22 mars 2011

Les syndicats français et le DGB - la fédération des syndicats allemands - ont lancé ensemble, mardi 22 mars à Paris, la fronde contre le pacte pour l’euro impulsé par la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy, pacte qui doit être adopté au conseil des chefs d’Etat et de gouvernement européens des jeudi 24 et vendredi 25 mars à Bruxelles, en contrepartie du renforcement du fonds de soutien aux pays en difficulté.

“Nous, les syndicats allemands et français, nous refusons ensemble le pacte fatal et asocial que nos deux gouvernements veulent mettre en place. Je me réjouis du fait que l’axe franco-allemand ne fonctionne pas uniquement au niveau des chefs d’Etat ou au niveau des ministres des finances, mais que nous [les syndicats allemands et français] nous travaillons la main dans la main sur notre chantier commun destiné à rendre l’Europe plus sociale”, a déclaré, mardi 22 mars, lors d’une conférence de presse commune Annelie Buntenbach, membre du comité de direction du DGB, tandis que le secrétaire général de la CGT Bernard Thibault dénonçait “ce qu’il faut bien appeler une agression sociale caractérisée”.

“Madame Merkel et Monsieur Sarkozy ont attaqué de front les droits des salariés en Europe avec leurs propositions en faveur d’un “pacte pour la compétitivité”. Ce pacte est une attaque contre nous tous. Ce pacte n’est pas une nouvelle déclaration d’amitié franco-allemande, mais une déclaration de guerre néo-libérale qui va creuser encore les écarts au sein de notre société”, a ajouté Mme Buntenbach. “L’Europe n’est pas malade du fait des droits sociaux. Par contre, elle sera de plus en plus contestée si elle sert de levier pour mettre en concurrence les travailleurs européens sur le moins disant social”, a assuré M. Thibault.

Les syndicats français - la CFDT, la CGT, FO, l’UNSA et la CFTC - auxquels se sont associés la FSU et Solidaires, et le DGB ont adopté une déclaration commune dans laquelle ils réclament “un changement d’orientation politique pour une Europe juste et équitable”. Ils se prononcent “contre une gouvernance économique basée sur une conception limitée de la compétitivité fondée sur la stagnation, voire la réduction des salaires et sur des marchés de travail flexibles et dérégulés”. “Une gouvernance économique ne peut pas reposer sur les seuls objectifs d’équilibre budgétaire. L’Europe a besoin de favoriser en même temps le développement économique et social”, ajoutent-ils.

La question du pacte “ne fait que commencer. On est dans un processus long”, a fait remarquer le secrétaire général adjoint de la CFDT, Marcel Grignard, en évoquant les manifestations prévues le 24 mars à Berlin et à Bruxelles, le 26 à Londres et le 9 avril à Budapest à l’appel de la confédération européenne des syndicats (CES), dont le prochain congrès se tient à Athènes en mai. Ce sera celui du départ pour Jonh Monks, secrétaire général de la CES depuis 2003 et ancien “patron” des TUC britanniques.

Cantonales : le vote du 20 mars et la proximité syndicale

 

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Les résultats du vote au premier tour des élections cantonales selon la proximité syndicale ont été analysés pour Liaisons sociales par Harris Interactive. L’enquête en ligne, réalisée dimanche 20 mars selon la méthode des quotas auprès d’un échantillon de 2057 Français inscrits sur les listes électorales dans les cantons renouvelables, apporte un certain nombre de confirmations et quelques précisions intéressantes.

L’étude fait d’abord apparaître que les personnes se déclarant proches d’un syndicat sont plus nombreuses (64%) à avoir voté pour un candidat de gauche que la moyenne des exprimés (50%). Ce sont les candidats du Front de gauche (14% contre 9% en moyenne) et les candidats socialistes ou divers gauche (41% contre 32%) qui ont bénéficié de leur vote, la proportion d’exprimés en faveur d’un candidat écologiste étant quasi-similaire  que l’on se déclare proche d’un syndicat ou pas.

Le Front de Gauche recueille respectivement 36% et 37% des suffrages exprimés par les personnes se déclarant proches de la CGT ou de Sud-Solidaires, et le PS 51% des suffrages exprimés par les proches de la CFDT. La droite fait un score de 24% chez les personnes affichant une proximité syndicale, sauf à la CFE-CGC où elle est nettement majoritaire (62%).

Les personnes se déclarant proches d’un syndicat ont moins voté pour le Front National (9%) que la moyenne nationale (15%). Cette moyenne générale dissimule des écarts. Ainsi, c’est parmi les proches de Force Ouvrière que l’extrême-gauche d’un côté (3%) et le Front National de l’autre (15%) font leur meilleur score. Ce qui peut s’expliquer par le côté attrape-tout de cette organisation syndicale.

FO a récemment sanctionné une de ses déléguées régionales dans le Nord qui se présentait sous l’étiquette FN aux élections cantonales. Mais, comme la CFE-CGC et la CFTC, Force Ouvrière a refusé de s’associer à la déclaration de l’intersyndicale condamnant l’idée de ”préférence nationale” véhiculée par le FN et jugée contraire aux valeurs du syndicalisme.         

Retraites complémentaires : FO donnera sa réponse le 28 mars

Force Ouvrière a décidé, lundi 21 mars, de renvoyer à son bureau confédéral du 28 mars la décision de signature ou de non signature du projet d’accord sur les retraites complémentaires. L’organisation syndicale avait un temps envisagé de faire connaître, dès le 21, sa position. Mais, après un entretien dans la matinée avec Philippe Pihet, chef de file de la délégation FO à la négociation, le secrétaire général de la confédération, Jean-Claude Mailly, a souhaité que la nouvelle commission exécutive - constituée après le congrès de Montpellier à la mi-février - puisse prendre connaissance et débattre du projet d’accord. Sauf imprévu, c’est donc le bureau confédéral du lundi 28 mars qui tranchera.

Vendredi dernier, au terme de la dernière séance de négociation sur l’avenir des régimes de retraite complémentaire de l’Agirc (cadres) et de l’Arrco (non cadres), M. Pihet était apparu partagé sur le projet d’accord. Mais il considérait que la proprogation jusqu’au 31 décembre 2018 de l’Association de gestion des fonds de financement de l’Agirc et de l’Arcco (AGFF) était un point positif.

Sans cette disposition, saluée par tous les syndicats, les personnes liquidant leurs retraites complémentaires à partir du 1er juillet toucheraient une pension réduite au maximum de 22%. Compte tenu de la sensibilité des salariés et des retraités sur les questions de retraite, la prorogation de l’AGFF pourrait faire pencher FO du côté de la signature. L’organisation syndicale attend toutefois les derniers chiffrages de l’Agirc et de l’Arrco sur le texte patronal.    

21 mars 2011

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Ils se sont affichés sur les plateaux de télévision et à la tête des manifestations contre la réforme des retraites de 2010. Ils ont mis en scène pendant des mois plus que leur entente cordiale : une certaine forme de proximité. Ils n’ont pas hésité à se donner du “François, tu” ou de “Bernard, tu” au journal de 20 heures. Mais depuis que les mobilisations sociales de la fin de l’année dernière se sont heurtées à l’inflexibilité de Nicolas Sarkozy et depuis que les syndicats ont été acculés à l’échec, les relations des secrétaires généraux des deux premières organisations syndicales françaises se sont singulièrement refroidies.

Bernard Thibault a, certes, pris soin de passer un coup de téléphone à François Chérèque pour lui dire que la CGT boycotterait, début janvier, les traditionnels voeux du chef de l’Etat aux partenaires sociaux. Depuis, plus rien. Pas le moindre contact. Mais il y a plus : le ”patron” de la CGT avait souhaité rencontrer Alain Olive avant qu’il ne quitte ses fonctions de secrétaire général de l’Unsa. Lequel a accédé bien volontiers à sa demande.

Les deux hommes ont déjeuné ensemble et, pendant ce déjeuner, Thibault a exposé en long, en large et en travers ses désaccords avec la CFDT. Et cassé du sucre sur le dos de Chérèque, en laissant paraître son agacement de voir la CFDT vivre mieux que la CGT la sortie du conflit des retraites. “Chacun son tour !”, pourrait répliquer le numéro un cédétiste que son ralliement à la réforme des retraites de 2003 avait plongé dans de grandes difficultés…

La vivacité des critiques cégétiste a surpris l’Unsa. Elle témoigne, au-delà des alliances de circonstance, de la persistance de divergences de fond entre la CGT et la CFDT sur leur conception du syndicalisme et de la négociation collective. La contestation de la réforme des retraites achevée, chacun retourne à son pré carré : le syndicalisme de contestation pour la CGT, le syndicalisme de proposition pour la CFDT. Comme s’il fallait choisir l’un contre l’autre !

L’approche des élections professionnelles de 2013, censées permettre de mesurer l’audience des syndicats, exacerbe cette tendance au repli identitaire dans l’ensemble du mouvement syndical. L’intersyndicale, sous perfusion, a beau exister encore, les relations intersyndicales s’enveniment un peu partout.

Ainsi, les chefs de file CFDT et CFE-CGC à la négociation sur les retraites complémentaires, Jean-Louis Malys et Danièle Karniewicz, n’ont pas dissimulé le peu d’estime dans lequel ils tenaient la stratégie de l’autre. ”On n’est pas là pour défendre quelques cadres dirigeants”, s’est exclamé en fin de négociation M. Malys. “Je ne laisserai pas brader la retraite par répartition”, a martelé Mme Karniewicz. Il n’en aurait pas fallu beaucoup plus pour qu’ils s’envoient franchement des noms d’oiseaux à la tête.  

Le 8 avril, quoi qu’il en soit, Thibault et Chérèque prendront le même avion pour Budapest (Hongrie) où la Confédération européenne des syndicats (CES) appelle à manifester le 9 pour dire non aux politiques d’austérité. Ce sera leur première occasion de tête à tête depuis des mois.

Retraites complémentaires : la CFDT se prononcera “dans les dix jours”

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La CFDT ne se précipitera pas pour annoncer sa décision de signer ou de ne pas signer le projet d’accord sur les retraites complémentaires. Elle se prononcera ”dans les dix jours” après avoir consulté les responsables de ses unions régionales interprofessionnelles (URI) et de ses fédérations, a indiqué dimanche 20 mars le secrétaire général de la centrale syndicale, François Chérèque, laissant le soin aux autres confédérations de faire connaître leur décision avant la CFDT.

“Notre position est que cet accord est équilibré, c’est ce qu’ont dit les négociateurs. Maintenant, on va regarder les détails” et “on va regarder ce que font les autres”, a ajouté M. Chérèque, invité dimanche soir de l’émission Le Grand Jury sur RTL. 

En l’état actuel de la législation, la validité d’un accord interprofessionnel est subordonnée à sa signature par au moins une organisation syndicale et à l’absence d’opposition de la majorité des organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de l’accord (CGT, CFDT, FO, CFTC, CGC), en l’espèce donc trois sur cinq.

Vendredi 18 mars au soir, au terme de la dernière séance de négociation sur l’avenir des régimes de retraite complémentaire des cadres (Agirc) et des non cadres (Arrco), la CGT et la CFE-CGC ont clairement indiqué qu’elles n’étaient pas favorables à la signature du projet d’accord, Danièle Karniewicz (CFE-CGC) ayant même évoqué la possibilité de faire jouer le droit d’opposition. La CFTC semblait décidée à ne pas signer. Sa délégation avait reçu un mandat impératif en ce sens si le patronat persistait dans son refus d’augmenter les ressources de l’Agirc et de l’Arrco. Mais la centrale chrétienne n’avait pas l’intention de se lancer dans un droit d’opposition.

Force Ouvrière était partagée. Le chef de file de sa délégation, Philippe Pihet, s’est entretenu lundi 21 mars dans la matinée avec le secrétaire général de la centrale Jean-Claude Mailly. Le bureau confédéral se réunit lundi à 15 heures et devrait se prononcer sur le projet d’accord. Sa décision est attendue dans la journée. Le patronat n’a pas ménagé sa peine pour convaincre FO de signer, organisant à deux reprises de longs apartés pour lui proposer des aménagements du texte.

Dans un passé récent, la CFDT avait été la seule organisation syndicale à prendre le risque de signer la convention 2009 d’assurance-chômage, qui a créé une filière courte d’indemnisation et permis ainsi la prise en charge de plusieurs centaines de milliers de jeunes jusqu’alors dépourvus de toute prise en charge. 

Les syndicats non signataires se sont, depuis, bien gardés de rappeler qu’il n’avait pas signé ce texte, trop contents de bénéficier des retombées positives indirectes de la création de cette filière courte… pourtant imputable au seul engagement de la CFDT. On conçoit, dans ces conditions, que François Chérèque ait préféré faire porter sur les autres confédérations la responsabilité d’une signature ou d’une non signature du projet d’accord sur les retraites complémentaires.      

20 mars 2011

Le projet d’accord sur les retraites complémentaires, bouclé et ouvert à la signature des syndicats depuis le 18 mars, n’est pas à la hauteur des difficultés financières de l’Association générale des institutions de retraite des cadres (Agirc), créée en 1947, et de l’Association des régimes de retraite complémentaire (Arrco) créée en 1961. Les deux régimes sont devenus déficitaires en 2009, et leurs réserves seront épuisées en 2023 pour l’Agirc (cadres) et en 2033 pour l’Arrco (non cadres).

A l’horizon de 2030, leur déficit, de l’ordre de 3,6 milliards d’euros cette année, atteindrait 117,2 milliards en l’absence de relèvement des bornes d’âge de la retraite (60 à 62 ans pour l’âge légal de départ et 65 à 67 ans pour celui de la pension sans décote). La réforme des retraites de 2010, imposée par Nicolas Sarkozy, ramène ce déficit à 43,6 milliards, le passage à 67 ans rapportant à lui seul 23,5 milliards.

Les autres mesures d’économies négociées depuis l’ouverture de la négociation le 25 novembre ne rapportent in fine qu’une broutille : quelques milliards. L’alignement du rendement de l’Agirc sur celui de l’Arrco en deux ans (2011-2012) renfloue les caisses de retraite complémentaire de 8,7 milliards. Mais  leur stabilisation entre 2012 et 2015 coûte 9,1 milliards. Des économies sur les dotations de gestion et d’action sociale rapportent plus de 3 milliards. Le chiffrage des mesures relatives aux majorations familiales n’est pas encore connu, mais il devrait être de l’ordre de quelques milliards.

La mensualisation des allocations de retraite complémentaire est ce qui rapporte le plus : 20,9 milliards à l’horizon de 2030, du fait notamment des possibilités de placement que l’opération rend possible. Sans elle, la situation serait nettement plus mauvaise.

Même si ces chiffrages sont affinés dans les jours prochains, une chose est sûre : les régimes de retraite complémentaire sont fragilisés par la non augmentation de leurs ressources. Celles-ci peuvent provenir soit d’une hausse des cotisations mais la présidente du Medef Laurence Parisot y a opposé son veto, soit de financements complémentaires par l’impôt, ce qui change la nature du système. Le chef de file de la délégation de Force Ouvrière, Philippe Pihet, l’a fait observer vendredi soir : “les réserves de l’Agirc et de l’Arrco changent de nature. D’amortisseurs, elles deviennent réservoirs et s’il n’y a pas de volonté de mettre du carburant dans la machine, nous ne tiendrons pas”.

Le projet d’accord, sur lequel les syndicats se prononceront à partir de lundi, prévoit, certes, un rendez-vous au second semestre de 2015 pour faire le point sur la situation économique, pour actualiser les prévisions d’équilibre et examiner, le cas échéant, la question d’une augmentation des ressources que le vieillissement de la population - les retraités sont plus nombreux et la durée de vie à la retraite s’allonge - rend nécessaire.

Sauf, bien sûr, à vouloir privatiser le système et l’ouvrir davantage à la capitalisation. “Derrière tout cela, on change de modèle. Je ne suis pas là pour brader la retraite par répartition. Les assureurs n’attendent que cela”, a insisté toute la soirée de vendredi Danièle Karniewicz, chef de file de la CFE-CGC et présidente de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV).

19 mars 2011

La négociation sur les régimes de retraite complémentaire, qui concerne 17,5 millions de salariés et 11,2 millions de retraités, s’est achevée vendredi 18 mars dans la soirée. D’interruptions de séance en apartés, la délégation patronale conduite par Jean-François Pilliard (Medef) a essayé jusqu’au bout de convaincre Force Ouvrière de signer le projet d’accord.

Les syndicats consultent leurs instances à partir de lundi. Trois organisations – la CGT, la CFE-CGC et la CFTC – ne devraient pas signer ce texte, plutôt apprécié des négociateurs CFDT. La principale inconnue réside dans l’attitude qu’adoptera FO.

Les organisations patronales et syndicales gèrent ensemble l’Association générale des institutions de retraite des cadres (Agirc) et l’Association des régimes de retraite complémentaire (Arrco). La retraite complémentaire représente une part importante de la pension d’un retraité : un tiers pour un non cadre, plus de la moitié pour un cadre.

Le premier point fort du projet d’accord est la prorogation de l’Association de gestion des fonds de financement de l’Agirc et de l’Arrco (AGFF) du 1er juillet 2011 au 31 décembre 2018. Sans cette prorogation, saluée par tous, les personnes liquidant leur retraite complémentaire après le 30 juin auraient subi une réduction de 22% au maximum du montant de leur pension. Ce ne sera pas le cas. Ce geste devrait rassurer les salariés. Le patronat n’avait jamais accepté de prolonger aussi longtemps la durée de vie de l’AGFF.

L’autre point fort concerne le rendement des cotisations (ce que rapporte un euro cotisé en pension). Le patronat a proposé de ramener le rendement de l’Agirc sur celui de l’Arrco (ce qui le fait sensiblement baisser) et de les stabiliser ensuite pendant quatre ans. La CFDT a insisté sur le caractère positif de ces deux avancées, en faisant observer que la stabilisation intervient après quinze années de baisse.

La CGT a critiqué le mécanisme de revalorisation prévu pour le salaire de référence servant au calcul et à l’inscription des points de retraite. ” Il s’agit en réalité d’une indexation sur les prix, et les taux de remplacement (ce que représente la retraite en pourcentage du dernier revenu d’activité) vont continuer de chuter”, a pointé Eric Aubin.

Comme le Medef l’a annoncé jeudi, ni l’âge de la réversion ni les pensions versées aux conjoints survivants, sur lesquels 5,7 milliards d’euros d’économies étaient envisagées à l’horizon de 2030, ne seront finalement touchés. Les pensions Agirc et Arrco seront toutes deux majorées de 10% pour au moins trois enfants nés ou élevés et ces majorations familiales sont plafonnées à 1000 euros par an dans chaque régime. Cette mesure n’a pas encore été chiffrée.

Selon Jean-Louis Malys (CFDT), 70 à 80% des familles de cadres et de non cadres verront leurs majorations familiales doubler. Danièle Karniewicz (CFE-CGC), présidente de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) ne l’entend pas de cette oreille : « on a l’AGFF, qu’il était intenable politiquement de ne pas proroger, mais on brade les retraites des cadres et d’une grande partie des classes moyennes », a-t-elle ajouté sans exclure, bien au contraire, la possibilité de faire valoir son droit d’opposition.

Un rendez-vous est prévu au second semestre de 2015 pour évaluer les effets des mesures et la réalité économique, pour réactualiser les prévisions d’équilibre et, si nécessaire, envisager une augmentation des ressources. Il n’est pas sûr que ce petit geste convainque la CFTC de signer. La CGT, de son côté, très critique sur la méthode employée par le patronat et sur le fond du projet d’accord, a estimé que celui-ci proposait « un marché de dupes à la signature, car les engagements prévus ne sont pas financés ».

FO, enfin, a reconnu « ne pas être insensible » à la prorogation de l’AGFF et à la stabilisation des rendements pendant quatre ans, mais jugeait vendredi soir le texte encore « déséquilibré ». Le patronat s’est efforcé d’arracher sa signature en restant notamment le plus flou possible sur le rapprochement entre l’Agirc et l’Arrco (présidée par FO). On saura sans doute lundi s’il a obtenu satisfaction.

18 mars 2011

Le patronat a soumis, vendredi 18 mars, un nouveau projet d’accord sur les retraites complémentaires aux organisations syndicales, qui ont demandé une interruption de séance peu après 10 heures du matin pour prendre connaissance de ce texte. Comme le Medef l’avait annoncé jeudi, les propositions d’économies sur les pensions de réversion versées aux conjoints survivants ont été retirées par la délégation patronale à la demande de Laurence Parisot au nom de l’égalité hommes-femmes.

Le nouveau texte patronal propose de limiter les majorations Agirc (régime de retraite des cadres) et Arrco (non cadres) pour trois enfants à 10% de l’allocation pour toute liquidation postérieure au 31 décembre 2011. Il plafonne également, sans en donner le montant, l’ensemble des majorations pour enfants nés ou élevés pour toute pension liquidée à compter du 1er janvier 2012. Ces plafonds seront proratisés en fonction de la durée d’affiliation aux régimes de retraite complémentaire.

La délégation patronale n’a pas encore chiffré le montant des économies qu’elle attend de ces mesures. Une chose est sûre : il lui sera difficile de convaincre les syndicats, hormis probablement la CFDT, de signer un projet d’accord qui ne comporte aucune augmentation de cotisations.

“C’est inadmissible. On s’interdit de débattre des ressources et on baisse les rendements des régimes, a fait observer, vendredi, Danièle Karniewicz, chef de file de la CFE-CGC et présidente de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (Cnav). Derrière tous cela, on change de modèle. Je ne suis pas là pour brader le modèle par répartition. Les assureurs n’attendent que cela !”.

Les différentes propositions du patronat, en particulier le fait de ramener le rendement Agirc au niveau de celui de l’Arrco et de les stabiliser, ensuite, pendant trois ans, impactent tout particulièrement le régime de retraite complémentaire des cadres. Le rendement d’un régime de retraite est ce que rapporte un euro cotisé en pension.

17 mars 2011

L’Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) a un nouveau secrétaire général. Il s’agit de Luc Bérille, 53 ans, secrétaire national à l’action revendicative et ancien “patron” pendant huit ans du syndicat des enseignants. Ce savoyard, instituteur de formation, a été élu jeudi 17 mars par le conseil national - sorte de parlement - de l’Unsa. Il succède à Alain Olive, 61 ans, qui exerçait les fonctions de secrétaire général depuis 1994 et ne souhaitait pas aller jusqu’au terme de son dernier mandat.

Ce changement d’hommes n’entraînera a priori aucune inflexion idéologique ou doctrinale. L’Unsa, en effet, qui revendique 200.000 adhérents (deux tiers dans la fonction publique, un tiers dans le privé), est solidement installée dans son réformisme en essayant, a déclaré M. Bérille au Monde, d’”avoir une position équilibrée entre le non par principe et le oui par habitude”. Le nouveau secrétaire général estime que “le mouvement syndical sera profondément remodelé dans les deux ans qui viennent ” et que ”l’Unsa doit y jouer sa part”. Créée en 1993 sur les décombres de la Fédération de l’éducation nationale (FEN), l’Unsa doit, précise-t-il, “continuer à se développer et oeuvrer au rassemblement, à l’intérieur du syndicalisme, de la famille réformiste”.

Alain Olive ne va pas complètement quitter une scène syndicale qu’il a marquée pendant plus de 16 ans de sa subtilité et de son ouverture. Il devrait continuer à suivre le travail en commun que l’Unsa et la CFDT ont engagé. Ce prof d’économie, passionné de rugby et d’histoire de l’art, fait l’unanimité.  ” Nous n’avons ni la même histoire ni la même vision du syndicalisme, mais il s’est battu pour sa propre organisation. Et nous avons toujours eu de bons rapports agréables et francs. Nous avons pu nous dire nos désaccords mais aussi travailler ensemble”, témoigne Annick Coupé, porte-parole de Solidaires. 

“C’est un type fin, discret, très cultivé. Il n’est pas dans la compétition et il n’est pas trop macho bien que catalan”, observe en souriant François Chérèque (CFDT). “J’ai d’excellentes relations avec lui, vraiment amicales. On a très bien travaillé ensemble à la Confédération européenne des syndicats (CES), sans jamais avoir le moindre désaccord de fond. Mon seul regret est que nous n’ayions pas pu aller plus loin ensemble. Mais nous avons sûrement notre part de responsabilité dans cette histoire. Il y a eu un loupé quand la Fen s’est coupée en deux, mais le Sgen-CFDT n’était probablement pas disponible à l’époque…”.      

Retraites complémentaires : le Medef renonce à toucher aux pensions de réversion

Coup de théâtre sur les retraites complémentaires : le Medef, qui avait proposé de faire 5,7 milliards d’euros d’économies à l’horizon de 2030 sur les pensions de réversion versées aux conjoints survivants y a renoncé. Sa présidente, Laurence Parisot, a demandé lundi dernier au Conseil exécutif du Medef - qui l’a accepté - d’entériner ce changement de ligne au nom de l’égalité hommes-femmes, a-t-on appris jeudi 17 mars dans l’après-midi de source proche de l’organisation patronale.

Le chef de file du patronat, numéro deux de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et président de la commission protection sociale du Medef, Jean-François Pilliard, avait pourtant soumis ces propositions d’économies (et quelques autres) à ses interlocuteurs syndicaux lors de la séance de négociation du 9 mars.

Le projet d’accord patronal, que M. Pilliard ne peut avoir sorti de son seul chapeau - il est trop politique pour cela -,  proposait, entre autres, de ramener de 60% actuellement à 54% au 1er janvier 2016 le taux de la pension de réversion à l’Agirc (cadres) et à l’Arrco (non cadres). Autrement dit, il procédait à un alignement de ces taux sur celui en vigueur à la Caisse nationale de l’assurance-vieillesse (CNAV), dans le régime de base.

Cette mesure pénalisait très fortement deux catégories de retraités qui se recoupent encore très largement : les personnes touchant de petites pensions et les femmes qui, vivant plus longtemps que les hommes, sont plus nombreuses qu’eux à toucher des pensions de réversion. Danièle Karniewicz, présidente (CFE-CGC) de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV) jugeait cettte mesure “impossible” à appliquer aujourd’hui car “bien trop pénalisante pour les femmes et les retraité(es) aux petites pensions”. La majorité des syndicats et les associations de retraités partagent ce point de vue. 

La seconde piste d’économie envisagée par la délégation patronale consistait à lier le montant de la pension de réversion et la durée de mariage. Cette proratisation pénalisait les jeunes qui se marient plus tard et divorcent beaucoup plus que leurs aînés. Les deux mesures permettaient de faire 5,7 milliards d’euros d’économies à l’horizon de 2030. 

Pour les syndicats, la question est maintenant de savoir quelles autres économies va proposer, vendredi 18 mars, le Medef pour ne pas dégrader les comptes de l’Agirc et de l’Arrco. La délégation patronale avait par ailleurs fait un geste pour apaiser les inquiétudes sur le niveau des retraites en acceptant de prolonger du 1er juillet 2011 au 31 décembre 2018 l’Association pour la gestion des fonds de financement (AGFF) de l’Agirc et de l’Arrco, qui permet aux salariés de toucher leur retraite complémentaire sans abattement. Il va bien falloir financer cette prolongation.