What.cd, Zone Téléchargement et l’aveuglement de la répression du partage

La fermeture de Zone Téléchargement la semaine dernière a déclenché une vague de réactions impressionnantes, qui montre que la question du piratage/partage est loin d’être passée au second plan. J’ai du coup été interviewé par plusieurs sites d’information : Konbini, France Info, Libération et encore aujourd’hui par Le Monde. Je n’aurai hélas pas le temps de consacrer un billet détaillé à la question, mais je reposte ci-dessous la retranscription de mes propos effectuée par la journaliste Morgane Tual (merci à elle !).

J’ai simplement modifié et développé plusieurs passages pour les faire mieux correspondre à ce que je voulais dire.

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Les industries culturelles entraînant les sociétés d’auteurs entraînant les autorités publiques dans la guerre au partage (allégorie). Source : Wikimedia Commons.

Zone téléchargement : « Les industries culturelles luttent contre des monstres qu’elles ont elles-mêmes créés »

Lundi 28 novembre, la gendarmerie nationale annonçait la fermeture de Zone téléchargement, un site qui permettait de télécharger directement des contenus protégés par le droit d’auteur. Une activité qui aurait permis à ses administrateurs, notamment grâce à la publicité, d’engranger plus de 1,5 million de chiffre d’affaires par an selon la Sacem, qui avait porté plainte. Son secrétaire général dénonçait, dans les colonnes du Monde, des « voyous qui se sont enrichis sur le dos des créateurs », et soulignait qu’il n’y avait « plus d’impunité pour les pirates ».

De son côté, Lionel Maurel, membre du conseil d’administration de la Quadrature du Net, une association française de défense des libertés numériques, déplore lui aussi l’existence de sites commerciaux tels que Zone téléchargement, tout en prônant la légalisation du partage. Explications.

La fermeture du site Zone téléchargement a provoqué énormément de réactions indignées de la part des internautes. Quelle a été la vôtre ?

Je n’ai pas été surpris. Les industries culturelles font régulièrement fermer ce genre de sites, tout en sachant que ça ne va pas mettre fin au problème. C’est une fausse solution, car d’autres sites vont immédiatement prendre la place de Zone Téléchargement. Ce n’est qu’un nouvel épisode dans un cycle d’ouvertures et de fermetures qu’on connaît depuis des années. J’avoue que je ressens par contre un peu de lassitude. Les industries culturelles se battent depuis des années contre des monstres qu’elles ont elles-mêmes créés.

Des monstres qu’elles ont créés, c’est-à-dire ?

Au départ, le téléchargement s’effectuait essentiellement de manière décentralisé en peer to peer (P2P, de pair à pair), avec logiciels comme eMule, Kazaa, puis les torrents… Ce système ne nécessitait pas d’intermédiaire commercial. Mais les ayants droit ont agi pour réprimer ces pratiques, notamment par l’intermédiaire du système de la riposte graduée mise en oeuvre par la Hadopi [Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet], conçue pour contrer ce type de partage, alors qu’elle est totalement impuissante pour des sites comme Zone téléchargement.

Comme le P2P était dans la ligne de mire de la répression, cela a mécaniquement abouti à faire monter les sites de téléchargement direct et de streaming, qui sont centralisés, et qui permettent à leurs fondateurs de faire beaucoup d’argent. Certains internautes ont comparé Zone téléchargement à une sorte de Robin des bois, qui « prend aux riches pour donner aux pauvres« , mais c’est en fait une vulgaire dérive mafieuse du partage de fichiers. Et de leur côté, les ayants droits mettent dans le même sac des sites comme Zone téléchargement et What.cd.

Justement, le site de partage musical What.cd a été fermé par la gendarmerie nationale le 17 novembre, une dizaine de jours avant la fermeture de Zone téléchargement. En quoi ces deux sites sont-ils différents ?

Ils le sont totalement. What.cd, c’était une communauté privée dans laquelle des gens mettaient en commun leur musique. On n’y entrait que par cooptation : il fallait être invité par un membre, et adhérer à une charte, qui défendait la qualité et la diversité des fichiers échangés. Le but était d’accéder à de la musique rare, et même si des dons étaient acceptés pour financer des serveurs, les gens à l’origine de What.cd ne faisaient pas de profit. Un système de ratio était imposé qui empêchait les utilisateurs de se « gaver », en les incitant à enrichir la base. Pour pouvoir télécharger, il fallait partager des musiques qui ne figuraient pas déjà dans le catalogue de What.cd. Participer à cette communauté nécessitait donc un  véritable investissement intellectuel. Et au final, les utilisateurs avaient réussi à constituer au fil du temps une des bibliothèques musicales les plus riches au monde, où l’on pouvait trouver toutes sortes d’enregistrements rares qui ne figurent dans aucune offre légale.

Zone téléchargement, ce n’est pas du tout ça. Ce type de sites existent pour satisfaisaire des besoins de consommation de masse de façon faussement gratuite – puisqu’il fallait regarder de la publicité. La philosophie était donc complètement différente.

Quelle est la bonne solution, selon vous ?

Ce qu’on veut depuis le début, c’est la légalisation du partage entre individus, en peer to peer, non centralisé et sans but de profit. Dans ce système, un site comme Zone téléchargement resterait illégal, tout comme le serait d’ailleurs la mise à disposition d’oeuvres protégées sur une plateforme comme YouTube. C’est légitime de fermer Zone téléchargement, car il s’agit de contrefaçon commerciale et l’action intentée par les ayants droit s’est déroulée dans le cadre d’une procédure judiciaire, apportant la garantie de l’intervention du juge.

Ce que nous proposons, c’est une légalisation du partage non-marchand, couplée à une redevance levée sur l’abonnement Internet des foyers, de l’ordre de 4 ou 5 euros par mois, afin que cela constitue une nouvelle forme de financement mutualisée pour la création. C’était l’idée originale de la licence globale que nous avons adaptée et que nous préférons appeler « contribution créative ». Mais à chaque fois qu’on essaie d’en discuter avec les ayants droit, on nous caricature, ils nous disent qu’on veut légaliser toutes les formes de partage. C’est faux !

La situation peut-elle évoluer ? Y a-t-il des signes en ce sens ? Et l’offre légale apporte-t-elle une amélioration ?

Il n’y a aucune raison que ça ne continue pas comme avant. La Sacem, par exemple, est très agressive. Elle s’en prend sans distinction à toutes les formes de partage, y compris à celle qui restent dans la sphère du non-marchand. Et c’est grave, car quand des sites comme What.cd ferment, les gens prennent l’habitude d’aller sur des sites de contrefaçon marchande, ils s’habituent aux pubs, ils ne participent à aucune communauté d’amateurs… La situation n’est pas réjouissante, car la guerre au partage menée par les ayants droit a dramatiquement réduit les pratiques réellement non-marchandes, en poussant les gens vers les sites mafieux.

Quant à l’offre légale, elle peut coexister avec le partage non marchand. C’est déjà très largement le cas pour la musique, où des offres de streaming de type Deezer ou Spotify ont réussi à trouver leur public, malgré le maintien à un niveau élevé des pratiques d’accès illégal aux oeuvres. Mais au niveau du cinéma, on n’y est pas du tout : les prix sont très élevés, la chronologie des médias en France reste la plus longue d’Europe et le catalogue est trop restreint… Tout cela favorise des sites comme Zone téléchargement.

Quelle philosophie sous-tend le « partage », mot que vous préférez à « piratage » ?

L’effet le plus intéressant du partage est l’élargissement de la gamme des oeuvres qui bénéficient de l’attention du public. Le partage décentralisé valorise des œuvres qui ne sont pas mises en avant par la distribution commerciale, celles qui forment ce que l’on appelle la « Longue Traîne ». Cette forme d’accès aux oeuvres élargit donc la diversité culturelle. Pour les gens qui partagent ainsi, ce n’est pas seulement une manière de consommer, c’est aussi une façon d’apprendre des autres, d’enrichir leurs goûts, de se forger une culture. Ce n’est pas ce qui se passait sur Zone téléchargement, qui se focalisait sur les derniers blockbusters.

Pour faire valoir ce type d’arguments, il aurait fallu pouvoir en discuter sereinement, mais en France depuis plus de 15 ans, cela n’a jamais été possible, on amalgame tout. Au début du quinquennat, nous avons un moment pensé que le débat était possible. Le candidat Hollande annonçait vouloir abroger la loi Hadopi et la remplacer par une grande loi culturelle. La question de la légalisation du partage a été abordée lors des consultations qui ont servi à élaborer le rapport Lescure. Mais très vite, le sujet a été politiquement enterré. La Sacem et les autres  sociétés d’ayants droit ont littéralement « pilonné » le gouvernement pour que la question ne puisse plus être mise en discussion.

Avec la contribution créative que vous soutenez, comment pourrait-on rétribuer les créateurs, notamment les plus petits ?

Tout le problème, c’est d’arriver à ce que la répartition de la rémunération soit moins concentrée qu’elle ne l’est actuellement. Aujourd’hui par exemple, une toute petite minorité des sociétaires de la Sacem touche la majorité des sommes et le schéma est grosso modo identique dans tous les secteurs de la création. Nous voudrions que les règles de répartition soient revues, et c’est une des raisons pour lesquelles les ayants droit ne veulent pas mettre le sujet sur la table. Il faut prendre en compte le fait qu’Internet a permis à un nombre plus important d’individus de créer et de diffuser des oeuvres. Pour répartir équitablement les revenus, il faudrait donc « lisser » la courbe, par exemple en faisant en sorte que si vous êtes cent fois plus vus que d’autres artistes, vous ne touchiez que dix fois plus. Mais dans un tel système, les gros doivent accepter de lâcher beaucoup plus au bénéfice des petits. Or, les sociétés de gestion des droits d’auteur sont tenues par ceux qui en bénéficient le plus.

Quant aux petits, qui parfois soutenaient cette démarche, il est aujourd’hui difficile de leur faire entendre ce genre d’idées. Leur précarité s’est accrue et ils voient Internet comme quelque chose qui les fragilise. La peur de perdre le peu que leur rapporte les droits qu’ils touchent l’emporte souvent sur l’espoir de pouvoir changer le système.

C’est un combat isolé ?

Si demain vous organisez un référendum sur la légalisation du partage, vous pouvez être certain que la réforme serait adoptée ! Regardez la réaction des gens après la fermeture de Zone téléchargement ; les sondages d’opinion à propos de la Hadopi vont dans le même sens, car cette institution reste profondément détestée… C’est la même chose que la prohibition de l’alcool dans les années 1920 : socialement, les pratiques de partage ne sont pas condamnées. La loi va contre les mœurs et c’est toujours une situation profondément malsaine.

Je pense que la légalisation du partage finira par arriver, même si c’est un combat de longue haleine. Cela se fera peut-être dans dix ou vingt ans. En revanche, l’idée de la contribution créative n’est pas très populaire. Mais la question de la rémunération de la création est cruciale et elle doit rester au coeur du débat. Il faut repenser les modalités de cette rémunération, mais certainement pas la supprimer.

PS : juridiquement, je n’ai pas la possibilité de republier ici mes propres propos, car ils sont justement couverts par les droits du journal Le Monde du fait de la retranscription effectuée par la journaliste. Mais je tenais que ce blog garde la trace de ces débats autour de Zone Téléchargement et je ne fais par cette reprise qu’illustrer ce que je défends : le droit au partage non-marchand. 


12 réflexions sur “What.cd, Zone Téléchargement et l’aveuglement de la répression du partage

  1. « Si demain vous organisez un référendum sur la légalisation du partage, vous pouvez être certain que la réforme serait adoptée ! Regardez la réaction des gens après la fermeture de Zone téléchargement »

    Y a-t-il des sources pour soutenir cela ?
    À mon avis, une grande partie de la population télécharge et va déplorer la disparition d’un acteur leur permettant de télécharger, mais considèrent que le téléchargement est en effet une forme d’arnaque envers le créateur (arnaque assumée ou pas: certains disent que les créateurs gagnent tellement que « pourquoi se gêner », mais cela ne veut pas dire qu’ils considèrent que leurs actions devraient être légales). D’ailleurs, c’est également le message d’une partie de ce texte lorsqu’il explique que les gens se sont tournés vers des solutions de type mafieuse qui sont d’après vous-mêmes légitimement moralement condamnables, et qu’ils déplorent leur fermeture.
    Je serais très très surpris de constater que 100% des personnes qui téléchargent considèrent que ce qu’elles font est totalement équitable pour tout le monde.

    Et même chose pour la loi Hadopi: considérer que ce n’est pas une loi efficace ne veut pas dire que le partage non-marchand est considéré comme une solution équitable.

    Donc, pour résumer:
    1) il est possible que vous ayez une vision biaisée par les groupes que vous fréquentiez, tandis que la majorité de la population ne partage pas forcément ces vues.
    2) le fait de déplorer la disparition d’une situation favorable (ou déplorer une solution inefficace) ne signifie pas forcément qu’on considère cette situation favorable comme équitable.

    1. En la matière, les gens votent d’abord avec leur souris : Zone Téléchargement comptabilisait en moyenne 4,3 millions de visiteurs uniques et cela ne représente qu’une partir des pratiques puisqu’il existe d’autres sites du même type et d’autres protocoles.

      Malgré le matraquage orchestré depuis 15 ans contre le partage des œuvres, les chiffres montrent que les pratiques sont stables. Environ 25% de la population déclarent se livrer à des pratiques illicites pour accéder à des œuvres (avec donc un fort biais à la baisse, étant donné qu’on n’est jamais enclin à d’éclater spontanément une pratique illégale).

      Par ailleurs, le centre de recherche Marsouin a conduit, il y a quelques temps, des enquêtes qualitatives sur la question du piratage, qui montraient clairement que la pratique n’est plus, ou faiblement, condamné socialement. On s’y adonne entre amis, au sein de la famille, etc.

      https://www.marsouin.org/mot220.html

      Concernant « l’équité », aucune étude indépendante n’a jamais réussi à établir que les individus qui ont des pratiques illicites ont des niveaux de consommation culturelle inférieure à ceux qui n’en ont pas. Certaines sont même arrivées à la conclusion contraire : plus on télécharge et plus on est un gros consommateur culturel par ailleurs.

      Donc d’un point de vue macro-économique, l’argument de « l’équité », du « vol », ne tient pas. C’est même tout le contraire…

      Tout ceci fait que si un référendum était organisé sur la légalisation du partage, je parierai volontiers sur une large victoire…

      1. Le taux d’usage ne signifie pas du tout que les usagers approuvent politiquement la solution qu’ils appliquent.
        Par exemple, c’est un fait que certains jettent leurs déchets par terre. Cela ne veut pas dire qu’ils iront manifester pour que jeter les déchets par terre devienne légal.
        D’ailleurs, dans votre article, vous soulignez que les sites de streaming et direct download sont en général peu moraux. Or leur usage a augmenté. Cela voudrait dire selon vous que le grand public est favorable à leur légalisation ?

        Je ne comprends pas le lien entre l’équité et la consommation culturelle inférieure. Au contraire, si la consommation ne diminue pas lors du téléchargement illégal, cela pourrait être le résultat du fait que la personne qui télécharge se sent coupable et soit essaie de ne pas « abuser », soit essaie de compenser en donnant son argent d’une autre façon (je ne dis pas que c’est le cas, mais c’est un exemple qui prouve qu’on ne peut pas prétendre que quelqu’un trouve une pratique morale sur base du fait qu’il n’y a pas d’impact très important, car il est possible que c’est justement parce que l’utilisateur considère que la pratique n’est pas morale qu’il fait d’autres actions qui réduisent les impacts).
        Cela ne concerne peut-être pas 100% des personnes qui pratiquent le téléchargement, mais je doute que ça soit négligeable, j’ai souvent observé de telles raisonnements dans mon entourage et c’est très courant d’en voir en commentaire. Notamment, quand les gens reprochent l’absence de solution légale de qualité, cela ne se base que là-dessus: s’ils pensaient que le partage non-marchand est légitime, ils ne diraient pas qu’ils aimeraient bien participer au partage marchand si celui-ci était mieux organisé.

        Concernant l’argument macro-économique: cela n’a pas grand chose à voir avec la question de l’équité. C’est bien connu que l’être humain n’est pas une machine à calculer. Cette erreur a même créé l’expression « homo œconomicus ». En particuliers, la question de savoir s’il est moral de pirater est une variante du jeu de l’ultimatum: https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeu_de_l%27ultimatum
        Même si au niveau économique, cela n’a pas de sens, l’être humain peut décider qu’il est injuste de voir le créateur mis partiellement à l’écart des retours positifs de ce qu’il a créé car il est un acteur très important pour la création de ces éléments positifs. (c’est la différence entre la morale et l’économie: on peut avoir un système qui fonctionne économiquement, cela ne veut pas dire que les gens vont le trouver juste: s’ils pensent que quelqu’un ne reçoit pas ce qu’il mérite (question très très subjective), ils diront que c’est injuste).

        Bref, votre réponse est loin de me convaincre, au contraire, elle montre que vos conclusions sont basées sur une analyse erronée de vos observations.
        (cela ne veut pas dire que vos conclusions sont fausses, peut-être que par hasard, elles sont juste, mais en l’état, avec les arguments que vous avez donné, on ne peut pas vraiment affirmer qu’elles le sont)

        1. Bonjour Nico
          « Je ne comprends pas le lien entre l’équité et la consommation culturelle inférieure » -> le principe du partage – même si on est contre – c’est que l’ayant droit ne perd rien, contrairement au vol : si je vole un cd le marchant perd le prix du cd, si je le partage le marchant ne perd rien, il estime juste qu’il a un manque à gagner parce qu’il pense qu’il aurait vendu le cd si je ne l’avais pas piraté. Du coup s’il s’avère que les gens achètent autant de CDs (ça existe encore ces trucs ?) personne n’est lésé, le créateur et comme les intermédiaires sont rémunérés, j’ai juste pu varier mes écoutes au lieu de me concentrer sur ce que j’ai les moyens de m’acheter (je ne dis pas que tout ça est vrai, j’explique le lien).

          Pour tout le truc sur ce que les gens trouve moral ou pas Calimaq vous renvoie à une enquête qui montre la légitimation progressive des pratiques de piratage de la société, c’est pas énorme mais c’est plus que ce que vous faites, du coup votre dernier paragraphe me parait un peu méprisant (dire que l’auteur pourrait avoir raison « par hasard » notamment…)

          En tous cas merci Calimaq pour ce texte, je n’ai pas d’opinion tranchée sur le sujet de la légalisation mais en effet, je n’ai jamais compris l’acharnement sur le P2P qui reste la façon la plus saine de partager et les communautés comme what.cd, dont les membres participent surement plus que la moyenne au financement de la culture (de toutes façons ils ont apparemment pas le choix, pour apporter de contenus neufs il faut bien acheter…)

          1. Pour le lien entre l’équité et la consommation culturelle inférieure, veuillez suivre le contexte. Je suis parfaitement au courant des arguments qui affirme que le partage puisse être équitable.
            Je ne dis pas qu’il n’y a pas de lien entre les deux, je dis que dans l’argument de Calimaq, il n’y a pas de lien entre les deux: faire une observation sur la consommation culturelle ne permet pas de tirer une conclusion sur à quel point le piratage est considéré comme équitable.
            Je démontre que c’est bel et bien le cas en donnant un contre-exemple d’une situation où le piratage est considéré comme inéquitable MAIS où: 1) il est une pratique courante et faiblement condamné socialement (comme le fait de jeter un papier par terre), 2) son impact sur la consommation est faible justement parce que les personnes ne veulent pas exagérer à cause de question d’éthique.

            En ce qui concerne les études:
            1) Jeter un papier par terre est aussi une pratique qui s’est banalisée. Pourtant, cela ne veut pas dire que si je demande à quelqu’un si c’est un acte responsable, il va me répondre que c’est le cas. Et encore moins que celui-ci va descendre dans la rue pour manifester son droit de jeter des papiers par terre.
            D’ailleurs, Calimaq le dit lui-même quand il parle de téléchargement direct: beaucoup de solutions pour cela sont issues d’un business assez immoral. Si la banalisation de la pratique (telle que démontrée par l’étude) implique un soutien aux solutions (la conclusion de Calimaq et avec laquelle je ne suis pas d’accord), cela voudrait dire que la population considère que ces pratiques semi-mafieuses sont totalement saines et morales.
            2) Il y a d’autres études sur le sujet, par exemple celle reprise ici:
            https://torrentfreak.com/scientists-discover-why-internet-pirates-dont-feel-guilty-160509/
            On y constate 2 choses:
            – Selon les hypothèses émises par cette étude, une explication de la différence de culpabilité vient du fait que l’individu a plus de difficulté à imaginer des objets qui ne sont pas tangible (c’est un effet « biologique », pas « moral »). Cela implique que si les individus se sentent moins coupables, ce n’est pas (uniquement) parce qu’ils pensent réellement que leur action est plus éthique, mais parce qu’ils ont plus de mal à évaluer si leur action est éthique.
            – L’évaluation du degré de culpabilité montre une différence nette entre « illegal intangible » et « illegal tangible », mais aussi entre « legal intangible » et « illegal intangible ». En d’autres termes, cette étude montre bel et bien que le « illegal intangible » reste source de culpabilité.

            Je suis un partisan de la diffusion libre depuis des années. Par contre, je reste un scientifique: c’est une erreur que de dire que les observations et les études permettent de prétendre que la population est idéologiquement en faveur d’une légalisation du piratage.
            Les éléments donnés comme « preuve » ne le sont pas (ces éléments pourraient tout aussi bien exister si la population est idéologiquement en défaveur d’une légalisation du piratage).
            Pire, cette conclusion implique des paradoxes (le fait que les usages se tournent maintenant vers des acteurs que Calimaq lui-même considère comme immoraux alors que l’évolution des usages est utilisée pour démontrer que les utilisateurs ne trouvent pas ça immoral)

  2. Quand vous mentionnez les « monstres qu’elles ont créés », vous expliquez a juste titre que les sites de telechargement legaux se sont construits dans la continuite de la repression du partage non-marchand. Ce qui manque est le pas precedent: ces partages non-marchands se sont essentiellement etablis sur les immenses vides de « l’offre legale » pendant les premiers developpements de l’internet grand public.

    Les principaux editeurs et distributeurs de media audio et/ou video ont tres longtemps resiste a toute tentative de developper une offre en ligne raisonnable. Les quelques rares initiatives qu’ils soutenaient etaient voues a l’echec de par la pauvrete du catalogue, les prix excessifs (au minimum egaux a ceux de la distribution physique) et les restrictions logicielles (rendant parfois les fichiers achetes inutilisables).

    Meme de nos jours, ils s’accrochent a des reliques de l’epoque de la pure distribtion physique telles que les restrictions geographiques, les licences hors de prix et souvent accompagnees de conditions etouffantes pour l’innovation…

    S’ils avaient une veritable strategie de developpement en ligne ou qu’ils soutenaient sincerement les tentatives d’autrui, cette guerre (couteuse pour tous) n’aurait pas lieu d’etre. Au lieu de cela, ils ont pousse de nombreux individus ou groupes a creer des offres « paralleles », marchandes ou non-marchandes, qui repondent aux attentes du public.

    Certaines ont ainsi des interfaces depassant de loin en fonctionnalite et richesse de catalogue la plupart des sites « legaux ».

    Nous ne le repeterons jamais assez: la situation qu’ils deplorent aujourd’hui est entierement le resultat de leur propre resistance au changement. Le monde changera, avec ou sans eux. Esperons que nos politiciens ne mettront pas dix ou vingt ans a l’admettre.

    1. (Petit ajout…)

      L’autre resultat de leur « guerre au partage » est de pousser les vues aux extremes.

      Les industries du divertissement refusent de parler, de discuter entre gens raisonnables, de trouver des compromis. Le resultat logique est que les visions les plus extremes deviennent de plus en plus repandues.

      Au lieu de trouver un moyen de faire cohabiter le partage non-marchand et l’offre legale, ils poussent le public a accepter des comportements « illegaux » comme « normaux ». Et cela conduit a ce que vous soulignez egalement: le respect pour la loi diminue dans l’esprit du public a mesure qu’elle s’ecarte des moeurs acceptables. C’est une situation malsaine sur le long ou meme moyen terme.

  3. Ma réflexion n’est pas aussi poussée que la vôtre mais je vais expliquer pourquoi je pirate des oeuvres:
    – 1er cas: j’ai acheté des CD quand j’étais jeune, je n’ai pas les moyens de les racheter sur iTunes ou autres. Mais ça rentre dans les copies je crois. De plus, ma fille a acheté un album sur iTunes 9.99€ et elle a acheté le CD physique 10€ (il y a 2 versions, mais elle n’a pu en acheter qu’une), et je lui ai trouvé la chanson exclusive sur la version 2, je pense qu’elle a contribué assez pour avoir cette chanson qui lui aurait coûté 10€! En plus, elle a acheté un t-shirt 30€ à cet artiste et je vais lui en offrir un autre pour Noël soit 79,99€ (je suis au RSA pour Info)

    -2ème cas: moi je suis fan de manga et d’animé. Le problème est que ça me coûterait cher d’accéder à l’offre légale (sans avoir l’assurance parfois d’avoir le matériel compatible ou suffisamment récent pour en profiter sans que la vidéo s’arrête parfois toutes les 5s), car il y a des détenteurs de licences et que bien sûr chez adn, Crunchyroll, wakanim et les chaînes payantes les séries sont différentes donc je devrais payer 5 à 10€ par offre… Soit 15 à 30€ par mois en plus d’internet…

    -3ème cas: certaines séries usa. A certaines périodes de l’année (donc pas toute l’année) je regarde des série usa, qui ne seront pas proposées sur la TNT avant…1 ou 2 ans. J’ai regardé les abonnements par canalsat et autres, mais il faut toujours payé en plus de l’abonnement de base, qui est assez cher, et ça me ferait rajouter 10 à 20€ encore par mois

    -Je lis les scans des mangas traduits gratuitement par des fans. Pourquoi? Un exemple: la manga Naruto edt terminé depuis novembre 2014. Et la parution française rattrape seulement en cette f8n d’année 2016….

    Le décalage avec les usa et le Japon (sauf Animation proposée en simulcast mais avec trop de plateforme différente) fait qu’à l’heure d’internet, on ne peut pas attendre de regarder nos séries ou lire nos mangas après que le Web est spolié et qu’on sache tout avant de le voir ou lire.
    Et le coût de toutes les offres: musique (moi c’est la Japan music qu’on a au compte goutte sur des plateformes légales en France), séries TV, animés, mangas.
    De plus, je déplore les adaptations et les fautes d’orthographe et de grammaire qu’il y a souvent sur des animés voire des mangas ou Light Novel… On paie pour un excellent travail, sinon je préfère du gratuit avec souvent une traduction et adaptation plus respectueuse de l’oeuvre (aller voir Milan Kundera qui a repris la traduction de ses oeuvres en français car elles ne correspondaient pas à ses idées).

    Enfin, je suis pauvre avec une ado qui travaille bien au collège, et se divertir et se cultiver sont nécessaires pour elle comme moi. On dépense de l’argent car j’achète des DVD quand l’offre commerciale me le permet, car je fais du téléchargement sur un téléphone et que j’aime voir sur un grand écran ou j’achète des mangas parce que j’ai vu l’animé et que je veux connaître la suite (au Japon, les animés servent aussi à mettre en lumière un manga et parfois c’est l’inverse). Donc oui je pirate (pour raisons de délai, par manque de moyens financiers car je pourrais pas tout acheter légalement ça représenterait 20% de mes revenus mis tout bout à bout, mais je consomme aussi: CD DVD mangas cinéma autres produits dérivés qui rémunèrent à travers les licences et un ou 2 concerts par an… Certains concerts c’est grâce au piratage car les artistes japonais ne vendent pas beaucoup de CD chez Leclerc, ne sont pas sur iTunes… Mais j’ai acheté leurs CD pour avoir une dédicace (il fallait acheter sur place pour y avoir droit, donc beaucoup de fans ont racheté le CD pour la dédicace, car les Japonais sont malins pour ça mais au final, je ne suis pas contre car quand on aime on ne compte pas! De plus pour les rencontrer il faut payer 2 fois plus chers que les autres..).

    Maintenant je suis peut-être une voleuse mais les artistes inventent des systèmes pour vendre plus ou plus cher… Donc je pense qu’on peut s’y retrouver.
    Et je parle pas de la taxe sur les supports numériques….

  4. Sinon il y a adriansealelli.com qui lui n’as ni pub, ni redirection, ni changement d’adresse, ni formulaire,…

  5. Mon site de téléchargement (adriansealelli.com) est ouvert depuis 4 ans et à part un e-mail de la MPAA (ceux qui ont fermé megaupload) et un déréférencement de ma partie films de google à la suite d’une demande Pathé je n’ai pas reçu grand chose

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