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Au Japon, les bars à animaux n'épargnent pas les espèces menacées

Temps de lecture : 2 min

Faire un selfie ou un câlin avec son animal favori n'est pas sans conséquences.

On a recensé 419 espèces, dont 51 menacées. | Nicolas Datiche / Anadolu Agency / AFP
On a recensé 419 espèces, dont 51 menacées. | Nicolas Datiche / Anadolu Agency / AFP

Hérissons, chouettes, flamants roses, capybaras, pingouins: au Japon, il semble que n'importe quel animal ait son café dédié. La clientèle peut venir consommer tout en observant ses espèces préférées, soit derrière une paroi de plexiglas, soit en ayant la possibilité de toucher et de câliner les animaux en question. Cela permet de réaliser des vidéos trop mignonnes, de prendre des selfies improbables, et de passer un moment mémorable.

Autant dire que la France, avec ses quelques cafés permettant de côtoyer des chats, est à la traîne. Sauf qu'il convient en fait de s'en réjouir, explique le New York Times, car ces business font passer le bien-être animal à la trappe –quand ils ne menacent pas carrément la survie de certaines espèces. Le site reprend les résultats d'une étude menée par la revue Conservation Science and Practice, qui sont affreusement édifiants.

D'après le comptage des chercheurs et chercheuses qui ont planché sur le sujet, ces établissements japonais exposeraient un total de 3.793 animaux appartenant à 419 espèces, dont 51 sont menacées d'extinction. Cela inclut neuf espèces exotiques, dont le loris paresseux pygmée et la tortue étoilée de Madagascar, tellement fragiles qu'elles sont strictement exclues de toute forme d'échange international.

Ces animaux «ont généralement été attrapés dans la nature», explique Marie Sigaud, vétérinaire et biologiste au Muséum national d'Histoire naturelle de Paris (MNHN), qui ajoute que «cela a des conséquences sur leur survie à long terme». En outre, précise la spécialiste, il faut aussi s'inquiéter du fait que certains de ces animaux sont susceptibles de transmettre des virus aux humains.

Disponibles à l'achat

Les scientifiques en appellent à la responsabilité du gouvernement japonais, les lois actuellement en vigueur étant unanimement considérées comme «trop faibles», rappelle Marie Sigaud. Pour le moment, le ministère japonais de l'Environnement, qui n'a pas répondu aux sollicitations du New York Times, semble faire la sourde oreille.

Le Japon n'est pas le seul pays à avoir ouvert de nombreux bars à animaux. Une étude datant de 2020 montre que depuis 1998 et l'ouverture de la première adresse de ce genre à Taïwan, ces commerces ont fleuri en Asie: la Chine, la Thaïlande, l'Indonésie, la Corée du Sud, le Vietnam, les Philippines et le Cambodge sont également concernés, même si je Japon reste «l'épicentre du phénomène», souligne l'experte.

De façon assez étonnante, les animaux les plus présents dans ces lieux sont les oiseaux, avec 62% des espèces, dont 40% de chouettes –peut-être l'effet Harry Potter. Mais aux côtés des mammifères, dont le succès n'est guère étonnant, il faut noter les reptiles ont également la cote. Parmi tous ces animaux, certains sont forcément arrivés là en toute illégalité, avertit Marie Sigaud, puisque le commerce d'animaux est strictement cadré par la loi, et qu'elle ne permet pas à n'importe qui de faire n'importe quelle acquisition.

Certains de ces animaux peuvent même être achetés par les membres de la clientèle s'ils en ont les moyens: marsupiaux, pythons royaux ou cacatoès sont en effet disponibles, pour des prix variant de 140 à 21.600 euros. Bref, le business est juteux, et la condition des animaux concernés importe peu à la majorité des propriétaires de ce genre de lieu, trop occupés à remplir leur tiroir-caisse grâce à l'obsession des touristes (et de certains locaux) pour tout ce qui relève du kawaii.

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