jeudi 8 mai 2003, par Magnakaï
On entend refleurir depuis quelques années certaines références au GRECE et à la « Nouvelle droite ». Mais, au fait c’est quoi au juste la « Nouvelle droite » ?
La « Nouvelle droite » est un courant de pensée que l’on peut rattacher à l’extrême-droite, né en 1968 avec la fondation du GRECE. Le GRECE (Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne) est une sorte de synthèse des divers groupuscules d’extrême-droite racialistes et élitistes héritéés de la Guerre d’Algérie (Europe-Action, Fédération des étudiants nationalistes, ou le Rassemblement Européen de la liberté). Ces derniers prônent « un nationalisme européen » les rapprochant de la revue de Maurice Bardeche (beau-frère de l’écrivain collaborationniste Robert Brasillach)« Defense de l’Occident », avec lequel beaucoup de membres du GRECE ont fait leur premières armes.
Les réferences fondatrices du GRECE sont pêle-mêle Gramsci, Pierre Drieu La Rochelle, Céline, Barrès, Konrad Lorenz, René Guénon, Julius Evola, Pareto, Ernest Jünger, Nietszche, Louis Rougier puis plus tard Hegel. Le groupement, à ses débuts, exalte l’identité européenne (ce qui le différencie du nationalisme maurrassien), combat les monothéismes nés chez les sémites du Moyen-Orient pour le remplacer par le paganisme indo-européen.Le Groupement est aussi violemment anticommuniste mais aussi contrairement à leurs compères du Club de l’Horloge, (né en 1974 maison mère de la pensée de Bruno Mégret) il est anticapitaliste. Enfin , le GRECE est eugéniste et s’interesse de près aux avancées de la génétique.
Très vite le GRECE se dote d’une revue savante « Nouvelle école » puis d’un trimestriel « Eléments », au sein de ce groupe très savant, on trouve des habitués de la droite extrême que sont le régionaliste Jean Mabire, Dominique Venner ancien membre du groupuscule « Jeune nation » et disciple du national-communiste Jean Thiriart, le très paien Pierre Vial et surtout le jeune polygraphe à l’intelligence encyclopédique Alain de Benoist(aka Fabrice Laroche ou Robert de Herte), ancien collaborateur de Coston et de Bardèche.
Après une gestation de près de dix ans, « la Nouvelle droite » accède à une tribune non négligeable(plus importante que celle de « valeurs actuelles » du très droitier Raymond Bourgine auquel ils participaient depuis 1974) par le biais d’une collaboration au Figaro-magazine fondé en 1978 par un de leur sympathisant Louis Pauwels. Ils avancent ainsi, au grand dam de Jean D’Ormesson, leur rhétorique antimonothéiste, pro-paienne et élitiste, antimarxiste et anticapitaliste dans la revue de Robert Hersant dans une perspective métapolitique chère à Gramsci.
Inquiets de voir cette tentative de réarmement idéologique de la droite et de l’extrême-droite, le journal « Le Monde » mène une véritable campagne de combat, reprise par « Le Nouvel observateur », « L’Express », « La Croix » contre le groupement et surtout contre Alain de benoist, lauréat du prix de l’académie française avec le livre « Vue de droite » durant l’été 1979, plus communément appellé « l’été de la nouvelle droite ».
Le bruit engendré par cette campagne conduit Robert Hersant à chasser les néodroitiers du « fig mag », d’autant plus que Pauwels se convertit au catholicisme en 1982 et s’éloigne de facto du GRECE. La traversée du désert commence et Alain de Benoist voit le nombre de défections augmenter au profit du Front National, véritable sang-sue des cadres grécistes. De Benoist, lui en profite pour réaménager la doctrine du GRECE en mettant en avant un differencialisme et un tiers-mondisme plus policés.
Les années 90 voient une forme de certaine reconnaissance intellectuelle pour De Benoist, quant à sa nouvelle revue « Krisis » elle recueille de prestigiueuses signatures:Regis Debray, Jacques Julliard, Jean Baudrillard, et Pierre André Taguieff qui ne se remettra jamais du lynchage médiatique, orchestré par Edwy Plenel, à propos de sa prétendue « complaisance » vis à vis du GRECE (l’affaire des « rouges-bruns »).
La fin des années 90 et le début du XXI siècle voit Alain de Benoist se rapprocher des positions altermondialistes, notamment en professant un anti-américanisme virulent et une toute nouvelle sensibilité écologiste.Emmené par une nouvelle équipe dirigée par le jeune Charles Champetier et toujours Alain de Benoist, le GRECE salue la venue d’écrivains « politiquement incorrects » et leur consacre des articles élogieux dans la revue « Eléments » que ce soit Houellebecq, Dantec, Muray, BDL et les tenants de la revue « Cancer ! »
Cependant le GRECE ne sert plus maintenant de boite à idées à l’extrême-droite, d’abord parce que ces derniers sont menacés par les théories d’anciens compagnons comme Guillaume Faye (alias skyman qui officiait sur skyrock) qui developpe un discours anti-musulman et pro-occidental relayé dans la sphère politique et médiatique (le fameux expert Alexandre del Valle ancien du GRECE et membre de l’UMP), ensuite parce que leur nouveau discours très anticapitaliste et communautariste, n’est pas très bien passé auprès de la base de la droite extrême.
Au final, si certains thèmes dont s’était emparé le GRECE au milieu des années 70 sont devenus majeurs avec la venue du nouveau siècle (choc des cultures, crise de la démocratie, vocation de l’école ), le Groupement semble condamné tant il souffre du magistère d’Alain de benoist, véritable gourou de cette socièté de pensée et intellectuel plutôt brillant mais pas éternel...