LE CIMETIÈRE DU MÉMORIAL DES NATIONS UNIES À BUSAN (CORÉE DU SUD)
par le docteur Jean-Marie
Thiébaud
fondateur de l'Académie Internationale de Généalogie
PRÉSENTATION GÉNÉRALE
Dans le quartier de Daeyon-dong (1) du port de
Busan (à l'extrémité méridionale de la péninsule de Corée), le cimetière
du Mémorial des Nations Unies (appelé aussi UNMCK – United Nations
Memorial Cemetery in Korea) s'étend sur une superficie de 14,39 ha.
Il a été créé le 18 janvier 1951 afin de
regrouper les corps des soldats onusiens déjà inhumés à Daegu, Daejon,
Inchon, Kaesong, Masan et Miryang depuis le début de la guerre de Corée.
Le 17 novembre 1955, l'Assemblée Nationale de la République
de Corée adopta une résolution exprimant la gratitude du pays aux troupes
de l'ONU qui ont payé un lourd tribut en hommes de
1950 à 1953. Ce même texte recommandait au gouvernement de demander à
l'Assemblée Générale des Nations Unies la création en Corée d'un cimetière
pour les soldats tués au combat contre les forces nord-coréennes et
chinoises. L'Assemblée Générale des Nations Unies adopta une résolution
dans ce sens le 15 décembre 1955. Un accord fut signé entre l'O.N.U. et la
Corée du Sud le 6 novembre 1959 et l'O.N.U. assuma la gestion du cimetière
à compter du 31 mars 1960 tandis que la Corée cédait la concession à
perpétuité d'un terrain libre de toutes charges.
L'entrée monumentale du cimetière, fermée par une
grille de fer forgé, a été dessinée par Kim Chung-up. La toiture blanche
aux courbes concaves de type asiatique symbolise le ciel. Quant aux colonnes
bleues qui la soutiennent, elles représentent la vie qui monte du sol vers
le ciel. De nuit, des projecteurs animent cet ensemble d'une rare harmonie,
financé par la municipalité de Pusan.
Le musée du Mémorial aligne sur ses cimaises, pays
par pays, des photos des hommes et du matériel militaire (avions, bateaux,
blindés, pièces d'artillerie, les insignes de leurs unités, etc.). Sur
l'emplacement réservé à la France, on reconnaît le lieutenant-colonel de
Germigny (2) abaissant le drapeau de son régiment devant le ministre de la
Défense de la Corée du Sud. Des photographies voisines montrent des
officiers de liaison français à bord d'une jeep et des prises de vues aériennes
de sites stratégiques.
Un Mémorial, construit dans la partie basse du
cimetière, a été créé en 1978. Il contient les noms des 37 895
membres des forces de l'O.N.U. (soldats de Corée du Sud exceptés) tombés
de 1950 à 1953 pendant la guerre de Corée.
À quelques mètres du musée, un Memorial Service
Hall a été inauguré le 21 août 1984. De conception architecturale très
moderne, il possède une toiture recouverte par six grosses poutres blanchâtres
en béton, disposées en Λ et solidement ancrées par des anneaux métalliques
dans des blocs cubiques fichés dans le sol. Le concepteur, un Coréen qui,
par ailleurs, a voulu éclairer l'édifice par une série de vitraux semi
abstraits, a choisi cette forme triangulaire générale dans l'intention de
représenter l'éternité et d'englober les différents types de foi de ceux
qui sont inhumés dans ce cimetière (musulmans, protestants, catholiques,
etc.).
La partie supérieure du cimetière est
symboliquement divisée en 20 parcelles pour chacun des pays qui servirent
sous la bannière de l'O.N.U. La Belgique et le Grand-duché du Luxembourg
d'une part, l'Inde et l'Italie d'autre part sont regroupés deux à deux. Ce
sont donc 22 drapeaux qui flottent au-dessus du mémorial.
(1) Pour se rendre dans cette presqu'île située au sud de la ville à
quelques centaines de mètres de la mer, prendre le bus 134 (ou 25, 68, 78.
93) et descendre à la station qui suit le rond-point où on a érigé un
monument représentant en uniforme un soldat de chacun des pays engagés
dans les troupes de l'ONU lors de la guerre de Corée. Disposés en cercle,
ces statues de bronze, tournées vers l'extérieur, s'adossent à une gerbe
de pylônes en béton qui forment une corolle supportant un globe terrestre
métallique ajouré. On peut aussi rejoindre le cimetière des Nations Unies
par le métro (station Daeyeon). À l'entrée du cimetière, une pancarte
annonce que des guides bénévoles parlant anglais, chinois et japonais sont
à la disposition des visiteurs. On peut tout aussi bien s'en passer, le
silence étant souvent plus propice à la montée des émotions. Puis, après
ce flash-back sur cette époque la plus sensible de la guerre froide et ce
qui aurait pu tout aussi bien déboucher sur une troisième guerre mondiale,
il est permis de se plonger dans un présent grouillant de vie parmi parents
et enfants coréens jouant dans le parc qui jouxte le cimetière, au milieu
d'un foisonnement d'arbres, de massifs floraux et de sculptures comme celle
réalisée par l'artiste éthiopien Mickael Bethe-Selassié (qui vit en
France), citoyen d'honneur de la ville de Pusan (Busan). On peut aussi découvrir
les principales essences végétales de la Corée en allant prendre une leçon
de botanique et un grand bol d'oxygène dans un arboretum voisin. On imagine
trop bien la réaction des vétérans retrouvant les lieux où ils
combattirent dans le froid et la boue sous le feu ennemi et transformés de
nos jours en parc au gazon parfaitement entretenu et semé de petites
plaques portant des noms de camarades et séparées les unes des autres par
des rosiers.
(2) Il reçut du général J.E. Hull, de l'Armée des États-Unis, pour ses
officiers et ses hommes sur le point de quitter le pays pour l'Indochine,
une chaleureuse lettre de félicitations. Le Mausolée donne à tort à ce
lieutenant-colonel français le nom de Germing.
Norvège
Suède
Éthiopie
Danemark
Colombie
République De Corée
Belgique
Luxembourg
Afrique Du Sud
Inde
Italie
Pays-Bas
Turquie
Grèce
Thaïlande
Nouvelle-Zélande
Philippines
Australie
Canada
U.S.A.
Grande-Bretagne
France
Les tombes s'alignent en contrebas selon le
quadrillage suivant :
Turquie
Turquie
Turquie
Turquie
Pays-Bas
Place vacante
France
Australie
Canada
Canada
Grande-Bretagne
Grande-Bretagne
Grande-Bretagne
Grande-Bretagne
Australie
U.S.A.
Canada
Grande-Bretagne
Mémorial du Commonwealth
Grande-Bretagne
Nations Unies
Le cimetière abrite les dépouilles de 2 300
hommes originaires d'Afrique du Sud (11), d'Australie (281), du Canada
(378), de la République de Corée (36), de France (44), de Grande-Bretagne
(885), des Pays-Bas (117), de Nouvelle-Zélande (34), de Norvège (1), de
Turquie (462) et des U.S.A. (36). Sans oublier 4 soldats inconnus et 11
non-belligérants.
Ces 2 300 hommes sont ceux qui restent des 11 000
qui étaient encore enterrés ici en 1954. Depuis cette date, la plupart
d'entre eux ont été rapatriés dans leurs pays d'origine.
Ces nombres sont à mettre en parallèle avec les pertes subies par les pays
envoyés par l'ONU (1) :
Corée du Sud : 237 686
U.S.A. : 33 870
Grande-Bretagne : 1109
Turquie : 724
Canada : 516
Australie : 340
France : 262 (2)
Colombie : 214
Grèce : 183
Thaïlande : 134
Pays-Bas : 124
Éthiopie : 122
Philippines : 112
Belgique : 106
Nouvelle-Zélande : 41
Norvège : 3
Le Mémorial du Commonwealth porte l'inscription :
1950-1953
ON THIS MEMORIAL ARE INSCRIBED THE NAMES OF MEN FROM BRITAIN, CANADA,
AUSTRALIA, NEW ZEALAND AND SOUTH AFRICA WHO DIED IN THE KOREAN WAR AND HAVE
NO KNOWN GRAVE. THEY DIED WITH MEN OF OTHER COUNTRIES FIGHTING TO UPHOLD THE
IDEALS OF THE UNITED NATIONS
Les noms y sont gravés par pays, armes (Navy,
etc.), grades, avec un maximum de détails. On y relève aussi le nom de médecins
militaires.
On remarque aussi deux monuments élevés par la
Turquie de part et d'autre du mémorial grec, un mémorial australien et un
mémorial canadien.
Le mémorial australien sommé des armoiries du
pays, sculpté à Melbourne par Ross Bastiaan en 1998 et financé par le
gouvernement australien (dans le cadre du Programme de Commémoration 1998),
se présente sous forme d'une carte des deux Corées (séparées par le 38e
parallèle) (3), coulée dans le bronze et entourée
- en bas et à droite, d'un soldat en treillis et rangers, reconnaissable au
premier coup d'œil rien qu'au chapeau de brousse à larges bords que
portent les militaires australiens en campagne
- en bas et à gauche, d'avions de la RAAF Meteor Jets
- des bateaux HMS Anzac, Bataan, Condamine, Culgoa, Murshison, Shoalhaven,
Sydney, Tobruk et Warramunga
- une table des pertes humaines
Pertes
NAVY
Armée de Terre
AIR
TOTAL
Morts
5
293
41
353 (4)
Blessés
6
1210
?
1216
Prisonniers
23
6
29
Une sculpture sert de mémorial pour les Canadiens :
sur un socle de granit (5), un soldat de bronze porte une fillette sur son
bras droit et pose sa main gauche protectrice sur l'épaule d'un garçon qui
marche à ses côtés. La fillette tient dans ses bras un bouquet de 21
feuilles d'érable et le garçon un autre de 21 roses représentant le
nombre des militaires canadiens tués et non identifiés. Cet ensemble a été
sculpté par un artiste coréen, Yoo Yung Mun d'après un dessin d'un vétéran
canadien, Vincemt R. Courtenay. Il porte en légende l'inscription anglaise :
WE WILL NEVER FORGET YOU SONS OF CANADA.
Pour commémorer le 50e anniversaire du
conflit, les vétérans canadiens se sont réunis au Parc de la Confédération
à Ottawa le 23 septembre 2003 afin de dévoiler sur la rue Slater une copie
de ce mausolée (6) en présence du premier ministre Jean Chrétien, du
ministre du Patrimoine Sheila Copps, du capitaine-chapelain Michel Dion et
de Chang Ki-ho, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République
de Corée au Canada.
(1) Chiffres relevés dans le musée du Mémorial de Busan. Ils ne prennent
en compte que les vies humaines et non le nombre encore plus impressionnant
de blessés.
(2) Ce chiffre est inférieur d'une vingtaine d'hommes à celui qui apparaît
sur le monument de Suwon car ce dernier fait figurer les noms de Coréens
qui ont combattu aux côtés des nôtres pour mettre numériquement le
bataillon français aux normes d'un régiment américain. La France a eu
aussi 3760 blessés lors de ce conflit.
(3) avec les principales villes où les Australiens eurent à combattre
pendant la guerre de Corée : Inchon, Kimpo, Pusan (actuellement
Busan), Séoul, Taegu (actuellement Daegu).
(4) Ce total ne correspondant pas à la somme des colonnes précédentes
(339) ni à celui (340) qui figure dans le musée. Fabrice Mosseray, sur le
site Internet http://www.dnd.ca,
donne le chiffre de 516.
(5) extrait de carrières montagneuses proches de champs de bataille
jouxtant la DMZ (zone démilitarisée sur le 38e parallèle).
(6) réalisée par le même sculpteur coréen.
LES TOMBES FRANÇAISES
Insignes du Régiment
Français et de la 2e division américaine d'infanterie
(Indianhead) dans laquelle il fut intégré pendant la guerre de Corée
Officiellement, 44 tombes françaises demeureraient
à Busan mais l'auteur n'en a retrouvé que 41.
ASKEUR Messaoud, soldat de 2e classe, + le 06.10.1951. N.B. :
il ne semble pas figurer sur le monument de Suwon.
BARDINAL Georges, soldat de 1re classe, + le 14.02.1951
BONNAUD Henri, caporal, + le 07.10.1952
BOURIES Gérard, caporal-chef, + G. de C. le .25.07.1952. N.B. :
il est nommé BOURIEZ sur le monument de Suwon.
BOUZERIBA Khemis, soldat de 1re classe, + le 06.10.1952.
N.B. : il ne semble pas figurer sur le monument de Suwon.
CALCET Jean, sergent, + le 25.07.1952
CALVEZ Marcel, sergent-chef, + le 01.02.1951
CARON Fernand, soldat de 2e classe, + le 05.03.1951
COURRIC François, soldat de 2e classe, + le 01.02.1951
DJIAN Julien, soldat de 2e classe, + le 04.07.1953
DROUIN René, caporal, + le 07.06.1953
DULONG-COURTY Maxime, soldat de 2e classe, + le 21.09.1951
FLEURY René, soldat de 2e classe, + le 06.10.1952
FOUILLEN Louis, soldat de 2e classe, + G. de C. le
01.02.1951. N.B. : il est nommé FOUILLON sur le monument de Suwon.
HUITOREL Lucien, soldat de 2e classe, + le 26.09.1951
ISAULE Abel, caporal-chef, + G. de C. le 07.10.1952. N.B. : il
est nommé ISAULE-GREEN sur le monument de Suwon.
LANDRI Mohammed Mohamed, soldat de 2e classe, + le
18.07.1952. N.B. : il est prénommé Mohamed Amar sur le monument
de Suwon.
LASRI Mohamed, caporal-chef, + le 05.03.1951. N.B. : il est prénommé
Mohamed Kaddour sur le monument de Suwon.
LEBIHAN Élie, soldat de 2e classe, + le 01.02.1951
LELAY André, soldat de 1re classe, + le 26.06.1953
LEMAIRE Michel, caporal-chef, + le 05.03.1951
LESAGE Adrien, sergent-chef, + le 30.05.1951
LESPINE Roger, soldat de 2e classe, + le 06.10.1952
MADDALENO Henri, soldat de 2e classe, + le 16.09.1951
MAILLOT Raymond, soldat de 2e classe, + le 28.05.1951
MARHOUS Lactine, caporal-chef, + le 14.02.1953. N.B. : il est
inscrit sous le nom de Mahrous LAKITA sur le monument de Suwon.
MAUDUIT René, soldat de 2e classe, + le 22.02.1952
MAURER Jean, sergent, + le 06.03.1951. N.B. : il est prénommé
Jean-Pierre sur le monument de Suwon.
MENASRIA Mohamed, soldat de 1re classe, + le 06.10.1952
MENINI Marcel, soldat de 2e classe, + le 07.10.1951
NICOLAS René, soldat de 2e classe, + le 05.03.1951. N.B. :
il ne semble pas figurer sur le monument de Suwon.
PIOT Marcel, caporal-chef, + le 26.02.1953. N.B. : il est prénommé
Michel sur le monument de Suwon.
RIO Pierre, caporal-chef, + le 14.08.1952. N.B. : il est prénommé
Pierre-Marie sur le monument de Suwon.
SAMSON Pierre, soldat de 2e classe, + le 12.01.1951
SARDAT Gaétan, soldat de 2e classe, + le 26.09.1951. N.B. :
il est présent sur le monument de Suwon sous le nom de SARDA.
SEGMANE Saadi, soldat de 2e classe, + le 20.09.1951
SEMBDNER Bernard, caporal, + le 15.10.1952
THIERRY André, soldat de 1re classe, + le 13.02.1951