FIFA Ballon d'OR 2011
1966 - BOBBY CHARLTON - UNE VICTOIRE D'UNE TRES COURTE TETE
Jusqu'à la réception du dernier bulletin, le doute avait plané : qui, de Bobby Charlton ou d'Eusebio, serait le onzième Ballon d'Or ? Jamais, dans l'histoire du vote annuel, une telle incertitude n'avait pesé sur l'identité du lauréat. Au décompte final, c'est le champion du monde anglais qui l'emporta d'un tout petit point face au lauréat 1965 qui ratait là l'occasion de rejoindre Alfredo Di Stefano, deux fois vainqueur (en 1957 et en 1959). La victoire ne tint donc qu'à un fil. Si la consécration de Charlton apparut, à la réflexion, assez logique, elle fut obtenue alors que le juré anglais ne l'avait même pas cité parmi ses cinq meilleurs joueurs, lui préférant ses compatriotes Ball, Moore et Hurst! Bobby Charlton fut donc sacré dix ans après Stanley Matthews, le premier nom inscrit au palmarès et le seul joueur anglais couronné à ce jour, et deux ans après Denis Law, son partenaire écossais à Manchester. Un grand jour pour celui qui échappa par miracle à la catastrophe de Munich où Manchester United perdit une grande partie de ses forces vives, avant de repartir vers le sommet sous la conduite de Matt Busby. La troisième place du prince charmant du football, Franz Beckenbauer, témoignait d'une ascension foudroyante qui ne devait pas rester sans lendemain. Autres présences significatives dans le haut du classement, celles des Hongrois Albert, Bene et Farkas, qui illustrèrent le renouveau du football magyar et son match inoubliable contre le Brésil, en Coupe du monde. Enfin, comment ne pas souligner l'inusable parcours de Lev Yachine, le seul joueur à avoir été cité dans tous les classements depuis 1956 ? |
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LE DI STEFANO ANGLAIS | ||||||||
Les intimes de Bobby Charlton affirment que son caractère
changea brutalement après le désastre
de Munich en 1958. En vingt-quatre heures, il passa
du stade de gamin à celui d'homme, un peu comme
pendant la Grande Guerre un bleu devenait un poilu après
un bref séjour dans les tranchées. Il
échappa à la catastrophe, bien que projeté
à plus de cinquante mètres de l'avion.
Miraculeusement, il ne souffrit que d'une légère
blessure à la tête et, bientôt, il
accomplissait un rôle important pendant la résurrection
de Manchester après le désastre. Aimé des joueurs, il jouit d'une énorme popularité dans le public, ce qui n'a en rien affecté sa modestie. Mais il est certain que, depuis la série de matches de Coupe du monde auxquels il participa, le grand joueur a considérablement changé. Il possède maintenant une confiance dans ses moyens qu'on ne lui avait jamais connue ; sa poignée de main est franche, son accueil ouvert et il a perdu beaucoup de son énorme timidité. Sur le terrain, son attitude a également changé. Avant la Coupe du monde, il jouait surtout d'instinct, maintenant il pense beaucoup plus. Il s'organise, il conçoit des plans. On dit que Bobby Charlton a étudié le jeu d'Alfredo Di Stefano sans pour cela le copier, c'est impossible.
Un bon juge des changements apportés à son caractère par la Coupe du monde est le demi Crerrand, de Manchester United. Crerrand affirme que Charlton a gagné énormément en maturité et en confiance, et qu'il joue mieux pour son équipe qu'il ne l'a jamais fait auparavant. Une des qualités de Charlton est son respect
pour son patron, Matt Busby, pour son club et pour ses
coéquipiers. Son chagrin fut immense la saison
passée, lorsque son équipe fut éliminée
en Coupe d'Europe. Grand fut son désappointement
et c'est à ce moment qu'il exprima sa pensée,
à haute voix, chose rare pour lui : « Alors,
nous allons devoir gagner la Coupe du monde. »
MAURICE SIMON
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