PAR ANNE-LISE TENEUL
douai@lavoixdunord.fr PHOTO ARCHIVES ÉMILIE DENIS
Le président du Syndicat mixte des transports du Douaisis (SMTD), Freddy Kazmarek, a demandé au maire de Douai de mettre sa culture administrative et technique (il est ingénieur de formation) au service du dossier du tramway Évéole. Il a donc mandaté Jacques Vernier afin que celui-ci suive la procédure d'homologation du tram, avec l'ingénieur du SMTD chargé du dossier. C'est ainsi que, la semaine dernière, les deux représentants du SMTD sont allés à Paris assister à une importante réunion. Autour de la table : plusieurs représentants d'APTS, le constructeur d'Évéole, deux représentants du CNRV (1), un représentant du service des transports guidés (2), et enfin deux représentants du ministère des Transports (le premier chargé de la sécurité routière, le second chargé du ferroviaire). « Le dialogue entre les deux branches de l'État a été assez long », rapporte Jacques Vernier. Pendant deux heures, les échanges n'ont porté que sur une seule question, essentielle pour l'homologation : savoir si, oui ou non, le conducteur d'Évéole sera autorisé à prendre le contrôle du volant lorsque le véhicule sera en mode guidé et roulera normalement, sans incident en vue.
Finalement, la réponse fut : non. Le service des transports guidés - comme le SMTD d'ailleurs - ne veut pas que le conducteur soit en mesure de reprendre le contrôle du volant sous une impulsion. Car « dans sa conception, le tramway Évéole est rattaché dans l'esprit au système ferroviaire », explique M. Vernier. Tout comme un conducteur de train n'est pas capable de manoeuvrer pour mettre le train hors des rails, le conducteur d'un Évéole ne devra pas avoir la capacité de quitter les rails virtuels, matérialisés par les plots de guidage informatique. APTS mettra donc un système qui empêche le conducteur de reprendre la main sur le volant tant qu'il n'y a pas de défaillance. La fin de cette dernière phrase a toute son importance. Car là où les choses se compliquent, c'est que les services de l'État ont apporté une autre exigence : si d'aventure le système informatique décelait une sortie de trajectoire, ils veulent que le conducteur puisse instantanément reprendre la main sur le volant. Cette condition a été posée, bien que la probabilité de voir un Évéole sortir de ses rails virtuels soit infime. « Elle est presque aussi improbable qu'un déraillement ferroviaire », compare M. Vernier, qui relève qu'« on impose à Évéole des choses qu'on n'impose ni à un train, ni à un tram sur rails. » Cela est dû à la nature même de la conception d'Évéole, qui n'entre pas dans une catégorie unique et clairement définie (soit un tramway, soit un bus), mais présente un caractère hybride (un tramway sur pneus sur rails virtuels, capable de sortir des rails sous certaines conditions).
Toujours est-il qu'APTS devra répondre à cette condition imposée par les services de l'État : au cas où un tram Évéole sortirait de la route tracée, le système de guidage devra pouvoir être déconnecté instantanément, et le conducteur reprendra le contrôle du volant. Les conclusions de la réunion ont ceci de positif, qu'elles apportent enfin un éclairage précis sur la question du contrôle du volant. Une première depuis le début de la procédure d'homologation. « Les représentants d'APTS étaient plutôt optimistes, rapporte Jacques Vernier. Selon eux, l'objectif est techniquement possible. » Bien sûr, un certain nombre des tests devront être réalisés afin de prouver la fiabilité du système. La procédure d'homologation va donc encore prendre du temps. Mais on peut raisonnablement espérer qu'Évéole circulera fin 2010.
> 1. CNRV : Centre national de réception des véhicules.
2. Plus exactement le STRMTG, Service technique des remontées mécaniques et des transports guidés.