Nogent-sous-Coucy : une abbaye bénédictine disparue.









Cette maîtrise a été soutenue en juin 1996 à l'université de Picardie Jules-Verne. Vous trouverez un résumé que vous pouvez copier ci-dessous.

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UNE ABBAYE BENEDICTINE AU MOYEN AGE
NOGENT-SOUS-COUCY XIIIEME-XIVEME SIECLES

 


 
L'abbaye de Nogent-sous-Coucy fut fondée en 1059 sur la rive droite de l'Ailette, dans la plaine qui est dominée par le château de Coucy. Il s'agit d'une fondation de la famille de Coucy. Ce n'est pas une création "ex nihilo" de cette famille. La légende, rapportée par le chroniqueur Guibert de Nogent, nous apprend qu'il y aurait eu à cet endroit, à l'époque du Christ, une ancienne chapelle où auraient été enterrés les restes d'un roi anglais du nom de Quilius qui se convertit au christianisme. Inconnu, même des anglais, ce Quilius fut révéré comme un saint par les moines de Nogent. Son effigie ornait le sceau de l'abbaye. L'installation des moines dans cette nouvelle abbaye n'intervint pas de suite car rien n'était prêt pour accueillir les moines. Ceux-ci ne s'y installèrent qu'en 1076. Le nouvel établissement religieux connut un afflux de donations diverses jusqu'à la première moitié du XIIème siècle, ce qui lui permit de se constituer un temporel varié composé d'églises, de biens fonciers et de revenus réguliers de diverses natures. D. Barthélémy, qui l'étudia jusqu'à la fin du XIIème siècle, constata cependant un essoufflement des donations vers la fin du XIIème siècle. Des sources, représentées par une soixantaine de textes et un cartulaire-chronique constitué à la fin du XVIIème siècle, nous permettent d'aborder l'étude de l'abbaye de Nogent selon trois axes principaux. Ce sont les cadres de vie, le temporel de Nogent-sous-Coucy, et les relations avec le monde extérieur.
 

L'abbaye de Nogent-sous-Coucy est située dans un environnement naturel très favorable. La région de Coucy-le-Château est en effet formée de collines dont l'altitude varie de cent à deux cents mètres, très découpées, fourmillant de petits ruisseaux et de petits plans d'eau. Guibert de Nogent et Dom Cotron, le rédacteur du cartulaire-chronique, insistent sur la caractère poissonneux de l'Ailette ainsi que sur les autres qualités naturelles de l'endroit : les terres sont très fertiles, et les forêts giboyeuses. Les possibilités économiques sont donc très vastes. De plus l'ensemble bénéficie de la proximité de plusieurs rivières, en particulier l'Oise, la Serre et l'Aisne ainsi que d'une voie antique, la chaussée; Brunehaut. L'environnement de l'abbaye présente donc le double avantage d'avoir de nombreuses possibilités économiques et d'être proche des voies de communication.
Le site sur lequel se dressait autrefois l'abbaye porte peu de traces de son existence. Des constructions monastiques il ne reste qu'un portail monumental. L'architecture de l'établissement religieux nous est pourtant connue grâce à Dom Cotron qui dessina les plans du monastère. L'ensemble comptait une église, probablement bâtie en deux temps au XIIIème siècle, un cloître où logeaient les moines, une maison abbatiale et une hôtellerie. Cet ensemble massif suggère la présence d'un nombre important de moines. Ce n'était probablement pas le cas. Bien que les indications soient fragmentaires, il semble qu'il n'y ait guère eu plus d'une dizaine de moines à Nogent, sous l'autorité d'un abbé et d'un prieur, dont la mission était de rendre un service spirituel consistant à prier pour le salut de leurs semblables.

L'ensemble des biens constituant le temporel de l'abbaye est réparti pour l'essentiel dans la vallée de l'Ailette, donc à faible distance de l'abbaye. Certains domaines sont plus éloignés, mais ils sont situés à proximité des voies de communications. Le temporel était de deux natures: il comportait des biens fonciers et des revenus. Il provenait essentiellement de dons, mais également d'achats et d’échanges. Au travers d'une vingtaine d'églises, les moines assuraient un service paroissial. Ils ne le rendaient pas eux-mêmes, nommant des desservants chargés de cet office. Ils possédaient également de nombreux biens fonciers, en majorité des terres, mais aussi des forêts, des maisons, des moulins, et des vignes. Des revenus réguliers leur étaient assurés par les dîmes ainsi que des redevances, soit en nature, soit en argent, mais payables à des dates déterminées ce qui leur assurait un revenu régulier. La gestion de l'abbaye de Nogent s'apparentait ainsi à celle d'un seigneur foncier d'autant que les moines possédaient également des droits de justice sur certains villages. Les textes nous apprennent également l'existence de type de tenanciers sur les terres appartenant aux moines: les hôtes et les hommes. Malgré ce temporel varié, il semble que l'abbaye ait commencé à connaître des difficultés économiques à la fin du XIVème siècle.

 L'abbaye de Nogent reste un lieu ouvert sur le monde qui l'entoure. Les moines sont en contact fréquent avec leur hiérarchie. Les papes écrivent et dressent l'inventaire des biens des moines. Ils apparaissent rarement. En revanche les moines sont en contact régulier avec les évêques, surtout celui de Laon, mais également avec les officialités. D'autres abbayes apparaissent également dans les textes de Nogent, en particulier celle toute proche de Prémontré. Les relations sont généralement cordiales, mais peuvent parfois s’envenimer. Des laïcs interviennent dans les textes. Leur générosité permet aux moines d'étoffer leur temporel, mais parfois ils ne font que vendre des terres à l'abbaye. Plusieurs familles de l'aristocratie locale apparaissent régulièrement. Les interlocuteurs laïcs privilégiés de l'abbaye restent cependant les sires de Coucy. Outre de généreuses donations, ceux-ci assurent à partir de la fin du XIIIème siècle la protection des moines et de leurs biens. Malheureusement, ils disparaissent définitivement à la fin du siècle suivant.
 

 La disparition des Coucy, qui jouaient un rôle crucial dans la région, les difficultés économiques, et les conditions de vie difficiles semblent indiquer que la fin du XIVème siècle marqua pour l'abbaye de Nogent la fin d'une époque de prospérité.