Hongkong sous le choc après les attaques des triades

Une centaine d’hommes armés de triques et de bâtons ont agressé des manifestants lors de la dernière grande mobilisation, marquant un nouveau pic dans la polarisation des positions.

Par Publié le 24 juillet 2019 à 10h48 - Mis à jour le 24 juillet 2019 à 13h55

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La vidéo dure une vingtaine de minutes. Junius Ho, un député hongkongais progouvernement, fixe la caméra et parle lentement, détachant les mots avec soin. « Un chemin s’offre à toi : il y a un chemin qui est d’être vivant et un chemin qui est de ne pas l’être. Choisis ton chemin. » Celui qu’il vient de menacer de mort, dans une vidéo postée sur son compte Facebook, est un autre député, Eddie Chu, membre de l’opposition et prodémocratie, avec qui il avait débattu plus tôt dans la journée du mardi 23 juillet sur le plateau de la télévision RTHK, avant de le quitter, en rage, parce qu’Eddie Chu refusait d’appeler à interdire les manifestations qui durent depuis plus d’un mois contre une loi d’extradition vers la Chine.

Le même Junius Ho est au cœur d’un scandale pour avoir soutenu les hommes en tee-shirt blancs qui s’en sont pris violemment, dimanche 21 juillet au soir, à des manifestants et des passants dans sa circonscription, à Yuen Long, au nord des Nouveaux territoires de Hongkong, près de la frontière avec la Chine. Une vidéo le montre félicitant les hommes, dont certains ont une canne de bambou à la main, et les appelant « mes héros ». L’attaque, par plus d’une centaine d’hommes armés de triques et de cannes, contre des passagers du métro et des passants, dont certains revenaient de la manifestation de dimanche, a fait 45 blessés, parmi lesquels le député Lam Cheuk-ting. Depuis, Junius Ho concentre la colère des manifestants. Sa permanence a été vandalisée lundi, ainsi que la tombe de ses parents, mardi, après son débat télévisé avec Eddie Chu.

L’attaque de la station Yuen Long a marqué un nouveau pic dans la polarisation des positions à Hongkong, plus d’un mois après les manifestations monstres qui ont rassemblé jusqu’à 2 millions de personnes dans les rues du territoire pour dénoncer une loi d’extradition ouvrant la porte à l’envoi de justiciables hongkongais vers les tribunaux chinois. Entre-temps, la chef de l’exécutif, Carrie Lam, a déclaré que le texte était « mort », mais elle a refusé de le retirer ou d’admettre l’existence de violences policières. Depuis, tous les week-ends, des manifestations de plus faible ampleur ont lieu dans différents quartiers de Hongkong. Presque à chaque fois, les défilés pacifiques se terminent par des altercations entre de jeunes manifestants et la police.

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Attitude trouble de la police

Dimanche soir, après une manifestation autorisée sur un trajet bien plus court que celui demandé par les organisateurs, des manifestants radicaux s’en sont pris au Bureau de liaison de Pékin à Hongkong, c’est-à-dire la représentation de la Chine sur le territoire autonome. Ils ont projeté des sacs remplis d’encre sur l’emblème de la République populaire de Chine et peint des inscriptions injurieuses sur le bâtiment – une attaque hautement symbolique, qui a poussé Pékin, d’ordinaire discret, à diffuser la photo de l’emblème maculé dans les médias chinois. Mais au même moment, plus d’une centaine d’hommes en tee-shirt blanc, par opposition aux tee-shirts noirs des manifestants, se rassemblaient près de la station de Yuen Long, à une heure de métro du centre où avait lieu la manifestation. Plusieurs images les montrent parcourant les rues en cortège, ou rassemblés sur un parking, suggérant que l’attaque avait été planifiée.