L'Océan
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''The Glorious First of June'' par Philippe-Jacques de Loutherbourg, 1795. Représente le combat entre le HMS Queen Charlotte (à gauche), vaisseau trois-ponts de 100 canons de l'amiral Howe, et le 118 canons Le Peuple de l'amiral Villaret de Joyeuse (à droite).

 

Le 19 juin 1786 est ordonnée la construction d'un nouveau 118 canons du type Le Commerce de Marseille dont la construction a commencé quelques mois plus tôt à Toulon.

Le trois-ponts est mit en chantier le 12 août 1786 à Brest, sa construction est financée par les Etats de Bourgogne d'où son nom de baptême, Les Etats de Bourgogne. Il est lancé le 8 novembre 1790 et entre en service dans la Marine française au mois de décembre de la même année. Le vaisseau a exactement les mêmes caractéristiques que les autres 118 canons français, tant en dimensions qu'en armement.

Les évènements en France conduisent rapidement à rebaptiser le vaisseau La Côte d'Or le 27 janvier 1793. Néanmoins, quelques mois plus tard, le 27 octobre 1793, il est décidé de renommer une nouvelle fois le navire, qui devient La Montagne.

En novembre 1793, Jean Bon Saint-André, membre du comité de salut public chargé de la réorganisation de la marine militaire, minée par l’insubordination, nomme Villaret de Joyeuse, tout juste élevé au grade de contre-amiral, commandant de l’armée navale de Brest, à la place de Morard de Galles, destitué après la mutinerie de Quiberon de septembre 1793. Villaret de Joyeuse reçoit l’ordre d’arborer son pavillon sur la Montagne.
A bord du vaisseau, l’atmosphère est étrange. Une guillotine est installée sur le pont, et le bourreau mange à la table des officiers.
Sur le gaillard avant, des orateurs prononcent des discours patriotiques en permanence. Villaret de Joyeuse est en outre constamment surveillé par Jean Bon Saint-André.

Le 1er juin 1794, le navire reçoit son baptême du feu et est criblé de boulets par les HMS Queen Charlotte et HMS Royal Sovereign, alors qu'il tente de défendre un convoi en Atlantique, lors des Combats de Prairial. A la fin du combat, on compte sur le vaisseau 6 tués, dont le capitaine de vaisseau Bazire, et 22 blessés. Villaret écrit à propos du comportement de Saint-André pendant le combat : "Ah le coquin ! A l'instant de la bordée du Queen Charlotte, il descendit dans la cale".

Quelques mois seulement après le difficile combat de Prairial, le 118 canons, portant toujours la marque de Villaret de Joyeuse, qui a été nommé vice-amiral le 27 septembre 1794, participe, avec l'ensemble de l'escadre de Brest, à la catastrophique campagne du Grand Hiver (décembre 1794 / janvier 1795), croisière inutile, voulue par la convention nationale, durant laquelle l'escadre perd 5 vaisseaux de ligne.

De mai à juin 1795, le 118 canons changent encore de nom, devenant Le Peuple puis L'Océan, nom qu'il gardera tout le reste de son long service pour la Marine française. Il effectue pendant ce temps divers sorties de Brest dont le combat de Groix, le 23 juin 1795, toujours avec la marque du vice-amiral Villaret de Joyeuse.

Subissant un radoub à Brest en 1797, l'Océan est ensuite envoyé en Méditerranée ou il effectue une campagne en 1799 sous la marque du vice-amiral Bruix.

De retour à Brest sous la division de Villaret de Joyeuse, à qui Bonaparte vient de confier le commandement de l'escadre, il appareille pour amener des troupes à Saint-Domingue le 14 décembre 1801.

Refondu en 1804, il quitte une nouvelle fois Brest le 11 février 1809 pour une expédition en Guadeloupe, mais l'escadre rejoint finalement Rochefort a lieu la terrible bataille de l'ile d'Aix. L'Océan échappe alors de justesse aux brûlots anglais. Quelques mois après la bataille, le 9 novembre 1809, le commandant Jean-Baptiste Lafon, qui commandait Le Calcutta durant l'affaire des brûlots d'Aix, est passé par les armes à bord de l'Océan, ayant été jugé responsable de la catastrophe par un conseil de guerre par 5 voix contre 4.

Le navire restera ensuite inactif jusqu'à la fin de l'Empire. Sa carrière ne s'arrête pourtant pas là puisque l'Océan subi deux refontes en 1818 et 1836, devenant une batterie flottante à Brest en mai 1851. L'Océan est finalement désarmé le 11 janvier 1854, rayé des listes de la Marine le 25 avril 1855 et démoli au cours de la même année. Le navire sera resté environ 65 ans en service dans la Marine française !

 

Le vice-amiral Villaret de Joyeuse.