Al-Ahram Hebdo, Egypte | Difficile terrain d’entente

  Président
Labib Al-Sebai
 
Rédacteur en chef
Hicham Mourad

Nos Archives

 Semaine du 15 au 21 juin 2011, numéro 875

 

Contactez-nous Version imprimable

  Une

  Evénement

  Enquête

  Dossier

  Nulle part ailleurs

  Egypte

  Economie

  Monde Arabe

  Afrique

  Monde

  Opinion

  Société

  Arts

  Idées

  Littérature

  Visages

  Environnement

  Voyages

  Sports

  Vie mondaine

  Echangez, écrivez



  AGENDA


Publicité
Abonnement
 
Egypte

Religion . Préparé par le gouvernement Charaf pour remédier aux tensions sectaires, le nouveau projet de loi sur la construction des lieux de culte suscite un débat houleux.

Difficile terrain d’entente

Après une longue attente, le projet de loi unifiée sur la construction des lieux de culte vient d’être annoncé. Une tentative de l’Etat pour mettre fin aux prétextes de la tension sectaire qui a eu de violentes répercussions non seulement à l’échelle sociale, mais aussi à celle de la sécurité nationale. Ce projet de loi était revendiqué par les coptes déjà avant la révolution. Devenu une demande pressante après les récents affrontements interconfessionnels ayant éclaté dans plusieurs endroits à travers le pays, notamment à Atfih, Imbaba et Aïn-Chams, le projet de loi est censé réaliser l’intérêt suprême de la patrie de par le fait qu’il est étroitement lié à la cohérence de la société, à sa solidarité nationale et à son intégrité interne.

Les rédacteurs de ce projet de loi ont l’ambition d’établir des normes claires et inaltérables quant à l’autorisation de construction, de rénovation et de restauration des lieux de culte. Le texte « confère le droit aux gouverneurs ou aux autorités locales de délivrer des autorisations de construction, de contrôler les sources de financement et d’établir des mécanismes pour la résolution des problèmes de rénovation et de restauration des lieux de culte actuels », a déclaré le conseil dans un communiqué de presse. Selon le projet de loi, tout lieu de culte, qu’il s’agisse d’une mosquée ou d’une église, sera construit sur une superficie de 1 000 m2 au minimum avec une distance d’au moins un km2 entre chaque établissement. En plus, un délai de deux mois sera donné aux autorités locales, si elles ne donnent aucune réponse, la demande de construction du lieu de culte sera considérée comme approuvée par défaut.

Le père Rafiq Greiche, porte-parole de l’Eglise catholique, exprime son optimisme quant à ce projet de loi. « D’abord, les mêmes règles s’appliqueront à la construction des mosquées et des églises. Vers la fin du régime de l’ex-président Hosni Moubarak, le Parlement examinait une loi seulement sur les églises, qui étaient censées être traitées différemment des mosquées. C’est une bonne chose de voir les mosquées et les églises traitées à un pied d’égalité », note-t-il.

Les lieux de culte chrétiens obéissent à une loi datant de l’époque ottomane et qui pose des restrictions multiples à la construction et à la rénovation des églises, qui va jusqu’à l’exigence d’une autorisation présidentielle. Les amendements introduits délèguent ce pouvoir aux gouverneurs, sans pour autant alléger certaines complications dont se plaignent les coptes.

Cependant, d’autres voix chrétiennes critiquent le projet qui, selon elles, englobe les mêmes lacunes que l’ancienne loi. Naguib Guibraïl, avocat et directeur de l’Union égyptienne pour les droits de l’homme, désapprouve le projet qui interdit la transformation des habitations en églises, ce qui se produisait autrefois. Alors que, pour lui, il y a des zones dépourvues d’espace suffisant pour construire une nouvelle église. « En plus, le projet confère le pouvoir d’accorder un permis de construire des lieux de culte au ministre du Développement local, puis au président de la République si le premier refuse, et ceci conformément à l’article 6 du projet, et nous ne voulons surtout pas de cette condition », dénonce Guibraïl.

Contributions des fidèles

Ce projet de loi unifiée spécifie les sources de financement pour la construction des églises comme c’est le cas pour les mosquées, une condition qui avait auparavant été rejetée par l’Eglise copte qui refuse que l’Etat contrôle la gestion de ses fonds qui proviennent principalement de l’aumône et des contributions des fidèles. Des prêtres et des évêques ont demandé à s’entretenir directement avec le gouvernement de ce projet de loi.

Des avocats et des activistes des droits de l’homme ont annoncé leurs craintes concernant le projet de loi en soulignant que son application « menacerait la paix sociale et l’unité nationale ». Par ailleurs, un groupe d’avocats a déposé une plainte devant le procureur général contre le premier ministre, Essam Charaf, pour exiger l’ouverture d’une enquête sur l’adoption du projet de loi en question qui, selon eux, « viole la Constitution et les règles de la charia ». Parmi eux figure Mamdouh Ismaïl, avocat islamiste, qui a appelé le Conseil ministériel à ne pas faire passer cette loi, incompatible, selon lui, avec la justice.

« Le Caire est la ville aux 1 000 minarets, et l’église se trouve souvent à côté de la mosquée. Comment, après 14 siècles, peut-on accepter des lois qui limitent le nombre des mosquées et qui empêchent ainsi les musulmans de faire leurs prières ? Ne faut-il pas prendre en considération le nombre de musulmans par rapport aux chrétiens dans ce pays en prenant une telle décision ? », s’indigne Ismaïl. Il dénonce la clause du projet de loi selon laquelle une distance d’au moins 1 km2 doit séparer chaque maison de culte de l’autre. Pour lui, la norme doit être la densité de la population. « Cette clause est à la fois inconcevable et inapplicable dans les villages et les quartiers populaires à forte densité de population. Où vont prier des centaines, voire des milliers de musulmans, dans ces zones populaires ? Dans la rue ? », demande Ismaïl. Adel Mekki, activiste, met le doigt sur d’autres obstacles établis par la loi quant à la construction des mosquées. Selon le projet de loi, il faudra les construire sur une superficie d’au moins 1000 m2 et cela coûtera des millions de L.E., ce qui rendra plus difficile la construction des mosquées pour la majorité des musulmans.

Les salafistes, en émettant les mêmes réserves sur les conditions de la distance et de la surface, rejettent carrément la promulgation de cette loi unifiée qui s’applique aussi bien aux mosquées qu’aux églises. Abdel-Moneim Chéhata, porte-parole des salafistes à Alexandrie, refuse le principe d’une loi unifiée pour les religions qui diffèrent par leurs rites. « Ce projet de loi suppose que les musulmans ne vont aux mosquées qu’une seule fois par semaine, c’est-à-dire pour la prière du vendredi comme c’est le cas dans les autres religions. Mais les musulmans sont appelés à se rendre à la mosquée 5 fois par jour, en plus de la prière du vendredi ; comment veut-on qu’ils fassent le trajet d’un km à pied 5 fois par jour pour aller prier dans une mosquée, notamment quand il s’agit de femmes ou d’hommes âgés ? », pose-t-il la question lancinante. Le gouvernement, pour sa part, a déclaré qu’il ouvrira une discussion sur le projet pour explorer les points de vue, afin de parvenir à une formule satisfaisante pour toutes les parties.

Ola Hamdi

Retour au sommaire

 




Equipe du journal électronique:
Equipe éditoriale: Névine Kamel- Howaïda Salah -Thérèse Joseph
Assistant technique: Karim Farouk
Webmaster: Samah Ziad

Droits de reproduction et de diffusion réservés. © AL-AHRAM Hebdo
Usage strictement personnel.
L'utilisateur du site reconnaît avoir pris connaissance de la Licence

de droits d'usage, en accepter et en respecter les dispositions.