Navigation – Plan du site
Dossier : L'opposition politique en Russie. Enjeux et limites

Les partis «  partenaires du Kremlin » à l’épreuve des dynamiques locales

Formes et pratiques de «  l’opposition constructive »
The parties that are “partners of the Kremlin” put to a local test : The forms and practices of “constructive opposition”
Lou Brenez
p. 65-90

Résumés

Tandis que nombre d’observateurs considèrent le Parti libéral démocrate de Russie (LDPR) et le parti Russie juste (RJ) comme des «  partis d’opposition loyale » (Petrov, Lipman & Hale, 2010) destinés à neutraliser les votes protestataires, l’étude du fonctionnement des branches de ces partis à Tomsk en Sibérie occidentale conduit à nuancer cette interprétation. Dans le système politique russe, très contraignant à l’égard de l’opposition, la structure flexible du «  système de franchise  » (Carty, 2004) du LDPR et de RJ ainsi que leur politique d’opposition dite constructive donnent une marge de manœuvre aux responsables régionaux pour pratiquer une opposition sélective au pouvoir local.

Haut de page

Texte intégral

  • 1 Rappelons la définition que donne de la loyauté Le nouveau Petit Robert de la langue française (200 (...)
  • 2 Selon Sartori (2005), un système à parti hégémonique n’est pas multipartite mais constitue « un sys (...)

1La Russie postsoviétique est considérée par de nombreux auteurs comme un régime hybride (Gel’man, 2008  ; March, 2009) qui crée des institutions politiques formellement démocratiques pour masquer sa nature autoritaire (Diamond, 2002). Cette caractéristique s’est accentuée avec la recentralisation opérée par le Président Vladimir Poutine lors de son arrivée au pouvoir en 2000. La compétition électorale fait en effet l’objet d’interventions de l’Administration présidentielle en faveur de formations politiques loyales1 au pouvoir (Wilson, 2005  ; Kulik, 2010) que l’on qualifie alors de «  partis satellites »2. Elles s’accompagnent parfois de la création de partis d’opposition (Schedler, 2002  ; Oversloot & Verheul, 2006).

  • 3 Il s’agit de la Douma d’État de la Fédération de Russie ; elle est composée de députés élus au suff (...)

2Depuis les élections fédérales de décembre 2007, outre Russie unie (Edinaja Rossija) – le parti dominant (Gel’man, 2007) –, trois partis sont représentés à la chambre basse du Parlement russe3. Si, au sein du Parlement fédéral, le Parti communiste de la Fédération de Russie  – Kommunističeskaja partija Rossijskoj Federacii (KPRF) – reste le traditionnel opposant au pouvoir, le Parti libéral démocrate de Russie – Liberal’no-demokratičeskaja partija Rossii (LDPR) –, sous la houlette de Vladimir Jirinovski, fait figure d’allié fidèle du gouvernement (Barber, 1997  ; Wilson, 2009)  ; enfin, Russie juste (RJ) – Spravedlaja Rossija – est fondée le 28 octobre 2006 conformément à la volonté de l’Administration présidentielle qui cherche par ce biais à concurrencer le KPRF (March, 2009). Entrée à la Douma fédérale en 2007, RJ soutient ouvertement la branche exécutive du pouvoir et concentre ses critiques sur le parti Russie unie. Ainsi, depuis le milieu des années 2000, c’est moins leur idéologie que leur degré de loyauté envers le Kremlin qui semble déterminer la position des partis politiques dans le système partisan (Gel’man, 2008).

  • 4 « Leur objectif est d’incarner l’opposition au régime, de servir de parti du pouvoir « alternatif » (...)

3Décrits comme des «  partenaires » (Tomskie Novosti, 2008) ou des «  sympathisants » du Kremlin (Shevtsova, 2007, p. 56), le PLDR et RJ semblent être les instruments d’une «  démocratie virtuelle » (Wilson, 2005). Ces deux formations ont effectivement en commun de se présenter comme une «  opposition constructive » pour justifier leur place dans le système politique. En tant que «  partis d’opposition favoris »4, elles auraient pour rôle de neutraliser toute opposition réelle au régime en la transformant, au sein des institutions parlementaires, en soutien du régime (Oversloot & Verheul, 2006, p. 392).

  • 5 Le terme « local » est générique et comprend, par opposition au niveau « fédéral » ou « central », (...)
  • 6 L’auteur distingue trois types d’opposition dans le cadre d’une démocratie en cours de formation : (...)

4Cependant, le LDPR et RJ se bornent-ils à n’être que des projets purement virtuels  ? Ou, au contraire, disposant tous deux d’une vaste organisation qui rassemble plusieurs centaines de milliers de membres et de nombreux élus au niveau local5, représentent-ils une opposition «  réelle », c’est-à-dire une volonté de changer le gouvernement et sa politique  ? Selon Linz, un parti politique exerce une opposition loyale au régime s’il accepte les moyens légaux mis en place pour réguler la compétition et refuse l’utilisation de la violence politique (Linz, 1978)6. En outre, la loyauté peut également constituer une stratégie d’opposition (Hirschman, 1970). Si Michels (1971) a posé le principe de la loi d’airain de l’oligarchie dans les organisations, le politologue Eldersveld (1965) a établi, à partir de cas locaux américains, que les hauts dirigeants ne contrôlaient qu’en apparence les branches locales. L’étude de la structure partisane dans la région de Tomsk en Sibérie occidentale nous permettra ainsi d’évaluer la nature et l’ampleur de l’autonomie possible des sections régionales, notamment dans leur activité d’opposition.

5À cette fin, l’article s’articule autour de deux parties. Tout d’abord, nous examinerons comment l’appareil central du LDPR de même que celui de RJ interviennent pour influencer la sélection du personnel au niveau régional. Nous montrerons que leur organisation centralisée s’apparente au modèle du «  parti de franchise » (Carty, 2004) du fait qu’elle ménage une certaine marge de manœuvre locale. Nous verrons ensuite comment ces acteurs régionaux utilisent leur relative autonomie pour appliquer la stratégie d’opposition constructive.

  • 7 Les données sur lesquelles nous fondons notre analyse ont été recueillies au cours de trois séjours (...)
  • 8 Voir en Annexe la biographie succincte des principaux acteurs politiques régionaux évoqués.
  • 9 Tomsk est un centre scientifique, académique et industriel de premier plan.
  • 10 Ainsi aux élections à la Douma de la ville de Tomsk en octobre 2005, le Parti des retraités (Partij (...)
  • 11 Une presse locale relativement indépendante peut ainsi publier des analyses pluralistes et critique (...)
  • 12 Deux élections distinctes ont lieu pour les branches exécutive et législative du pouvoir local. Le (...)

6Le cas choisi pour cette étude est celui de Tomsk, capitale de l’oblast (région) de Tomsk en Sibérie occidentale7. La relative tolérance des autorités locales, notamment du gouverneur Viktor Kres8, à l’égard des mouvements d’opposition et le dynamisme de la région sur les plans économique et social9 facilitent l’expression de résistances au pouvoir central. La compétition politique n’y est pas feinte10 et est publique11. C’est pourquoi les élections municipales12 qui se sont déroulées à Tomsk en mars 2009 constituent, dans le cadre de notre problématique, un laboratoire stimulant d’observation.

1. Le contrôle de la sélection du personnel chez RJ et le LDPR  : la branche locale propose, le siège central dispose

  • 13 À ce sujet, Daniel Treisman donne l’exemple du vote du budget fédéral en 1995; il mentionne l’exis (...)

7Le parti de Vladimir Jirinovski, fondé dès 1989, est qualifié de Parti libéral démocrate de l’Union soviétique (Liberal’no-demokratičeskaja partija Sovetskogo Sojuza). Les circonstances de sa création demeurent relativement obscures mais l’on peut se référer aux recherches menées à ce sujet par Andrew Wilson  : celui-ci voit dans cette construction une tentative du Politburo de lancer un autre parti politique que le Parti communiste de l’Union soviétique après l’abrogation – qui consacre l’ouverture au multipartisme – de l’Article 6 de la Constitution de l’URSS (Wilson, 2005, pp.  22-24). Alors inconnu du grand public, V. Jirinovski est placé par les forces conservatrices soviétiques à la tête de cette formation classée dans la catégorie des partis nationalistes (Remington, 2004, pp.  169-170) et dont le nom était destiné à tromper les électeurs libéraux et démocrates (Korguniuk, 1999 cité par Hale, 2007). Rebaptisée Parti libéral démocrate de Russie, elle a par la suite maintenu sa présence au Parlement fédéral à chaque élection. Les députés du LDPR y siègent depuis l’accession de V. Poutine à la présidence de la Fédération et ont l’habitude de soutenir le Président et le gouvernement quand des questions clés sont en jeu13 (Treisman, 1998, p. 15  ; Hale, 2007  ; Raviot, 2008, pp.  152-153).

  • 14 Elle a englobé le parti nationaliste La Patrie (Rodina) d’Aleksandr Babakov, le Parti de la vie (Pa (...)
  • 15 Chambre haute du Parlement fédéral.
  • 16 Notons qu’à Stavropol, Russie juste devance Russie unie du fait de la rivalité entre le maire de la (...)
  • 17 Les ressources administratives font référence à l’utilisation, à des fins électorales, des moyens d (...)

8Russie juste (RJ), née de la fusion de trois formations14, est présidée par Sergej Mironov, président du Conseil de la Fédération15 et fidèle allié de V. Poutine (Raviot, 2008). Aux élections régionales du 11 mars 2007, RJ réalise d’excellents scores là où le mécontentement contre l’élite locale est le plus grand, notamment à Stavropol16, Vologda, Saint-Pétersbourg et Samara. Proche du pouvoir, il bénéficie de «  ressources administratives »17 et du soutien manifeste de V. Poutine qui salue la création de ce nouveau parti (March, 2009  ; Kahn, 2007). Le directeur adjoint de l’Administration présidentielle, Vladislav Surkov, avait réuni les composantes de cette formation avec l’objectif affiché de doter la société d’une «  seconde jambe », la première étant Russie unie (March, 2009). Toute la stratégie de Russie juste, dont le programme a pour principaux thèmes le patriotisme et la réduction des inégalités sociales, repose sur la critique de Russie unie tout en affichant un soutien indéfectible au Président (Gel’man, 2008).

  • 18 Loi fédérale n° 95-FZ du 11 juillet 2001 sur les partis politiques. Voir en particulier le Titre IV (...)
  • 19 Selon Jean-Robert Raviot, la loi dénote une vision claire de l’organisation d’un parti : il doit êt (...)

9La loi sur les partis politiques s’inscrit dès 2001 dans ce projet de centralisation accrue du pouvoir politique18. Exigeante et détaillée, elle régit une grande part de l’organisation interne des partis dans le sens d’une structure centralisée19.

1.1. Des «  partis de franchise » à structure centralisée

  • 20 La franchise est « un savoir-faire, une marque, etc. cédés par un commerçant à un autre dans le cad (...)
  • 21 Par exemple, le nom de Russie juste (Spravedlivaja Rossija) connote, d’une part, le discours de «j (...)

10Dans notre description du fonctionnement interne du LDPR et de RJ, nous recourons au modèle des «  partis comme systèmes de franchise » développé par Kenneth Carty (2004, pp.  11-12). En droit commercial, les systèmes de franchise20 offrent l’avantage, pour une entreprise, d’associer économie d’échelle et standardisation avec les avantages de la participation locale et la livraison des produits de la firme. Carty applique ce modèle aux partis. L’organisation centrale du parti crée et développe une «  marque » définissant sa place dans le système partisan21. Elle doit fournir les produits de base (policy et leadership), élaborer et diriger la communication (campagne nationale) et la gestion organisationnelle, s’acquitter de fonctions de formation et de financement. Les unités locales s’occupent de l’organisation de base pour les membres, livrent les produits, trouvent et soutiennent les candidats et mobilisent le personnel pour la campagne. Au cœur de ces partis, se trouve le contrat de franchise qui répartit le pouvoir entre les niveaux et définit les ressources. Les dirigeants centraux ont tous pouvoirs en ce qui concerne la politique du parti mais ils doivent satisfaire les demandes politiques et électorales de leurs soutiens et les aspirations de carrière des cadres. Ce schéma d’analyse appliqué au LDPR et à RJ met en lumière le type de relations existant entre le siège central (le franchiseur) et la branche locale (le franchisé). Dans ce cadre, la question de la sélection du personnel est particulièrement éclairante.

  • 22 Entretien avec les responsables du LDPR de Kemerovo (24.09.2008).
  • 23 Selon la loi sur les partis politiques (n° 95-FZ, 2001, article 24.2), « l’organe directeur supérie (...)
  • 24 Entretien avec un des tuteurs du Département des relations avec les régions (RJ, Moscou, 19.11.2009 (...)

11S’agissant du renouvellement des postes de direction régionaux, les responsables locaux du LDPR que nous avons interrogés approuvent la structure hiérarchique de l’organisation. Filant une métaphore organique, l’appareil central à Moscou est appelé «  la tête » tandis que les branches régionales sont «  les membres »22, ce qui implique qu’elles sont de simples exécutants. La «  politique des cadres » est un aspect essentiel du travail du quartier général. Le responsable régional est choisi par le président du parti lui-même, V. Jirinovski, qui approuve ou non le choix de la conférence régionale du parti23. Une telle supervision par l’appareil central est également observable au sein de RJ. La sélection des dirigeants régionaux est suivie de près par les douze kuratory (tuteurs) du Département des relations avec les régions. Dans le cas d’un conflit opposant plusieurs candidats au même poste et bien qu’une solution à l’amiable soit préférée, il arrive que le franchiseur impose sa décision. Notons que le rôle des kuratory ne se limite pas à la sélection des dirigeants  ; ils veillent aussi à la loyauté des franchisés  : si l’un d’eux ne donne pas satisfaction – en «  discréditant le parti » ou en s’avérant «  nezavisimyj » (indépendant)24 –, le kurator peut se déplacer en région.

  • 25 Entretien avec A. Ščukin (LDPR, Barnaoul, 25.11.2008).
  • 26 Le Présidium est l’organe collégial directeur supérieur central de RJ.

12Les statuts des deux partis stipulent que les listes de candidats doivent être dressées par les conférences régionales, composées des délégués des niveaux inférieurs du parti. Étant donné les contacts fréquents des dirigeants régionaux avec l’appareil central, les choix de la conférence sont orientables ou modifiables en amont ou en aval du processus. Ainsi au LDPR, la conférence régionale transmet ses recommandations à V. Jirinovski «  mais lui seul décide »25. Les modifications sont aussi fréquentes que les approbations en l’état. Chez RJ, les listes de candidatures proposées par la conférence régionale du parti sont pratiquement toujours approuvées en l’état par le Présidium26 car de nombreuses consultations les ont précédées. Ses décisions sont sans appel.

13En somme, dans les deux partis, le contrôle du siège central emprunte tant la voix formelle qu’informelle, en amont et en aval des procédures, pour influencer les choix, dûment exprimés, des organes régionaux du parti. Analysons à présent deux exemples permettant d’illustrer comment, et en faveur de qui, l’appareil central intervient dans ce processus.

1.2. La profonde divergence des critères de sélection du personnel local  : le cas de Tomsk en 2009

14Nous examinons ici des cas concrets de sélection des candidats aux élections municipales de Tomsk les 1er et 15 mars 2009. La configuration du scrutin uninominal à deux tours oblige les acteurs partisans ayant été défaits au premier à se prononcer pour le candidat qu’ils soutiendront au second. Celui de Russie unie et du gouverneur Viktor Kres est, sans surprise, le maire intérimaire sortant Nikolaj Nikolajčuk. Son principal concurrent prévisible est Aleksandr Deev, récent adhérent de Russie juste.

1.2.1. Russie juste  : une prédilection pour le clientélisme et la loyauté envers le pouvoir

  • 27 Elle se réunit le 27 décembre 2008.
  • 28 Le seul enjeu de la conférence était de décider de l’ampleur du soutien au candidat du pouvoir. Le (...)

15Russie juste peine à choisir son candidat. Déjà bien installé dans le paysage politique et médiatique de Tomsk, A. Deev est sans conteste le seul ayant des chances de succès contre le candidat de Russie unie. Pourtant, cette candidature embarrasse tant la direction locale que fédérale du parti  ; en témoigne, par exemple, l’attitude de la secrétaire du bureau de RJ à Tomsk qui, pour éluder la question, explique, en novembre 2008, qu’il est improbable que son parti présente un candidat, ajoutant que la présidente de la branche régionale a peut-être déjà reçu des consignes en ce sens de l’appareil central. Selon elle, la conférence régionale du parti27, habilitée à choisir le candidat, optera pour le soutien à N. Nikolajčuk28. Il n’est donc pas question de présenter Deev. Après la déclaration de candidature indépendante de ce dernier, RJ tient à annoncer publiquement qu’il agit sans le soutien de son parti. Contre toute attente, la conférence régionale décide alors, en concertation avec l’appareil central, de présenter son propre candidat  : la présidente de la branche régionale et députée régionale, Galina Nemceva.

Résultats du premier tour de scrutin, élection du maire de Tomsk, 1er mars 2009 (participation  : 37,40  %, 136 947 électeurs)

N. Nikolajčuk (Russie unie) : 40,60  %

A. Deev (indépendant) : 34,82  %

G. Nemceva (RJ) : 15,98 %

I. Kučerov (KPRF) : 3,72 %

E. Gusev (LDPR) : 2,91 %

Résultats du second tour de scrutin, élection du maire de Tomsk, 15 mars 2009 (participation  : 43,40  %, 160 018 électeurs)

N. Nikolajčuk (Russie unie) : 50,66  %

A. Deev (indépendant) : 46,67 %

Sources : Izbiratel’naja kommissija Tomskoj oblasti – Commission électorale de la région de Tomsk (2008 et 2009).

  • 29 Le coordinateur régional A. Didenko, anticipant un score peu élevé, a préféré ne pas aller lui-même (...)

16Les résultats révèlent que RJ dispose d’un réel potentiel de victoire, l’addition des scores de Deev et Nemceva, tous deux membres du parti, dépassant de plus de dix points celui du sortant. Devant la nécessité d’un second tour, le gouverneur Viktor Kres annonce à la télévision qu’il ne travaillera pas avec le maire de Tomsk si Deev est élu (A.I. Regnum, 2009), menaçant indirectement la région de paralysie. Soucieuse d’en préserver «  la stabilité », Nemceva appelle donc ses électeurs à voter pour le candidat de Russie unie au deuxième tour. Le LDPR, qui a présenté un candidat de second rang29, ne donne, quant à lui, aucune consigne de vote, restant enfermé dans sa posture d’opposition au candidat sortant malgré le chantage du gouverneur.

  • 30 Le refus de présenter Deev a permis d’éviter un conflit frontal avec Russie unie et surtout avec le (...)
  • 31 Directeur du fonds de l’assurance médicale obligatoire, médecin de profession, A. Deev est loin d’a (...)

17Ce cas d’étude traduit bien la ligne30 imposée par l’appareil central de RJ à la branche locale. La campagne électorale a toutefois mis en évidence la marge de manœuvre de la candidate. Très épurée, la propagande ne se réfère guère aux thématiques ni même aux symboles du parti, se résumant à sa photo accompagnée du slogan «  Bonjour, je suis Nemceva » (Tomskij Vestnik, 2009  ; RIA Novosti, 2009). Cette jeune femme qui vient tout juste d’adhérer au parti souhaite profiter des élections pour se faire connaître. Elle dispose de certaines ressources qui peuvent expliquer le soutien qu’elle reçoit de l’appareil central. Outre sa jeunesse et sa réussite professionnelle dans le monde de l’entreprise – son profil tranche avec celui des retraités ou des employés de la fonction publique, majoritaires parmi les députés municipaux élus sur la liste du Parti des retraités en 2005 –, elle a pu apporter des ressources financières à la branche régionale voire à l’organisation centrale. La campagne de mars 2009 aurait ainsi été financée avec l’argent de Nemceva, issu de sa position au sein du Groupe agraire sibérien, une firme agro-alimentaire de premier plan en Sibérie dont elle est l’un des membres fondateurs. De surcroît, Nemceva dispose de son propre fonds caritatif, grâce auquel elle subventionne de nombreux projets sociaux. Ces atouts et ce parcours servent les intérêts de RJ à double titre  : femme de conviction engagée dans la sphère sociale, elle peut accroître la visibilité voire les succès de RJ à Tomsk en échange de la carrière politique dans le parti qui s’ouvre à elle. Deev possède indéniablement des ressources bien supérieures en termes de clientèle électorale, de visibilité et d’expérience politique. En revanche, ses ressources financières sont moindres31, sa carrière politique est derrière lui et il ne doit rien à RJ.

18La confiance du siège central a permis à Nemceva de renouveler la direction de la branche régionale. La responsable de l’appareil, retraitée élue à la Douma de la ville, a ainsi été remplacée par une jeune femme ayant tout juste achevé ses études de journalisme et étroitement mêlée aux activités caritatives de Galina Nemceva. RJ Tomsk fonctionne comme une franchise de l’organisation centrale avec plus de cadres associés au monde de l’entreprise. Le franchiseur opère directement ou indirectement la sélection du personnel en choisissant des personnes à même d’augmenter la visibilité du parti et de sa «  marque » au niveau local, et capables d’assurer une certaine autonomie financière de la branche.

19Le LDPR, de son côté, persiste dans son opposition au candidat sortant, même si, comme nous allons le voir, la stratégie électorale a fait l’objet de discordes internes.

1.2.2. Au LDPR  : la primauté aux ressources idéologiques et à la loyauté envers le parti

  • 32 Le coordinateur régional est l’équivalent chez RJ du président de la branche régionale du parti. C’ (...)
  • 33 La nécessité de rassembler les forces à l’approche des élections législatives fédérales en décembre (...)

20De profonds désaccords ont également partagé la section du LDPR à Tomsk où deux factions – les «  vieux cadres » et les «  jeunes cadres » – se sont disputé le poste de coordinateur régional32. Les premiers ont dirigé l’organisation de 1993 à 2005 (Argumenty i Fakty Tomsk, 2005) jusqu’à la tenue, en novembre 2005, de deux conférences régionales concurrentes, chacune plaidant pour un candidat différent. Le conflit a été tranché par Jirinovski en faveur des «  jeunes cadres » avec à leur tête le député à la Douma d’État, Vladimir Ovsiannikov. Aleksej Didenko, étudiant en droit et assistant parlementaire de ce dernier, prit sa suite en février 2007 avant d’être élu député de la Douma régionale en mars 2007. De nouvelles dissensions se sont fait jour en juillet 2007 entre les «  vieux cadres » représentés par quatre députés locaux, S. Panov, S. Rudenko, A. Rudenko et S. Vinitski, et l’équipe d’A. Didenko soutenue par le député fédéral. Le Conseil supérieur du parti, présidé par Jirinovski, arbitra, une fois encore, en faveur de cette dernière et accepta l’exclusion des quatre députés qu’elle demandait. Ceux-ci furent toutefois réintégrés33.

  • 34 Étudiant dans la même faculté que Didenko, c’est une figure inconnue du public tout comme au sein d (...)

21La campagne des élections municipales de Tomsk de mars 2009 provoque un nouveau conflit. Le 1er décembre 2008, les quatre députés «  vieux cadres » récidivent en organisant une conférence de presse à la Douma de la ville où ils annoncent que le LDPR soutiendra la candidature du maire sortant. Cette déclaration est démentie par le coordinateur régional et le LDPR présente son propre candidat, E. Gusev34. Quelques mois plus tard, le 29 mars, après les élections, ils sèment de nouveau le trouble au sein de leur parti en participant à une réunion publique organisée par Russie unie. Pour sa défense, S. Rudenko affirme qu’il était à ce meeting pour soutenir la politique anti-crise des dirigeants du pays et avance que l’affrontement entre partis n’a pas lieu d’être hors des périodes d’élection et de campagne (Tomskij Obzor, 2009). Là encore, Didenko obtient l’appui du président du parti qui lui transmet par écrit sa décision d’exclure les quatre membres. Le 3 avril 2009, le Conseil supérieur prononce leur exclusion pour avoir discrédité l’action du parti lors d’événements publics en présence des médias et causé un dommage moral au LDPR. Ainsi la loyauté des quatre élus locaux envers les autorités et leur compromission avec Russie unie a été sanctionnée par l’appareil central, affermissant la position d’un jeune élu régional résolument opposé à Russie unie et aux élites locales affiliées.

  • 35 L’indice d’accès clientéliste est le pourcentage de sièges d’un groupe parlementaire détenus par le (...)
  • 36 Les entreprises unitaires municipales, dont les capitaux appartiennent à la municipalité, gèrent le (...)
  • 37 Les administrateurs intermédiaires et les gestionnaires d’entreprise ont l’avantage de disposer d’u (...)
  • 38 Son père l’aide financièrement depuis Novossibirsk.

22Dans leur étude sur l’accès des groupes parlementaires aux ressources étatiques, Oleh Protsyk et Wilson Andrew mesurent, à partir du cas des élections fédérales russes de 1993 et 1995, «  l’indice d’accès clientéliste »35 du groupe LDPR à la Douma. Ce parti, avec un indice de 4 et 0  % respectivement aux deux élections, apparaît comme le moins doté en ressources clientélistes. Henry Hale avance également que, durant la période 1993-2003, le LDPR a davantage tiré profit de la personnalité, des idées et des succès de son chef, Vladimir Jirinovski, qu’il ne s’est appuyé sur une stratégie clientéliste (Hale, 2007, p. 86). Dans l’exemple que nous rapportons ici, les quatre élus exclus du parti sont deux juristes, anciens assistants de députés fédéraux, un ancien du parti et un vice-directeur du service juridique d’une entreprise unitaire municipale36. En tant qu’élus locaux, et/ou administrateur intermédiaire, ils apportaient des ressources matérielles mais aussi une base électorale liée à leurs mandats électifs37. Les apports de Didenko semblent modestes en comparaison  : doctorant en droit, son père est un ancien administrateur de la région qui, depuis 2007, occupe le poste d’adjoint au maire de Novossibirsk en étant affilié à Russie unie. Didenko n’a pas d’enracinement particulier dans une circonscription, contrairement aux quatre élus précités. Cependant, sa situation financière le met plutôt à l’abri des pressions des administrations locales38. Ses compétences et connaissances juridiques, ses qualités oratoires et sa fidélité à la ligne du parti ont vraisemblablement été les critères décisifs pour Jirinovski. Là aussi, l’objectif de visibilité du parti au niveau local et la pureté idéologique en rapport avec l’opposition marquée à Russie unie ont favorisé le choix de ce cadre régional, pourtant moins doté en ressources clientélistes que les élus locaux exclus. Cela confirme les tendances observées pour ce parti au niveau fédéral. Ce n’est pas l’accès à des ressources clientélistes permettant d’offrir des avantages directs, matériels ou symboliques à ceux soutienant le parti qui détermine le choix du personnel au LDPR.

  • 39 « Dans un parti stratarchique, le pouvoir et l’autorité organisationnels ne sont pas concentrés dan (...)

23Ces deux exemples permettent de souligner la divergence entre le LDPR et RJ dans leurs critères de sélection des candidats  : le premier est d’une grande intransigeance sur les accommodements de ses responsables avec le pouvoir tandis que le second préfère un candidat qui démontrera in fine son allégeance au gouverneur. Ils confirment en outre le modèle de structure stratarchique39 centralisée suggéré par le système de franchise pour les deux partis étudiés. Si le siège garde un contrôle sur la sélection du personnel au niveau local, il laisse une marge de manœuvre non négligeable aux dirigeants régionaux qui ont préalablement gagné sa confiance. Ceux-ci organisent leur propre campagne, composent leurs appareils exécutifs régionaux, mènent les consultations internes et établissent leur stratégie électorale. Les deux partis privilégient les personnalités non seulement aptes à construire ou envisager une carrière politique interne mais encore susceptibles de se démarquer de Russie unie. Un tel choix indique leur volonté de s’inscrire dans la durée en privilégiant les cadres jeunes, ambitieux et investis dans la vie sociale et politique. L’objectif de construction et de consolidation du parti transparaît dans les deux cas et prime sur les intérêts et gains de court terme.

24Qu’en est-il toutefois dans les actes  ? Ce personnel privilégié est-il porté par des soucis de carrière aux dépens d’une activité d’opposition  ? Une fois aux affaires, le comportement des représentants régionaux de RJ et du LDPR est-il celui de «  partenaires » du pouvoir en place  ? Reçoivent-ils des consignes en ce sens de leur direction centrale  ? Pour répondre à ces questions, nous entendons explorer le contenu de la stratégie d’opposition constructive, notamment au niveau local.

2. «  L’opposition constructive » dans la pratique parlementaire locale  : une application sélective

25Le modèle de système de franchise implique que la tête définit la politique globale du parti tout en laissant le soin de l’exécution aux membres. L’on peut voir dans cette stratégie globale une «  opposition constructive » et nous vérifierons ici la pertinence d’une telle catégorie dans le cas du LDPR et de RJ et, plus particulièrement, à Tomsk.

  • 40 L’opposition constructive peut donc s’inscrire dans l’idéologie conservatrice propagée par Russie u (...)
  • 41 Outre les entretiens de l’auteur, voir les discours de députés locaux publiés sur le site de discus (...)
  • 42 L’expression est employée pour qualifier l’action du LDPR à la Douma fédérale, mandat de 2003-2007.
  • 43 Voir notamment celles de la sociologue Larisa Nikovskaja sur spravedlivo.ru

26L’on doit l’expression d’«  opposition constructive » à l’Administration présidentielle  : Vladislav Surkov, son chef adjoint chargé d’élaborer l’ingénierie institutionnelle du Kremlin, souhaite une opposition qui s’élève contre les problèmes et non contre le pouvoir en tant que tel (RIA Novosti, 10.2009). À ses yeux, l’opposition, qu’il s’agisse des partis ou des associations, doit se cantonner dans une activité de conseil et d’expertise tandis que le pouvoir décisionnel reste du ressort des dirigeants40. Cette tactique a donc été conçue au sommet de l’État avant que le LDPR et RJ puis Pravoe Delo (ex-Union des forces de droite – UFD) s’en saisissent et se l’approprient comme registre de justification. On ne trouve toutefois pas mention de l’expression dans leurs statuts ou programme officiel. Le concept est davantage présent dans les discours41, dans certains ouvrages (Žirinovskij, 2009)42 ou encore dans des contributions publiées sur Internet43.

  • 44 Les partis d’opposition loyale mentionnés sont RJ, le LDPR, le Parti démocratique et Juste cause.

27D’après Linz (1978), une opposition acceptant les moyens légaux mis en place pour réguler la compétition politique serait loyale mais, comme le soulignent Nikolaj Petrov, Maria Lipman et Henry Hale (2010), son impact se réduirait au minimum dans le contexte russe de maîtrise de la compétition par un seul groupe dirigeant. Pour ces chercheurs, les «  partis d’opposition loyale »44 servent un objectif précis  : «  conscients de la valeur informative de la compétition politique, les dirigeants russes ont cherché des moyens créatifs de stimuler une concurrence “constructive” dont les effets seraient bénéfiques pour eux mais qui ne risquerait aucunement de déboucher sur la victoire d’un camp opposé » (Ibid., 2010, p. 10).

28Nous verrons tout d’abord la place que tient cette stratégie dans les discours des responsables des deux partis puis dans leurs actes au sein de la Douma régionale. Le cas de la réforme du système électoral pour l’élection des maires dans la région de Tomsk illustrera la fonction tribunitienne (Lavau, 1969) adoptée par les élus régionaux du LDPR et de RJ.

2.1. Dans les discours  : l’opposition constructive comme registre de justification

  • 45 RJ a des représentants élus aux Doumas de la ville et de la région de Tomsk.

29Les représentants du LDPR et de RJ interrogés expliquent et justifient leur rôle dans le système partisan par leur pratique d’«  opposition constructive ». Dans leurs discours, ils font ressortir que l’opposition constructive est avant tout synonyme de compétence, de créativité et de connaissance de la réalité sociale, qu’elle n’a pas vocation à remettre en cause les orientations générales de la politique, celles-ci émanant des chefs de l’exécutif par l’intermédiaire de Russie unie, pas plus qu’elle n’est censée critiquer la manière dont ces orientations sont traduites dans les faits  ; en somme, elle propose des solutions plus efficaces pour résoudre les problèmes. Les membres de RJ s’étendent de manière détaillée sur les projets qu’ils entendent défendre dans le domaine social, attestant ainsi de la grande capacité d’initiative concrète de leur parti. Celui-ci soumettrait aux doumas régionale et municipale de Tomsk45 un nombre élevé de propositions de loi mais qui sont ensuite bloquées par Russie unie. Leur proximité de la population garantit aux deux forces d’opposition les compétences et les connaissances dont elles se targuent, acquises via les permanences que tiennent leurs sympathisants pour conseiller les citoyens sur des questions juridiques, économiques ou sociales.

  • 46 Entretiens avec S. Bulanova de RJ (Tomsk, 01.11.2008).
  • 47 Entretien avec A. Didenko (Tomsk, 09.09.2008).
  • 48 Entretien avec V. Ovsjannikov (LDPR, Moscou, 12.11.2008).

30Pour mieux souligner la distance censée les séparer, un responsable et des membres de RJ à Tomsk qualifient Russie unie de «  syndicat de bureaucrates » incompétents et oisifs46. Au LDPR, la critique des ressources administratives est tout aussi vive47  ; ses représentants soulignent qu’en termes de soutien de la population, bien que ses moyens soient moindres, le LDPR à Tomsk fait mieux que le «  parti du pouvoir » qui se borne à «  faire fonctionner l’administration »48. RJ et le LDPR s’érigent tous deux en experts éclairés face au pouvoir  ; cependant, le mépris que les deux partis éprouvent l’un pour l’autre est certainement plus fort que celui exprimé à l’endroit de Russie unie. Les deux partis se dénigrent réciproquement, considérant leur adversaire comme insignifiant, artificiel voire ridicule. Ainsi, pour RJ à Tomsk, le LDPR est «  le théâtre d’un seul acteur, une filiale de Russie unie » alors que, pour sa part, le second qualifie son rival d’iskusstvennyj («  artificiel »). Loin de porter sur des considérations idéologiques, ces critiques mutuelles révèlent le refus de chacun de reconnaître son concurrent comme un véritable parti politique indépendant du parti du pouvoir. Toute idée d’alliance ou de coalition entre RJ et le LDPR est en principe rejetée par les différents acteurs partisans interrogés.

  • 49 Entretien avec G. Nemceva (Tomsk, 24.10.2008).

31Dans la pratique parlementaire pourtant, l’opposition constructive ne se veut surtout pas menaçante ou offensive à l’égard du parti du pouvoir et de ses représentants, mais conciliante, adepte du dialogue et de la coopération. Le LDPR et RJ ne se placent pas dans le registre du conflit. Si le temps des élections est présenté comme celui de l’affrontement, le temps du mandat parlementaire est celui de la coopération dans un esprit apaisé, constructif et productif49. Une caractéristique fondamentale de cette opposition est qu’elle «  ne dérange pas le pouvoir dans son travail » selon le responsable fédéral du LDPR. Interrogé sur sa définition de l’opposition constructive par la chaîne locale indépendante TV2, le coordinateur du LDPR de Tomsk répond que l’opposition constructive, c’est vouloir le dialogue pour choisir les meilleurs politiques (TV2, 2009). La posture critique à l’encontre de Russie unie cède alors le pas à la collaboration au sein de l’Assemblée.

  • 50 Entretien avec V. Ovsjannikov (LDPR, Moscou, 12.11.2008).
  • 51 Aman Tuleev, membre du KPRF jusqu’en 2003, est aujourd’hui encore gouverneur de la région de Kemero (...)

32L’opposition constructive, enfin, œuvre avant tout pour les intérêts et la stabilité de l’État et des institutions. Quand le soutien aux dirigeants de l’État fédéral, D. Medvedev et V. Poutine n’est pas explicite, aucune critique n’est formulée à leur égard. Ce souci de la permanence de l’exécutif aux niveaux central et régional est plus prégnant chez RJ. Il arrive, en effet, que le LDPR critique la «  politique des cadres »50 du gouvernement qui entraîne le maintien au pouvoir de gouverneurs anciennement membres du KPRF, au comportement indépendant et marqué par de fortes dérives autoritaires, comme Aman Tuleev51. La désapprobation du LDPR est toutefois modérée puisqu’il préfère s’accommoder d’une telle situation.

  • 52 À l’issue des élections du 1er mars 2009 en Russie, V. Surkov déclarait : « Un seul parti domine ch (...)

33En définitive, la stratégie d’opposition dite constructive est, par bien des aspects, virtuelle, c’est-à-dire vidée de son sens tant elle édulcore le désaccord. Le recours à ce registre discursif prouve, certes, que les deux partis suivent les directives du Kremlin mais, surtout, il témoigne d’une évolution de la conception du partage du pouvoir dans les modes de pensée. À cet égard, le sémiologue Iouri Lotman observe dans l’histoire politique russe une tendance à la bipolarité qui exclut le principe du compromis et selon laquelle «  un individu, un groupe, un pays était soit ami, soit ennemi » (Lotman, 2002 cité in Vaissié, 2010, p. 109). Le pouvoir soviétique a promu cette approche bipolaire que l’Administration présidentielle réactive à son tour en 2004 (Vaissié, 2010). Le pouvoir ne se partage pas (Glebova, 2006) et toute opposition est perçue comme un facteur de division par des dirigeants pour qui l’unité et la stabilité du pays sont prioritaires52. L’appréhension de l’opposition constructive par le LDPR et RJ remet néanmoins en question ce schéma et suggère une voie médiane entre les deux pôles que sont le pouvoir et les barricades. L’exploration du terrain local met en lumière l’application concrète de cette politique.

2.2. Dans les actes  : quand l’opposition constructive exerce la fonction tribunitienne

  • 53 Selon Georges Lavau, la fonction tribunitienne est le fait des « forces centrifuges qui ne peuvent (...)

34Qu’au sein de l’arène parlementaire de Tomsk, les partis usent de cette stratégie pour traiter de nombreuses questions, notamment économiques, juridiques et sociales, ne les empêche pas de s’opposer frontalement au parti du pouvoir. L’examen de la réforme du système des élections municipales montrera que le LDPR et RJ assurent la fonction tribunitienne53 (Lavau, 1969).

  • 54 Voir le Statut (Loi fondamentale) – Ustav (Osnovnoj zakon) – adopté par la Douma de la région de To (...)
  • 55 Elle se compose de 42 députés, élus pour moitié au scrutin uninominal et pour moitié au scrutin de (...)
  • 56 Loi de la région de Tomsk du 14 février 2005, n° 29-OZ « Sur les élections municipales dans l’oblas (...)

35Conformément à l’Article 13, §2 (e) de son Statut54, la région de Tomsk a la compétence de fixer la procédure des élections aux administrations autonomes locales sur le territoire du sujet. Suite à l’élection du maire de Tomsk en mars 2009, le gouverneur V. Kres fait transmettre via la fraction Russie unie de la Douma régionale55 une proposition d’amender la loi «  sur les élections municipales dans l’oblast de Tomsk »56 qui vise la suppression du second tour de scrutin. L’argument avancé est d’abord économique  : les villes pourraient de la sorte éviter les dépenses liées à l’organisation d’un second tour. En deuxième lecture, le 17 décembre 2009, après des débats houleux, Viktor Kres renchérit  ; il fait alors valoir que l’entre-deux-tours est propice aux tentatives de corruption des électeurs et de commerce des voix (TV2, 2009). Le supprimer protègerait les électeurs contre ces «  méthodes de campagne sales » et les obligerait à se responsabiliser en votant dès le premier tour pour le candidat de leur choix. Le scrutin à deux tours qui favoriserait la corruption et la division (raskol) de la société mérite donc d’être réformé selon le gouverneur dont les arguments sont d’ailleurs relayés par les députés du groupe Russie unie. Ceux de RJ et du LDPR sont, en revanche, plus circonspects.

  • 57 Le « vote contre tous » est une possibilité permettant aux électeurs d’exprimer leur rejet de tous (...)
  • 58 Des extraits vidéo de cette 34ème session de la Douma régionale sont disponibles sur Internet, au 1 (...)
  • 59 Une exclusion du parti n’entraîne pas en soi une exclusion de l’élu de la fraction parlementaire.

36Les deux députés du groupe RJ votent «  contre » la proposition et explicitent leur choix dans la presse. Nemceva avait certes préalablement envisagé de voter «  pour » mais à la seule condition du rétablissement du vote «  contre tous »57. Composée de deux élus, la position de la fraction LDPR reflète ses divisions internes. A. Didenko s’oppose publiquement à la réforme, la qualifiant d’«  antidémocratique » (Kommersant’’, 2009) à la tribune de la Douma58 où il motive ses arguments et réfute ceux de la majorité alors que son collègue S. Rudenko, exclu du parti59, le contredit et prend la défense du projet du gouverneur et de Russie unie.

  • 60 Notons que les données manquent concernant le détail des votes de la fraction du KPRF (3 députés). (...)
  • 61 Le 15 mars 2010, suite aux élections régionales dans quelques sujets de la Fédération, RJ organise (...)
  • 62 Les élections du 11 octobre 2009 à la Douma de Moscou ont été entachées de fraudes massives, permet (...)

37Parmi les trente-cinq députés présents à la Douma, le 17 décembre 2009, trente et un se prononcent pour la réforme du système électoral, trois s’y opposent et un s’abstient. Les trois voix «  contre » sont celles des deux élus RJ et d’un élu LDPR60. Or, d’après Hans Oversloot et Ruben Verheul (2006), les partis dits satellites du pouvoir ont pour mission de transformer le vote protestataire des électeurs en soutien effectif pour le régime au sein des organes législatifs. Ce que n’illustre pas cet exemple précis dans la mesure où Nemceva et Didenko dénoncent fermement et publiquement le monopole de Russie unie sur la vie politique61. Comme l’avancent Protsyk et Wilson (2003), afin de mettre en évidence leur marquage idéologique, ces partis ne peuvent se conformer en permanence à la ligne politique du gouvernement. Il leur faut voter contre la majorité sur certains dossiers dont le rejet ou l’approbation sont des révélateurs du degré de loyauté envers le gouvernement. Dans notre cas, les deux députés régionaux s’opposent avec une certaine véhémence à la réforme électorale et plus particulièrement à la modification par Russie unie des règles du jeu. Se voulant ici les porte-parole de leur électorat lésé qui rassemble les citoyens insatisfaits de la politique des dirigeants du pays, ils assument la fonction tribunitienne (Lavau, 1969, p. 38) dans le système politique. Celle-ci a, en premier lieu, pour spécificité «  l’exercice d’une critique sociale fondée sur la défense des classes défavorisées et axée sur une dénonciation parcellaire du fonctionnement du régime politique » (Hamel & Thériault, 1975, p. 20). Numériquement trop faibles pour réellement changer la donne, ils s’expriment haut et fort pour se distinguer dans le système partisan et légitimer leur présence au yeux de leur électorat, au risque de déplaire au parti dominant. Il est difficile de savoir si les deux députés ont reçu des consignes en ce sens de leur appareil central, mais il est à noter qu’une telle action reproduit une scène similaire de protestation ouverte des députés RJ et LDPR en octobre 2009 à Moscou62. On peut en déduire que les appareils centraux n’ont pas désapprouvé une telle protestation publique contre le monopole de Russie unie à Tomsk.

Conclusion

38Tandis que de nombreux observateurs considèrent le LDPR et RJ comme des partenaires du pouvoir destinés à capturer et neutraliser les votes protestataires, nous voulions nuancer cette appréciation en mettant en relief le fonctionnement concret de ces deux partis à Tomsk. En effet, s’il est indéniable que le LDPR et RJ s’inscrivent dans la politique d’ingénierie partisane de l’Administration présidentielle, ils disposent néanmoins d’une véritable organisation qui agit sur tout le territoire de la Fédération de Russie. Nous nous sommes interrogée sur la manière dont l’appareil central de chacun de ces partis peut contrôler ses branches locales, tant du point de vue de l’organisation que de la politique du parti. Nous avons ainsi choisi d’observer deux indicateurs de ce contrôle  : la sélection du personnel régional et l’application de la politique d’opposition constructive.

39Examinant dans un premier temps la chaîne reliant les appareils centraux moscovites et les branches locales en Sibérie occidentale, nous avons pu conclure à la pertinence du modèle de «  parti de franchise » appliqué à ces deux formations. Ainsi le LDPR et RJ ont en commun une structure interne centralisée, le siège se réservant tous pouvoirs d’intervention et de décision, de manière formelle ou informelle, sur la sélection du personnel. Les dirigeants régionaux (les franchisés) ayant reçu l’aval du siège central (le franchiseur) jouissent, de leur côté, d’une certaine autonomie pour «  livrer le produit » de la «  marque » (Carty, 2004).

  • 63 Le parti Jabloko, représenté à la Douma fédérale jusqu’en 2007, ainsi que des mouvements tels que D (...)

40L’opposition constructive, utilisée comme registre de justification par le LDPR et par RJ, est l’une des stratégies fondamentales que les branches locales doivent appliquer. Assumée et relayée par les responsables du LDPR et de RJ à Tomsk, elle leur offre divers avantages. En mettant en avant la compétence, l’expertise, la coopération et leur force de proposition, elle protège leurs membres des stigmates de l’appartenance à «  l’opposition »63 dans un contexte de pluralisme limité  ; ces derniers peuvent, dès lors, envisager une carrière en politique hors du parti du pouvoir. De la sorte, l’objectif du siège central de développer le parti coïncide avec les aspirations personnelles des cadres locaux.

41La politique d’opposition constructive, loin de n’être qu’une composante de la «  démocratie virtuelle » (Wilson, 2005), représente aussi une tentative de participer aux organes décisionnels dans le cadre d’un pouvoir et d’une société hiérarchisés où «  l’allégeance est un trait essentiel de la configuration de l’esprit public » (Raviot, 2008, p. 83). Au Parlement régional de Tomsk, l’on constate néanmoins une application sélective de ce principe. Agissant sur le thème des politiques économiques et sociales, il est mis à l’écart sur le terrain des réformes du système électoral. On voit alors émerger un autre impératif, approuvé par l’appareil central et qui conditionne également le choix du personnel  : celui de la visibilité du parti en tant que parti d’opposition dénonçant le «  monopole » de Russie unie.

42Les deux «  partis de franchise » visent effectivement à développer et asseoir leur «  marque » sur tout le territoire russe. Les politiques ayant un impact négatif sur leur nombre de sièges ou sur leur visibilité dans la compétition électorale sont donc âprement combattues. L’exemple de Tomsk souligne que lorsque de telles ressources sont disponibles, le siège favorise des cadres ayant la capacité et la volonté de mener ces combats, aux dépens des ressources clientélistes. Le LDPR et RJ endossent alors la fonction tribunitienne, écartant d’éventuels soutiens financiers mais donnant corps à la protestation politique chère à leur électorat.

  • 64 Ainsi la branche de RJ à Kemerovo fait preuve, contrairement à celle de Tomsk, d’une loyauté sans f (...)

43Dans une perspective comparative, la structure flexible du système de franchise du LDPR et de RJ explique la diversité des situations régionales64. Elle autorise une marge de manœuvre aux responsables régionaux pour appliquer, en fonction du contexte, une opposition sélective aux initiatives du pouvoir. L’ampleur et la nature de cette opposition sont déterminées par le niveau régional selon les intérêts idéologiques et/ou opportunistes des dirigeants de la branche. L’étude de cette articulation entre les principes et leur application montre que derrière des formes et pratiques d’opposition loyale, le LDPR et RJ peuvent assumer les fonctions «  classiques » des partis politiques.

Haut de page

Bibliographie

Auyero Javier, Lapegna Pablo & Page Poma Fernanda (2010), « Contestation et patronage : intersections et interactions au microscope », Revue internationale de politique comparée, vol. 17, n°  2, pp.  71-102.

Barber John (1997), “Opposition in Russia”, Government and Opposition, vol. 32, n° 4, October, pp.  598-613.

Carty Kenneth (2004), “Parties as Franchise Systems”, Party Politics, vol. 10, n° 1, pp. 5-24.

Diamond Larry Jay (2002), “Thinking About Hybrid Regimes”, Journal of Democracy, vol. 13, n° 2, April, pp. 21-35.

Eldersveld Samuel James (1965), Political Parties  : A Behavioral Analysis, Chicago  : Rand McNally.

Gel’man Vladimir (2008), “Party Politics in Russia : From Competition to Hierarchy”, Europe-Asia Studies, vol. 60, n° 6, August, pp. 913-930.

Gel’man Vladimir (2007), «  Le parti dominant en Russie, quelles perspectives ? », in Aude Merlin, éd., Où va la Russie  ?, Bruxelles  : Éditions de l’Université de Bruxelles, pp.  51-65.

Gel’man Vladimir (2003), “Free but Unfair. The Problems of Electoral Governance in Russia”, PONARS Policy Memo Series, n° 292, Center for Strategic and International Studies, The European University at St Petersburg, November.

Glebova Irina (2006), Kak Rossija spravilas’ s demokratiej : zametki o russkoj političeskoj kul’ture, vlasti, obščestve (Comment la Russie est venue à bout de la démocratie  : notes sur la culture politique russe, le pouvoir, la société), Moskva : ROSSPEN.

Golosov Grigorii (1997), “Russian Political Parties and the ‘Bosses’ : Evidence from the 1994 Provincial Elections in Western Siberia”, Party Politics, vol. 3, n° 1, pp.  5-21.

Hale Henry (2007), Why not Parties in Russia ? Democracy, Federalism and the State, Cambridge-New York : Cambridge University Press.

Hamel Jacques & Thériault Yvon (1975), «  La fonction tribunitienne et la députation créditiste à l’Assemblée Nationale du Québec », Revue canadienne de science politique, vol.  8, n°  1, pp.  3-21.

Hirschman Albert O. (1970), Exit, Voice, and Loyalty : Response to Decline in Firms, Organizations, and States, Cambridge, MA : Harvard University Press.

Izbiratel’naja komissija Tomskoj oblasti (2008), «  Tomskaja gorodskaja municipal’naja izbiratel’naja komissija » (Commission électorale municipale de la ville de Tomsk) ; http://www.tomsk.vybory.izbirkom.ru/region/tomsk?action=show&vrn=470422093197&region=70&prver=0&pronetvd=null

Izbiratel’naja komissija Tomskoj oblasti (2009), «  Tomskaja gorodskaja municipal’naja izbiratel’naja komissija » (Commission électorale municipale de la ville de Tomsk) ; http://www.tomsk.vybory.izbirkom.ru/region/tomsk?action=show&vrn=470422093912&region=70&prver=0&pronetvd=null

Kahn Michèle (2007), «  Russie juste, naissance d’un second “parti du pouvoir” », Regard sur l’Est, 15 mars  ; http://www.regard-est.com/home/breve_contenu.php?id=715

Kulik Anatoly (2010), “Parties of the Russian ‘Sovereign Democracy’ : Are They Sustaining Democratic Governance ?”, in Kay Lawson, Ed., Political Parties and Democracy, vol.  III  : Anatoly Kulik & Baogang He, Eds., Post-Soviet and and Asian Political Parties, Westport : Praeger Publishing House, pp.  57-83.

Lavau Georges (1969), «  Partis et systèmes politiques  : interactions et fonctions », Revue canadienne de science politique, vol.  2, n°  1, mars, pp.  18-44.

Linz Juan J. (1978), The Breakdown of Democratic Regimes, vol.  1, Baltimore : The Johns Hopkins Press.

March Luke (2009), “Managing Opposition in a Hybrid Regime : Just Russia and Parastatal Opposition”, Slavic Review, vol. 3, n° 68, pp. 504-527.

Michels Robert (1971), Les partis politiques, Paris  : Flammarion [première édition  : 1911].

Moraski Byron (2006), Elections by Design : Parties and Patronage in Russia’s Regions, DeKalb : Northern Illinois University Press.

Oversloot Hans & Verheul Ruben (2006), “Managing Democracy : Political Parties and the State in Russia”, Journal of Communist Studies and Transition Politics, vol. 22, n° 3, September, pp. 383-405.

Petrov Nikolaj, Lipman Maria & Hale Henry (2010), “Overmanaged Democracy in Russia : Governance Implications of Hybrid Regimes”, Carnegie Paper, n°  106, February.

Protsyk Oleh & Wilson Andrew (2003), “Centre Politics in Russia and Ukraine : Patronage, Power and Virtuality”, Party Politics, vol. 9, n° 6, November, pp. 703-727.

Raviot Jean-Robert (2008), Démocratie à la russe  : pouvoir et contre-pouvoir en Russie, Paris  : Ellipses.

Remington Thomas F. (2004), Politics in Russia, New-York : Longman.

Sartori Giovanni (2005), Parties and Party Systems : A Framework for Analysis, Volume 1, Cambridge-New York : Cambridge University Press [première édition  : 1976].

Schedler Andréas (2002), “Elections without Democracy : The menu of manipulation”, Journal of Democracy, vol. 13, n° 2, April, pp. 36-50.

Shevtsova Lilia (2007), Russia Lost in Transition : The Yeltsin and Putin Legacies, Washington, DC : Carnegie Endowment for International Peace.

Vaissié Cécile (2010), «  Étouffement et renaissance des oppositions en Russie (2000-2010) », Hérodote, n°  138, pp.  109-126.

Wilson Andrew (2005), Faking Democracy in the Post-Soviet World, London : Yale University Press.

Wilson Kenneth (2009), “Party-System Reform in Democracy’s Grey Zone : A Response to Moraski”, Government and Opposition, vol. 44, n° 2, April, pp.  188-207.

Zenkovič Nikolaj (2007), Elita, enciklopedija kar’er gubernatora novoj Rossii (L’élite, encyclopédie des carrières de gouverneur dans la nouvelle Russie), Moskva : Olma media group.

Žirinovskij Vladimir (2009), LDPR : 20 let bor’by (LDPR  : 20 ans de lutte), Moskva : Izdatel’stvo LDPR.

Presse

“Putin poobešal ne dopustit’ liberal’nuju oppoziciju k vlasti” (Poutine a promis de ne pas admettre l’opposition libérale au pouvoir), Lenta.ru, 19.12.2010.

“V odin tur budut prokhodit’ vybory glav municipal’nykh obrazovanij v Tomskoj oblasti” (Les élections des maires dans l’oblast de Tomsk se dérouleront en un tour), TV2, 17.12.2009.

“Tomsk sekonomit obščestvu 15  % golosov” (Tomsk fera épargner à la société 15  % des voix), Kommersant, n°  213 (4268), 16.11.2009.

«  Des fraudes colossales aux élections à Moscou révélées par les sociologues », RIA Novosti, 03.11.2009.

“Surkov prizyvaet oppoziciju RF k bol’šej konstruktivnosti” (Surkov appelle l’opposition de la Fédération de Russie à être plus constructive), RIA Novosti, 20.10.2009.

“V Tomske : A. Didenko : Byvšie členy Tomskogo regional’nogo otdelenija LDPR ustroili provokaciju” (Tomsk. A. Didenko  : les anciens membres de la branche régionale du LDPR ont organisé la provocation), Tomskij Obzor, 22.04.2009.

“Nedovol’naja itogami vyborov mera Tomska obščestvennost’ trebuet otstavki gubernatora Viktora Kressa” (Mécontente des résultats des élections municipales de Tomsk, l’opinion publique demande la démission du gouverneur Viktor Kres), A.I. Regnum, 23.03.2009

“Vybory – khorošij povod, čtoby gorodskoj i oblastnoj vlasti sdelat’ vyvody” (Les élections  : une bonne occasion pour le pouvoir régional et municipal de tirer des conclusions), TV2, 16.03.2009.

“Partii deljat pobedu ‘Edinoj Rossii’” (Les partis partagent la victoire de Russie unie), Kommersant, n°  37 (4092), 03.03.2009, http://kommersant.ru/doc.aspx?DocsID=1128643&print=true

“Počemu ne vyigral favorit ?” (Pourquoi le favori n’a-t-il pas gagné ?), Tomskij vestnik, 03.03.2009.

“Na vyborakh mera Tomska lidiruet Nikolajčuk, neznačitel’no otstaet Deev” (Aux élections municipales de Tomsk, Nikolajčuk est en tête suivi de peu par Deev), RIA Novosti, 01.03.2009.

“Tomskoe otdelenie LDPR – pod vnešnim upravleniem” (La branche de Tomsk du LDPR est dirigée de l’extérieur), Argumenty i Fakty Tomsk, 14.12.2005.

Haut de page

Annexe

Annexe méthodologique

Entretiens qualitatifs semi-directifs, en face à face

Responsables du LDPR et de RJ

À Moscou  :

– Un responsable du LDPR  : V. Ovsjannikov, directeur adjoint de l’appareil central du LDPR à Moscou (12.11.2008).

– Deux responsables de RJ  : S. Birjukov, responsable des relations avec les régions au parti Russie juste (13.11.2008) et M. Kopaeva, tutrice de la région sibérienne (19.11.2009).

Dans les trois villes sibériennes  :

– Cinq responsables régionaux du LDPR  : A. Didenko et L. Terekhov à Tomsk (09.09.2008 et 08.12.2009)  ; A. Ščukin à Barnaoul (25.11.2008)  ; V. Bunkin et S. Gromakin à Kemerovo (24.09.2008).

– Trois de RJ  : S. Bulanova, K. Malykh et G. Nemceva à Tomsk (24.10.2008, 01.11.2008 et 14.10.2010).

Observateurs de la vie politique

À Tomsk  :

Plusieurs journalistes  : A. Krasnoperov, Tomskie Novosti, 03.09.2008, 07.12.2009 et 14.10.2010  ; A. Sokolov, Tomskaja Nedelja, 15.09.2008 et 05.12.2009) et un professeur à l’Université d’État de Tomsk et membre de l’UFD/Juste cause (Pravoe Delo) (A. Dankov, Faculté d’histoire, 28.10.2008).

Données officielles

Publiées par la commission électorale régionale (www.elect70.tomsk.ru) ou la Douma de la région de Tomsk (www.duma.tomsk.ru)  : résultats des élections, comptes des partis, comptes rendus de séances de la Douma régionale.

Documents internes des partis

Correspondance entre Jirinovski et Didenko.

Presse locale

Tomskie Novosti, Tomskaja Nedelja, TV2.

Presse internet nationale ou régionale

A.I. Regnum ; RIA Novosti ; Tomskij vestnik ; Tomskij obzor ; Argumenty i Fakty Tomsk.

Sites internet du parti RJ

<spravedlivo.ru>, site de débats et discussions.

Annexe biographique

Aleksandr Deev. Né en 1960, député à la Douma de la ville de Tomsk, médecin, il se présente régulièrement aux différentes élections contre les candidats sortants depuis 1999. Directeur de rédaction de l’hedbomadaire Tomskaja Nedelja, il fait principalement campagne contre la corruption des élites locales et le dysfonctionnement des administrations de la région. Un temps membre de Russie unie, il passe en 2007 chez RJ.

Aleksej Didenko. Né en 1983, doctorant (aspirant) à la Faculté de droit de l’Université d’État de Tomsk, ancien assistant de député fédéral, il est membre du LDPR depuis 2003 et coordinateur régional du LDPR de Tomsk depuis 2005. Il est élu député à la Douma de la région de Tomsk en 2007.

Evgenij Gusev. Né en 1980, il est médecin en anesthésie-réanimation au sein d’une maternité de Tomsk, membre du LDPR. Il suit également des études de droit à l’Université d’État de Tomsk.

Viktor Kres. Né en 1948, ancien directeur de kolkhoze, il est gouverneur de la région de Tomsk depuis 1991 et membre de Russie unie depuis 2004. Il est loyal envers le Kremlin tout en manifestant une certaine tolérance pour l’existence de médias indépendants (Zenkovič, 2007, pp.  231-33).

Galina Nemceva. Née en 1975, gestionnaire des ressources humaines dans la firme agro-alimentaire Groupe agraire sibérien (5 000 employés), elle est directrice générale adjointe aux questions sociales depuis 2004. Elle s’implique dans diverses activités caritatives. En 2007, elle entre à RJ dont elle préside la branche régionale de Tomsk depuis 2008. Elle est élue député à la Douma de la région de Tomsk en 2007.

Nikolaj Nikolajčuk. Né en 1960, ingénieur industriel, il est député de la Douma de la ville de Tomsk depuis 2001 et président de la Douma de 2002 à août 2007. À cette date, il devient maire intérimaire suite à l’arrestation du maire A. Makarov. Il est élu maire de Tomsk en 2009. Il est membre de Russie unie.

Haut de page

Notes

1 Rappelons la définition que donne de la loyauté Le nouveau Petit Robert de la langue française (2009) : « Caractère loyal, fidélité à tenir ses engagements, à obéir aux règles de l’honneur et de la probité » ; on peut, entre autres, la témoigner à une personne ou une institution. Selon Hirschman, la loyauté est « un attachement spécial à une organisation » qui comporte une dimension affective ou de croyance. Mais contrairement « à un pur acte de foi », le comportement « le plus loyaliste » contient une grande part de calcul raisonné (Hirschman, 1970, p. 77). La loyauté envers le pouvoir est donc ici une ligne de conduite fondée sur un attachement particulier aux élites dirigeantes qui consiste à accepter leur présence actuelle au pouvoir, la soutenir et contribuer à la perpétuer.

2 Selon Sartori (2005), un système à parti hégémonique n’est pas multipartite mais constitue « un système à deux niveaux » dans lequel un parti tolère et distribue de manière discrétionnaire une fraction de son pouvoir à des groupes politiques subordonnés. Ces partis « satellites » peuvent participer au pouvoir, être présents dans les organes exécutifs et législatifs, mais ne sont pas des acteurs de plein droit. Leur statut d’infériorité par rapport au parti hégémonique ne leur laisse quasiment aucune chance de se comporter de manière indépendante. Ce système produit un « pluralisme simulé ».

3 Il s’agit de la Douma d’État de la Fédération de Russie ; elle est composée de députés élus au suffrage universel direct.

4 « Leur objectif est d’incarner l’opposition au régime, de servir de parti du pouvoir « alternatif » et de canaliser le mécontentement de l’électorat à l’égard des dirigeants. Les partis d’opposition favoris sont créés ou cooptés ou, au moins, aidés par les dirigeants (…) afin de désarmer toute opposition réelle et indépendante, et de transformer les votes des citoyens pour les partis d’opposition en votes en faveur du régime via les votes des élus au Parlement » (Oversloot & Verheul, 2006, pp. 391-395). Toutes les citations issues de l’anglais ont été traduites par nos soins.

5 Le terme « local » est générique et comprend, par opposition au niveau « fédéral » ou « central », le niveau régional (désignant les entités fédérées ou sujets), le niveau municipal, etc.

6 L’auteur distingue trois types d’opposition dans le cadre d’une démocratie en cours de formation : loyale, semi-loyale et déloyale. L’opposition déloyale utilise des moyens illégaux et/ou violents pour parvenir à ses fins.

7 Les données sur lesquelles nous fondons notre analyse ont été recueillies au cours de trois séjours de recherche à Moscou et en Sibérie occidentale (ville de Tomsk principalement, mais aussi Kemerovo et Barnaoul) du 18 août au 14 décembre 2008, à Moscou et Tomsk du 15 novembre au 15 décembre 2009 et à Tomsk en octobre 2010. Nous faisons ici référence aux entretiens qualitatifs semi-directifs que nous avons menés auprès de responsables du LDPR et de RJ, à des données officielles, à des documents internes des partis ainsi qu’à la presse locale. Pour plus de précisions, voir l’annexe méthodologique.

8 Voir en Annexe la biographie succincte des principaux acteurs politiques régionaux évoqués.

9 Tomsk est un centre scientifique, académique et industriel de premier plan.

10 Ainsi aux élections à la Douma de la ville de Tomsk en octobre 2005, le Parti des retraités (Partija pensionerov) dépasse Russie Unie en nombre de voix.

11 Une presse locale relativement indépendante peut ainsi publier des analyses pluralistes et critiques de la situation politique comme en témoignent les programmes de la chaîne de télévision TV2 ainsi que les articles publiés par Tomskie novosti ou par l’hebdomadaire d’opposition, Tomskaja nedelja.

12 Deux élections distinctes ont lieu pour les branches exécutive et législative du pouvoir local. Le maire de la ville de Tomsk est élu tous les cinq ans au scrutin uninominal à deux tours et c’est bien de cette élection qu’il s’agit ici. La Douma de la ville de Tomsk, organe représentatif composé de 36 députés, est également renouvelée tous les cinq ans au scrutin mixte (la moitié des députés sont élus au scrutin de liste, l’autre moitié au scrutin binominal majoritaire par circonscription). Par la suite nous entendrons par « élections municipales » celles du maire du Tomsk.

13 À ce sujet, Daniel Treisman donne l’exemple du vote du budget fédéral en 1995; il mentionne l’existence «d’autres votes clés» à l’occasion desquels le LDPR a soudainement changé de position au moment du vote final, passant de l’opposition à l’approbation (Treisman, 1998).

14 Elle a englobé le parti nationaliste La Patrie (Rodina) d’Aleksandr Babakov, le Parti de la vie (Partija žizni) de Sergej Mironov et le Parti des pensionnés (Partija pensonierov) d’Igor Zotov.

15 Chambre haute du Parlement fédéral.

16 Notons qu’à Stavropol, Russie juste devance Russie unie du fait de la rivalité entre le maire de la ville (Russie juste) et le gouverneur de la région, (Russie unie), ce dernier étant particulièrement impopulaire (March, 2009, p.514).

17 Les ressources administratives font référence à l’utilisation, à des fins électorales, des moyens de l’administration publique (Gel’man, 2003).

18 Loi fédérale n° 95-FZ du 11 juillet 2001 sur les partis politiques. Voir en particulier le Titre IV sur « Le dispositif interne du parti politique » (articles 21 à 25).

19 Selon Jean-Robert Raviot, la loi dénote une vision claire de l’organisation d’un parti : il doit être une doublure de la verticale du pouvoir d’État (Raviot, 2001, p. 32).

20 La franchise est « un savoir-faire, une marque, etc. cédés par un commerçant à un autre dans le cadre d’un contrat de franchisage ». Le franchisé est « un commerçant qui utilise la marque, l’organisation, l’image publicitaire, etc. d’un autre (franchiseur) en lui versant une rémunération » (Le Petit Larousse, 2010).

21 Par exemple, le nom de Russie juste (Spravedlivaja Rossija) connote, d’une part, le discours de «justice sociale» (March, 2009, p.519) susceptible de capter l’attention des électeurs sensibles à cette thématique et, d’autre part, l’analogie avec le nom de Russie unie (Edinaja Rossija)– RJ se situe au «centre gauche» par rapport au parti du pouvoir (Kahn, 2007). Selon le directeur adjoint de l’administration présidentielle, Vladislav Sourkov, un tel parti a vocation à attirer les électeurs «qui ne soutiennent pas le pouvoir mais ne lui sont pas radicalement hostiles» (V.Surkov, rencontre du 26 mars 2006 avec des parlementaires du Parti de la vie. Le sténogramme de cette rencontre est disponible au 31 janvier 2011 sur http://www.polit.ru/dossie/2006/08/15/surkov.html). La dénomination même du parti confirme ainsi la notion de «jambe gauche du parti du pouvoir» (March, 2009, p.509).

22 Entretien avec les responsables du LDPR de Kemerovo (24.09.2008).

23 Selon la loi sur les partis politiques (n° 95-FZ, 2001, article 24.2), « l’organe directeur supérieur de la branche régionale du parti est la conférence (konferencija) ou bien l’assemblée générale (obščee sobranie) de la branche régionale du parti ». Cette instance se réunit au moins une fois tous les quatre ans. Elle est constituée des délégués élus au sein des sections locales qui composent la section régionale. Chez Russie juste (Articles 29 et 30 des statuts de 2009) comme au LDPR (Article 6 des statuts de 2009), il est de la compétence de la conférence régionale d’examiner les candidatures et de former les listes en vue des élections organisées dans la région. Au LDPR de la région de Tomsk, la conférence comprend 19 délégués des sections locales tandis que Russie juste en comporte 15.

24 Entretien avec un des tuteurs du Département des relations avec les régions (RJ, Moscou, 19.11.2009).

25 Entretien avec A. Ščukin (LDPR, Barnaoul, 25.11.2008).

26 Le Présidium est l’organe collégial directeur supérieur central de RJ.

27 Elle se réunit le 27 décembre 2008.

28 Le seul enjeu de la conférence était de décider de l’ampleur du soutien au candidat du pouvoir. Le soutien actif consistait à faire véritablement campagne pour Nikolajčuk, un soutien passif était un simple appel à voter pour lui.

29 Le coordinateur régional A. Didenko, anticipant un score peu élevé, a préféré ne pas aller lui-même aux urnes, ce qui s’explique par le conflit interne de la branche locale que nous évoquerons plus loin.

30 Le refus de présenter Deev a permis d’éviter un conflit frontal avec Russie unie et surtout avec le gouverneur, RJ faisant alors figure de « parti aidant le parti du pouvoir » (Oversloot & Verheul, 2006, p. 392) plutôt que de parti d’opposition.

31 Directeur du fonds de l’assurance médicale obligatoire, médecin de profession, A. Deev est loin d’avoir accès à des sources de financement comparables à celles de Nemceva au sein du Groupe agraire sibérien. Entretien avec le journaliste A. Krasnoperov (14.10.2010, Tomsk).

32 Le coordinateur régional est l’équivalent chez RJ du président de la branche régionale du parti. C’est lui qui la dirige et porte la responsabilité de l’exécution des directives émanent du siège. Il représente officiellement le parti dans la région (Statuts du LDPR).

33 La nécessité de rassembler les forces à l’approche des élections législatives fédérales en décembre 2007 en a été le prétexte.

34 Étudiant dans la même faculté que Didenko, c’est une figure inconnue du public tout comme au sein du LDPR.

35 L’indice d’accès clientéliste est le pourcentage de sièges d’un groupe parlementaire détenus par les députés ayant un accès direct aux ressources étatiques lors des élections législatives. Ces « clients préférentiels de l’État » sont les hauts fonctionnaires et les directeurs des entreprises publiques (Protsyk & Wilson, 2003, p. 709).

36 Les entreprises unitaires municipales, dont les capitaux appartiennent à la municipalité, gèrent les services communaux. Leur statut est réglementé par la loi fédérale 161-FZ « O gosudarstvennykh i municipal’nykh unitarnykh predprijatijakh» (Sur les entreprises unitaires municipales et d’État) du 14 novembre 2002. Ici, Tomskgorsvet gère l’éclairage public à Tomsk.

37 Les administrateurs intermédiaires et les gestionnaires d’entreprise ont l’avantage de disposer d’une base électorale limitée mais fiable (Golossov, 1997, p. 13).

38 Son père l’aide financièrement depuis Novossibirsk.

39 « Dans un parti stratarchique, le pouvoir et l’autorité organisationnels ne sont pas concentrés dans un lieu unique ou dans un ensemble unique d’individus ; ils sont (plus ou moins) largement partagés. » (Carty, 2004, p. 9).

40 L’opposition constructive peut donc s’inscrire dans l’idéologie conservatrice propagée par Russie unie (voir l’article de Clémentine Fauconnier dans ce dossier, pp. 17-36).

41 Outre les entretiens de l’auteur, voir les discours de députés locaux publiés sur le site de discussion de RJ : Spravedlivo.ru.

42 L’expression est employée pour qualifier l’action du LDPR à la Douma fédérale, mandat de 2003-2007.

43 Voir notamment celles de la sociologue Larisa Nikovskaja sur spravedlivo.ru

44 Les partis d’opposition loyale mentionnés sont RJ, le LDPR, le Parti démocratique et Juste cause.

45 RJ a des représentants élus aux Doumas de la ville et de la région de Tomsk.

46 Entretiens avec S. Bulanova de RJ (Tomsk, 01.11.2008).

47 Entretien avec A. Didenko (Tomsk, 09.09.2008).

48 Entretien avec V. Ovsjannikov (LDPR, Moscou, 12.11.2008).

49 Entretien avec G. Nemceva (Tomsk, 24.10.2008).

50 Entretien avec V. Ovsjannikov (LDPR, Moscou, 12.11.2008).

51 Aman Tuleev, membre du KPRF jusqu’en 2003, est aujourd’hui encore gouverneur de la région de Kemerovo. Il est un des derniers gouverneurs à rejoindre, en 2005, les rangs de Russie unie. Il s’est présenté contre Boris Eltsine aux présidentielles de 1991 puis contre Vladimir Poutine en 2000.

52 À l’issue des élections du 1er mars 2009 en Russie, V. Surkov déclarait : « Un seul parti domine chez nous parce que cela est préférable au désordre que pourrait provoquer une période de turbulences » (Kommersant’’, 2010).

53 Selon Georges Lavau, la fonction tribunitienne est le fait des « forces centrifuges qui ne peuvent être pleinement et immédiatement intégrées », que le système politique doit réussir à intégrer ou parvenir à neutraliser. Cette fonction est pour le système politique « un des moyens de vivre avec les clivages » en leur donnant la possibilité de s’exprimer (Lavau, 1969, pp. 38-39). Dans le contexte russe actuel, le pouvoir politique tente de susciter cette fonction tribunitienne en favorisant les partis politiques censés capter l’électorat qui ne soutient pas Russie unie. Ainsi, « au plan électoral, Russie Juste s’était vue assigner la tâche que Rodina avait remplie en 2003 – siphonner les voix communistes et de tendance national patriotique – tout en neutralisant les forces turbulentes d’un nationalisme xénophobe dont l’activisme et la capacité de mobilisation effraient l’élite du pouvoir. » (Raviot, 2008, p. 58) Selon le même auteur, Vladimir Jirinovski, président-fondateur du LDPR « est l’emblème du caractère tribunitien de la vie parlementaire russe » (Raviot, 2008, p. 152). Son comportement et sa posture de provocateur attirent vers son parti de nombreux votes protestataires.

54 Voir le Statut (Loi fondamentale) – Ustav (Osnovnoj zakon) – adopté par la Douma de la région de Tomsk le 26.07.1995.

55 Elle se compose de 42 députés, élus pour moitié au scrutin uninominal et pour moitié au scrutin de liste. Elle comprend trois « fractions » ou groupes parlementaires : Russie unie (30 députés), le KPRF (3 députés), RJ (2 députés) et le LDPR (2 députés).

56 Loi de la région de Tomsk du 14 février 2005, n° 29-OZ « Sur les élections municipales dans l’oblast de Tomsk », amendée le 17 décembre 2009.

57 Le « vote contre tous » est une possibilité permettant aux électeurs d’exprimer leur rejet de tous les candidats présentés. Cette pratique héritée de la fin de la période soviétique a été supprimée pour les élections aux organes d’État par la loi fédérale n° 106 du 12 juillet 2006. Galina Nemceva affirme que cette réforme ne fera que renforcer «l’apathie politique». Elle réfute l’argument économique du gouverneur, qualifié de non pertinent dans un contexte de crise où la lutte contre la corruption serait nettement plus efficace que le sacrifice d’un tour de scrutin. Site de Russie juste de Tomsk, 19 novembre 2009. Accessible en janvier 2011 sur http://www.spravedlivo.ru/themes/10084.php?&topic=70&open=news

58 Des extraits vidéo de cette 34ème session de la Douma régionale sont disponibles sur Internet, au 15 avril 2010 : http://duma.tomsk.ru/page/14691/?stm=200912

59 Une exclusion du parti n’entraîne pas en soi une exclusion de l’élu de la fraction parlementaire.

60 Notons que les données manquent concernant le détail des votes de la fraction du KPRF (3 députés). L’un d’eux, Nikolaj Kirilov, est intervenu à la tribune de la Douma pour s’opposer au projet de réforme.

61 Le 15 mars 2010, suite aux élections régionales dans quelques sujets de la Fédération, RJ organise à Tomsk un rassemblement (piket) et fait signer une pétition contre « la monopolisation politique » (političeskoj monopolizm). Nemceva publie un article énumérant les effets négatifs du monopole de Russie unie sur la participation électorale, mais aussi sur le développement économique et social du pays. Nemceva Galina, « My vykhodim s piketami protiv političeskogo monopolizma, ekonomičeskoj i administrativnoj stagnacii, protiv pokazukhi i političeskogo vran’ja » (Nous nous rassemblons pour protester contre la monopolisation politique, la stagnation économique et administrative et contre le maquillage des faits et les mensonges politiques), 16.03.2010. Disponible au 5 avril sur le site internet de RJ Tomsk, http://tomsk.spravedlivo.ru/press/first_face/950.smx

62 Les élections du 11 octobre 2009 à la Douma de Moscou ont été entachées de fraudes massives, permettant à Russie unie de remporter 32 sièges sur 35, les trois derniers revenant au KPRF. Pour protester, les députés des groupes de RJ, du LDPR et du KPRF siégeant à la Douma fédérale en ont boycotté les séances (RIA Novosti, 03.11.2009).

63 Le parti Jabloko, représenté à la Douma fédérale jusqu’en 2007, ainsi que des mouvements tels que Drugaja Rossija (Autre Russie) créé en 2006 ou Solidarnost’ (fondé en 2008) visent ouvertement à renouveler l’élite dirigeante du pays et subissent de fréquentes pressions du pouvoir (Lenta.ru, 18.12.2010). Voir l’article de Sergej Kostarev dans ce dossier.

64 Ainsi la branche de RJ à Kemerovo fait preuve, contrairement à celle de Tomsk, d’une loyauté sans faille envers les dirigeants de l’administration régionale.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Lou Brenez, « Les partis «  partenaires du Kremlin » à l’épreuve des dynamiques locales  », Revue d'études comparatives Est-Ouest, 42-1 | 2011, 65-90.

Référence électronique

Lou Brenez, « Les partis «  partenaires du Kremlin » à l’épreuve des dynamiques locales  », Revue d'études comparatives Est-Ouest [En ligne], 42-1 | 2011, mis en ligne le 15 mars 2013, consulté le 07 septembre 2017. URL : http://receo.revues.org/115

Haut de page

Auteur

Lou Brenez

Doctorante à l’Université libre de Bruxelles (ULB), Centre d’étude de la vie politique, CEVIPOL, lbrenez@ulb.ac.be

Articles du même auteur

Haut de page

Droits d’auteur

© NecPlus

Haut de page
  • Logo NecPlus
  • Logo CERCEC
  • Logo CNRS - INSHS
  • Logo ISP
  • Logo CNL
  • Revues.org