Les Archives de la Planète en Arabie, préparer l'après-guerre

Chaque mois, retrouvez sur Centenaire.org un portfolio d'autochromes des années 14-18 issus des Archives de la planète d'Albert Kahn, conservés par le Musée départemental Albert-Kahn des Hauts-de-Seine.

Pendant la guerre, participant d’un vaste mouvement de mobilisation intellectuelle, Albert Kahn et son directeur scientifique Jean Brunhes mettent la collection des Archives de la Planète au service de la défense des intérêts de la France. Depuis 1916, Jean Brunhes utilise pour illustrer des conférences de propagande les autochromes dont il a lui-même supervisé la réalisation. À partir de 1917, Albert Kahn soutient de son côté matériellement divers services de propagande. Sa contribution consiste notamment en la mise à disposition de matériel de prises de vues en autochromes à l’occasion de missions photographiques précises, en échange de quoi tout ou partie des autochromes réalisées sont ensuite versées au Archives de la Planète.

Albert Kahn intervient ainsi par exemple en cette année 1918, où le cinéaste Jean Prache et le photographe Paul Castelnau, tous deux mobilisés à la Section Photographique et Cinématographique de l’Armée (SPCA), sont envoyés en Arabie. Ils séjournent pendant plusieurs semaines aux côtés de la mission militaire française qui appuie l’armée anglaise, elle-même soutien de l’armée chérifienne qui va bientôt défaire les armées ottomanes, mettant en octobre un terme à la guerre sur le front d’Orient. Les films réalisés par Jean Prache ainsi que les photographies en noir et blanc réalisées par Paul Castelnau à l’occasion de cette mission sont aujourd’hui conservés à l’Établissement de Communication et de Production Audiovisuelle de la Défense (ECPAD), tandis que les autochromes de Castelnau sont conservées au musée départemental Albert-Kahn.

Par sa présence au Proche-Orient et son soutien effectif à la révolte arabe, la France entend prendre des gages sur le démantèlement à venir de l’Empire ottoman, dont elle s’est déjà pré-réparti les dépouilles en 1916 dans le cadre des accords secrets dits « Sykes-Picot » signés avec la Grande-Bretagne. La France vise en particulier l’administration de la Syrie, du Liban et de la Palestine ; elle n’obtiendra cependant après la guerre que les deux premiers territoires, dans le cadre d’un mandat attribué par la Société des Nations.

Depuis 1917, Jean Brunhes défend ce but de guerre lors de ses leçons au Collège de France qui traitent des projets de réorganisation internationale à envisager une fois la victoire acquise et la paix revenue. Par la suite, il consacre encore les années universitaires 1922 et 1929 à l’œuvre de la France en Syrie, où se déploie selon lui un modèle colonial exemplaire.

Paul Castelnau, qui a interrompu la préparation de sa thèse de doctorat en géographie du fait de la mobilisation, est précisément un ancien élève de Jean Brunhes. Sa pratique photographique s’en ressent, par exemple par l’attention portée au modelé géologique du terrain et à la représentation de la diversité ethnique qui caractérise les rangs de l’armée chérifienne. En cette année 1918 il pratique exclusivement la photographie mais après la guerre il poursuit une carrière de cinéaste documentariste indépendant tout en conservant des relations suivies avec l’équipe des Archives de la Planète.

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Toutes les collections d'autochromes des Archives de la Planète sont à retrouver sur l'open-data du Musée départemental Albert-Kahn : collections.albert-kahn.hauts-de-seine.fr/