LE PROJET DE DÉCRET DU DMP (DOSSIER MÉDICAL PARTAGÉ) EST ENFIN DISPONIBLE AVEC PLUSIEURS MOIS DE RETARD. MAIS LES DIFFICULTÉS LIÉES À LA SÉCURITÉ DES DONNÉES ET AU CONSENTEMENT DU PATIENT NE SONT PAS TOUTES LEVÉES.
C’était un décret très attendu par les professionnels de santé. Son existence a déjà le mérite de montrer que le sujet avance... ce qui est non négligeable vu le retard accumulé. Alors que le DMP devait être opérationnel le 1er janvier 2007, il ne devrait pas voir le jour avant mars 2008. Si tout va bien ! En tout cas, le dossier demeure éminemment politique : l’un des premiers gestes de Philippe Bas, lors de sa prise de fonction au ministère de la Santé, a d’ailleurs été d’officialiser ce retard par un communiqué.
Le décret DMP est donc actuellement soumis aux consultations officielles. « Nous sommes globalement satisfaits même si certaines formulations juridiques doivent être revues », résume le Dr Jacques Lucas, secrétaire général du Conseil national de l’Ordre des médecins. Mais d’autres organisations sont nettement plus critiques. « L’analyse du texte démontre que tous les pièges juridiques ou fonctionnels ne sont pas encore déminés », commente le Dr Jean-Jacques Fraslin, responsable de Fulmedico (1). Première préoccupation : la sécurité des données ne semble pas totalement assurée. « Le DMP touche à l’intime de chaque individu. Aujourd’hui, les Français sont favorables à sa création, mais une fuite des données suffira à leur faire perdre toute confiance », prévient Christine Ferreira, conseillère CNAM pour la CGT. Or les expérimentations ont prouvé que des failles existent chez plusieurs hébergeurs comme l’a constaté la CNIL. Le ministère de la Santé indique d’ailleurs que « les défaillances constatées par la CNIL et le GIP DMP sont susceptibles de faire l’objet de sanctions financières. » L’appel d’offres pour l’hébergeur de référence vient d’être publié au Journal officiel européen. Les candidats ont jusqu’au 4 juin pour déposer leur dossier, la décision finale devrait être connue au mois de septembre.
Autre problème pointé par Fulmedico, celui du consentement du patient.
« Le décret indique que le consentement donné par le titulaire au professionnel de santé pour accéder à son dossier médical personnel est recueilli par tout moyen. Tout moyen, voilà une formule qui nous interpelle et nous semble fort peu juridique », argumente le Dr Fraslin.
En cas d’urgence, si le patient n’a pas autorisé l’accès à son dossier, une procédure exceptionnelle dite « de bris de glace » peut s’appliquer. « Cette possibilité ne doit pas être réservée aux urgentistes. Par contre, le praticien qui l’utilise devra justifier son geste a posteriori afin d’éviter tout abus », insiste le Dr Lucas. « Nous souhaitons aussi que la partie relative au masquage soit révisée. Si le patient y a recours, la responsabilité du praticien ne doit pas être engagée puisqu’il ne possédait pas toutes les informations. »
Ainsi, le DMP devra encore surmonter de nombreux freins techniques et réglementaires. Sa mise en place sera certainement, pour de longs mois encore, l’un des dossiers phares du ministère de la Santé, quel que soit le nouveau gouvernement.
(1) http://www.d-m-p.org
(2) Fédération des utilisateurs de logiciels médicaux.
Examen détaillé du décret sur http://www2.fulmedico.org