hydrea

Ces haikus forment un recueil entrepris lors du début d’un traitement médical toujours en cours, pour célébrer la beauté, parfois la laideur, toujours le ressenti fort de la vie.

monts illuminés
merveilleux sentier de crête
poison dans mes veines

Naves, 30 octobre 2011

feuillage d’automne
la mort voyage avec moi
le TGV file

10 novembre 2011

il goûte une poire
branche pourpre et feu de bois
tiède vent d’automne

28 novembre 2011

c’est un bon maçon
sapin au faîte du toit
musique et bonheur

29 novembre 2011

hydrea la la
rire du diable qui danse
et cligne de l’oeil

11 décembre 2011

fenêtre éclairée
femme de dos gestes calmes
table à repasser

11 décembre 2011

pneus sur le gravier
paix du jardin retrouvé
après le travail

11 décembre 2011

ton rire et la neige
guirlandes au sapin voltent
tes baisers m’envolent

29 décembre 2011

jardin de coton
flocon de neige sans hâte
se pose et tout dort

2 février 2012

vibration qui s’enfle
le train approche du quai
l’enfant s’émerveille

24 février 2012

il vient m’agresser
insultes ragots menaces
le ciel bleu gentiane

6 mars 2012

recru de fatigue
floconneux coeur chaviré
ils comptent sur moi

22 mars 2012

où dansent les filles
où dansent leurs compagnons
au son du clairon

19 avril 2012

d’un coup plus de vent
en plein jour tombe une nuit
et l’odeur d’orage

30 avril 2012

brave ordinateur
confident des rires clairs
des soirs d’agonie

30 avril 2012

manif au soleil
cent drapeaux couleurs volantes
l’enfant bat des mains

1er mai 2012

la mort surgira
d’un hallier d’ombres dorées
souriante et chaude

2 mai 2012

ne dis pas « cancer »
trop de laideur nuit trop noire
juste « prolifère »

2 mai 2012

agoni d’injures
mails d’accusation publique
poire aux saveurs chaudes

18 mai 2012

panne d’internet
tous les voyants sont éteints
roue de vie grippée

26 mai 2012

parfum d’églantine
doux brouhaha de la ruche
caresse du vent

28 mai 2012

dans ses yeux lavés
muet appel en dérive
au bord nos orgueils

28 juin 2012

parfaite et limpide
du robinet se libère
la goutte et s’écrase

4 juillet 2012

soir après la pluie
brume enroulant ses volutes
lourd parfum de terre

17 août 2012

le danseur a froid
les projecteurs ont lâché
un chien dans les jambes

25 août 2012

aux rets du grillage
fleur grisante au chèvrefeuille
fend un grand sourire

8 octobre 2012

seringue en horreur
la foudre envahit ma chair
me ronge et me fouille

21 novembre 2012

mots sur un forum
douleur questions peur qui rôde
paix des mots amis

17 décembre 2012

défilé de mode
visages thermoformés
hanches robotiques

10 février 2013

Monsieur qu’avez-vous ?
Madame c’est un cancer
Hors d’ici, voyou

10 avril 2013

il découvre un banc
près du transfo noir de tags
comment c’est s’asseoir ?

16 avril 2013

jambe ventre gorge
tout est béchamelle froide
va-t’en mouche bleue

17 avril 2013

quand le champ de blé
ondule au vent chaud qui frôle
à ton sein ma paume

7 mai 2013

pommes de Cézanne
trente deux millions d’euros
frais goût des reinettes

9 mai 2013

recrute gendarme
sans condition de diplôme
moralité bonne

Affiche vue ce matin, très peu modifiée
15 mai 2013

en ouvrant les yeux
la lumière sourirait
paupières collées

17 mai 2013

dans la main palpite
la truite qui glisse et volte
un coup sec met fin

18 juin 2013

feuille transparente
dont la nervure s’embrase
au soleil couchant

10 septembre 2013

sous le roc obscur
les stalactites de glace
dansent en pleurant

19 octobre 2013

balayer les feuilles
monter quatre pneus contact
flocons et silence

23 novembre 2013

givre sur la vitre
firmament d’ombre argentée
glace dans le coeur

27 décembre 2013

la pluie souriante
caresse la joue bleutée
lave un peu le sang

12 janvier 2014

son rire est un feu
qui m’inonde de chaleur
souvenir de braises

3 avril 2014

certaines douleurs
verront des enfantements
créons la couleur

26 mai 2014

épi bien serré
haut sur la tige bleutée
long ciel immobile

9 juin 2014

l’aiguille de quatre
égrène les mailles douces
patiente caresse

14 août 2014

J’ai cru voir la mort
Dans le reflet d’une branche
Sur l’étang des ombres
9 septembre 2014

La cendre et le vent
De l’homme qui tue un homme
Eteignent la flamme
17 novembre 2014

C’est l’hiver la neige
Sur ce corps que le sang baigne
Pose page blanche
8 janvier 2015

Déception d’automne
La promesse non tenue
La pluie aux yeux mornes
20 octobre 2015

Au lever du jour
Vent chaud balayant la peur
Ouvre nos paupières
15 novembre 2015

ce n’est pas l’amour
qui fait taire le poète
c’est la balle au ventre
10 février 2016 (anniversaire de la mort de Pouchkine)

je n’ai pas dormi
dans la rue aux senteurs tièdes
j’ai mangé la lune
31 mars 2016

un tyran vainqueur
une ville assassinée
un ciel rouge sang
13 décembre 2016

dans le goudron tiède
arrachés à la montagne
mille éclats s’endorment
1er avril 2017

nous t’avons élu
sans flamme et sans illusion
nous résisterons
9 mai 2017

tu courbes la branche
la cerise au front ému
s’offre et ta main cherche
24 mai 2017

le cercle d’amis
la place que je retrouve
le bon feu de joie
5 septembre 2017

la neige sidère
le désespoir de l’asphalte
et le rêve glisse
1er décembre 2017

9 haïkus perdus, je les recherche.

Théâtre des Bouffes,
Ils ont chanté « On est là ».
France au cœur battant.
17 janvier 2020

l’ombre froide avance
nous recouvre nous sidère
glisse le silence
16 mars 2020

il est interdit
de voler alors je reste
devant mon miroir
24 mars 2020

le masque à ta bouche
pose un duvet de mystère
en songe tu passes
16 avril 2020

Sur ton lit. Sans force.
Tu vas mourir tu le sais.
Nous nous sourions.
19 avril 2020

masque de misaine
miroitement de tes yeux
visage au long cours
20 avril 2020

ne pas espérer
ne plus jamais espérer
ne jamais comprendre
20 avril 2020