Pour ce 3e procès, Jean-Louis Muller s'est adjoint les services du célèbre pénaliste Eric Dupond-Moretti. "La bête noire" évoquait ce procès comme l'affaire de sa carrière.

[NOTE : article originellement publié le 23 octobre 2013]

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« JE NE SUIS PAS CHUTOLOGUE » par Charlotte Piret

La reconstitution est un des points d’achoppement de cette affaire. Demandée par la défense, elle a toujours été refusée. C’est même du fait de ce refus que Jean-Louis Muller avait adopté la stratégie du silence pendant son procès en appel.

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Pour ce troisième procès, Eric Dupond-Moretti a voulu faire autrement. Dès hier, on l’a vu installer la table du train électrique. Cette table qui occupait l’essentiel de la salle de jeux dans laquelle Brigitte Muller a été retrouvée morte. Une table en contreplaqué, supportée par de simples tréteaux et qu’à la suspension d’audience l’accusé lui-même replaçait consciencieusement, mètre à la main.

C’est derrière cette table que l’avocat de la défense emmène Yves Roedlandt, expert en balistique : « Venez avec moi, monsieur l’expert ». « Il y a la science balistique, puis il y a le reste. : comment peut-on savoir si, dans un dernier geste, la main peut se crisper sur le revolver? Comment peut-on savoir comment l’arme va tomber ? », lance Eric Dupond-Moretti. « Est-ce que vous êtes chutologue ? » La salle rit, le ton est donné.

Quelle meilleur moment pour la défense pour livrer sa reconstitution ? Ici, sur le parquet ciré de la salle d’assises. A coup de petites phrases : « c’est tout juste s’il ne faut pas faire de la menuiserie », la défense impose sa logique.

Et offre aux jurés cette scène loufoque. « Placez-moi, monsieur l’expert, je suis la victime ». Eric Dupond-Moretti, un revolver sur la tempe, se plante face à la cour. L’expert, lui, devient le meurtrier, peinant à embrasser la robe noire et l’imposante carrure. « Si vous êtes là, il ne peut pas y avoir de traces de sang derrière vous. »

Les sourires sont à peine retenus, les parties civiles se figent. Mais pas l’avocat général. Qui laisse éclater une colère aussi rouge que sa robe : « c’est un attrape-couillon. Moi aussi, je sais faire du cinéma, mais moi c’est du vrai cinéma, c’est du documentaire. » Entre les deux, les jurés choisiront.

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OÙ EST PASSÉ LE DR MULLER? par Jean-Philippe Deniau

C’est son positionnement favori. Sur le banc du box des accusés, dont la porte est symboliquement restée ouverte pour bien signifier qu’il comparait libre, il joint les mains devant son visage, baissé, les yeux mi-clos, et reste ainsi en prière. Il ne rate pas une seconde des débats mais se met en retrait. Dans cette position de sagesse apparente. De retenue.

La sagesse et la retenue. C’est certainement cette double attitude que ses défenseurs lui ont conseillé d’adopter. Rigoureusement. Fini les interventions verbeuses de son premier procès, qui avaient eu un effet détestable sur le jury. Fini le mutisme total qu’il s’était imposé au deuxième procès, afin de protester contre le refus du président de la cour d’organiser une reconstitution. Ce silence absolu n’avait pas eu meilleur effet.

Cette fois-ci, l’accusé ne s’exprime que quand la présidente lui demande. Il s’est longuement expliqué sur sa biographie et sa personnalité le premier jour, n’a quasiment pas parlé le deuxième, et n’est guère plus intervenu le troisième jour. Parfois se permet-il de se pencher au dessus de la balustrade de son box pour glisser quelques indications à ses avocats, assis en contrebas devant lui.

Ce sont donc eux, Eric Dupond-Moretti et Alice Cohen Sabban, qui mènent la défense et porteront donc, le 31 octobre, l’entière responsabilité du potentiel de séduction intellectuelle que la thèse du suicide aura exercé sur le jury. Mais on finit tout de même par se demander où est passé le Docteur Muller. Et si sa mise en retrait des débats ne sera pas finalement interprétée comme un trop grand détachement.

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L’AVOCAT GÉNÉRAL QUI AIMAIT BOUGER par Charlotte Piret

C’est à croire que sa place sur l’estrade ne lui suffit pas. Ou peut-être qu’il se serait bien vu avocat. Ou même, osons toutes les hypothèses, qu’il se sent un devoir de prendre le relais d’avocats des parties civiles décidemment peu présents.

Toujours est-il que l’on voit souvent l’avocat général descendre de son piédestal pour plonger dans la mêlée. En général d’ailleurs à grand renfort de cris indignés, le visage souvent rougi par la colère.

« Silence ! » lance-t-il excédé à l’avocat de la défense qui tente de l’interrompre. « J’ai pas fini de poser ma question ». Et d’oser quelques envolées lyriques. « Vous avez une arme qui glace d’épouvante. Comment pouvez vous dire : absence de trace de lutte = suicide ? L’absence de trace de lutte, elle ne signifie rien du tout devant une personne qui est épouvantée, terrorisée. »

Et l’on voit la robe rouge du magistrat virevolter, tournoyer autour de la table de la salle de jeux ramenée dans le prétoire. Il disait ce matin préférer le documentaire au cinéma.

Nous, on le verrait bien dans une pièce de Molière.

LA TABLE, TÉMOIN MUET DU DRAME par Jean-Philippe Deniau

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C’est une grande table posée au milieu de la cour d’assises. Ou plutôt, deux grandes planches de contreplaqué disposées en forme de « L » sur sept tréteaux. A l’époque des jours heureux chez les Muller, c’était le train électrique des enfants. Puis c’est devenu le témoin muet du drame dans la cave.

Et aujourd’hui, dans cette salle d’audience, tout le monde tourne, retourne et s’énerve autour de cette table comme si elle allait enfin pouvoir dire ce qui s’est réellement passé.

L’avocat de la défense d’abord, montre aux jurés où a été retrouvé le corps sur le sol, où était placé le pistolet au pied d’un des tréteaux et il en déduit qu’en fonction de ces positionnements, il ne pouvait pas y avoir de tireur dans la pièce. A cause de l’encombrement de la table.

Puis l’avocat général s’agace, descend de son estrade, et à son tour, repositionne le corps différemment puis, le bras tendu, montre qu’il est tout à fait possible que Brigitte Muller ait été abattue.

Enfin, c’est un avocat des parties civiles qui prendra lui aussi la table à témoin de ses propres hypothèses. Bref, tout le monde tourne autour de cette table muette avec sa propre vérité. Mais personne ne parvient à la faire parler.

C’est Frédéric Nietzsche qui aura la parole en dernier. « il n’y a pas de faits, que des interprétations. » lance l’avocat général excédé. « Ce qui rend fou, ce n’est pas le doute, c’est la certitude » lui renvoie Maître Dupond-Moretti.

Comme dirait la présidente de la cour d’assises : « un partout, la balle au centre. »

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