencé.

3 décembre


-  Le pourvoi en Cassation contre l’arrêt-Connerotte des familles Russo, Lejeune, Marchal et Benaïssa est débattu ce matin.

Nos observations : Sachant d’avance que la Cour de Cassation ne se déjugerait pas, les familles n’ont pas d’autre choix légal que d’épuiser tous les moyens juridiques en Belgique, avant d’introduire un éventuel recours à la Cour européenne des Droits de l’Homme, puisque la décision de la Cour de Cassation s’est basée sur une requête unilatérale des avocats des inculpés.

-  La commission parlementaire fait saisir le matériel informatique du BCR suite aux accusations formulées par certains gendarmes dans les huis-clos de cette commission.

-  Nihoul est à nouveau hospitalisé sans que personne ne sache jamais les raisons de cette brusque dégradation de son état de santé.

Nos observations : Dans l’enquête de Neufchâteau, certaines auditions importantes sont précisément attendues de lui à ce moment. Elles seront reportées suite à ses indisponibilités "providentielles". C’est le début des grandes manœuvres pour faire durer l’enquête et l’allonger jusqu’au risque de dépassement des délais raisonnables.

5 décembre


-  Le ministre de la Justice De Clerck annonce que la cellule de Neufchâteau a été renforcée de dix gendarmes supplémentaires de la section financière de la BSR.

Nos observations : Un renforcement qui correspond au début des problèmes des gendarmes Bille et De Baets (brigade financière de la BSR de Bruxelles) déjà affectés à Neufchâteau depuis août 96.

-  Le restaurateur PIRO de L’Arche de Noé, à Charleroi, est mystérieusement abattu sur un parking. Le juge Sohet est chargé de l’enquête.

Nos observations : Le restaurateur en question venait de prendre contact avec un membre de la famille Lejeune afin de lui faire part d’un projet de dîner public au cours duquel il aurait d’importantes révélations à faire concernant Julie et Mélissa (Voir, à ce propos, un article publié dans le N’OUBLIEZ PAS ! n°12 : "Affaire Piro, ce côté obscur de l’affaire Dutroux")

-  Perquisition chez l’avocat Van Bossuyt, conseil de Jacques Genevois, à l’époque décrit comme suspect n°1 dans l’enlèvement de Loubna Benaïssa. On apprend que Van Bossuyt serait également l’avocat du Dolo, établissement longuement fréquenté par Nihoul. Genevois, qui se sait recherché par la gendarmerie, se cache. Il explique à la presse qu’il a demandé à plusieurs reprises à être entendu par la commission, mais que cela lui a été refusé.

Nos observations : On pourra se demander longtemps encore de quoi J. Genevois voulait entretenir la commission d’enquête, s’il n’a rien à voir et n’a jamais rien su sur les enlèvements d’enfants.

-  Nihoul (déjà remis sur pieds !) assiste à la dernière séance du procès SOS Sahel, ce procès dans lequel il lui est reproché une vaste escroquerie à la charité. Me Clément de Cléty, son avocat, tire pour arguments à sa défense, le fait que ce dossier est vide et l’instruction anormalement longue (sept ans).

Nos observations : La tactique juridique de Me Clément de Cléty est plantée : évocation du dépassement du délai raisonnable, instruction lacunaire, innocence parfaite du client Nihoul. C’est une tactique qui fera long feu, puisqu’elle sera la même utilisée par les avocats des inculpés de Neufchâteau, pendant toute la procédure (plus de sept ans).

Quant à Nihoul, il clôt les débats par ses sempiternelles et désormais célèbres déclarations : "Jamais personne ne m’a surpris à mentir. Il y a des choses que je n’ai pas dit mais jamais je n’ai menti…".

-  Le conseiller communal d’Etterbeek, Henri Tombeur, est poursuivi et détenu depuis juillet 96 pour faits de pédophilie. Passant ce 5 décembre 96 en correctionnelle, il clame son innocence, arguant d’un montage réalisé contre lui et accusant un policier qui aurait détourné les témoignages des jeunes témoins au profit de Jacques Grafé (frère du ministre liégeois Jean-Pierre Grafé) qui serait le véritable suspect. Tombeur reconnaît néanmoins connaître Nihoul.

7 décembre

Melchior Wathelet (ex-ministre de la Justice PSC) justifie sa signature pour la libération de Dutroux en avril 92 en arguant qu’il s’est basé sur une majorité d’avis favorables. image 161 x 48 - 1.2 ko Argument qui fait sortir de ses gonds le président de la commission administrative, Yvon Stuart, qui déclare que la commission avait rendu un avis défavorable à la libération de Dutroux, de la même façon que le parquet. Seules les autorités de la prison où se trouvait Dutroux avaient rendu un avis favorable. Ce sont donc les avis défavorables qui étaient majoritaires contrairement à ce que dit M. Wathelet.

9 décembre


-  La Libre Belgique titre que "Dutroux était bien le suspect numéro 1 mais que les soupçons qui pesaient sur lui n’ont pas été communiqués à la juge Doutrèwe chargée de l’instruction liégeoise".

Nos observations : Toute audition maladroite de n’importe quel gendarme en commission d’enquête fera désormais l’affaire pour entériner l’idée que la magistrature de Liège a été tenue à l’écart des informations concernant Dutroux.

-  Jacques Genevois, suspect principal de l’enlèvement de Loubna est entendu à Neufchâteau.

Nos observations : C’est le juge Gérard, succédant à Connerotte et nommé en renforcement du juge Langlois, qui s’occupera des suites de l’enquête sur Loubna.

10 décembre

Comme chaque mois durant toute la procédure d’instruction de Neufchâteau, la chambre du conseil statue sur les demandes de libération des inculpés. Concernant Nihoul, Me De Clety repasse et repassera sans cesse les mêmes arguments contre les témoignages d’enfants ayant éventuellement reconnu Nihoul : "Témoignages discordants".

Nos observations : Les mêmes arguments seront resservis à l’automne 2002, lors de la dernière chambre du conseil de Neufchâteau, ainsi qu’en mars 2003, à la chambre des mises en accusations de Liège, lorsque le procureur du Roi évoquera les témoignages d’enfants sur les agissements suspects de Nihoul. Ce même argument est d’ailleurs régulièrement utilisé par certains avocats dans certaines affaires de pédophilie qui ont défrayé la chronique (exemple. : l’affaire du Collège St Pierre).

11 décembre


-  La presse dresse un portrait de Jacques Genevois, nouvellement inculpé dans l’enlèvement de Loubna pour complicité. Il est décrit comme un indicateur et une balance. Il détiendrait notamment certaines indications sur les tueries du Brabant wallon suite à ses contacts avec le jeune François Eertrijk, garde du corps du chanteur Plastic Bertrand, retrouvé mort de quatre balles sur un parking, en janvier 1985. Selon d’autres sources, Jacques Genevois aurait eu peur d’être impliqué dans ce dossier par "un truand proche de l’extrême droite et de certains milieux policiers", raison pour laquelle il se serait caché des autorités judiciaires qui le recherchaient.

-  Sans surprise la décision de la Cour de Cassation sur le pourvoi des familles d’enfants disparus est tombée : leurs oppositions à l’arrêt spaghetti sont rejetées.

-  L’avocat Van Bossuyt de Jacques Genevois se voit également inculpé par le juge Gérard de Neufchâteau, pour faux et usage de faux. JF Deliège, dans la Libre Belgique, ajoute que Van Bossuyt a reconnu avoir effectivement couvert Genevois dans son alibi pour l’enlèvement de LoubnaL. En outre, rappelle le journaliste Deliège,Van Bossuyt fut l’avocat de Dolorès Bara, patronne du Dolo à Etterbeek, "club privé présenté par un témoin crédible comme un haut lieu de la pédophilie belge dans les années 80".

12 décembre

La charte constitutive des Comités blancs est publiée. Leur souhait d’action :

-  Insister sur le droit à la protection des enfants

-  Soutenir les familles des enfants actives dans leur combat pour la vérité

-  Préparer activement les Etats généraux pour une justice meilleure.

13 décembre

L’enquête de Neufchâteau poursuit ses recherches dans les anciennes mines Saint Louis de Jumet. Le juge Langlois a fait prévenir les parents de tous les enfants encore disparus de ces fouilles.

Nos observations : Etait-il bien nécessaire (et prudent) de prévenir ces parents de ce qu’éventuellement les restes de leurs enfants pourraient être retrouvés sur ce site, alors qu’aucun élément concret (hormis les témoignages de deux "repentis" qui s’avéreront, par la suite, de simples fabulateurs) ne permettait d’être à ce point certain de la présence de corps d’enfants ?
Ces terribles cafouillages de l’enquête de Neufchâteau seront, par la suite, attribués au procureur du Roi Bourlet, alors que c’est le juge Langlois qui menait résolument, tête baissée (et sans plus de réflexion) les fouilles à cette époque, même s’il reste vrai que le procureur lui-même a cru aux résultats positifs de celles-ci (suite aux déclarations d’octobre 96 de Michelle Martin)

La presse parle déjà d’un possible "week-end d’horreur".

16 décembre


-  Après quatre jours de fouilles, les enquêteurs commencent à désespérer.

-  Nabela Benaïssa reçoit le prix Régine Orfinger-Karlin, attribué par la Ligue des Droits de l’Homme, pour sa remarquable dignité.

22 décembre


-  Deux mille personnes se rassemblent à Sars-la-Buissière pour ne pas oublier Julie et Mélissa et tous les enfants disparus, à l’orée de Noël.

-  On continue à parler en long et en large des fouilles effectuées sur le site St Louis. On y a découvert une cave que la presse décrit avec moult détails. Certains médias s’emploient même à relater le passé historique du site (anciens charbonnages).

Nos observations : Voilà tout ce que la presse relate encore au sujet de l’enquête : des fouilles… des fouilles et encore des fouilles… On est, un moment, tenté de croire que le nouveau juge est fort décidé à élargir les faits d’enlèvements d’enfants qu’ils a déjà sous sa saisine, à d’autres faits peut-être plus terribles encore ?

-  A la commission d’enquête, certains parlementaires se plaignent de faire l’objet de curiosité déplacée de la part des services policiers concernant leur vie privée.

23 décembre


-  Alain Guillaume journaliste du Soir, dévoile le volet ABRASAX (secte satanique) de l’enquête de Neufchâteau, faisant état de perquisitions qui viennent d’y être effectuées, à Forchies-la-Marche, suite à une note intrigante trouvée chez Weinstein (complice présumé de Dutroux). Le journaliste en question se pose déjà la question de savoir si les victimes de Dutroux ont pu avoir été sacrifiées sur l’autel du démon, ajoutant que "ces histoires-là, on n’y croyait pas jusqu’ici. Et pourtant, en Allemagne, en France, en Grande-Bretagne et aux USA, services de police et journalistes avaient déjà décelé l’existence "de réseaux sataniques" et imaginent qu’ils s’approvisionnaient en jeunes victimes. Toutes ces enquêtes avaient échoué, tous ces dossiers refermés, étouffés sous le sceau du mot "fantasmes".

Nos observations : Le volet ABRASAX de l’enquête sera plus tard l’un de ceux qui permettront aux avocats de la défense des inculpés notamment, de se plaindre des "croyances", "fantasmes" et "thèse des grands réseaux" qu’auraient distillés, selon eux, certains "chevaliers blancs" (Bourlet-Verwilghen) ou nébuleux personnages issus du mouvement blanc, voir tout journaliste qui aurait eu le moindre contact avec ce mouvement et les parents des victimes qui l’auraient initié en organisant la Marche blanche. Il est pourtant très clair que ce ne sont ni les personnalités de ce mouvement, ni les parents, ni aucun journaliste en contact avec eux qui ont produit ces premiers scoops à sensation sur les thèses des grands réseaux et encore moins sur les pistes satanistes. Ces "informations" étaient, à l’époque, l’oeuvre de la plupart des journalistes et des rédactions réputées les plus sérieuses tels que La Libre Belgique ou Le Soir. Il est remarquable que les accusations et imprécations de ces avocats et de leur entourage se soient retournées vers ceux qui n’y étaient pour rien plutôt que contre ceux qui en furent véritablement les responsables. Ces mêmes journaux relaieront d’ailleurs eux-mêmes plus tard les plaintes de ces avocats en oubliant manifestement qu’ils en sont les premiers responsables. Ne faut-il pas, dès lors, penser que nous voici ici à l’origine des manoeuvres de brouillage et de manipulation de l’information sur l’affaire de Neufchâteau ? Ajoutons encore que la suite du ce volet d’enquête fut particulièrement peu investigué après ces perquisitions sans résultat.

-  La notoriété des parents d’enfants disparus est, à cette époque, telle que certains médias iront jusqu’à leur demander d’adresser à tous, dans leurs pages, un message de Noël.

Nos observations : Le message rituel de la Maison royale côtoiera, cette année-là, celui des parents. Il est clair qu’il ne s’agissait pas là d’une démarche spontanée de la part de ces parents, mais d’une forme d’exploitation par les médias de leur image. C’est sous la pression et les pressantes sollicitations journalistiques, que les parents se sont soumis à ce jeu dangereux de la montée en puissance de leur popularité.

-  Le ministre de la Justice se déplace sur le site des fouilles à Jumet, pour "encourager les fouilleurs".

Nos observations : Autant de focalisation médiatique et jusqu’au politique sur cet aspect très aléatoire de l’enquête de Neufchâteau ne laisse pas sans interpeller.

24 décembre


-  "Une trêve de Noël" est annoncée pour les fouilles sur le site de Jumet, annonce la presse.

Nos observations : A nouveau les grandes formules, sas doute pour mieux faire ressortir les grands moyens et par conséquent, la grande détermination des magistrats à ne rien négliger dans cette affaire. Pendant ce temps, les dessous de l’enquête, la partie non visible du travail mais aussi la plus importante (auditions des inculpés, des témoins, analyses financières, analyses scientifiques, recueil d’éléments d’information et investigations de fond) n’avance guère.

-  Libération de Jacques Genevois par la chambre des Mises en Accusations de Liège. Malgré cette libération, Genevois reste toutefois inculpé de complicité d’enlèvement d’enfant.

image 161 x 48 - 1.2 ko- Les juges Doutrèwe (en charge du dossier Julie et Mélissa en ’95) et Ancia (en charge du dossier Cools) sont citées dans la presse comme étant menacées par téléphone et courriers anonymes. Une instruction judiciaire est immédiatement ouverte.

-  Selon un sondage français, l’affaire Dutroux est l’événement qui aura le plus marqué les Français au cours de l’année 1996.

-  Sous la plume de Nancy Ferroni (actuellement plus journaliste, mais porte-parole de la gendarmerie), on apprend dans La Dernière Heure que "cinq dossiers ont été ouverts par la BSR de Bruxelles. Cinq victimes se sont présentées : elles ont confié avoir subi les pires sévices au cours de messes noires et surtout avoir été contraintes elles-mêmes d’exercer des sévices, des violences graves envers de jeunes enfants (…) Les enquêteurs sont perplexes : ils parlent désormais de nébuleuse, ne savent pas encore établir que sacrifice d’enfant il y a eu, mais s’attaque sérieusement à ce dossier secte (en parlant d’Abrasax)."

Nos observations : Qui étaient ces cinq victimes : la journaliste fait-elle un peu trop précipitamment allusion aux témoins X (dont on n’entendra parler que beaucoup plus tard dans la presse) ? S’agit-il d’amalgames journalistiques douteux ? On peut s’autoriser à le penser. Quoi qu’il en soit, le processus de désinformation est en marche…

26 décembre

Les fouilles reprennent à Jumet. Le Soir divulgue que parmi les sources ayant mené les enquêteurs de Neufchâteau sur ce site, figure "Michelle Martin qui avait expliqué, voici plusieurs semaine, qu’on pourrait y trouver quelque chose". Le Soir ajoute que "Michelle Martin aurait également déclaré qu’à l’époque où Sabine Dardenne a été enlevée, elle avait entendu son mari dire qu’il fallait une fille pour Nihoul… ce qui accrédite évidemment", poursuit le très sérieux journal, "la thèse selon laquelle Dutroux et ses complices appartiennent à une nébuleuse de réseaux spécialisés dans l’exploitation d’enfants."

Nos observations : Il s’agit d’une époque où le dossier d’enquête de Neufchâteau n’est pas accessible aux parents d’enfants disparus. Ceux-ci, comme le grand public, n’ont donc accès qu’à l’information des médias. Si distillation de certaines thèses de réseaux il y a eu, elles proviennent purement et simplement de certains grands médias dès le début de l’enquête du juge Langlois. En fin d’instruction, lorsqu’il sera loisible pour toutes les parties concernées par le futur procès de prendre connaissance de l’intégralité du dossier, il sera néanmoins vérifiable que les propos de Michelle Martin concernant Nihoul et les tunnels de Jumet ont bel et bien été tenus.

27 décembre

Titre de La Libre Belgique : "Dutroux protégé ? Comme une évidence…" Pour poser un tel titre, La Libre Belgique s’appuie sur l’étonnement dont a fait part le procureur Bourlet par rapport à un dossier de viol commis à Obaix en 95, dans lequel il apparaissait que Dutroux, gravement soupçonné, n’avait pas été soumis aux tests ADN qui auraient éventuellement permis de la confondre, alors que ces analyses avaient pourtant été pratiquées sur deux autres personnes. Michel Bourlet ajoute que la réunion au sein du même parquet des dossiers OTHELLO (surveillances suite aux enlèvements de Julie et Mélissa), séquestrations à charge de Dutroux et Weinstein, et du viol d’Obaix (dont le suspect n°1 est encore Dutroux) devait immanquablement provoquer "une instruction à charge de Dutroux avec perquisition en son domicile".

28 décembre

En guise de bilan pour cette fin d’année 96, Le Soir publie une ligne du temps de l’affaire Dutroux, en reprenant les informations que contenait le rapport Othello de la gendarmerie :


"DUTROUX, UN SUSPECT DEMASQUE TROP TARD

1985
1er mars. Marc Dutroux est arrêté pour viol et vols qualifiés et détenu préventivement à Mons.

1986
3 février. Arrestation de Marc Dutroux pour viol, séquestration et vols.

1989
26 avril. Dutroux est condamné, en appel à Mons, à 13 ans et 6 mois de prison. Michèle Martin écope de 5 ans.

1992
6 avril. Marc Dutroux bénéficie d’une libération conditionnelle.

1993
21 octobre. Le premier maréchal des logis P. reçoit des informations qui font état de travaux effectués par Marc Dutroux dans les caves d’une de ses maisons à Marchienne-au-Pont : des cellules pour enfants.

8 novembre. La gendarmerie de Charleroi effectue une série de perquisitions. A Marchienne-au-Pont, les gendarmes constatent que des travaux sont bel et bien en cours.

10 décembre. La gendarmerie de Charleroi demande au juge d’instruction Lorent d’autoriser l’opération de surveillance “Decime”.

1994
5, 6 et 12 janvier. Le peloton d’observation, de soutien et d’arrestation (Posa) de Charleroi surveille Dutroux.

16 février. Fin de l’opération “Decime”.

13 juin. Sur ordre du juge Lorent, les gendarmes de Charleroi procèdent à de nouvelles perquisitions.

1995
24 juin. Julie Lejeune et Mélissa Russo sont enlevées à Grâce-Hollogne.

7 juillet. Fax de la brigade de gendarmerie de Charleroi à la brigade de Grâce-Hollogne qui enquête sur la disparition de Julie et Mélissa. Les informations sur Dutroux sont communiquées.

27 juillet. Le BCR envoie les photos et les documents sur Dutroux à Grâce-Hollogne.

28 juillet. Fax de la brigade de gendarmerie de Grâce-Hollogne à la BSR de Charleroi pour lui demander un contrôle des véhicules de Dutroux et Martin.

7 août. La brigade de Grâce-Hollogne demande au BCR de constituer un dossier sur Dutroux.

9 août. Le BCR organise une réunion à laquelle participent les BSR de Charleroi, Thuin et Namur.

22 août. Ann Marchal et Eefje Lambrecks sont enlevées à Ostende.

25 août. Le district de gendarmerie de Charleroi demande de lancer l’opération Othello.

28 août. Le Posa de Charleroi effectue la première observation de l’opération Othello.

2 novembre. Le procureur du Roi Marchandise est informé, pour la première fois, de l’opération Othello.

5 novembre. Avec Weinstein, Dutroux séquestre trois adultes dans le cadre d’un règlement de comptes.

6 décembre. Dutroux est interpellé pour le règlement de comptes et la séquestration du 5 novembre.

13 décembre. La BSR de Charleroi effectue des perquisitions chez Dutroux. A Marcinelle, les gendarmes entendent des cris, mais ne découvrent pas la cache de Julie et Mélissa.

19 décembre. Nouvelle perquisition à Marcinelle. Sans résultat.

1996
25 janvier. Les gendarmes interrompent l’“opération Othello”.

20 mars. Le juge d’instruction Lorent libère Marc Dutroux.

28 mai. Sabine Dardenne est enlevée à Kain.

9 août. Laetitia Delhez est enlevée à Bertrix.

12 août. Marc Dutroux est interpellé.

15 août. Libération de Sabine et Laetitia.

17 août. Les corps de Julie et Mélissa sont découverts à Sars-la-Buissière.

3 septembre. Les corps d’Ann et Eefje sont découverts à Jumet.

Septembre à décembre. Une trentaine de propriétés appartenant à Marc Dutroux ou fréquentées par lui sont méthodiquement fouillées. Sans résultat.

21 décembre. L’association sataniste “Abrasax” est perquisitionnée.

(Le Soir, 28.12.96)


Le même journal dresse le portrait de Connerotte et Bourlet en termes plutôt flatteurs : Jean-Marc Connerotte, pour sa part, est dépeint comme le "chevalier blanc chestrolais", tandis que Michel Bourlet est qualifié de "procureur têtu et tenace".

Nos observations : Ces qualifications de "chevalier blanc" et "procureur têtu et tenace" prendront au fil des années des consonances de plus en plus négatives. Cela ira jusqu’à la raillerie pour certains médias (qui se feront immanquablement porte-paroles des avocats d’inculpés).

De même, un portrait des douze inculpés de Neufchâteau dont nous reproduisons ci-dessous l’intégralité pour mémoire :


ENLEVEMENTS ET VOLS D’AUTOS : DEUX DOSSIERS A NEUFCHÂTEAU

Marc Dutroux

Aujourd’hui âgé de 40 ans, Marc Dutroux apparaît comme “ le chef ” du réseau de pédophiles en cours de démantèlement. A ses premiers aveux, qui ont permis la libération de Sabine et Loetitia et la découverte des corps de Julie et Mélissa, semble succéder un mutisme qui n’empêche cependant pas l’enquête de se déployer. Au lendemain des enlèvements de Julie et Mélissa, Dutroux fut considéré par la gendarmerie, qui monta les opérations secrètes Othello et Decime, comme le principal suspect des rapts. L’homme, incarcéré en 1985 pour l’enlèvement et le viol de mineures d’âge, avait été condamné en 1989 à 13 ans de prison. Il avait été libéré en 1992. Détenu.

Michel Nihoul

Cet “agent immobilier” bruxellois serait la tête pensante du réseau Dutroux. Il pourrait avoir servi d’interface entre le pédophile et les clients de la filière. Nihoul fréquentait assidûment les milieux politiques bruxellois. Il était aussi grand maître d’une confrérie brassicole. Mais l’homme est aussi un escroc. Arrêté dans le cadre de l’affaire Dutroux. Le tribunal correctionnel de Bruxelles poursuit son procès. Il avait monté une fausse association caritative, “ SOS Sahel ”. L’homme se déplace dorénavant à l’aide de béquilles. Il semble malade. Mais il n’a pas encore avoué tout ce qu’il sait. Et les enquêteurs sont certains qu’il détient les clés de l’enquête. Détenu.

Michèle Martin

L’épouse de Marc Dutroux fut condamnée à 3 ans de prison en 1989 pour complicité dans la séquestration et le viol par son mari de deux mineures d’âge. Michèle Martin fait figure de “ rabatteuse ”. Elle aurait pu repérer les fillettes à enlever. Des témoins affirment l’avoir vue à Grâce-Hollogne peu avant l’enlèvement de Julie et Mélissa. C’est également elle qui aurait dû nourrir les deux fillettes, séquestrées à Marcinelle et abandonnées à leur sort après l’arrestation de Marc Dutroux dans le cadre d’une affaire de vol, en décembre 1995. Michèle Martin apparaît comme une femme sous influence, totalement assujettie aux perversions de Dutroux. Détenue.

Michel Lelièvre

La biographie de Michel Lelièvre est peu connue. Ce jeune homme de 25 ans apparaît comme un vagabond autorisé par le couple Dutroux-Martin à partager sa table et à squatter l’un de ses taudis. Cette mansuétude était “ remboursée ” par les menus travaux que Lelièvre, ferrailleur-bricoleur, accomplissait pour ses hôtes dans leurs propriétés.

Il y avait aussi des “ services ” plus immondes. Lelièvre, totalement inféodé aux phantasmes criminels de son maître, est suspecté d’avoir été le docile complice de Dutroux dans l’exécution des enlèvements d’enfants, dont celui d’An et Eefje à Ostende, et d’avoir prêté son concours à la garde des gamines séquestrées. Détenu.

Michel Diakostavrianos

Ce garagiste surnommé “ Michel Le Grec ” est impliqué dans les deux principaux volets du dossier Dutroux : les meurtres et les enlèvements d’enfants et l’assassinat de Bernard Weinstein. Interpellé plusieurs fois avant d’être arrêté par le juge Connerotte, Michel Diakostavrianosvendait des pneus d’occasion, rachetés en Allemagne. Il fréquentait les dancings de la région de Charleroi, accompagné de filles originaires de Slovaquie, le pays dans lequel Marc Dutroux et ses complices se rendaient régulièrement. Une commission rogatoire belge s’est rendue en Slovaquie. Elle y a enquêté sur les activités de Dutroux : pornographie et prostitution. Détenu.

Bernard Weinstein

Le 17 août 1996, alors que les enquêteurs viennent d’exhumer les dépouilles de Julie et Mélissa à Sars-la-Buissière, ils mettent également au jour un troisième corps, celui de Bernard Weinstein. Ce petit truand français a été assassiné par Dutroux qui reprochait à son “ lieutenant ” de renseigner la police sur son compte. Weinstein vivait dans le chalet de la rue Daubresse, à Jumet, où les corps d’An et Eefje ont été retrouvés. En novembre 1995, la police investit les lieux et y libéra trois personnes séquestrées par Weinstein. Dutroux, se croyant “ doublé ” par son complice, lui fit avaler une tartine au Rohypnol (un puissant somnifère) et l’enterra vivant.Assassiné.

AnnieBouty

Inculpée“d’associationdemalfaiteursayantparticipéàdesenlèvementsetàlaséquestrationd’enfants”,AnnieBoutyestl’ex-femmedeMichelNihoul.Cetteex-avocateavaitétérayéedubarreaudeBruxellesaprèsavoir été condamnée pour escroquerie au détriment de réfugiés politiques. Elle avait déjà été arrêtée en 1983 à Liège pour avoir suscité un faux témoignage. Elle conservait avec Nihoul des contacts suivis. Les enquêteurs estiment qu’elle connaissait les activités de son ex-mari. Libérée.

Georges Zicot

Cet inspecteur principal de la police judiciaire de Charleroi, âgé de 45 ans, a été présenté comme le protecteur possible de Marc Dutroux, ce que Georges Zicot et ses avocats démentent. Figure de proue du volet “ vols de voitures ” ouvert à Neufchâteau, le policier se dit victime de la guerre des polices qui oppose la PJ à la gendarmerie. Georges Zicot a rédigé un faux PV dans l’affaire du camion volé, permettant ainsi à Gérard Pinon (voir ci-dessous) de toucher une prime d’assurance. Libéré.

Marleen De Cokere

Arrêtée le 24 septembre pour “ participation à une association de malfaiteurs notamment impliquée dans des faits d’enlèvements et de séquestration de mineurs d’âge, de séquestration de mineurs d’âge et de trafic de stupéfiants ”, Marleen De Cockere, âgée d’une quarantaine d’années, était l’une des compagnes de Michel Nihoul. Ils s’étaient rencontrés au Dolo, ce café d’Etterbeek où étaient organisées des parties fines. Les enquêteurs la soupçonnent de partager les secrets de Nihoul. Libérée.

Gérard Pinon

Ce commercant est le propriétaire du hangar où un camion volé par la bande Dutroux avait été caché. Pinon était un indicateur de l’inspecteur Zicot. Il avait dénoncé Weinstein et Dutroux au policier qui, pour le protéger, avait rédigé un faux PV, indiquant que le camion volé avait été retrouvé sur la voie publique. Gérard Pinon avait été dénoncé aux enquêteurs de Neufchâteau par Marc Dutroux. Celui-ci soutenait qu’il l’avait aidé à assassiner Bernard Weinstein, ce que le commerçant nie farouchement. Libéré.

Claude Thirault

Inculpé d’association de malfaiteurs, cet ancien locataire de Dutroux porte des accusations graves contre la gendarmerie : En 1993, Dutroux, qui savait que j’avais besoin d’argent m’a proposé 150.000 F pour enlever deux jeunes filles. J’ai alors balancé Dutroux à la gendarmerie de Charleroi dont j’étais l’informateur. J’ai parlé des travaux qu’il faisait dans ses maisons. J’ai donné ses plaques de voiture. Pourquoi n’ont-ils jamais vérifié ? Des affirmations que la gendarmerie dément catégoriquement. Libéré.

Pierre Rochow

Impliqué dans une affaire de camion volé, Pierre Rochow avait été séquestré avec un ami et une jeune femme par Dutroux et Weinstein, qui lui reprochaient de les avoir “ doublés ”. Libéré.

Thierry Dehaan

Patron du service des “ affaires spéciales ” de la Royale belge, il est soupçonné d’escroquerie à l’assurance, ayant octroyé une prime de 150.000 F à Pinon pour la restitution d’un camion volé. Un procédé qui bénéficiait, affirme Dehaan, de l’accord de la compagnie. Libéré.

(Le Soir, 28.12.96)


Toujours dans Le Soir, sous la plume d’Alain Guillaume, on peut lire que l’enquête menée à Neufchâteau "a permis de mettre à jour deux ou trois réseaux d’exploitation d’enfants ou plutôt une nébuleuse de voleurs ou de marchands d’enfants à l’œuvre en Belgique depuis de nombreuses années. Des dizaines de victimes sont tombées dans leurs filets. Plusieurs sont mortes. Trois autres, encore vivantes, ont été identifiées, et témoignent aujourd’hui. C’est ainsi que les enquêteurs ont appris et vérifient qui étaient les clients probables de ces réseaux et ce qu’ils y faisaient. Ces enfants, loués ou prêtés par leurs parents, volés à leurs familles… ou fabriqués à la commande, étaient livré dans des villas de clients fortunés, dans des bars louches, des châteaux de province, dans de sombres caves où se célébraient de diaboliques sabbats. Ce n’est pas un cauchemar, c’est la cruelle vérité du dossier instruit à Neufchâteau : une vérité qui s’étaie pas à pas et qui éclatera au grand jour dans les prochains mois. Les juges, les enquêteurs et leurs témoins ne sont pas seuls à connaître ces horreurs. Plusieurs journalistes, dont ceux du Soir, les partagent avec eux, à des degrés divers, depuis septembre."

Nos observations : Vous avez dit : info ? Vous avez dit : intox ? Vous avez dit "psychose collective" ? Il eut été bien difficile de rester froid à la lecture de tels articles publiés dans l’un des plus sérieux et des plus grands quotidiens de la presse belge. Ceux qui se sont abondamment plaints, par la suite, du climat de "psychose collective" que l’on entretint en Belgique en cette fin d’année-là, n’ont-ils jamais eu l’envie d’aborder les auteurs de cette littérature-là ? En ce qui nous concerne, nous devons constater que cet emballement médiatique généralisé n’a jamais été expliqué. Vérités tronquées, mensonges orientés ? Nul ne le sait encore aujourd’hui. Mais s’il s’est agit là uniquement de dérapages médiatiques, il y avait matière à beaucoup d’inquiétude sur l’état de notre société, de toute façon. Et s’il s’est agi d’une manipulation de l’information, comment expliquer son ampleur ?
Quel était le but poursuivi ?
Par qui ?

29 décembre


-  La Dernière Heure produit de "nouvelles révélations sur les amis de Nihoul". Il s’agit des premières informations qui seront publiées, dans la presse quotidienne, sur le château de Faulx-les-Tombes et les soirées très spéciales qu’y organisait Nihoul. La Dernière Heure dénonce sans les citer de nombreuses personnalités comme ayant participé à ces soirées en tant que relations de Nihoul. Michel Marteau constate dans son éditorial du jour que des "personnalités de la vie politique et policière de ce pays ont bénéficié de l’hospitalité disons intime de Nihoul et ses ami(e)s, et que certaines d’entre elles seraient sans doute très embêtées de voir leur nom imprimé à côté de celui du tristement célèbre Jean-Miche."

-  De manière étonnamment plus prudente que les confrères du Soir, un autre article de La Dernière Heure révèle également que "cinq témoins dont trois victimes auraient parlé" en faisant allusion au journal télévisé du jour précédent de la RTBF qui a affirmé que "l’un des liens entre les différents dossiers d’enlèvement d’enfants serait la piste satanique avec mis à mort rituelle. (…) Les enfants seraient sacrifiés lors de ces soirées sataniques, n’auraient jamais été déclarés. Ils seraient, en fait, achetés à des familles qui les mettent au monde dans l’unique but de les offrir en sacrifice. De l’argent serait versé aux parents de ces enfants par les organisateurs des messes noires. Parmi les participants à ces soirées, certaines personnes seraient ou auraient été influentes. Pour les pousser à garder le silence, ces personnalités seraient aujourd’hui rançonnées. Leur silence serait assuré grâce à des photos ou des vidéos prises par les organisateurs, avec menace de publication en cas de refus de paiement. Enfin, toujours selon la RTBF, des enquêteurs, des journalistes et les témoins interrogés dans le cadre de ce dossier auraient été menacés de mort."

Nos observations : Il est remarquable de constater que ce soit La Dernière Heure (journal de tendance sensationnaliste) qui ait pris toutes les précautions d’usage pour faire état de ces informations : le conditionnel est de mise et la référence à la RTBF sert de couverture.

-  "L’insoutenable attente" est un des gros titres, en référence aux interminables fouilles de Jumet. Autre titre : "L’absence de résultat vient s’ajouter aux rigueurs hivernales."

Nos observations : Avec une ingéniosité remarquable, les journalistes écrivant sur ce sujet, arrivent à broder des lignes et des lignes pour faire part de l’absence d’information concernant ces fouilles.

30 décembre


-  Michel Nihoul est condamné à trois ans de prison ferme dans l’affaire SOS Sahel. Il ne fera pas appel de ce jugement.

-  En cet avant-dernier jour de l’année, Jean-Luc Dehaene, Premier ministre, image 161 x 48 - 1.2 ko déclare que "le monde politique doit rester mobilisé sur les changements à apporter dans la société et entend, du reste, mettre à profit cette dynamique en 1997 pour adopter rapidement les réformes susceptibles de rétablir la confiance, tant entre les citoyens eux-mêmes que dans les institutions du pays."


A suivre : Troisième partie - Ambiance électrique autour de l’affaire "Loubna Benaïssa"

Forum : 3 message(s)

Le 1er avril 2005 : > Chronique d’une enquête étouffée (2)

Le 24 mars 2005 : > Chronique d’une enquête étouffée (2) , par  ?

Le 12 mars 2003 : > Chronique d’une enquête étouffée , par Jean-Maurice ARNOULD

Répondre à cet article

Ce forum est modéré à priori : votre contribution n'apparaîtra qu'après avoir été validée par un administrateur du site.

Titre :

Texte de votre message :
(Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.)

Lien hypertexte (optionnel)
(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d'informations, veuillez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse URL.)
Titre :

URL :

Qui êtes-vous ? (optionnel)
Votre nom (ou pseudonyme) :

Votre adresse email :