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Arena Civica (Milan)

 

Le sport moderne n'a de toute évidence pas grand-chose à voir avec les formes de sport préexistantes, avant la fin du XIXe siècle, plus proches du jeu que du sport organisé et réglementé. Il est donc naturel que les stades modernes soit largement différents de leurs prédécesseurs. Et l'évolution de l'architecture sportive est incarnée par un ouvrage, un arène à l'antique devenue le premier véritable stade moderne : l'Arena Civica de Milan.

Pour Napoléon et les Milanais

Lorsqu'en 1803 des gradins de bois sont montés aux bords d'un terrain herbeux près du vieux centre de Milan, il va de soi qu'il ne peut s'agir que d'une solution temporaire. Il en est ainsi notamment dans l'esprit de Luigi Canonica, qui supervise l'ensemble des constructions du Foro Bonaparte, qui doit devenir le nouveau cœur de la vie milanaise et des activités collectives de son peuple. L'architecte, précurseur de l'urbanisme moderne, prépare en effet un ouvrage plus grandiose, faisant appel à l'inspiration antique, avec le but avoué de constituer un symbole à la gloire de Napoléon. L'Empereur des Français est en effet couronné roi d'Italie en 1805 : c'est Canonica qui organise les festivités de son couronnement qui se déroule au Foro Bonaparte, le 26 mai. Et en cette même année 1805, Canonica dévoile les nouveaux plans d'une arène ovale, l'Arena Napoleonica, faite toute de pierre dans le style le plus monumental. Les travaux débutent l'année suivante et l'inauguration se déroule le 17 août 1807. L'ouvrage ne présente alors pas son aspect définitif : quatre colonnes sont installées en 1808 (réutilisées après la démolition de l'église Sant'Agostino delle Agostiniane), la "porte triomphale" de l'Arena Napoleonica est projetée en 1813 et ce n'est qu'en 1827 que l'Arena de Milan, la plus importante réalisation de Canonica, est enfin achevée.

L'arène de Milan n'est pas conçue pour être un monument sans vie. Au contraire, sa raison d'être est d'abord la volonté d'y organiser toutes les manifestations collectives, festives, culturelles, politiques et sportives dans la cité lombarde. Comme les arènes antiques, l'Arena Napoleonica peut aisément être transformée en bassin pour accueillir de fréquentes et populaires naumachies (batailles navales miniatures), ou des courses à la rame. Dès 1807 d'ailleurs, le 17 décembre, l'Empereur Napoléon, le vice-roi et le roi de Bavière sont présents pour assister à une naumachie et une régate de barques. Au XIXe siècle, plutôt que de sports on peut parler de jeux, là encore très proches du modèle antique. L'Arena Napoleonica accueille ainsi également des courses de biges (chars à deux roues tirés par deux chevaux), des carrousels (spectacle équestre en musique) et toutes sortes de compétitions équestres. On y vient aussi s'émerveiller devant des éléphants, admirer des feux d'artifice, assister à des spectacles d'équilibristes et à d'autres numéros de cirque, participer à du tir au pigeon. Par deux fois le "Wild West Show" de William Frederick Cody, dit Buffalo Bill, se produit à l'Arena, en 1894 et en 1906.

Plus rare, en 1830, une grande maquette de baleine en bois, en métal et en toile y est montée et crée l'étonnement des Milanais. Puis, plus tard, tout au long du siècle et au début du XXe, on y voit des spectacles d'aérostats, de montgolfières et de parachutes. On y voit des courses entre automobiles rudimentaires organisées par le tout jeune Automobile Club da Milano (fondé en 1903). On y voit les premières rencontres italiennes de basket-ball (que l'on appelle encore "palla al cesto"), sport tout juste importé des États-Unis et dont Milan reste la capitale nationale jusqu'au déménagement de la Fédération à Rome en 1930. On y voit aussi des rencontres de "palla ovale", le rugby : la première équipe du pays est créée à Milan (US Milanese), en 1909. On y aménage enfin une patinoire pendant l'hiver dès la fin du XIXe siècle, selon une vogue citadine occidentale, où les Milanais s'amusent, et où les champions de courses s'affrontent.

Le premier stade moderne

L'Arena Napoleonica, acquise en 1870 par la municipalité de Milan et rebaptisée dès lors Arena Civica (ce qui correspondrait à peu près au terme "arène municipale"), est un équipement sans équivalent, et qui n'est pas pour rien dans l'activité sportive débordante de la ville. C'est à Milan que les sports modernes sont importés et adoptés. C'est au milieu des gradins de pierre de l'Arena Civica que naît le sport italien, et que les jeux antiques laissent la place aux compétitions contemporaines, dans la droite ligne de l'essor du mouvement olympique en Europe, dans les dernières années du XIXe siècle. Et si le sport moderne hésite dans un premier temps entre plusieurs modèles d'architecture sportive, notamment avec l'amphithéâtre ouvert du stade olympique d'Athènes, c'est bien le modèle de l'arène fermée à la romaine exhumé et remis au goût du jour à l'Arena Civica de Milan qui devient la norme pour les stades sportifs modernes.

Il faut dire que la forme de l'arène se prête mieux à certaines manifestations, comme les courses cyclistes. L'Arena Civica accueille les plus prestigieuses compétitions cyclistes de la Belle époque. Les Championnats d'Italie s'y déroulent notamment le 25 juillet 1895. Le 30 mai 1909, la première édition du Giro d'Italia (tour d'Italie) s'y achève. La boxe a également droit de cité à l'Arena Civica, notamment en ce 20 mai 1923, lorsqu'Erminio Spalla conquiert devant son public le titre européen des lourds face au Hollandais Van der Veer.

L'athlétisme trouve naturellement un terrain idéal entre les tribunes de l'Arena Civica. Une piste est en effet aménagée pour accompagner l'essor de l'athlétisme italien. En terre battue noire, elle mesure 500 mètres et accueille des meetings internationaux dès 1913. Sa longueur ne sera réduite à 400m qu'en 1963. Des rencontres par équipes sont également organisées, la première opposant l'Italie à la Tchécoslovaquie le 30 mai 1925. Douze records du monde ont été établis sur la piste de l'Arena Civica, sur les seize obtenus en tout à Milan. Dans l'avant guerre, Luigi Beccali, médaillé d'or du 1 500m à Los Angeles en 1932, établit là un record dans la même discipline le 17 septembre 1933 (39'49"0), puis un record du 1 000 yards le 4 novembre suivant (2'10"0).

Le calcio et l'Inter

Mais évidemment, de tous les sports que les Milanais apprennent à connaître à l'Arena Civica, celui qui est promis à la plus grande postérité est bien le football. On estime que le sport est importé en Italie par l'ex-champion de cyclisme Carlo Braida en 1895. En tout cas, la contagion est rapide, même si elle ne touche Milan qu'après Turin ou Gênes. Mediolanum, premier club local, est créé en 1898, l'année même où la Fédération nationale est constituée à Turin. L'année suivante, en décembre 1899, est créé le "Milan Cricket and Football Club", le futur Milan AC. Le premier match à l'Arena Civica se déroule le 20 mai 1900, avec le derby Mediolanum - Milan AC. Puis, une semaine plus tard, les rossoneri du Milan reçoivent la Juventus de Turin. Le Milan et Mediolanum font leurs premiers pas dans un championnat d'Italie balbutiant en 1901, et que les rossoneri remportent immédiatement. La "Palla al Calcio" comme on l'appelle encore ("balle au pied", déformation du terme anglais "football" qui désignait non pas l'usage du ballon mais sa taille réglementaire), fait des émules à Milan comme ailleurs, et d'autres clubs sont fondés : l'US Milanese en 1902 et l'Internazionale le 8 mars 1908 (ce dernier naissant d'une scission avec le Milan AC). Enfin, l'équipe nationale italienne foule pour la première fois la pelouse de l'Arena Civica le 15 mai 1910, et bat la France (6-2). La Nazionale y revient  affronter en général des nations voisines : la Hongrie (0-1) et la Suisse (2-2) en 1911, l'Autriche en 1914 (0-0), la Suisse en 1926 (3-2), la Hongrie en 1935 (2-2). La concurrence des autres stades de la ville, et notamment du Stadio San Siro du Milan AC, réduit toutefois les visites des Azzurri.

L'Arena Civica reste néanmoins largement utilisée pour le football jusqu'à la seconde Guerre mondiale. Car si le Milan joue ailleurs, l'Inter adopte le vieux stade du centre-ville pour tous ses matches à domicile. Deux ans après sa fondation, en 1910, le club nerazzuro remporte son premier scudetto sous la direction de son capitaine et entraîneur Virgilio Fossati, hélas tué pendant la première Guerre mondiale. Il faut attendre 1920 pour voir l'équipe remporter un deuxième titre national, avec dans ses rangs le frère de Virgilio, Giuseppe Fossati. Après sa fusion avec l'US Milanese, et son changement de nom en Ambrosiana Milan puis en Ambrosiana-Inter (suivant en cela l'exigence de Mussolini lui-même, inquiet de la consonance communiste du terme "Internazionale"), le club remporte la toute première édition de la Serie A, en 1929-1930. Suivent les titres 1938 et 1940, tandis que l'Ambrosiana-Inter remporte aussi sa première Coppa Italia en 1940, après une finale jouée chez les voisins du Milan AC, à San Siro. En 1942, le club retrouve son nom d'Internazionale.

La guerre, qui suspend les compétitions de football, provoque aussi de graves dégâts à l'Arena Civica, notamment lors du bombardement de Milan le 13 septembre 1943. Le sport reprend néanmoins ses droits à peine les hostilités terminées. Dès 1945, le stade accueille le tour final du scudetto non-officiel de la partie nord de l'Italie (Campionato Alta Italia) : face à Venezia et au Torino, la petite équipe de La Spezia remporte un titre surprenant, qu'elle cherche aujourd'hui à faire reconnaître. Le 20 mai 1945, le "Grande Torino" de Valentino Mazzola affronte une sélection mixte de joueurs du Milan AC et de l'Inter, battue 5-4. Puis, le 24 juin, l'athlétisme revient aussi avec une exhibition de la Cinquième armée américaine. Le 23 septembre de la même année, c'est encore le football qui règne sur l'Arena Civica, avec une rencontre entre les Anglais de la 592e division des troupes royales et ceux de l'Assembly Centre. Le rugby suit le même jour, avec une rencontre entre les amateurs de Milan et une sélection militaire sud-africaine. L'Arena Civica reprend vie. L'Inter y dispute toujours ses compétitions jusqu'en 1948, année où les nerazzurri rejoignent San Siro, devenu stade municipal.

L'athlétisme toujours

Le football professionnel fuit donc l'Arena Civica. Les amateurs, eux, continuent de s'y faire plaisir. Et puis, le 14 janvier 1952, ce sont des gloires du cyclisme qui viennent y taper dans le ballon. D'un côté, l'équipe de Fausto Coppi, sous les couleurs du Milan. De l'autre, celle de Gino Bartali, sous les couleurs de l'Inter. Dans les tribunes, 25 000 spectateurs assistent à ce match dont les bénéfices sont reversés au profit des victimes des inondations du Pô de 1951. Les coéquipiers de Coppi l'emportent sur un score de tennis (6-0).

Sans le football, l'athlétisme devient le seul sport à créer l'événement dans l'Arena Civica de l'après-guerre. Et les records continuent d'y tomber. Le 10 octobre 1948, le grand Adolfo Consolini, médaillé d'or à Londres quelques mois plus tôt, bat son propre record du disque (55,33m). Deux ans plus tard, le 8 octobre 1950, Armando Filiput, établit un record au 440 yards haies (51"9). Le 30 octobre 1956, Janusz Sidlo pulvérise de 10 centimères le record du javelot (83,60m). Record porté à 86,74m par Carlo Lievore le 1er juin 1961. Le 2 juillet 1969, c'est un record féminin qui est établi par Paola Pigni, en 1 500m (4'12"4). Puis, en 1972, Pietro Mennea fait sensation en égalant coup sur coup le record européen du 100m, le 16 juin (10"), et celui du 200m, le 17 juin (20"2). En 800m, Marcello Fiasconaro bat le record du monde en 1'43"7, le 27 juin 1973. Enfin, en 1980, le Polonais Wladislaw Kozakiewicz établit un record de saut en hauteur (5,72m) le 11 mai, à l'occasion de la "Pâques de l'athlétisme" (Pasqua dell'Atleta) ; puis, le 3 juillet, l'Américain Edwin Moses court le 400m haies en 47"13.

Mais même pour des événements ponctuels, l'Arena Civica est désormais trop visiblement vétuste et mal adaptée aux exigences du sport moderne. Des rénovations ont finalement lieu au début des années 1990. Désormais, l'Arena Civica de plus en plus délaissée par le sport professionnel retrouve sa polyvalence des débuts : les concerts rock ou classique y sont notamment de plus en plus fréquents. Cela n'empêche pas l'organisation de grands événements sportifs de manière ponctuelle. En 1996 s'y déroulent notamment consécutivement la finale du Grand Prix IAAF d'athlétisme et la "Notturna di Milano", meeting international d'athlétisme désormais renouvelé chaque année au mois de juin. Année après année, les Hicham El Guerrouj, Maurice Greene, Christine Aron et autres champions internationaux perpétuent la vie de l'Arena Civica. Le patriarche des stades a de beaux jours devant lui.

 
 

Nom officiel : Arena Napoleonica ou Arena del Foro Bonaparte (1807-1870), Arena Civica (1870-2003), Arena Civica "Gianni Brera" (depuis 2003)
Club résident :
Internazionale Milan (1908-1948)
Inauguration :
1807
Capacité :
30 à 40 000 (1807), 18 000 (1996)
Record d'affluence :
?
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