C'est le formidable palmarès 2001 de Michael Owen (Coupe d'Angleterre, Coupe de la Ligue, Coupe de l'UEFA, Supercoupe d'Europe, Charity Shield, qualification pour le Mondial avec la sélection anglaise), constellé de coups d'éclat et de buts autant spectaculaires que décisifs, qui orienta le jury de France Football sur sa piste. Le magnifique Raul « pesa » moins lourd et le superbe Oliver Kahn non plus. La performance du capitaine du Bayern fut assez exceptionnelle : pour la quatrième fois seulement, un gardien terminait dans le tiercé de tête. L'avaient précédé Lev Yachine, vainqueur en 1963, Dino Zoff, deuxième en 1973, et Ivo Viktor, troisième en 1976. Vingt-deux ans après la seconde victoire de Keegan, Michael Owen relança donc un palmarès conforme à l'évolution du rapport des forces dans le football européen. L'éclipse obligée du football anglais de clubs à la suite de la catastrophe du Heysel avait réinstallé le Calcio dans sa superbe, maintenu la Liga en état de résistance et, pour finir, ouvert un espace au football français. La fin de la pénitence, la création de la Premier League en 1993, ramenèrent l'Angleterre dans le match, puis redistribuèrent les cartes en sa faveur. Ainsi, le Ballon d'Or d'Owen rappela que ce pays occupait une place importante au palmarès. Après l'ouverture en but majeur de Stanley Matthews (1956), Bobby Charlton (1966) et Kevin Keegan (1978 et 1979) l'emportèrent à leur tour, l'un sous le maillot de Manchester United, l'autre sous celui du Hambourg Sport Verein, qui n'était donc pas celui du Liverpool FC, précisément quitté l'année précédente par Kevin. Et la présence anglaise se trouva encore renforcée par les sept deuxièmes places de Billy Wright (1957), Bobby Charlton (1967 et 1968), Bobby Moore (1970), Kevin Keegan (1977), Gary Lineker (1986), David Beckham (1999) et les deux troisièmes places de Jimmy Greaves (1963) et d'Alan Shearer (1996). |
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L'ATTAQUANT À RÉACTION | ||||||||||
(...) Son rayon d'action est la surface de réparation, même si une frappe de balle très soudaine, avec un « armé » particulièrement réduit, lui permet de marquer en dehors de celle-ci. Il s'excentre rarement jusqu'aux abords de la ligne de touche. Plus il est loin du but, moins il est à l'aise, rejoignant en cela les grands buteurs de l'histoire, race à laquelle il appartient depuis ses débuts fracassants juste avant le Mondial 98. Mais à proximité de l'objectif, il possède une technique de pied et de corps aussi sobre que parfaite. Peu de talonnades, de rateaux, de passements de jambe, ou même de doubles contacts, mais un déchet incroyablement réduit dans les contrôles, les prises de balle ou les pivots, et très peu dans les tirs, décochés plus souvent à basse altitude qu'en lucarne, et qui trouvent souvent le petit filet intérieur après être passés sous la jambe du tacleur arrivé une fraction de seconde en retard. (...) Il possède évidemment les deux pieds, et, s'il est petit, son jeu de tête est tout à fait excellent. D'abord parce qu'il est anglais, et qu'on ne plaisante pas avec ce genre de choses dans son pays, ensuite parce qu'il possède un timing et un sens de l'anticipation propres aux joueurs d'exception. Prendre 50 cm d'avance sur son garde du corps, c'est sa spécialité, et cela peut aussi servir à couper les trajectoires, surtout quand on les devine avant les autres.
Il faut souhaiter, pour le bien du football, que l'on songe à protéger les chefs-d'ouvre en péril que sont les grands attaquants d'aujourd'hui. Pour qu'on puisse le plus longtemps possible admirer Mike Owen, le plus jeune Ballon d'Or de l'histoire après Ronaldo en 1997, qui ne dépare pas la prestigieuse galerie où il vient de prendre place. Jean-Jacques Vierne
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