L'histoire des Bouquinistes

   En 1857, on compte soixante-huit bouquinistes concessionnaires. En 1865, ils sont soixante-quinze.

   La ville concède à chacun dix mètres de parapet et perçoit un droit annuel de tolérance de 26,35 F, plus une patente de 25 F. Les boîtes, petites, pouvaient être facilement transportables. Elles seront ouvertes du lever au coucher du soleil.

   En 1866, au moment des aménagements de Paris par Haussmann, il est question d’expulser les bouquinistes des quais pour les rassembler dans l’ancien Marché à la volaille, quai des Grands-Augustins, démoli depuis et remplacé par l’immeuble de la RATP.

   En 1892, les cent cinquante-six bouquinistes, qui deviendront deux cents en 1900, ont désormais le droit de laisser leurs boîtes la nuit, sur le parapet.

   En 1910, lors des fameuses inondations, ils seront les premières victimes.

   De nouvelles mesures officielles sont décidées en 1930. La dimension des boîtes est réglementée, la vente exclusive des livres exigée, l’interdiction faite aux bouquinistes d’être détenteurs d’une boutique. Une seule nomination par ménage, mais le ou la bouquiniste pourra se faire assister par un suppléant.

   Depuis, la vie a suivi son cours, avec des fortunes diverses ; et malgré les aléas, les bouquinistes des quais de la Seine maintiennent une tradition unique au monde au cœur de Paris.

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   J’ajouterai à l’historique de Guy Silva ces informations :

   - durant la seconde guerre mondiale, les autorités d’occupation exigèrent que des espaces séparent les jeux de boîtes, pour permettre une meilleure surveillance et une défense efficace des quais par l’armée. La longueur totale des étalages fut donc ramenée de 10 à 8 mètres. La guerre finie, la mesure fut maintenue.

   - sous la présidence de Georges Pompidou, alors que le tracé de la voie-express rive gauche n’était pas fixé, le projet d’expulsion des bouquinistes des alentours de Notre-Dame fut exhumé, avec rassemblement dans divers lieux aussi fantaisistes que machiavéliques ! L’action des associations qui prirent la défense de ce site unique, comme le décès du Président, permirent de réenterrer à la fois le projet et la hache de guerre. Jusqu’à quand ?

   - deux bouquinistes s’aimaient d’amour tendre. Ils durent vivre quelques années “dans le péché“ car le règlement ne permettant qu’un seul jeu de boîtes par ménage, le mariage leur aurait fait perdre la moitié de leurs revenus. Le nouveau règlement promulgué en 1993 rapporta donc, pour eux et tous ceux qui les imiteront à l’avenir, cette mesure cruelle !