La commission Charbonneau

Financement des partis : Zambito se vide le coeur, Normandeau sur la défensive

L'entrepreneur Lino Zambito L'entrepreneur Lino Zambito

Exclusif - L'un des acteurs du scandale du contrat de l'usine d'épuration des eaux à Boisbriand refuse d'être le bouc émissaire de tout un système. Lino Zambito, propriétaire de construction Infrabec qui fait face à une dizaine d'accusations, veut aujourd'hui dénoncer le financement des partis politiques, qui mène, selon lui, à bien des dérives dans la construction.

Construction Infrabec a obtenu le contrat de 28 millions de dollars pour la construction de l'usine d'épuration des eaux de Boisbriand.

« C'est une mascarade. C'est une pièce de théâtre. La loi leur permet de dépenser 100 000 $, mais les élections en coûtent 200 000 à 300 000 $. C'est de l'hypocrisie », dit-il.

Selon lui, l'industrie de la construction subit une pression pour financer les partis politiques.

« Les firmes d'ingénieurs, ce sont les gens qui sont les plus proches au pouvoir. [...] On vous approche pour demander si vous êtes prêts à leur donner un coup de main. Pour essayer que eux rencontrent leurs obligations », explique M. Zambito.

Ces firmes surveillent les chantiers et approuvent les réclamations supplémentaires, les « extras ».

« Si moindrement tu es brillant et tu sais lire entre les lignes [...] on te fait comprendre : "Aide-moi, puis je t'aiderai", c'est aussi simple que ça », ajoute l'entrepreneur.

Roche et Zambito organisent une soirée de financement pour Nathalie Normandeau

Nathalie Normandeau et le premier ministre du Québec, Jean Charest Nathalie Normandeau et le premier ministre du Québec, Jean Charest  Photo :  PC/Presse canadienne

La firme Roche, qui a obtenu le contrat des plans de l'usine, et M. Zambito ont organisé cinq soirées de financement pour l'ex-ministre des Affaires municipales, Nathalie Normandeau, recueillant des centaines de milliers de dollars pour le Parti libéral.

« C'est arrivé parfois que j'ai fait passer des projets, alors que ça ne "fittait" pas dans la petite case, là. Comme ministre, on essaie de faire preuve de la plus grande souplesse et créativité possible. J'assume totalement ce que j'ai fait », affirme Mme Normandeau, jointe au téléphone.

Selon des documents, qui font partie de la preuve que la police a recueillie dans le dossier Boisbriand et que Radio-Canada a obtenus, l'ex-ministre des Affaires municipales a accordé, contre l'avis de ses fonctionnaires, une subvention de 11 millions de dollars pour l'usine de Boisbriand.

À la suite des questions de Radio-Canada, l'ancienne ministre a admis qu'elle avait accepté des billets pour des spectacles de Céline Dion et Madonna offerts par Lino Zambito.

« Je veux réitérer fortement le fait que, un, je n'avais pas de liens spéciaux avec M. Zambito et, deuxièmement, ça n'a influencé en aucun temps mon travail de ministre », se défend-elle.

Lino Zambito dit qu'il serait disposé à témoigner à la commission Charbonneau si cela ne l'incrimine pas en vue de son procès.

Réaction de Nathalie Normandeau

L'ex-ministre des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire (MAMROT), Nathalie Normandeau, a tenu à réagir en fin de soirée aux informations révélées par l'émission Enquête, en rappelant que la subvention octroyée pour le projet des stations d'épuration à Boisbriand a été annoncée au mois de février 2007.

« Contrairement à ce qui a été véhiculé dans le reportage, cette subvention a été octroyée à la municipalité de Boisbriand conformément aux règles qui régissent les programmes du MAMROT », peut-on lire dans le communiqué publié jeudi soir.

Mme Normandeau affirme également que le choix d'une firme d'ingénierie et l'octroi de contrats pour la réalisation de projets municipaux relèvent des municipalités concernées et non du ministère des Affaires municipales.

« Il y a quelques jours, j'ai répondu de bonne foi aux questions de la journaliste de l'émission Enquête. Je trouve dommage aujourd'hui de voir l'interprétation que l'on donne à mes propos. J'en conviens, il n'était pas judicieux de ma part d'accepter une invitation dans une loge au Centre Bell en février 2009. Cependant, cette présence n'a en aucun temps pu influencer l'octroi d'une subvention à une municipalité, octroyée deux ans plus tôt », a indiqué Mme Normandeau, qui ne fera pas d'autres commentaires sur le sujet.

D'après le reportage de Marie-Maude Denis

Le reportage de Marie-Maude Denis

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