Compte rendu

"Casse-toi, pauvre con !" : quatre mots à 1 000 euros

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LAVAL ENVOYÉE SPÉCIALE

"Casse-toi, pauvre con !" : quatre mots lâchés par Nicolas Sarkozy au Salon de l'agriculture, le 23 février. Quatre mots qui pourraient coûter cher à Hervé Eon, 56 ans, poursuivi pour offense au président de la République.

Il est 11 heures, le 28 août, lorsque M. Sarkozy arrive à Laval, où il vient défendre le revenu de solidarité active (RSA). M. Eon, militant de gauche, se rend en centre-ville à vélo pour assister à une manifestation. Apercevant un véhicule aux vitres teintées immatriculé 75, il brandit un écriteau mentionnant la formule de M. Sarkozy. M. Eon est immédiatement mis à terre par deux policiers. Le parquet décide de déclencher des poursuites.

L'homme comparaissait, jeudi 23 octobre, devant le tribunal correctionnel de Laval. Plusieurs dizaines de militants - appartenant notamment à la CGT, au PCF ou aux Verts - avaient fait le déplacement pour lui témoigner leur soutien. Jean-Luc Mélenchon, sénateur PS de l'Essonne, s'est exprimé en qualité de témoin de moralité. Il a dit craindre "un retour du crime de lèse-majesté".

Interrogé par le président du tribunal, Patrice Douchy, M. Eon s'est défendu : "Je ne suis pas un voyou. Je n'ai pas voulu insulter directement le président. Cette phrase était destinée à qui voulait bien la prendre pour lui." "Faux, a rétorqué le procureur, Alex Perrin. On voit clairement à qui se rattache la mention, qui n'exprime d'ailleurs ni une opinion ni une conviction, mais qui injurie." Selon le représentant du ministère public, le comportement de M. Eon, déjà poursuivi pour des actes de fauchage volontaire, tombe sous le joug de l'article 26 de la loi du 29 juillet 1881 réprimant l'offense à la fonction présidentielle. Il a requis 1 000 euros d'amende.

"TROIS PAGES DE PROCÈS-VERBAL"

Côté défense, on essayait de comprendre. "Je dois avouer, monsieur le président, que lorsque j'ai été saisie de cette affaire, je n'y ai d'abord pas cru, déclare Me Dominique Nogueres. Je m'attendais à un dossier fourni, je n'ai reçu que trois pages de procès-verbal !" Et l'avocate de poursuivre : "Je constate qu'il n'y a aucun témoin des faits. Quant à la victime, on est dans le flou total." Pour la défense, en effet, les mots de M. Eon - repris dans une "citation dépourvue de guillemets" - auraient pu être adressés à n'importe qui.

Au terme de sa plaidoirie, Me Nogueres s'est efforcée d'alerter le tribunal sur les dangers d'une jurisprudence qui légitimerait la répression de la liberté d'opinion. La décision sera rendue le 6 novembre.

Anne-Claire Poignard
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RÉACTIONS DES ABONNÉS DU MONDE.FR
ANDRE B. :
«
Cath B: NS accomplit un travail extraordinaire et travaille bien au dela des 35 heures préconisées par la gauche. L'expression a pu lui échapper car c'est un être humain surmené! Cependant le marin pêcheur l'avait traité "d'enculé"... et la gauche qui ne veut pas respecter le résultat des urnes l'insulte sans arrêt (cf faits divers). Voir comme les élus de gauche vocifèrent à l'assemmblée ne respectant pas le temps de parole des autres. Quel exemple pour notre jeunesse que ces visages haineux!